Ceux qui connaissent par ses écrits Napoléon Roussel, l’incontournable polémiste évangélique du 19ème siècle, seront d’avance entièrement convaincus de la véracité du très curieux récit suivant. Il les intéressera d’autant plus qu’à la lecture d’ouvrages consacrés aux réveils, ils ont plus d’une fois regretté qu’ils soient toujours rédigés par des plumes de mentalité anglo-saxonne, trop longtemps après les faits. Or ici nous nous trouvons devant le compte-rendu d’un bon Français, sceptique par tempérament et par hygiène, couché sur papier l’année même du phénomène.
Tout observateur chrétien confronté au bizarre en religion, aspire aussitôt à distinguer entre ce qui vient de Dieu et ce qui vient de l’homme. Ce vœu n’est pas toujours exaucé : Napoléon Roussel confesse sa grande perplexité face à l’épidémie des sévères prostrations physiques qui frappent les pécheurs, lors de ce réveil irlandais. S’il lui était donné d’assister aujourd’hui aux lamentables pantomimes de nos télévangélistes, aux cours desquelles les candidats choisis parmi le public s’effondrent sous la main bénissante du charlatan, il ne se poserait pas la question, puisqu’à l’évidence tout vient de la mise en scène humaine. Mais en ce mois de juillet 1859, à Belfast, les preuves de l’action divine sont trop patentes pour rester ignorées. Cependant, notre compatriote évangélique n’est pas persuadé pour autant que tout dans ce réveil, et plus spécialement les phénomènes physiques, provienne directement de Dieu…
La conclusion du témoin oculaire, sera qu’assurément Dieu permet des choses étranges, peut-être parce qu’elles sont le moyen d’attirer l’attention d’un monde incrédule, mais que la marque essentielle de l’œuvre de l’Esprit de Dieu, reste des cœurs gagnés à Jésus-Christ, des vies transformées, des volontés qui rejettent le mal et poursuivent le bien. Lointains auditeurs des échos de ce puissant séisme spirituel dans l’histoire irlandaise, nous ne pouvons que partager le même constat : il est illusoire pour l’homme de chercher à comprendre et à expliquer toutes les actions de l’Esprit de Dieu ; son devoir n’est que de saisir l’objet que l’Esprit dépeint à ses yeux intérieurs et qu’il offre à sa foi : le Sauveur Jésus-Christ, crucifié pour nos péchés, et ressuscité pour notre justification.
Phoenix, le 1er août 2013