Quatre chapitres, parus séparément en 1958 et en 1964, ont été ajoutés au texte de nos premières éditions de ce message écrit il y a plus de vingt ans.
Les pages supplémentaires de cette troisième édition de "Jésus revient!... Es-tu prêt?" développent le même thème. Elles reviennent sur quelques passages bibliques importants et précisent ce que le monde attend de ceux qui croient encore au Retour du Seigneur et ce que Jésus désire trouver dans les âmes qui marchent à Sa rencontre, "prisonnières heureuses" d’une glorieuse espérance! À ce sujet, qu’on me permette d’évoquer ici, quelques souvenirs personnels.
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Je me souviens avec émotion du jour où je lisais à mon père bien-aimé, le manuscrit original de ce travail.
En visite dans mon pays natal, je m’étais arrêté quelques heures dans le village de mon enfance pour serrer sur mon cœur ceux qui, dès avant ma naissance, avaient prié pour moi et m’avaient consacré à Dieu. Comme deux amis qui ont beaucoup à se dire, mon père et moi avions gravi une petite colline dominant notre beau Val-de-Ruz.
Assis côte à côte sur un rocher couvert de mousse, le murmure d’une source jaillissant du granit accompagnait ma lecture. Chaque fois que je levais les yeux, je voyais à mes pieds le village et la maison où j’avais passé une enfance heureuse, dans la chaude atmosphère qu’entretient la lecture quotidienne de la Bible. Seuls la trouvent vraiment ennuyeuse ceux qui ignorent les trésors qu’elle contient ou qui lisent le Livre par "devoir religieux". N’est-ce pas à la maison, par-dessus tout que la présence de Dieu est rendue comme palpable? "La maison est simplement le cadre naturel qui modèle le caractère de chacun et entretient le désir de servir Dieu dans tous les domaines".
Mais revenons au texte que je lisais. Mon père écoutait avec une attention soutenue. Quand j’eus terminé, il se leva, me regarda et me dit: "Ne tarde pas de publier ces lignes. Il est temps que le monde prenne connaissance "des choses qui vont arriver bientôt". Nul ne doit ignorer que des hommes croient encore aux événements prédits dans les Écritures. C’est aussi l’heure pour les chrétiens de se réveiller de leur sommeil spirituel et de se relever d’entre les morts. Alors le Christ éclairera à nouveau tout notre témoignage".
J’avais reçu l' "Imprimatur" paternelle. Nous redescendîmes dans le foyer où ma mère nous avait préparé le repas du soir.
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Mais pourquoi, direz-vous, revenir vingt ans en arrière et nous entretenir de souvenirs personnels?
Dédiée à la mémoire de mon père, il est juste que les lecteurs de cette troisième édition sachent à quel point cet homme a vécu dans l’attente du Retour du Seigneur. Tout en se gardant de prédire une date pour cet événement, il ne cachait à personne qu’il espérait être de ceux qui ne verraient pas la mort, mais seraient "transmués" pour être enlevés sur les nuées à la rencontre du Seigneur dans les airs.
Pourtant, le 9 septembre 1970, mon cher père devait, à l’âge de quatre-vingts ans, quitter son corps pour être recueilli dans la paix de la foi.
Saisi par le Christ alors qu’il n’avait que neuf ans, cet homme marcha avec Dieu durant soixante et onze ans. "Puis il ne fut plus, parce que Dieu le prit." Sa dépouille mortelle repose dans ce coin de pays où il avait vu le jour et où il exerça durant de longues années le métier d’horloger pour subvenir aux besoins d’une famille de quatre enfants. Son esprit, retourné à Dieu qui l’avait donné, attend près du Seigneur et loin de tout mal, un corps de gloire pour habiter son domicile céleste.
Ces choses d’en-haut, ce monde à venir, la Personne de Christ qui en est le centre, dans la Loi, les Psaumes et les Prophètes, comme dans les Évangiles, les Actes des Apôtres, les Épîtres et l’Apocalypse, en un mot, toutes les Écritures, faisaient chez mon père l’objet d’une étude approfondie et jamais terminée. La Bible était son livre de chevet et comme Marie, il repassait dans son cœur les paroles qu’il avait lues et entendues. C’est ainsi qu’il s’efforça de vivre de cette Parole selon la compréhension qu’il en avait reçue et qu’il enseigna à d’autres les grandes vérités qui s’y trouvent, spécialement celles se rattachant au Retour du Seigneur Jésus-Christ, le Messie promis à Israël, le Chef invisible de l’Église.
Mon père ne prétendait pas avoir découvert quelque doctrine nouvelle, mais il pensait devoir souligner des vérités essentielles, trop souvent négligées par les prédicateurs officiels, quelquefois plus soucieux d’actualité que de fidélité au texte de la Parole. Il est si facile d’annexer Jésus à nos idées personnelles et de tomber dans le piège de donner à notre prédication une couleur politique ou sociale. En définitive, un tel message ne satisfait personne. La Parole de Dieu, vivante et permanente, n’a pas besoin d’être actualisée ou mise au service d’une cause idéologique. Cette dernière, même bonne au départ et ayant toutes les apparences de la justice, devient douteuse quand ceux qui militent en sa faveur restent complètement "étrangers à la vie de Dieu". Dieu a une politique qui dépasse toutes nos politiques et des plans économiques et sociaux plus audacieux que les nôtres. Ses pensées sont très profondes et concernent tous les hommes, quelles que soient leur race, leur couleur, leur langue et leur religion. Or, aujourd’hui, quand nous croyons avoir marché dans la voie de Dieu, en épousant la doctrine d’un parti, nous nous apercevons avec amertume que nous avons suivi les penchants de notre cœur. Et ce chemin conduit à l’impasse, à la mort des autres ou à leur asservissement.
La Parole de Dieu n’exalte pas l’homme et ne flatte pas la chair. C’est pourquoi elle doit être prêchée dans le dépouillement et s’adresser à la conscience et au cœur de l’individu. "Ainsi la foi naît de la prédication et de cette prédication la parole du Christ en est l’instrument".
Ceux qui ont connu ou entendu prêcher mon père savent quelle joie illuminait ses traits quand il parlait des choses célestes et de la "bienheureuse espérance".
Le 6 décembre 1970, au vingtième anniversaire de la fondation de la "Communauté Évangélique du Refuge", à Nice, une chère servante de Dieu me disait: "J’ai quatre-vingts ans, et j’ai eu l’occasion d’entendre une foule de prédicateurs, mais c’est ici, et par le canal de votre père que j’ai entendu la meilleure réunion de ma vie sur le retour du Christ".
Oui, mon père pensait que cet enlèvement pouvait se produire dans le cours de sa vie. Et ce n’était pourtant ni le retour des Juifs en Terre sainte, ni la renaissance de l’État d’Israël qui l’avaient amené à attendre Jésus quotidiennement.
Quelques théologiens diront que mon père était tombé dans la même erreur que les apôtres et les premiers chrétiens, qui ont enseigné, sans le moindre doute, la possibilité d’être eux-mêmes concernés par ce retour. Se sont-ils trompés? Non, nous ne le croyons pas. Car Jésus leur avait appris à l’attendre ainsi, insistant toujours sur l’élément "surprise" que produirait Sa venue.
Certes, sur Son Retour en gloire, le Nouveau Testament mentionne plusieurs signes qui précéderont Son apparition et indiqueront non le jour ou l’heure, mais l’époque où s’accomplira le début de Son règne glorieux. Mais les disciples n’avaient pas à s’occuper "des temps et des saisons que le Père a fixés de sa seule autorité". Ils devaient évangéliser les nations et attendre la venue de leur Maître à toutes les veilles de la nuit.
L’Église doit régner avec le Christ. Son avenir est d’être ravie à Sa rencontre dans les airs, afin de paraître à Ses côtés quand Il reviendra pour juger toutes les nations et gouverner l’Univers, avec les saints de tous les âges qui auront eu part à la première résurrection. Le temps de l’enlèvement des croyants n’est précédé d’aucun signe et peut se produire à tout instant, l’Église faisant partie du Royaume, mais n’étant pas le Royaume de Dieu.
L’attente du retour de Jésus est donc une attente amoureuse et ses effets dans la vie pratique sont merveilleux. Loin de paralyser nos activités terrestres et de nous conduire à nous évader de nos responsabilités, elle nous pousse à ne pas remettre à demain ce que nous pouvons faire aujourd’hui. Elle nous incite à faire "toutes choses bien" et à être toujours prêts à accueillir Celui qui ne sera jamais un gêneur, mais le Libérateur, l’Époux longtemps absent, aimé et désiré à chaque instant.
Le travail que l’Église n’aura pu achever n’est donc pas un obstacle au retour de Jésus. L’Évangélisation de toute la Création, Dieu l’accomplira par d’autres hommes et d’autres femmes qui ne seront pas compromis dans tous les crimes que "les chrétiens" ont commis sous le couvert du christianisme et qui enlèvent aujourd’hui au plus fidèle des disciples du Christ, l’autorité qu’il devrait avoir pour prêcher un Évangile vécu par tous les baptisés. Or, parmi ces baptisés, on trouve pourtant des nationalistes outranciers, des racistes, des antisémites, des criminels, des voleurs, des adultères, des idolâtres, en un mot, tout ce qui est la négation de l’Évangile.
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Mon père est mort dans la foi, "sans avoir reçu les choses promises". Mais durant ses longues marches, il a pu "les voir et les saluer de loin", ayant confessé publiquement "qu’il était étranger et voyageur sur la terre". Comme Moïse, des sommets où Dieu l’avait conduit, ses yeux contemplèrent longuement "le pays lointain", tandis que son Seigneur lui révélait doucement qu’il devait assumer pleinement la condition humaine, c’est-à-dire passer par la mort. Dans le dernier entretien que j’eus avec mon père, deux mois avant son départ, et alors qu’il était encore relativement bien portant, il me fit comprendre qu’il ne me reverrait pas ici-bas.
Il faut le dire aussi: Dieu prend les paroles de Ses enfants au sérieux. Je me souviens d’avoir entendu mon père répondre assez vivement à ceux qui lui disaient: "Et si vous deviez mourir avant le Retour du Christ, que feriez-vous?"
— Pour mourir, répliquait mon père, je n’ai besoin de personne!
Le matin de sa mort, il murmura simplement: "Va-t-elle bientôt venir"?
— Qui? lui demanda ma sœur qui le veillait depuis quelques jours.
"La mort"!
Et devant l’étonnement de sa fille qui lui demandait: "Papa, tu attends donc la mort"? Mon père répondit avec force ces simples mots: "Oh! Non".
À midi, alors que par exception il était un moment seul, Jésus dut lui dire: "Passons l’autre rive"! Quand l’infirmière revint, mon père ne respirait plus. Tout en sachant qu’il mourrait, il n’a pas vu la mort. Il a vu Jésus! Le voile s’est soudainement déchiré. La majesté divine qui brillait sur les traits de sa dépouille mortelle disait assez éloquemment Qui avait retiré cette âme de sa maison d’argile!
Une chose est certaine! Mon père ne s’est pas trompé en attendant Jésus à la manière des apôtres. La mort ne fait pas partie de l’espérance chrétienne. On n’attend pas la mort, mais on marche avec Celui Qui est la Résurrection et la Vie!
G.R.
Nairobi (Kenya), le 5 mars 1971.