Durant le cours de son professorat à la Faculté de Montauban, M. Bonifas a enseigné à trois reprises l’Histoire des Dogmes dans l’auditoire de théologie (années classiques 1868-69, 1871-75 et 1877-78). La première et la seconde fois, il a écrit son cours en entier ; la troisième fois, il s’est borné à revoir la seconde rédaction, à y apporter les modifications nécessaires, à y faire surtout de nombreuses additions, dont il couvrait, soit les marges de ses feuillets, soit des feuillets supplémentaires, soit encore de simples bandes de papier soigneusement intercalées, parmi lesquelles on se retrouve aisément, grâce à un ingénieux système de renvois.
Nous avons eu constamment sous les yeux ces deux manuscrits, le premier (celui de 1868-69) écrit tout d’une venue, le second (celui de 1874-75) rempli de surcharges. Le texte que nous avons imprimé est celui du manuscrit le plus récent, en tenant compte de tous les remaniements ultérieurs. Toutefois nous avons conservé en notes au bas des pages, quelques passages, peu nombreux d’ailleurs, du texte primitif, que le professeur avait plus tard supprimés, et qui nous ont paru présenter un intérêt spéciala.
a – Voir en particulier tome Ier, pages 4-5 et 74-75 ; tome II, pages 321-325 et 444-446.
Le plus souvent nous avons pu nous borner à reproduire littéralement les notes de M. Bonifas. Bien que destinées uniquement à soutenir sa mémoire, au cours de ses leçons orales, elles étaient en général rédigées avec assez de soin pour pouvoir être imprimées telles quelles. Cependant il a fallu, de temps en temps, y apporter quelques modifications de pure forme. Nous l’avons fait sans aucun scrupule, toutes les fois qu’il s’agissait de supprimer certaines expressions purement oratoires, de rétablir la correction grammaticale de certaines phrases, d’alléger ou d’éclaircir certaines formes de style.
Parfois aussi nous nous sommes cru obligé à opérer des modifications plus graves. Le style de M. Bonifas, naturellement facile et abondant, n’évite pas toujours, dans ses notes, la prolixité. Tel mot, tel tour de phrase, telle pensée est reproduite jusqu’à satiété. Cette ampleur, fatigante à la lecture, était sans inconvénient, offrait même de grands avantages dans la bouche du professeur : grâce à la répétition, les développements pénètrent mieux dans l’esprit des auditeurs, sont plus facilement saisis et fixés par la plume des élèves. Mais, dans un ouvrage imprimé, il fallait condenser : nous nous le sommes permis au besoin. Néanmoins, nous n’avons usé de cette liberté qu’avec la plus grande réserve. Le lecteur trouvera peut-être qu’en plusieurs endroits la pensée aurait gagné à être rendue plus concise encore. M. Bonifas l’eût fait certainement s’il avait préparé lui-même la publication de son cours. Mais on comprendra que nous ayons dû borner au strict nécessaire de semblables remaniements.
Esprit amoureux d’ordre et de clarté, M. Bonifas semait ses notes de nombreuses divisions. Les 1°, 2°, 3°…, les A, B, C…, les a, b, c…, abondent dans ses manuscrits. En outre, un très grand nombre de mots — plusieurs dans chaque phrase — sont soulignés à la plume, quelques-uns de deux ou trois traits, suivant leur importance. Nous avons conservé plusieurs de ces divisions et marqué aussi, par des caractères spéciaux, les mots saillants de la plupart des paragraphes. Il nous a semblé que nous devions respecter ainsi, dans la mesure du possible, jusqu’aux dispositions extérieures du texte que nous avions sous les yeux. Le lecteur nous excusera si, dans cet ordre d’idées, nous lui paraissons être resté en deçà ou allé au delà du nécessaire.
Partout où nous l’avons cru utile, nous avons indiqué les sources auxquelles étaient puisées les citations. Ces sources n’étaient jamais mentionnées sur le manuscrit du professeur. Les retrouver, soit dans les ouvrages originaux, soit dans les Histoires des Dogmes allemandes où M. Bonifas les avait prises, a été la partie la plus longue et la plus ingrate de notre travail. Nous avons dû rectifier quelques-unes de nos citations. Il se peut que quelque inexactitude nous ait encore échappé. Sur ce point aussi nous réclamons l’indulgence du lecteur.
Nous ne nous sommes pas attribué le droit de compléter, même par des notes, les points sur lesquels des découvertes ou des publications récentes ont jeté un nouveau jour. Pour n’en citer qu’un, il est évident que l’auteur eût tenu grand compte, dans son exposition de la théologie patristique, de la Διδαχὴ τῶν ἀποστόλων retrouvée depuis sa mort. Nous avons cru que notre rôle devait se borner à mettre en lumière, le plus fidèlement possible, l’œuvre même de M. Bonifas.
L’ouvrage que nous offrons au public reste donc certainement bien au-dessous de ce qu’il aurait été, si notre regretté maître l’eût mené à bonne fin. Tel que nous le publions, nous pensons qu’il peut rendre service à l’Église, particulièrement aux pasteurs et aux étudiants en théologie, et nous appelons sur lui la bénédiction de Dieu.
Jean Bianquis