Écrire un livre sur le sujet si controversé du parler en langues, n’est assurément pas le meilleur moyen de se faire des amis. C’est au contraire la façon la plus sûre d’en perdre quelques-uns. Pour la défense de la vérité, l’apôtre Paul prenait le risque de déplaire. Il disait en Galates 1.10 : “Est-ce la faveur des hommes que je désire ou celle de Dieu ? Est-ce que je cherche à plaire aux hommes ? Si je plaisais encore aux hommes, je ne serais pas serviteur de Christ”. Toutefois, que Dieu nous garde de cultiver l’art de déplaire. Comme le disait Alexandre Vinet, il faut de la charité pour les personnes et non pour les idées. Mais l’esprit de certains est ainsi tourné que c’est la vérité elle-même qui les dérange. Quand Ralph Shallis a écrit son livre « Le don de parler diverses langues», il l’a fait avec tant d’amour qu’il n’a pas pris moins de dix pages pour s’excuser des vérités qu’il allait développer. Personne n’a, pour les dire, mis autant de gants. Certains n’y ont cependant vu que des gants de boxe. Un adage populaire ne prétend-il pas qu’il n’y a que la vérité qui blesse ? Mais la Bible dit que les blessures d’un ami prouvent sa fidélité (Proverbes 27.6). Il serait illusoire de croire que l’attitude la plus fraternelle puisse prévenir certaines ruptures. Mes exposés antérieurs sur le sujet m’ont valu de solides et durables inimitiés. Paul, comme il le dit en Galates 4.16, se faisait des ennemis en disant la vérité, et cela parmi ceux qui lui étaient les plus proches, qu’il avait amenés au salut et qui étaient ses enfants spirituels.
L’éventail des positions sur cette question est tel qu’il faudrait écrire non pas un livre mais plusieurs car les nuances sont nombreuses. Chez ceux qui sont tout acquis à la cause, on trouve, en dégradé, ceux pour qui le parler en langues est :
Au bord opposé, on trouve, aussi en decrescendo, ceux pour qui le parler en langues actuel est :
Ces deux tableaux peuvent paraître incomplets, mais ils sont révélateurs de multiples sensibilités. Ne classer les protagonistes qu’en deux camps, les uns pour et les autres contre, peut sembler simpliste, mais il faut s’y résoudre si on veut que le lecteur s’y retrouve.
Pour donner plus de poids à cette étude, je me suis attaché à citer en priorité les écrits d’auteurs pentecôtistes en vue, et à en faire témoigner d’autres qui ont quitté le mouvement pour des raisons de doctrine. Parmi eux, je donne une place de choix à mon ami Albert Busono qui a fait un travail considérable de recherche et de compilation au niveau de la littérature pentecôtiste anglo-saxonne. Mais en premier lieu, ce qui forme la trame de cet ouvrage, c’est mon cheminement personnel et celui de ma chère épouse à qui je dédie ce livre.
Par déférence pour mes frères pentecôtistes modérés qui, sur l’essentiel, croient comme moi à toutes les vérités fondamentales de l’Évangile, j’ai évité (citations d’auteurs exceptées) de nommer leurs Églises par leurs appellations particulières. Pour désigner ceux qui, à des degrés divers, adhèrent au parler en langues, je me suis rangé à l’expression la plus répandue : le pentecôtisme, expression à laquelle je ne prête aucun sens péjoratif. Jusqu’au chapitre 13 je fais la distinction entre eux et les charismatiques catholiques : plusieurs pentecôtistes conservateurs seraient en effet choqués d’être confondus avec ces charismatiques dont ils se démarquent énergiquement.
Certains demanderont : pourquoi un tel livre ? Parce que beaucoup ont souhaité posséder un ouvrage de référence fouillé sans être touffu, avec une ligne directrice et des sujets bien compartimentés permettant de s’y retrouver facilement afin de savoir, selon l’exhortation de Colossiens 4.6, “comment il faut répondre à chacun”.
Ma prière à Dieu pour mes lecteurs est qu’ils soient animés de l’esprit des Juifs de la ville grecque de Bérée : “Ces Juifs avaient des sentiments plus nobles… ils sondaient chaque jour les Écritures pour voir si ce qu’on leur disait était exact” (Actes 17.11).
Fernand Legrand