Il y a environ deux cents ans que Richard Baxter publia sur le ministère évangélique un ouvrage qui a rendu d’importants services à la cause du christianisme, et dont les pages suivantes nous offrent la traduction.
Cet ouvrage n’était, dans sa forme primitive, qu’un discours prononcé à l’occasion d’un jour de jeûne qui fut célébré à Worcester, en 1655, par les ministres du comté, et à la suite duquel ceux-ci s’engagèrent solennellement à s’acquitter du soin de l’instruction personnelle envers tous les membres de leur troupeau.
Les ministres présents à cette solennité reçurent de ce discours une impression si profonde, qu’ils prièrent M. Baxter de traiter ce sujet avec plus de développements, et de publier son ouvrage sous la forme d’un appel à tous les ministres de l’Évangile. Le caractère et les talents de Baxter le rendaient éminemment propre à traiter des obligations et des devoirs du saint ministère non seulement il avait une longue expérience de cette vocation, mais encore la manière dont il s’était acquitté de sa charge, comme pasteur à Kidderminster, et le succès dont il avait plu à Dieu de couronner ses efforts le signalaient au choix de ses collègues comme l’homme le plus capable d’écrire avec force, avec profondeur et avec dignité, sur la responsabilité attachée aux fonctions du pastorat.
Cet ouvrage, à la composition duquel Baxter ne put, à cause de ses fréquentes maladies et de ses nombreuses occupations, donner autant de soin qu’il l’aurait désiré, parut sous le titre de Gildas Salvianus : ou le Pasteur Réformé.
Gildas et Salvien étaient deux écrivains du cinquième et du sixième siècle, distingués tous les deux par la fidélité de leurs enseignements et par la hardiesse de leurs exhortations. « Je n’ai point de prétention, dit Baxter, à la sagesse de Gildas ni à la sainteté de Salvien ; mais leurs noms serviront d’excuse à la candeur et à la franchise de mes paroles. Pourquoi, dans un rang inférieur, et avec un talent moins élevé, ne me serait-il pas permis de suivre leurs traces, ne fût-ce que de loin ? Haïs peut-être pendant leur vie, à cause de leur franchise et de leur sincérité, ils sont hautement estimés et approuvés après leur mort. Je puis donc, d’après ce précédent, espérer que mon ouvrage aura quelque succès, sinon pour le présent, du moins dans l’avenir. »
L’espoir de Baxter n’a point été trompé. Son ouvrage a eu un débit immense, et a été publié sous une grande variété de formes. Estimé des chrétiens des diverses dénominations, il a eu en Angleterre beaucoup d’éditions, dont l’une, revue et abrégée par le révérend docteur Brown, ministre presbytérien à Edimbourg, a été récemment publiée avec une excellente préface par le révérend Daniel Wilson, aujourd’hui évêque de Calcuttaa. « Je me réjouis, dit celui-ci, de rendre témoignage à l’excellence de ce livre. Membre de l’église épiscopale, je me sens particulièrement heureux de faire précéder de quelques lignes les pages chaleureuses et éloquentes de ce célèbre théologien non conformiste. » Le célèbre docteur Doddridge, professeur de théologie et ministre parmi les indépendants, dit : « C’est un ouvrage très remarquable, et que tous les jeunes ministres doivent lire avec soin avant d’être consacrés ; on ferait bien même d’en relire plusieurs parties tous les trois ans. Rien ne serait plus propre à réveiller dans l’esprit d’un pasteur ce zèle pour son œuvre, faute duquel plusieurs ministres, pieux du reste, ne sont que les ombres de ce qu’ils pourraient être par la bénédiction de Dieu. »
a – C’est sur l’édition du révérend docteur Brown que cette traduction a été faite.
Dans les conseils que donne Baxter pour l’accomplissement des devoirs pastoraux, il peut se rencontrer quelques détails qui ne seraient point en France d’une application immédiate. Certaines circonstances de localité ou d’organisation ecclésiastique peuvent s’opposer à ce que les directions de Baxter soient ponctuellement suivies. Mais malgré ces impossibilités de détail, qu’il serait le premier à reconnaître, les principes qu’il établit et les dispositions qu’il recommande ne peuvent manquer d’être appréciés et approuvés par la conscience de tous les fidèles serviteurs de Jésus-Christ, comme la lecture en est éminemment propre à alarmer et à réveiller ceux qui regardent le ministère chrétien comme une simple profession qui leur assure un rang honorable dans le monde, mais dont ils ne connaissent mi les glorieuses prérogatives ni la grave responsabilité. Lorsque Baxter publia le Pasteur chrétien, il exprima la confiance que la bénédiction de Dieu accompagnerait cet ouvrage. Il disait, peu de temps avant sa mort : « J’ai lieu de remercier Dieu du succès de ce livre, et de croire qu’il a fait du bien à un grand nombre d’âmes ; car il a encouragé plusieurs ministres à entreprendre sérieusement la tâche qu’il recommande. » — Pour nous, nous terminons aussi en exprimant l’espoir que cette traduction pourra, par la bénédiction divine, exercer comme l’original une heureuse et salutaire influence ; et nous dirons avec l’auteur : S’il plaisait à Dieu de réformer les ministres et de les disposer à remplir avec fidélité et avec zèle les devoirs de leur vocation, cette réforme s’étendrait infailliblement aux troupeaux ; car les églises prospèrent ou déclinent, selon que leurs pasteurs se distinguent, non par des honneurs et par des richesses, mais par leur savoir, par leur fidélité et leur zèle. »
Mark Wilks, 1841.