Lorsqu'on demanda à Jésus qui était le plus grand de tous les commandements, il répondit par ce texte du Deutéronome : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta pensée. C'est le premier et le grand commandement » (Matthieu 22.37-38). En d'autres termes, la chose la plus importante que puisse faire un être humain est d'aimer Dieu.
Vous souvenez-vous des fameuses « bagues d'humeur » très en vogue à l'époque, qui changeaient de couleur selon notre humeur ? (En fait, c'était la température du corps qui influait sur la couleur, mais des vendeurs essayaient de nous faire croire que c'était l'humeur du porteur. Ce gadget leur a permis de gagner beaucoup d'argent, y compris une partie du mien !) Pourquoi n'inventeraient-on pas des « bagues d'amour » qui indiqueraient le degré d'amour ressenti pour Dieu, et dont le port serait obligatoire ? Si les couleurs s'échelonnaient du bleu marine (l'absence totale d'amour pour Dieu) au bleu pâle (un amour passionné), j'imagine que nous croiserions beaucoup de personnes portant des bagues plutôt foncées – parmi lesquelles un grand nombre de chrétiens. Je dois dire en toute honnêteté que ma « bague d'amour » aurait été plutôt sombre si je n'avais pas été aussi gâté par la vie. Grâce à Dieu, je suis devenu le Forrest Gump du monde chrétien.
Forrest Gump, le héros du film du même nom, est un homme ordinaire – un peu simple d'esprit mais au grand cœur – qui mène une vie banale. Au cours de son existence ce « rien du tout » rencontre de nombreux « quelqu'un ». C'est ainsi qu'il est le spectateur involontaire de certains épisodes les plus marquants de l'Histoire (le fameux discours du docteur Martin Luther King : « J'ai fait un rêve ») et rencontre des personnages éminents (plusieurs présidents américains, des célébrités, des savants…). Quand je regarde à ma vie passée, j'ai l'impression d'être un peu comme Forrest Gump. J'ai grandi dans une famille méthodiste non pratiquante et je ne suis devenu chrétien qu'en dernière année de lycée. J'aimais le sport, les jolies filles et Jésus – dans cet ordre. Mes résultats scolaires étaient très moyens, littéralement : je suis sorti trois centième sur six cents. Pas de quoi relever le niveau de mon CV.
Au cours de ma première année dans une université d'État, ou je pratiquais plusieurs sports tout en courtisant les jolies filles, Jésus a commencé à remonter dans mon classement. Au cours du second semestre, il arrivait en première place, aussi décidai-je de changer pour une université chrétienne. Je choisis un établissement appelé Friends University, situé à Wichita, Kansas. J'étais un étudiant moyen fréquentant une petite université d'une ville de province, sans la moindre idée de ce que l'avenir me réservait. Tout ce que je savais, c'était que mon désir de mieux connaître Dieu grandissait de jour en jour.
Je n'avais jamais entendu parler de Richard Foster et j'ignorais qu'il avait écrit un des livres chrétiens les plus pertinents du vingtième siècle : L'éloge de la discipline (paru aux Éditions Vida). Je savais seulement que j'avais cours avec lui le mardi et le jeudi de 10h 30 à 12h. Il était différent de tous les professeurs que j'avais eus jusque-là, à la fois extrêmement intelligent et doté d'un sens de l'humour remarquable. Il semblait entretenir avec Dieu une relation que je n'avais vue chez personne d'autre – comme s'il était son ami. C'est lui qui m'a fait découvrir ce Dieu merveilleux.
Des années plus tard, un ami commun me raconta que Richard avait prié pour que Dieu mette sur son chemin un étudiant dans lequel il pourrait investir ses efforts et qu'il pourrait faire profiter de sa sagesse. Peu de temps après notre rencontre, il aurait dit à cet ami que j'étais celui que Dieu avait choisi pour cette relation de mentor à élève. Pour ma part, je savais seulement que Richard discutait beaucoup avec moi, priait avec moi, me permettait de garder ses enfants lorsqu'il sortait avec sa femme et de l'accompagner lors de ses conférences. Ce fut durant ces moments seul à seul que j'appris le plus de lui.
Au cours de ma dernière année d'études, alors que je réfléchissais au choix d'un institut théologique, Richard me mit en relation avec Henri Nouwen, le célèbre écrivain chrétien. Sur la suggestion d'Henri, je posais ma candidature à Yale Divinity School, où je fus admis. (Visiblement, j'avais fait des progrès sur le plan scolaire !) Ma formation achevée, j'obtins un poste pastoral dans une église de la région et épousai Meghan, la fille la plus jolie et la plus intelligente que j'aie jamais connue. J'appris les rudiments du ministère et découvris très rapidement que le rôle de pasteur n'était pas facile. Alors que notre mission prioritaire devrait être de faire des disciples, mille autres besoins, problèmes et impératifs nous détournent continuellement de notre but. Heureusement, grâce à ma longue collaboration avec Richard Foster, j'ai toujours su faire de ma propre vie spirituelle une priorité.
Quelques années plus tard, je pris un poste d'enseignant aux côtés de Richard dans le département religieux de Friends University. Je connus à cette occasion un autre de ces moments dignes d'un Forrest Gump : un homme nommé Richard Mullins, un célèbre auteur-compositeur-interprète chrétien, faisait partie de mes étudiants. Avoir Rich comme élève dans un cours sur Dieu, c'était comme avoir Einstein dans un cours de mathématiques – j'étais extrêmement intimidé. Mais nous devînmes des amis proches et il occupa même l'appartement mansardé de notre maison pendant plus de deux ans. Grâce à lui, je fis la connaissance de Brennan Manning, qui deviendra lui aussi un mentor et un ami. Il est probablement l'homme qui m'a le plus appris sur l'amour de Dieu.
En 1987; Richard Foster m'invita à démarrer avec lui un ministère chrétien de renouveau spirituel appelé Renovaré, un nom que personne n'arrivait à prononcer et dont tout le monde ignorait la signification. Nous passâmes les vingt années suivantes à organiser des conférences, des retraites et des séminaires dans tout le pays, aux côtés de plusieurs hommes et femmes extraordinaires. Notre but était de montrer aux chrétiens comment accéder à une vie plus profonde et plus équilibrée avec Dieu. Certains pensaient que nous faisions partie du Nouvel Âge à cause de notre nom « bizarre » et parce que Richard employait des mots comme contemplation et justice sociale. Il arriva même qu'on bloque l'accès à nos lieux de rencontre ! Cela fait partie des joies du service !
Grâce à Richard et Renovaré, je fis la connaissance de Dallas Willard, qui enseigne la philosophie à l'Université de Californie du Sud. Je n'ai jamais connu un homme aussi intelligent que lui. Comme Richard, Dallas est un disciple authentique de Jésus. En 1994 j'acceptai son invitation à co-enseigner avec lui un cours de doctorat en théologie qui se tenait chaque été pendant deux semaines au Fuller Seminary. En fait je n'étais qu'un assistant amélioré, Dallas dispensant quatre vingt dix pour cent de l'enseignement. Cela veut dire que je passai sept à huit heures par jour, pendant une dizaine de jours, à écouter parler de Dieu. Cette « collaboration » dura dix ans et me permis de profiter de plus de sept cents heures d'enseignement sur Dieu, son royaume, la Bible, les disciplines spirituelles et la vie en général.
Certains des meilleurs enseignants chrétiens m'ont ainsi inculqué leur savoir et leur sagesse, à moi qui n'étais rien et j'en suis infiniment reconnaissant. Je suppose que c'est la façon dont le christianisme fonctionne depuis le début. Jésus a choisi douze homme ordinaires pour les emmener dans une aventure de trois ans et demi et il a investi sa vie en eux parce qu'il croyait en eux. L'influence de tous ces mentors – Richard, Henri, Rich, Brenann et Dallas – m'a tellement marqué que je ne suis pas sûr d'avoir des pensées qu'ils n'aient pas façonnées. Chacune des pages de ce livre porte leur empreinte. J'ai étudié tous leurs écrits, écouté les enregistrements de tous leurs sermons, chants et conférences, mais je dois dire en toute honnêteté que c'est le temps passé seul à seul avec chacun d'eux qui m'a le plus apporté. Les longues marches avec Richard, les lettres échangées avec Henri, les nuits entières passées à discuter avec Rich Mullins, les dîners prolongés avec Brennan et les festins de crème glacée avec Dallas (il aime la vanille, quelle idée !), tout cela est profondément ancré dans mon âme.
Ce livre est l'aboutissement de vingt-cinq années d'apprentissage à l'écoute de ces grands hommes de Dieu. L'idée à surgi peu de temps après le début de ma collaboration avec Dallas. Il ne cessait d'évoquer le besoin d'élaborer un programme de « formation à la ressemblance à Christ » (comme il disait) à l'usage des individus et des églises. Il en avait lui-même esquissé les grandes lignes dans l'un de ses livres. Chaque fois que je lui demandais si une telle entreprise était réalisable, il m'assurait que oui.
« Alors pourquoi ne le fais-tu pas, Dallas ?
– Parce que je pense que c'est ton travail, Jim » me répondait-il invariablement.
Aucune pression !
En 1998, je commençai à rédiger un programme s'inspirant de l'ébauche de Dallas et ayant pour thème : apprendre à vivre comme Jésus nous l'a enseigné. En 2003, je demandai au Conseil de mon église (Chapel Hill United Methodist Church, Wichita, Kansas) l'autorisation de tester ce programme sur des membres de la communauté. Mon pasteur accepta avec joie et la première année, vingt-cinq personnes suivirent ce cours de trente semaines. Vers le milieu de l'année, je commençai à me dire que la vision de Dallas était juste : une transformation authentique à l'image de Christ est effectivement possible.
Depuis, j'ai étudié ce matériel avec soixante-quinze personnes au total, avec toujours les mêmes résultats : un changement significatif dans leur vie. À l'église, des épouses viennent me trouver pour me dire : « Qu'avez-vous fait à mon mari ? Il n'est plus le même. Je ne sais pas ce qui se passe, mais il est beaucoup plus patient et plus prévenant envers nous. En tous cas, c'est décidé, l'année prochaine, je m'inscris à ce cours ! » Cet enseignement a également été suivi par des élèves de lycée, des groupes de jeunes et des étudiants d'université. Lorsqu'on m'interroge sur le public ciblé, je réponds : « Tous ceux qui aspirent à changer – qu'ils soient jeunes ou vieux, chrétiens de fraîche date ou plus matures, hommes ou femmes. »
Le livre que vous avez entre les mains est le premier d'une série, qui ébauche avec deux autres ouvrages un chemin de ressemblance à Christ. Le but de ce premier volume est de révéler le Dieu que Jésus connaît.
Chaque chapitre dénonce les conceptions fausses que nous avons de Dieu, pour les comparer à la vérité, c'est-à-dire au récit de Jésus. Il propose également des exercices pour l'âme qui visent à enraciner le récit de Jésus plus solidement dans votre corps, âme et esprit. Le but de ces exercices n'est pas de vous rendre plus religieux ou d'impressionner Dieu, mais de vous permettre de voir et de comprendre le monde comme Jésus le voyait et le comprenait. Par ailleurs, des questions posées au fil du texte stimulent la réflexion.
Ce premier livre s'attache plus particulièrement au caractère de Dieu et à notre cheminement vers une vie plus intime avec lui.
Le deuxième ouvrage de la série présente le royaume de Dieu et traite de notre caractère, plus spécifiquement des vices qui nous font tellement de tort : la colère, la luxure, l'inquiétude, l'esprit de jugement et bien d'autres. En nous inspirant du Sermon sur la montagne, nous essaierons de démasquer les récits erronés derrière ces défauts (par exemple : Quels sont les récits qui mènent à la colère ?) et les remplacer là encore par ce que Jésus nous révèle de la vie dans le royaume de Dieu. De même que pour le présent ouvrage, chaque chapitre proposera un exercice destiné à ancrer le récit jusque dans notre âme.
Le but du troisième livre de la série est de nous apprendre à vivre comme des « apprentis » de Jésus dans notre existence ordinaire de tous les jours. Comment puis-je mettre la vision du royaume en pratique dans ma famille ? Quel impact ma vie avec Dieu aura-t-elle sur mon attitude au travail ? Comment moi, disciple de Jésus, puis-je changer le monde dans lequel je vis ? Comment, dans la pratique, aimer mes ennemis et bénir ceux qui me maudissent ? Finalement, que ce soit à la maison, au travail, dans notre communauté ou sur notre planète, tout se résume à ceci : « Ce qui importe, c'est la foi qui agit par l'amour » (Galates 5.6, FRANÇAIS COURANT).
Mais pour commencer, découvrons le Dieu que Jésus connaît et apprenons à l'aimer de toutes les fibres de notre être. Cette connaissance et cet amour sont le fondement sur lequel repose les deux autres ouvrages et toute la vie chrétienne. Ce livre sera peut-être le seul que vous lirez dans cette série et si tel est le cas, je prie que la couleur de votre « bague d'amour » s'éclaircisse.