L’Église chrétienne a toujours eu ses difficultés, au dedans et au dehors. Les difficultés du dehors sont sa force et les difficultés du dedans sont sa faiblesse.
« Il n’y a rien de nouveau sous le soleil », bien que les choses puissent varier extérieurement et que les manifestations changent. Le sujet que nous exposons ici représente un phénomène d’ordre spirituel qui, — disons-le tout de suite — n’a pas commencé au jour de la Pentecôte, mais qui en est une excroissance, venue quelque temps après dans la vie même de certaines d’entre les églises primitives. Cette excroissance peut avoir une certaine ressemblance avec la vraie chose qu’elle tente d’imiter ; elle peut s’attacher même au corps, mais par sa nature et par son origine, elle est maladive, malsaine ; c’est le fruit d’un principe spirituel défectueux et d’un organisme déjà malade. Toute loi physique a son parallèle dans les lois spirituelles.
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Chacune des Églises apostoliques auxquelles écrivait l’apôtre Paul représente, par ses expériences et le message qui lui est adressé, un aspect spécial des dangers et des séductions séculaires de l’Église. Le texte divin de chaque Epître révèle la vérité qui remédie au danger dont l’apôtre Paul avertit les croyants. Ainsi l’enseignement qui découle de l’un et de l’autre forme un avertissement complet.
Les églises de l’Achaïe, principalement celle de Corinthe, étaient affligées de différents maux spirituels, parmi lesquels se trouvaient l’abus, l’exagération et la contrefaçon des dons spirituels, faits qui se sont renouvelés au travers des siècles, sous diverses formes.
Dans ses messages aux Corinthiens, l’apôtre Paul parle de l’enseignement d’un « autre évangile » (2 Corinthiens 11.4), qui n’est donc pas l’Évangile véritable, bien qu’il lui ressemble peut-être ; il leur parle encore d’un « autre Jésus », qui n’est pas le Seigneur Jésus-Christ, et aussi d’un « autre esprit » qui n’est pas le Saint-Esprit. Et il ajoute qu’il existe un état spirituel qui fait que le croyant « supporte fort bien » ces choses.
Une contrefaçon doit nécessairement ressembler autant que possible à la chose qu’elle imite. C’est précisément à ce sujet que l’apôtre Paul dit « Il ne faut point s’en étonner » (2 Corinthiens 11.14-15). Il n’est donc pas surprenant que bien des croyants soient tout disposés d’abord à « embrasser » ces contrefaçons, et ensuite à les « supporter fort bien » (2 Corinthiens 11.4). La Bible donne au chrétien l’explication de toutes choses ; elle a toujours raison — ce qui ne veut pas dire que nos interprétations de la Bible soient toujours justes ! Et c’est parce que, de nos jours, un grand nombre de fidèles sont si peu affermis dans la Parole qu’ils se laissent si facilement emporter « comme des enfants par tout vent de doctrine et: d’esprit », pour être séduit par la ruse de l’ennemi qui sait cruellement et perfidement profiter de l’état déplorable de l’Église chrétienne (Éphésiens 4 .14).
Il est utile et nécessaire de dire ici qu’en écrivant ces lignes nous n’avons nullement l’intention de faire des personnalités. Nous parlons d’un principe, d’un état spirituel dont le Saint-Esprit a parlé dans des termes clairs et solennels. Nul n’est hors de danger ; nul ne peut se dire hors d’atteinte des ruses et des séductions de Satan : l’affirmer prouverait précisément le contraire. « Que celui qui croit être debout prenne garde qu’il ne tombe » (1 Corinthiens 10.12). C’est l’Église de Dieu, ce sont Ses propres enfants que Dieu met en garde contre Satan déguisé en ange de lumière. Pourquoi se sentir blessé par cet avertissement divin ? Écoutons « ce que l’Esprit dit aux Églises » et nous serons certainement gardés et conduits. Le « lion rugissant » et « l’ange de lumière » sont deux titres inspirés dévoilant l’activité de Satan à l’égard des saints (1 Pierre 5.8 et 9 ; 2 Corinthiens 11.14).
Ici, nous tenons à éviter tout équivoque et à affirmer avec précision que s il existe telle chose reconnue par le nom de « mouvement de Pentecôte », il y a aussi un nombre considérable de chrétiens qui se défendent, parfois. même avec empressement, d’être de ce « mouvement » mais qui ont néanmoins un très fort esprit « pentecôtiste ». C est pourquoi nous jugeons nécessaire de parler de « Pentecôtisme ». Car tout en prétendant ne pas appartenir à ce « mouvement » on peut avoir certaines conceptions mentales et certaines interprétations erronées qui nécessairement engendrent un esprit qui n’est rien d’autre qu’un esprit étranger, semblable à celui du « Pentecôtisme ». Le manque de vrai fondement biblique qui va si souvent de pair avec une recherche malsaine et continue d’expériences, d’émotions nouvelles et extraordinaires, caractérise de nos jours beaucoup de chrétiens ; ce qui les ouvre au « Pentecôtisme » et fait qu’ils deviennent souvent les meilleurs agents du « mouvement de Pentecôte » dont ils ne veulent pas porter le nom. Il y a là la source d’une grande confusion… mais rien n’est étonnant de nos jours. Et cette confusion engendre la confusion, et tout esprit étranger fait appel à un « autre esprit ».
Il est peut-être utile de faire ressortir la force de l’emploi de ce titre frappant donné au séducteur : « ange de lumière ». Sous l’ancienne Alliance, et principalement tout au début, avant que les oracles de Dieu aient été écrits, l’Éternel apparut souvent à Son peuple sous forme d’ange, c’est-à-dire en manifestations théophaniques (Genèse 16.7-11 ; 21.17-19 ; 22.11-16 ; 31.11-13 ; Exode 3.2-4 ; Juges 2.1 ; 6.2-16, etc.) ou apparitions de la Divinité sous forme d’ange, antérieures à l’Incarnation, mais ayant en vue le peuple d’Israël, et caractérisant les relations de Dieu avec le peuple élu. Ces apparitions cessèrent avec l’établissement du jour de la Grâce pour les païens, mais elles se renouvelleront à la reprise des relations du Seigneur avec Son peuple, selon Apocalypse 10 et 14.
De prétendues manifestations « d’anges » pendant la dispensation de l’Église ne peuvent émaner de Dieu qui, Lui, ne « parle » plus de cette « manière » (Hébreux 1.1). Les égarements spirituels et les conceptions mentales qui caractérisent le « Pentecôtisme » vont souvent de pair avec les « visions », les manifestations « d’anges », les communications de soi-disant « révélations », « ordres », « directions », qui ne peuvent être autre chose que les séductions dont l’ange de lumière use pendant le temps présent.
Ces « manifestations extraordinaires » sont contraires aux lois et aux principes divins établis pour chacune des différentes dispensations qui composent l’histoire de la révélation divine. L’apôtre affirme cela dans Hébreux 1.1 à 3 et 2.1 à 3. Le ministère de l’ange a caractérisé l’ancienne économie et a conduit à Christ qui, Lui, exclut nécessairement tout autre médiateur. Mais, par contre, dans les premiers chapitres des Actes, Son œuvre fut confirmée devant le peuple juif par « des signes et des miracles et les dons du Saint Esprit », car le Juif, fort des promesses messianiques, « demande des signes », et ils lui sont accordés (Matthieu 12.38 ; 1 Corinthiens 1.22).
Mais ce sont là, précisément, ces « premiers éléments » que l’apôtre Paul nous exhorte à délaisser pour tendre à la maturité en Christ, afin de plus être des « enfants » qui ont « besoin de ces choses », mais qui sont incapables de comprendre la Parole de justice. cette grande nécessité des temps où nous sommes arrivés (Hébreux 5.12 à 14 ; 6.1). Seule cette Parole de justice communique ce dont l’Église a un si grand besoin : le discernement.
La Parole envisage les dons et les miracles qu’ont connu les chrétiens de la première génération de l’Église comme les dons qui se rattachent à ses débuts, au temps où elle venait de naître, où l’Évangile fut offert « premièrement aux Juifs ». Ce sont des signes d’enfance destinés à faire place à ce qui pouvait la conduire hors de l’état d’« enfant ». C’est en parlant de ce mal dont les Corinthiens étaient affligés, que l’apôtre prononce ces paroles révélatrices, et qui le sont encore davantage comparées au contexte des chapitres 12 et 14. « Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant, lorsque je suis devenu homme, j’ai fait disparaître ce qui était de l’enfant (1 Corinthiens 13.11).
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Puisque la Parole divine nous renseigne sur ces débuts lointains de l’Église primitive, nous pouvons mieux comprendre les effets contemporains de ces mêmes manifestations qui datent, dans une grande mesure, non pas du Réveil du Pays de Galles, mais qui sont plutôt une suite et une contrefaçon de ce grand et glorieux mouvement de l’Esprit de Dieu. A partir de l’année 1903, l’Esprit de Dieu commença à Se mouvoir sur le chaos dans lequel vivait Son peuple, en réponse à des prières incessantes et en prévision des temps que le monde allait vivre : la grande guerre et ses terribles suites. Cette extraordinaire effusion de l’Esprit agit avec une puissance et une efficacité remarquables et ses effets s’étendirent à d’innombrables vies dans tous les pays du monde. Les déplorables égarements et exagérations qui se développèrent ensuite ne portent nullement atteinte à la merveilleuse puissance originelle et à la bénédiction mondiale qui résultèrent de l’œuvre que Dieu accomplit alors.
Des volumes ont été écrits sur ce thème glorieux et l’on pourrait en écrire davantage encore, mais notre but en en parlant est de faire ressortir que ce mouvement lui-même et l’œuvre initiale et pure qui s’effectuèrent alors, eurent ensuite leur contrefaçon, caractérisée par le mélange du vrai et du faux. L’œuvre de l’Action Biblique est elle-même un fruit du Réveil original du Pays de Galles, et c’est pourquoi elle a eu le privilège, quand le Pentecôtisme fit sa première apparition en Suisse romande, il y a une quinzaine d’années, d’être la seule à lever la voix contre ce danger spirituel. Beaucoup l’ont écoutée et lui en ont su gré. D’autres, selon l’habitude mentale qu’ils ont malheureusement prise, ont refusé ces avertissements ; que de désordres, de déceptions, de choses infiniment douloureuses auraient été évitées, si l’on y avait prêté mieux l’oreille !
L’erreur contient toujours un certain élément de vérité, et s’il existe telle chose que des esprits étrangers, des séductions spirituelles, il existe aussi de vrais et chers enfants du Seigneur souvent sincères en ce qu’ils croient et dévoués en ce qu’ils font, mais cependant victimes de ces esprits séducteurs.
Une loi spirituelle qui a toujours caractérisé les œuvres de Dieu depuis que le monde existe et qu’il est sous la puissance de Satan, « menteur depuis le commencement » (Jean 8.44), est que tout ce qui est réellement divin est imité et contrefait. Plus l’œuvre est spirituelle, plus la contrefaçon est spirituelle et subtile, Il ne nous faut pas — répétons le bien — nous en étonner ; au contraire, comme nous le dit l’apôtre Paul, il faut s’y attendre.
Qu’il nous soit permis de redire ici avec insistance que nous n’avons nullement l’intention de juger aucun croyant, mais bien plutôt de les servir avec amour dans la vérité. En face des diverses manifestations du « Pentecôtisme », il est bien plus facile de se taire. L’attitude de la tolérance contemporaine coûte moins cher ! Mais la tolérance à l’égard de doctrines aussi pernicieuses, pesée dans la balance du temps et des faits, apparaît dans sa vraie nature : c’est de la lâcheté, c’est l’esprit du siècle présent religieux, un esprit de confusion accompagné du refus de souffrir pour la vérité. L’amour n’agit pas ainsi, la vérité ne trafique pas de cette façon, elle ne se tait pas devant les risques que courent tant de membres de la famille de notre Père céleste. Il y a seize ans, nous avons eu le privilège de prendre la plume en face des dangers qui vinrent se greffer à la suite du Réveil : un cortège de contrefaçons de la vraie effusion de l’Esprit que Dieu accorda alors. Aujourd’hui,. nous cédons à la demande de plusieurs et nous répondons au besoin d’un grand nombre de croyants en écrivant ces lignes.