Si, par égard pour la vérité historique, j’ai rappelé que la théologie de ces trois derniers siècles était généralement restée sourde aux enseignements bibliques se rapportant au ministère de délivrance et de guérison 1, il y a lieu de relever aussi les raisons qui encourageaient l’Eglise à ignorer ce ministère.
1 Pour quelques Grignon de Montfort (1673-1716) et Jean-Baptiste Marie Vianney (le curé d’Ars ; 1786-1859) en France, Jean-Albert Bengel (1687-1751) et Jean-Christophe Blumhardt (1805-1880) en Allemagne, Georges Fox (1624-1690), John Wesley (1703-1791) et Edward Irving (1792-1834) en Angleterre, Jean-Joseph Gassner (1727-1779) et Dorothée Trüdel (1813-1862) en Suisse, il y eut, en contrepartie, l’enseignement officiel de l’Eglise, autant réformée, luthérienne, anglicane que catholique. Il rappelait à tous que le temps des miracles est révolu, que la maladie est “une école de sainteté”, et que la seule responsabilité des serviteurs de Dieu est d’appeler les malades à la pénitence et à la résignation, ou alors — en l’état de moribond — à la requête de l’extrême onction…
D’abord ceux qui s’en réclamaient, trop rapidement sans doute, entraient en dissidence suite à l’incompréhension ou la réprobation dont ils étaient l’objet. Tout ministère de libération fut donc tenu pour un facteur de division plutôt que pour un don du Seigneur ou une œuvre du Saint-Esprit.
De plus, il eut souvent pour enracinement les milieux piétistes, connus pour leur juste réaction contre le formalisme ecclésiastique et le rationalisme de la théologie officielle. Ainsi qu’il arrive souvent dans de telles situations, cette réaction s’accompagna de jugements, d’étroitesses, parfois aussi de mesquineries qui cadraient mal avec la vie de l’Esprit qu’elle voulait honorer. Les signes et miracles furent peu remarqués, tandis qu’on fit larges griefs des maladresses de quelques-uns dans la défense et l’illustration de leurs charismes.
Il faut dire enfin que parallèlement à ces Mouvements de Réveils, mais sans relation aucune avec eux, il y eut les réapparitions parfois sporadiques, parfois tenaces, de la gnose 2 aux formes diverses, tantôt philosophique et affinée — telle la théosophie — tantôt mystique et primaire — tel le spiritisme — ou alors plus moderne, tels la Science chrétienne, l’Antoinisme, le Christ de Montfavet…
2 Connaissance, savoir religieux qui prétend à l’excellence alors qu’il n’est qu’humain.
Ces hérésies contribuèrent à discréditer les ministères de libération et de guérison authentiquement chrétiens ; et les condamnations qu’elles suscitaient atteignirent indistinctement les fidèles et les renégats.
Les Eglises historiques ne sont pas blanchies pour autant d’avoir méconnu l’aspect pratique de la parole de Jésus proclamée à Nazareth 3. Et il faut le dire, son message reste mutilé en bien d’autres secteurs que celui de la libération de la personne. On sait comment, par exemple, le glaive de la Parole perd sa pointe acérée et son tranchant dès qu’on touche aux questions économiques et politiques. Cependant, même si elles sont apparentées, la recherche de l’unité et de la santé de la personne n’est pas à confondre avec celle des implications politiques et sociales du message évangélique. L’une et l’autre restent tributaires du même mal endémique et fondamental : l’incrédulité, parfois revigorée par la théologie elle-même. A preuve, les réponses qu’elle a données lorsqu’elle était interrogée au sujet de sa négligence ou de son refus du ministère de la libération pourtant pratiqué et dûment enseigné par Jésus, puis par l’Église naissante. Sauf rares exceptions, devant la contradiction entre les promesses de l’Ecriture et les actes ecclésiastiques, elle a trouvé sa propre justification là où personne n’aurait pensé à la chercher.
3 Luc 4.18-19.
Exemples cités de mémoire :
Reconnaissons que de tels propos s’accordent mal avec les récits d’authentiques guérisons et délivrances opérées par le Christ et par ses disciples, ou avec les étonnantes professions de foi des démoniaques eux-mêmes ! Aussi a-t-on trouvé aujourd’hui d’autres arguments :
Au siècle du voyage sur la lune, de l’électronique et de la fission de l’atome, comment pourrions-nous croire encore à l’existence du diable ? Il n’est qu’une figure mythique, un symbole de tout ce qui aliène l’individu non encore libéré de la peur. Il est la personnification du mal moral, physique, social, d’une société qui n’a pas encore atteint son âge adulte.
Cette vue des choses se veut assurément au service de la libération. Elle dit n’avoir que faire d’anges et de démons, donc de croyances naïves à ranger au musée des superstitions. De fait, elle s’en est débarrassée une fois pour toutes par une réinterprétation démythologisée du donné biblique. C’est dans un engagement “politique”, dans un combat “sécularisé” qu’à l’heure actuelle on exorcise les névroses d’une société encore inféodée à de fausses idéologies.
Il serait certes insensé de nier la nécessité de cette libération-là aussi. Mais on peut s’étonner qu’elle tienne lieu de substitut à celle que propose préalablement le Seigneur. On peut s’étonner aussi qu’elle serve d’argumentation visant à nier l’essentiel de la Parole de Dieu…
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Au temps du Christ déjà, la vie spirituelle du peuple d’Israël était marquée par une piété puisant à d’autres sources qu’à celle de la vérité scripturaire. Les Apocryphes connus, tels ceux d’Enoch ou de Daniel ou de Tobie, laissent entendre quelles singulières croyances étaient alors généralement admises. Elles devaient leur inspiration à la littérature religieuse du paganisme oriental et non à l’Eternel, le Dieu d’Israël. L’opposition connue des sadducéens — les rationalistes de cette époque — était donc partiellement justifiée. Non sans raison, ils refusaient de souscrire aux stupides superstitions qui hantaient l’esprit des gens. Mais n’est-il pas insensé de prêter au Christ et à l’Eglise naissante une ignorance ou des confusions qui nous amèneraient à mettre en doute leur enseignement sur Satan et sur les esprits mauvais ?
L’enseignement scripturaire, même lorsqu’il emprunte le vocabulaire usuel de l’époque, reste celui du Dieu de vérité et non celui d’hommes religieux faillibles et crédules. Comme l’écrit le pasteur van Dam dans son remarquable ouvrage sur la démonologie et le ministère de délivrance 4 :
4 Dämonen und Besessene, Paul Pattloch Verlag, Aschaffenburg.
Naturellement, Jésus était homme en son siècle, mais il était aussi le Fils de Dieu. Il incarnait, proclamait, manifestait le royaume de Dieu dans la puissance du Saint-Esprit qui l’accompagnait. C’est pourquoi ses contemporains s’interrogeaient : “Qu’est-ce que cela ? Voilà un enseignement nouveau, plein d’autorité. Il commande même aux esprits impurs et ils lui obéissent” 5. Venu au nom du Père, il cherchait la volonté de son Père 6, il disait ce qu’il avait entendu de son Père 7 et faisait les œuvres que son Père lui avait donné d’accomplir 8. Et en rapportant cela, Jean avait en vue le ministère de la libération inscrit dans la parole du Christ selon Jean 14.12 : “Celui qui croit en moi fera aussi les œuvres que je fais.” Jésus a considéré son combat victorieux contre les puissances démoniaques comme une manifestation du royaume de Dieu 9... Parce que Jésus est la personnification du royaume de Dieu, les fondements de son enseignement au sujet de Satan et des démons ne sont pas tributaires du siècle, mais ont valeur de vérité intemporelle. Pourrait-il être le témoin du royaume de Dieu dans la communion et la plénitude du Saint-Esprit et ignorer ce que sont en réalité le royaume des ténèbres et les agissements des esprits impurs ? Si la parole est certaine quand il nous instruit des choses du royaume de Dieu, pourquoi ne le serait-elle pas quand il nous parle du royaume de Satan? S’il est Seigneur quand il révèle la volonté de Dieu, il l’est aussi dans sa catéchèse au sujet des démons.
5 Marc 1.27.
6 Jean 5.30.
9 Luc 11.20 ; Matthieu 12.28.
Et le pasteur van Dam d’ajouter :
La révélation de Dieu se limite-t-elle à ce que l’homme croit naturellement ou bien la foi a-t-elle pour vraie mesure la Parole divinement inspirée ? Cette critique purement rationnelle de l’Ecriture n’est-elle pas finalement un avantage donné au prince des ténèbres ? L’injustice, le racisme, la guerre, manifestations du péché de l’homme, doivent être combattus. Cette action nécessaire est un des aspects de la libération, quand même Jésus n’aurait jamais qualifié d’exorcisme une démonstration politique contre l’occupation romaine.
Soyons équitables ! L’Evangile est inséparable de la parole du prophète Esaïe 10 appelant à une libération sociale et économique. Et les chrétiens n’ont pas toujours su incarner cet Evangile-là. C’est pourquoi, depuis un siècle bientôt, souvent avec un sens aigu de la solidarité, de nombreuses idéologies à leur manière ont cherché à établir la justice sur la terre. Que d’efforts et d’ingéniosité pour débarrasser nos sociétés de la famine, de l’insécurité, de l’injustice, du racisme, des inégalités, des guerres et de la dégradation qu’elles apportent !
10 Esaïe 58.6-8.
Il faut le dire loyalement : ces généreuses intentions sont souvent payées par des sacrifices aussi énormes que meurtriers. Lorsqu’elles ont quelque apparence de réussite, elles sont sans durée, ou alors artificiellement et constamment soutenues par un appareil policier, totalitaire et bureaucratique, finalement lui aussi tyrannique et asservissant. Les exemples abondent ! Un professeur de l’Université de Lausanne disait récemment à des étudiants :
Vous êtes convaincus que la bonté et la générosité naturelles des hommes sont perverties par la société, vous croyez à la possibilité de créer une société nouvelle, sans conflits ni hiérarchies, fabriquée de toutes pièces, radicalement différente de celle dans laquelle nous vivons. Je suis, vous vous en doutez, sur ce point, très pessimiste.
Je n’arrive jamais à effacer de ma mémoire les camps de concentration et les archipels Goulag. Les bâtisseurs de sociétés nouvelles, au lieu du bonheur, nous ont toujours donné l’enfer.
C’est une prétention démoniaque de sociologue universitaire, de croire que l’on puisse fabriquer de toutes pièces la bonne, la belle, la bienheureuse société, juste et libre. Pour ce faire, il faudrait à la fois susciter des hommes nouveaux, justes et sans passions, et bien évidemment créer des structures contraignantes qui pourraient faciliter leur évolution. Mais une société pareille ne serait-elle pas encore plus contraignante et conditionnante que celle que vous dites ne pouvoir aucunement supporter ? Ou bien pensez-vous que conditionner une société suivant vos propres désirs, à l’exclusion de ceux des autres, soit le “bon critère” ? 11
11 M. Giovanni Busino, dans 24 Heures du 29.7.76.
Ne serait-ce pas que ces “bâtisseurs de sociétés nouvelles” tant désirées et recherchées par les hommes à chaque nouvelle génération ignorent volontairement ou par aveuglement satanique deux vérités que seule l’Ecriture révèle :
Satan est le prince de ce monde. Selon sa propre nature, il s’ingénie à corrompre et détourner de leurs fins les meilleures intentions humaines.
Il n’y a qu’une seule vraie libération : celle que le Christ accomplit. Elle apporte la justice et la paix 12 ; elle commence par une libération de l’homme lui-même. Elle est inséparable de l’action du Saint-Esprit.
12 Romains 14.17.
C’est ce qu’enseigne l’Ecriture qu’il faut maintenant étudier.
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Cette instruction est avant tout néotestamentaire ; il serait regrettable cependant de passer sous silence tout ce que nous en dit déjà
Démons ou méchants esprits y sont moins souvent nommés que dans les évangiles. C’est que leur présence et leur action apparaissent sous un autre nom, combien fréquent celui-là : l’idolâtrie. En Israël, elle avait deux formes bien connues :
13 Deutéronome 18.9-15 ; Jérémie 27.9 ; Osée 4.12. Note : Dans “L’occultisme à la lumière du Christ”, Ed. Ligue pour la lecture de la Bible, nous avons expliqué comment et pourquoi ces “pratiques”, dont la recrudescence est aujourd’hui universelle et combien significative, aliènent gravement ceux qui s’y adonnent.
A l’évidence, ces cultes païens étaient un mélange de superstition et de recours aux forces démoniaques. Leur effet néfaste n’avait rien d’imaginaire. A preuve, la dégradation morale à laquelle le peuple était ainsi entraîné. Invoquer les puissances célestes (les faux dieux), c’est, selon l’expression connue, “avoir commerce avec les démons”, c’est réclamer leur assistance, c’est devenir leurs obligés.
Aussi la sévérité de la loi de Moïse envers les idolâtres était à la mesure des conséquences désastreuses qu’elle devait conjurer. Elle n’envisageait rien moins que la lapidation des transgresseurs.
Cette amputation, dans la chair vive du peuple, ne devrait pas nous étonner. Devant la prolifération possible d’une cellule cancéreuse, nous admettons l’ablation d’un membre atteint.
La rigueur du jugement de Dieu envers toute forme d’idolâtrie a aussi pour cause la nocivité mortelle des pratiques occultes.
Déjà révélateur est le terme biblique qualifiant d’abomination ces cultes et ces pratiques. Avons-nous jamais pris conscience des malédictions qui résultent du commerce avec les esprits? Beaucoup de maladies du caractère, des sentiments, de la volonté, du comportement, telles l’envie, la peur, la jalousie, la colère, ont une origine circonstancielle et psychologique. Mais elles sont aussi des terrains favorables à l’action des démons, à leur volonté délétère, morbide et meurtrière, à leur force de division, d’opposition et d’aveuglement, à leur faculté de ruse, de perversion, d’orgueil et de ressentiment. Ce tableau clinique a pour référence l’histoire d’Israël, constamment liée à l’idolâtrie. Cette histoire fut une suite de désastres, en dépit de la grâce renouvelée de Dieu. Un commentateur juif relève que, sans la souveraine intervention de Dieu et l’action de sa Parole, non seulement Israël mais l’humanité entière serait depuis longtemps anéantie en conséquence de son commerce volontaire avec les forces sataniques.
Cela nous aide à mieux comprendre aussi pourquoi, dans la vie et l’œuvre de Jésus, la défaite du prince de ce monde a été au premier plan de son combat. Mais précisons-le d’emblée : il est plus difficile d’aimer Dieu que de lutter contre les démons. C’est en allant jusqu’au bout de son amour pour Dieu que le Christ combat les démons. Ce qui ressort d’une lecture attentive des évangiles.
Les récits concernant le ministère de Jésus, puis celui de l’Eglise engagée dans le témoignage et l’évangélisation s’accompagnent toujours d’une victoire à remporter d’abord sur les puissances adverses.
14 Matthieu 4.1-11 ; Marc 1.12-13 ; Luc 4.1-13.
15 Matthieu 4.24.
16 Marc 1.23-26.
17 Luc 4.33-36.
18 Luc 13.32.
19 Luc 7.22.
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Le ministère de libération, en particulier la victoire remportée sur les puissances sataniques, est donc bien pour Jésus le signe annonciateur de la venue du royaume. Dans une récente étude, le pasteur Jacques Blandenier écrit : Oui, c’est bien contre Satan que Jésus est venu livrer bataille… Et on peut trouver tout au long de l’Evangile le fil conducteur de cet affrontement 20.
20 Souffrir peut-être… mais guérir, P.B.U., Lausanne, p. 25-26.
21 Il est intéressant de relever les étymologies possibles du mot démon :
— Daîo : partager; celui qui distribue à chacun son lot ou son sort.
— Daênai = savoir; celui qui inspire notre connaissance, nous rend habiles (Paul parle de doctrines de démons, 1 Timothée 4.1).
— A partir de la racine “di” = celui qui nous fait briller (Lucifer !).
22 1 Corinthiens 10.19-20. F. Godet commente : “Derrière cette fantasmagorie mythologique se cachent des puissances malfaisantes, qui sans être des divinités n’en sont pas moins réelles, très actives et qui sont parvenues à fasciner l’imagination humaine et à détourner sur des êtres de fantaisie le sentiment religieux des nations païennes ; de là les cultes idolâtres, cultes adressés à ces puissances diaboliques et non pas à Dieu” (Commentaire à la première épître aux Corinthiens, Ed. Monnier, NE, Tome 2, p. 106).
23 Ephésiens 6.12.
24 Apocalypse 12.9.
25 Luc 24.39.
26 Opus cité p. 146.
27 Certains auteurs considèrent que les esprits dits “méchants” sont des défunts morts dans l’incrédulité et qui, de ce fait, n’ont pas trouvé le repos promis en Dieu. Cette explication est intéressante, même séduisante. Quelques rares textes de l’Ecriture sembleraient l’appuyer : Lévitique 20.6 ; Deutéronome 18.11 ; Esaïe 8.19. Nous ne pouvons cependant souscrire à une telle interprétation. En Israël, la nécromancie était tenue pour une prostitution, c’est-a-dire une idolâtrie. Les “’revenants” n’étaient pas confondus avec les esprits ou démons ; leur évocation ou même leur appellation était tenue pour un égarement hérité des religions païennes. Pour reprendre la traduction de 2 Rois 23.24 donnée par la TOB, nous rangeons donc ces “croyances’” au nombre des “‘ordures” définitivement balayées par Josias, dont il nous est dit “qu’il revint au Seigneur de tout son cœur, de tout son être et de toute sa force, selon toute la loi de Moïse”.
28 Opus cité p.148.
29 Cf. Matthieu 15.22 et Marc 7.24-30.
30 Cf. Matthieu 4.23-24 ; 10.1-8.
31 Matthieu 8.17.
32 1 Pierre 2.24.
33 Marc 3.11.
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Il y a quelque excuse à l’aveuglement des pharisiens à l’égard du Christ. Instruits par l’Histoire 35 et sévèrement mis en garde par la loi de Moïse 36, les chefs d’Israël connaissaient la perfidie de l’Ennemi. Ils pensaient que les exorcismes de Jésus étaient une ruse satanique. A leur idée, son pouvoir lui venait de Béelzébul, nom donné à l’un des plus grand princes des ténèbres, sinon à Satan lui-même 37. Si ce dernier lui permettait de chasser quelques esprits inférieurs, c’était afin de mieux circonvenir le peuple. En effet, dans l’organisation des puissances sataniques, le subterfuge est un recours constant. Miracles de toutes sortes sont des déguisements 38 destinés à mieux leurrer le peuple appelé par Dieu à la vraie libération 39.
37 Marc 3.22.
39 A noter que la même mystification — miracles des guérisseurs, magiciens et autres voyants — abuse aujourd’hui les crédules et les détourne de la foi au seul vrai Libérateur.
A cette fausse interprétation de la réalité, Jésus oppose des faits qui sont l’évidence même et qui dénoncent l’aveuglement de ses interlocuteurs. Les Juifs n’étaient pas ignorants. Ils savaient que Satan est le maître de créatures célestes et qu’il exerce une autorité incontestée sur tous les démons. Admettre que Jésus agit par une puissance satanique, c’est laisser entendre que le royaume de l’Ennemi connaît des luttes intestines et va à sa ruine. Or, chacun sait combien, au contraire, il est prospère !
Donc, si Jésus chasse les démons, “l’homme fort et bien armé”, Satan 40 et, avec lui, ses légions ont réellement trouvé leur maître. Ils s’avèrent incapables d’empêcher que leur soient repris les biens (les hommes) dont ils ont fait leur proie.
40 Luc 11.21.
Pour celui qui veut voir et comprendre, il ne s’agit même plus d’un combat dont l’issue serait incertaine. La victoire a déjà été remportée. En fait, à chaque affrontement, la déroute est audible dans les propos des démoniaques ; elle est visible dans l’impossibilité où sont les démons de se soustraire aux injonctions du Christ.
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Les contempteurs de Jésus se contredisent d’une autre manière encore. L’exorcisme était pratiqué par certains Juifs. L’Ecriture ne nous donne aucune indication sur leur manière de faire. On sait seulement qu’elle était agréée des chefs. L’historien juif Josèphe et le Talmud nous disent qu’ils recouraient à des incantations, à des formules, à l’obligation faite aux malades d’avoir à respirer certains parfums, selon un enseignement qu’on faisait remonter à Salomon. Avec Jésus, rien de semblable. A sa seule parole, esprits et démons lui obéissent. Donc en la personne de Jésus, comme autrefois en Egypte, “le doigt de Dieu est là” 41 le royaume est manifesté. Si les magiciens égyptiens l’ont reconnu même devant le Pharaon, à combien plus forte raison les pharisiens devaient-ils ouvrir les yeux. Or, non seulement ils ne veulent pas voir l’évidence, mais ils en dénaturent l’origine et la manifestation.
41 Exode 8.15 (version Synodale 8.19)
Peut-être faut-il ajouter que l’aveuglement et la colère des pharisiens s’alimentaient à une source qui n’est pas tarie aujourd’hui. Cette libération, qui sème la déroute dans le camp ennemi, atteste la messianité de Jésus, l’accomplissement de la prophétie d’Esaïe : Les captifs de l’homme fort lui seront enlevés et la proie de l’homme violent lui sera arrachée… et toute créature saura que moi, l’Eternel, je suis ton Sauveur et que ton Rédempteur est le Dieu puissant de Jacob 42. Elle atteste aussi et en même temps l’impuissance de l’homme religieux à mener un tel combat. Car la victoire sur l’Ennemi ne tient pas d’abord à la science des docteurs ou à leur position ecclésiastique. Elle est dépendante d’une autorité conférée par le Seigneur reconnu comme tel. Or, il est plus aisé de discourir des choses de Dieu que d’en apporter la démonstration. Paul le dit clairement aux Corinthiens 43.
42 Esaïe 49.24-26.
Ce ne sont pas là faciles propos. Les trois synoptiques ne manquent pas d’avertir que l’aveuglement à ce sujet risque de conduire au péché contre le Saint-Esprit. Et la parabole rapportée par Luc et Matthieu 44 n’a pas été ajoutée par hasard à cet avertissement : Celui qui n’est pas avec moi est contre moi et celui qui n’amasse pas avec moi disperse. Lorsque l’esprit impur est sorti d’un homme… il s’en va et prend avec lui sept autres esprits plus méchants… Ils entrent là et y demeurent, et la dernière condition de cet homme devient pire que la première. Le refus de l’action libératrice de Jésus n’est donc pas sans grave conséquence. Lui fermer la porte, ou bien admettre qu’il intervienne puis le congédier, c’est laisser le champ libre au Malin.
Cela n’explique-t-il pas le sort d’Israël après son tragique rejet du Messie, et celui d’une chrétienté contemporaine imbue de son savoir, oublieuse de tout ce qu’elle doit à l’Evangile et en même temps contestatrice de l’autorité du Christ et de sa Parole ? N’’est-ce pas ce dont nous avertit aussi la prophétie de Jean 45 en rapport avec les événements précédant la septième trompette : Les hommes ne cessèrent pas d’adorer les démons et les idoles d’or, d’argent, d’airain, de pierre et de bois.. Ils ne se repentirent ni de leur meurtres, ni de leurs maléfices, ni de leurs impuretés, ni de leurs rapines.
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Peut-être — et jusque dans l’Eglise — le ministère de la libération est-il tenu pour un ministère exceptionnel, voire redoutable, puisqu’en l’exerçant nous sommes dans un tête-à-tête direct avec l’Ennemi.
Ses agissements sont certes inquiétants. Son intrusion lui permet de disposer de la voix et de l’intelligence d’une personne. Il s’exprime par la bouche de ceux qu’il a circonvenus ou bien, à volonté, leur enlève la possibilité de parler, d’entendre et même de voir 46. Il asservit à ses desseins meurtriers leurs muscles et leur volonté propre 47.
46 Matthieu 8.29 ; Marc 1.24 ; Luc 11.14.
S’il est vrai que le démon dispose de forces surnaturelles, le disciple ne court aucun risque réel lorsque son ministère est vécu dans la communion du Seigneur. Luc, l’évangéliste, nous en assure : Je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds les serpents, les scorpions (illustration — courante dans l’Ecriture — des créatures sataniques et de toute la puissance de l’Ennemi) et rien ne pourra vous nuire 48.
48 Luc 10.19.
De plus, dans la libération, la personnalité du serviteur n’est pas requise. Seule est importante la présence du Seigneur et l’autorité conférée à sa Parole. Même quand il se voudrait opiniâtrement défensif, le combat par lequel les démons s’opposent à une action libératrice est sans espoir pour eux. On ose même dire qu’ils la redoutent eux les premiers 49. Comme le dit Jacques, ils tremblent 50.
50 Jacques 2.19.
La seule action négative que les démons puissent jamais tenter, lors d’une libération ainsi exercée contre eux, porte sur ses effets. De deux manières :
51 Luc 11.26.
52 Marc 1.27 ; Luc 4.35-36 ; Actes 5.17.
Quant à la colère, voire la fureur des démons, elle est sans doute en relation non pas avec le fait d’avoir à reconnaître l’autorité du Christ, mais d’avoir à déloger des personnes dans lesquelles ils ont élu domicile. Car, selon l’Ecriture, l’Ennemi n’a d’autres possibilités d’agissement sur la terre que celles que lui offrent les hommes soumis à ses desseins et à ses ordres. Quitter une personne ou un endroit, c’est être privé d’un moyen ou d’un théâtre d’action 53. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner si, d’après les trois synoptiques, les douze et, plus tard, les septante disciples envoyés en mission, reçoivent l’ordre de prêcher la repentance mais aussi de chasser les démons 54, Jésus leur en avait lui-même donné l’exemple 55, Bien sûr, l’efficacité de leur ministère ne pouvait que les réjouir. Mais il faut retenir les deux remarques de Jésus à ce sujet :
53 C’est l’occasion de souligner que la possibilité d’action du diable sur la terre est liée à cette nécessité d’avoir des médiums — des hommes — à sa disposition. En eux, par eux, sur la scène du monde il joue son propre théâtre, il manifeste sa personnalité. Chaque démon pris individuellement en est un aspect. Ce qui explique l’ingérence progressive d’un, puis de plusieurs démons en l’homme, et leur investissement peu à peu élargi à l’intelligence, aux sentiments, au comportement de cet homme. Cela peut aller de la simple suggestion jusqu’à la possession. Autrement dit, si Satan défigure l’homme créé à l’image de Dieu, il le remodèle à sa propre image. On peut alors comprendre que l’orgueil, le bluff, le faux semblant, le besoin de paraître et d’être admiré, le prestige, l’arrogance, la superbe, la prétention, la suffisance, la pose, les grands airs, le grand genre, la poudre aux yeux, la gloriole, le mensonger, le sophistiqué — si longue soit cette liste, elle est loin d’être complète ! — occupent tant de place, caractérisent tant d’hommes et tant de situations de ce monde. Là encore, là aussi, en négligeant le ministère de la libération, l’Eglise sert involontairement la cause de l’Ennemi et de tous les démons aussi infatués d’eux-mêmes que leur maître, et trop heureux de disposer à leur gré de la part d’âme, d’esprit et de corps que les hommes veulent bien leur concéder. Dans ce contexte, écoutons cette parole éclairante du Christ : “Mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur” et celle de Paul : “Laissez-vous attirer par ce qui est humble” (Matthieu 11.29 ; Romains 12.16).
54 Matthieu 10.1-8 ; Marc 3.13-15 ; 6.12-13 ; Luc 9.1-2 ; 10.1, 9, 17.
55 Marc 1.39.
La première : Je voyais Satan tomber du ciel comme un éclair 56 laisse entendre que la pratique du ministère de la libération hâte d’autant la précipitation finale des puissances infernales 57 et l’avènement du royaume qu’elle actualise 58.
56 Luc 10.18.
58 2 Pierre 3.11-12.
La seconde : Ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont assujettis, mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont inscrits dans les cieux 59 rappelle opportunément à tout serviteur que le salut 60 est prioritaire.
59 Luc 10.20.
60 Et quand je dis salut, il faut s’entendre sur ce mot. Il caractérise l’œuvre de réconciliation entre Dieu et l’homme, œuvre dont l’initiative et la réalisation reviennent entièrement à Dieu lui-même. C’est l’occasion de redire ici que si les pages de ce livre dénoncent Satan et sa tactique, elles ne doivent pas nous faire oublier une vérité elle aussi prioritaire : le rejet de Dieu par l’homme, même parfois par le croyant. Il est facile (trop parfois) d’accuser Satan. Sa part est réelle. Celle de l’homme révolté et incrédule ne l’est pas moins. D’où l’appel constant à la repentance, puis l’appel à se réjouir pour le bon motif.
Il serait faux d’objecter à cela une parole que la théologie de la démythologisation a particulièrement remise en honneur : Au jugement dernier 61 le royaume sera remis à ceux qui auront “œuvré”, alors que ceux dont la foi ne s’est pas accompagnée d’actes connaîtront le sort éternel du diable lui-même. Par cet argument, cette théologie prétend opposer à une libération “spirituelle” contestée et tenue pour piétiste, une libération politico-socio-économique, tenue pour seule efficace en ce monde. Que répondre ? Déjà dans l’Ancien Testament, à l’heure où Dieu dévoile à Moïse l’ensemble de sa volonté sainte et la récapitule dans les dix commandements, il spécifie que l’obéissance d’Israël à la loi manifestera l’œuvre que Dieu lui-même a accomplie en faveur de son peuple : Je suis l’Eternel ton Dieu qui t’ai libéré de l’Egypte.
Mais les œuvres que, dans sa foi reconnaissante, Israël voudra apporter au Seigneur ne seront jamais envisagées comme l’expression d’un travail salutaire où méritoire. Dieu dit à Moïse : Tu me feras un autel de terre pour y sacrifier tes holocaustes… Si tu me fais un autel de pierres, tu ne le bâtiras pas en pierres de taille, car en y passant ton ciseau (c’est-à-dire en y mêlant ton œuvre) tu les profanerais 62.
62 Exode 20.24, 25.
Cette même vérité est illustrée dans le Nouveau Testament par la parabole connue du cep et des sarments, avec le commentaire succinct qu’en donne Jésus : Hors de moi, vous ne pouvez rien faire 63. Le seul travail d’un sarment, c’est de laisser œuvrer la sève au travers de lui ; elle procède entièrement du cep. Ce que Jésus dit aussi à ceux qui lui demandent : Que nous faut-il faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? L’œuvre de Dieu, c’est de croire en Celui qu’il a envoyé 64. Ce que Paul enseignera, à son tour, aux Philippiens : C’est Dieu qui crée en vous et le vouloir et le faire selon son dessein bienveillant 65.
63 Jean 15.1-5.
64 Jean 6.28-29.
65 Philippiens 2.13.
En vérité, quelle est la part des œuvres dans la foi ? Dans le Sermon sur la Montagne, Jésus l’a définie sans équivoque possible : Il ne suffit pas de me dire : “Seigneur, Seigneur !” pour entrer dans le royaume des cieux ; il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux 66. En d’autres termes : quiconque agit réellement au nom de Jésus, c’est-à-dire dans la communion de sa personne et la proclamation de ce que son nom recouvre 67 peut s’attendre à des signes, des œuvres, des actes, qui accréditent son message. Mais dans ce ministère de proclamation et de libération, le nom de Jésus n’est pas utilisable magiquement. Il n’est pas non plus une étiquette qu’on peut placer sur toute entreprise qu’il nous agréerait de lui faire endosser. Avec sagesse, connaissant bien le cœur de l’homme et les ruses de l’Ennemi, Jésus a prévenu son Eglise de l’usage abusif qu’elle serait tentée de faire, et de son nom, et de l’autorité que ce nom confère à une action. A bon entendeur, salut ! C’est ici le cas de le dire.
66 Matthieu 7.21.
67 Le salut par grâce ; l’expiation pour le péché des hommes ; l’autorité sur les puissances du mal ; la joie d’un service libérateur marqué du sceau de la justice et de l’amour.
Si cela peut nous rendre humbles et nous engager dans une incessante recherche de sa volonté, cela ne peut jamais nous rendre sectaires. Sauf si nous oublions l’avertissement du Seigneur adressé aux disciples qui s’opposaient au ministère d’un homme parce que, sans être de l’équipe des douze, il chassait les démons au nom du Christ. Il leur dit : Ne l’en empêchez point, car celui qui n’est pas contre vous est pour vous 68.
68 Luc 9.49-50.
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Deux questions encore ! La première pourrait être posée au sujet de l’étonnante connaissance des démons touchant la personne du Christ. D’où savaient-ils que “Jésus était le Fils de Dieu, le Saint de Dieu venu pour les perdre” 69 ?
69 Matthieu 8.19 ; Marc 1.24 ; Luc 4.34.
Créatures célestes déchues au même titre que nous sommes des créatures terrestres déchues, les démons ne connaissent de la sagesse de Dieu que ce qui leur en est révélé par sa Parole. A la différence de beaucoup d’hommes, même parmi ceux qui se réclament du Seigneur, il la prennent au sérieux. Lors du baptême de Jésus, la proclamation divine les a atteints eux les premiers : Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j ai mis toute mon affection 70. Ce qu’ils ont appris là, dès lors les remplit d’horreur à l’égard de ce Fils et de son nom.
70 Matthieu 3.17 ; Marc 1.11 ; Luc 3.22.
Il est aussi intéressant de relever qu’à l’heure où ils interpellent Jésus, ils le disent Fils de Dieu, Saint de Dieu, mais se gardent bien de l’appeler Seigneur.
Quant à nous — et pour cause — pourquoi ce que nous savons de ce Fils et de la puissance de son nom ne nous remplirait-il pas de joie et de zèle ?
La seconde question est en rapport avec l’origine de Satan et des démons. Il pourrait paraître étonnant que dans ce chapitre qui traite de leur nature, je ne dise rien non plus de leur origine, en particulier des circonstances ou des raisons qui ont fait d’eux des créatures célestes déchues, ennemies de Dieu et ennemies de toute la création.
Mon silence à ce sujet est intentionnel et, à sa manière se veut fidèle aux données de l’Ecriture. En effet, elle range les créatures et l’œuvre satanique à l’enseigne du “mystère de l’iniquité” 71, c’est-à-dire d’une réalité dont le sens ne nous est pas encore révélé.
Je m’en tiens donc à ce silence de l’Ecriture, même s’il peut paraître insatisfaisant à certains. Je ne leur cache pas que d’autres serviteurs, avec cette même fidélité à l’Ecriture, ont cru découvrir dans les prophètes Esaïe et Ezéchiel en particulier 72, une explication plausible de ce mystère. Ceux que ma réponse ne satisfait pas pourront consulter par exemple le livre d’Emile Dallière 73 ou encore celui de René Pache 74.
72 Esaie 14 ; Ezéchiel 28.
73 Opus cité pp. 163 suiv.
74 Le retour de Jésus-Christ, éd. Emmaüs, St.-Légier s/Vevey, pp. 165 suiv.
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Quelqu’un pourrait s’étonner enfin que cette étude sommaire, cependant étendue à la plupart des textes des synoptiques, ne fasse jamais mention de l’évangile de Jean.
Ce n’est pas que cet évangéliste ignore le diable ou les démons (il les cite six fois dans son évangile). C’est que sa véhémence à leur endroit a pour cela la sobriété de ses propos. Comme le dit Frédéric Godet 75 : Conformément à l’appellation de “fils de tonnerre” donnée à Jean, ce disciple a des synthèses intactes de toute analyse... S’il doit jamais lutter contre l’erreur, il prononce sur elle un anathème et, au lieu de réfuter, il foudroie… Pour exemple : Celui qui pèche est du diable ; celui qui est né de Dieu ne pèche point 76.
75 Introduction au commentaire de l’évangile de Jean, p. 78, éd. Librairie française et étrangère, Paris, 1864.
76 1 Jean 3.8-9.
Par ailleurs, selon ce qu’en disent les Pères de l’Église, Jean est intéressé non à redire ce qu’avaient déjà raconté les synoptiques mais à compléter leurs récits et leur enseignement.
Enfin et surtout, à l’heure où ce disciple écrit (à la fin du premier siècle), l’Eglise est en lutte avec des tendances hérétiques. Aussi son combat porte-t-il moins sur une description du ministère de libération que sur les armes à donner aux serviteurs appelés à combattre contre les faux docteurs et les faux prophètes.
Il s’intéresse donc surtout à exposer la vérité contre laquelle se brisera finalement toute hérésie, autant au sujet de l’humanité qu’au sujet de la divinité du Christ.
Cette libération de l’hérésie, combien nécessaire aussi, est menée aujourd’hui par des chrétiens dont la plume et le verbe sont des armes puissantes de l’Esprit. Louons Dieu pour leur combat fidèle !
Le nôtre, sans l’ignorer, ne vise cependant pas l’ivraie des idéologies implantées dans le bon grain de la théologie. Nous en restons à des situations plus concrètes, à ce service connu hier sous le nom de cure d’âme, aujourd’hui plus communément sous celui de relation d’aide. Ce qu’a dit Jésus à Nazareth, nous avons à le pratiquer ; d’où notre intérêt prioritaire pour ce qu’avaient à nous apprendre les trois synoptiques 77.
77 Quelqu’un pourrait s’étonner de l’absence de toute référence à un enseignement des épîtres au sujet de l’exorcisme. Ce silence est déjà une réponse. En effet, dans les écrits apostoliques ne se trouve aucune instruction précise en rapport avec le ministère de délivrance. Cependant, on peut souligner que Pierre et Paul chassaient les démons. Outre les récits commentés au chapitre 5 de ce livre, il y a la référence d’Actes 19.11-12 : “Dieu faisait des miracles extraordinaires par les mains de Paul… les esprits malins sortaient”, confirmée par Romains 15.19 ; 2 Corinthiens 12.12 ; Jacques 2.19. On peut aussi mentionner l’avertissement d’avoir à se garder de l’idolâtrie et des pratiques occultes (1 Corinthiens 10.19-22 ; 2 Corinthiens 6.15-7.1 ; Galates 5.19 ; 1 Pierre 4.3). Ce qui est également souligné, c’est la part satanique dans l’hérésie, les fausses doctrines, les fausses prophéties (2 Thessaloniciens 2.3 ; 1 Timothée 4.1 ; 2 Timothée 2.26 ; 1 Jean 4.1-3 ; Jacques 3.14-16). Dans l’Apocalypse, les difficultés du temps de la fin sont mises en rapport avec la liberté laissée aux forces démoniaques de sévir sur la terre (Apocalypse 9.2-3, 13-15, 20-21 ; 12.7-12 ; 18.2).
Il faut certes la puissance d’En-haut pour être des témoins efficaces. Les disciples qui ont passé à l’action y avaient été formés par le Maître. Nous avons aussi besoin de cette formation. Cela ne signifie pas qu’elle soit réservée à des spécialistes. Elle est le privilège de tous ceux qui, dans la reconnaissance au Seigneur, veulent aimer et aider les autres, comme Dieu nous aime et nous aide.