Analyse du parler en langues

Chapitre 2

Un message aux hommes ?

Nous allons nous en tenir, tout au long de cette étude, à cet excellent principe énoncé au chapitre 1 par D. Cormier : “L’esprit qui est en contradiction avec les Écritures, ne peut être le Saint-Esprit”. Il a permis aux pentecôtistes conservateurs de débusquer les graves erreurs de leurs semblables charismatiques et d’en conclure :

Les manifestations surnaturelles (chez les charismatiques) sont un signe leur disant qu’ils n’ont rien à craindre, qu’ils sont dans la bonne voie alors qu’ils marchent dans l’erreur… Ces manifestations elles-mêmes reproduisent plus on moins fidèlement celles que l’on trouve dans le Nouveau Testament. C’est pour cela que l’on peut parler avec raison de contrefaçon” (Analyse du renouveau charismatique, Page 15).

On ne peut qu’applaudir à cette clairvoyance biblique pour autant qu’on ne l’applique pas qu’aux autres. Car, s’ils scrutaient leur propre doctrine avec la moitié moins de rigueur qu’ils ne l’ont fait envers les charismatiques, ils verraient que, comme ils le disent si bien : “Croire qu’on est dans la bonne voie grâce aux signes, aux miracles, au parler en langues”, c’est aussi l’essentiel de ce qui fait leur foi, leur force et leur sentiment de sécurité. Par exemple, quand la croissance rapide du mouvement qu’ils condamnent est attribuée aux manifestations spirituelles, n’est-ce pas précisément d’elles qu’ils se vantent ou se réclament pour expliquer et justifier leur croissance plus rapide que celle des évangéliques ? “Mais nous sommes bibliques, nous !” entendons-nous dire. Nos pratiques sont conformes au modèle scripturaire !

Un modèle scripturaire ?

C’est ce que nous allons commencer par examiner dans ce deuxième chapitre. Que lit-on dans la Bible à propos de l’exercice véritable du parler en langues ? : “Celui qui parle en langues ne parle pas aux hommes mais à Dieu” (1 Corinthiens 14.2). C’est ce que, de façon péremptoire, Paul, le plus grand docteur de l’Église et de surcroît conduit par l’Esprit, enseignait aux Corinthiens : “...il ne parle pas aux hommes…”. Ce texte à lui tout seul fait vaciller toute la caractéristique pentecôtiste et lézarde son système jusque dans ses fondements. Le Saint-Esprit lui-même, auquel on ne résiste pas sans risque, précise que ce n’était pas à des hommes que les paroles dites en langues, étaient adressées mais à Dieu. À l’instar des Béréens (Actes 17.11) qui sondaient chaque jour les Écritures pour savoir si ce qu’on leur disait était exact, rien n’est plus facile que de les examiner pour savoir si ce qui se dit dans le mouvement de Pentecôte, sur ce point précis, est exact. Après plus de trente années de contacts étroits avec eux et après avoir épousé certaines de leurs idées, j’ai bien été forcé d’admettre qu’il y avait sur ce point un désaccord flagrant avec ce que dit la Parole de Dieu. Je me suis d’abord incliné devant son autorité, puis je suis passé à une vérification plus poussée sur le terrain. À des frères bien ancrés dans leur conviction, j’ai plusieurs fois posé la question : “Quand, dans votre Église, un parler en langue est interprété, de quoi s’agit-il ?” Je ne posais pas la question parce que je ne connaissais pas la réponse, mais pour avoir, de leur propre bouche, une réponse nette qui ne laissait aucune place à l’ambiguïté. Sans aucune exception, les réponses allaient dans le sens de ce que j’avais toujours constaté : c’est une parole d’encouragement, ou une prophétie, ou une exhortation, ou même une évangélisation. Cela s’adressait forcément aux auditeurs présents, aux hommes, et c’était, par voie de conséquence, en totale contradiction avec le Saint-Esprit qui a dit au contraire : “Celui qui parle en langues, ne parle pas aux hommes”. En bref, l’exercice d’un don qui n’est pas conforme à l’Écriture ne peut pas venir de l’Esprit de Dieu mais plutôt, comme ils le disent si justement à propos de leurs frères charismatiques, d’un esprit étranger. Après avoir reçu les réponses que je viens de rapporter, je faisais voir à mes interlocuteurs ce qu’en disait la Bible. Certains étaient comme effondrés devant ces paroles limpides qu’ils n’avaient jamais vues ou qu’on leur avait toujours cachées. Les plus intelligents mesuraient en un instant l’ampleur du désastre doctrinal qui les atteignait : un vrai Waterloo.

Empêché de voir

Chez beaucoup d’autres, par contre, je constatais comme une incapacité à saisir le sens de ces paroles pourtant claires : “…il ne parle pas aux hommes”. Il y avait comme un voile mis sur leur intelligence. Ils disaient : “Mais bien sûr que c’est comme ça !” tout en étant incapables de voir que leur “comme ça”, ce n’était pas du tout ça, c’était même le contraire. Au départ, il n’y avait chez eux aucun esprit de dérobade mais un empêchement de voir. Ils lisaient bien “ne parle pas aux hommes” mais ils semblaient comprendre à l’envers, répondant que Dieu devait bien parler à son Église par ce moyen-là, certains allant jusqu’à dire : “Comment Dieu nous parlerait-il si ce n’est par ce moyen-là ?

Un de mes amis, un pasteur enthousiaste, m’a invité pour une campagne d’évangélisation dans son église. Il m’a parlé d’une dame qui, dans une conversation privée avec lui, avait parlé en langues. “Dans ce qu’elle a dit”, a-t-il expliqué, “j’ai discerné un message pour moi”. L’occasion était idéale. Je lui ai simplement demandé, “Comment conciliez-vous l’idée d’un message vous étant adressé personnellement avec la déclaration biblique que « … pour celui qui parle en langue ne parle pas aux hommes, mais à Dieu » ? Vous n’êtes pas Dieu !” Il était comme quelqu’un qui venait de recevoir un coup sur la tête. Il était totalement muet. Il venait de découvrir un texte qu’il n’avait jamais vu auparavant, ou qu’il n’avait pas pris le temps d’examiner. Il a eu un air si pitoyable que je l’ai plaint. Je ne lui ai pas dit que ces langues adressées aux hommes sentaient l’hérésie. Je ne lui ai pas dit non plus qu’il s’agissait d’un tour ou d’un canular. Non, je l’ai laissé découvrir par lui-même qu’il s’était heurté à une erreur spirituelle évidente. 1

1 Paragraphe intégralement repris de la dernière version en anglais, seule version où il figure.

Mon plus récent entretien sur le sujet est révélateur de cet aveuglement. Je me suis aperçu que citer le texte verbalement était insuffisant. Mon interlocuteur suivait son idée et restait imperméable à la Parole de Dieu. Je me suis assis à côté de lui, Bible ouverte, et je lui ai fait lire le texte à haute voix. Rien n’y faisait. Je m’y suis repris plus de dix fois. Tout à coup, le déclic s’est fait. Il a compris de quoi il s’agissait. C’est alors que son vrai problème a débuté. Il commençait à mesurer la portée de cette vérité qui enfonçait sa position comme l’iceberg dans le flanc du Titanic avant de l’envoyer par le fond. Pauvre ami, qui heurtait de front une Bible qui disait le contraire de ce qu’il croyait tellement bien connaître. Pour se sortir de ce mauvais pas, il ne lui restait d’autre issue que de m’opposer le sable mouvant de ses expériences. Dans mon premier ouvrage sur les langues, j’ai rapporté la confrontation qui eut lieu entre un frère à l’œuvre des Assemblées de frères (ex dites “darbystes”) et mon voisin, pasteur de la Pentecôte. Ce dernier ne fit vraiment pas le poids. Acculé à reconnaître que son opposant avait raison, il ferma sa Bible, la poussa de côté et dit : “Bibliquement vous avez raison, mais je ne peux pas renier une expérience !”. Tout était là, dans le geste et dans la parole. La Bible mise de côté et l’expérience mise en avant. Trente ans plus tard, rien n’a changé. Comme le dit D. Cormier déjà cité plus haut : “Nous vivons dans un monde où l’on ne croit plus à la vérité absolue, mais à des vérités relatives subordonnées à l’expérience humaine où l’accent est davantage mis sur l’expérience que sur la doctrine. Parler en langues, ressentir une paix intérieure est plus important que de connaître la saine doctrine”.

Le dernier entretien auquel je fais allusion s’est terminé de la même façon que le premier. Après avoir, une fois de plus, fait remarquer à mon interlocuteur que son expérience personnelle et son observation du parler en langues dans son Église s’adressait bien à des hommes, à l’inverse de ce que dit la Bible, je lui ai demandé : “Qu’allez-vous mettre de côté, la Parole de Dieu ou votre expérience ; vous devez faire un choix entre les deux ; quel est-il ?”. Sans hésitation et deux fois de suite, la réponse a été : “Je choisis l’expérience !”. Compréhensible mais malheureuse obstination qui s’explique par ce terrible aveu d’un pasteur à propos de cet enseignement biblique sur ce point particulier du parler en langues : “Quand cette parole de Paul a commencé à circuler dans nos Assemblées, ça a fait l’effet d’une bombe. L’idée n’a pas été retenue car il aurait fallu admettre que TOUT CE QUI S’ÉTAIT FAIT JUSQU’ICI ÉTAIT EAUX !

C’est faux, bien sûr, mais on fait en sorte que ça ne se sache pas ou que ça ne le paraisse pas. Comment s’y prend-on ? Il y a quatre moyens d’y arriver.

1. En mettant démesurément l’accent sur les expériences. Par exemple :

La source est intarissable. De tels témoignages, rapportés avec aplomb, conditionnent les auditeurs, les néophytes surtout, au point de les prémunir contre toute découverte ultérieure de la vérité. Nous développerons plus longuement le sujet des expériences au chapitre 12.

2. Le deuxième moyen c’est d’escamoter le texte, comme l’a dit ce pasteur, en ne retenant pas cette pensée trop dérangeante. C’est ce que faisaient les rabbins avec le chapitre 53 d’Ésaïe lors de la lecture méthodique de la loi et des prophètes dans les synagogues. Quand ils arrivaient à la fin d’Ésaïe 52, ils sautaient à Ésaïe 54 ! J’atteste qu’en plus de trente ans de contacts, d’entretiens, de débats, d’échanges fraternels et de collaboration avec les milieux concernés, ce texte a toujours été soigneusement évité. Dans son livre en anglais “Vingt et une raisons pour parler en langues”, Gordon Lindsay (à ne pas confondre avec Hal Lindsay), à sa onzième bonne raison dit que c’est pour parler à Dieu, et élude sans autre le gênant “ne parle pas aux hommes”. Ce “silence” accrédite l’idée que l’un et l’autre sont également bons.

3. Le troisième moyen, c’est de hausser les épaules et de traiter la chose comme quantité négligeable, avec une largeur de vue qui transforme le Saint-Esprit en girouette : “Bien sûr que la Bible dit cela, mais qui peut sonder les desseins de Dieu ; n’est-Il pas souverain ; ne peut-Il pas se servir de ses dons et les employer comme Il le veut ?”. On voit où cela peut conduire. À toutes les hérésies du monde, à redonner la parole au Perfide et à sa première suggestion : “Dieu a-t-Il réellement dit ?”. Tous les maux de l’humanité ont commencé là ! Je me méfie d’une certaine largeur de vue sur la Souveraineté de Dieu qui enlèverait toute souveraineté à sa Parole. Car si les insondables richesses de son amour et de sa sagesse peuvent donner un parler en langues qui s’adresse aux hommes, elles peuvent aussi nous avoir donné une reine du ciel, une co-rédemptrice, un ciel à mériter et une kyrielle de saints à invoquer.

4. Le quatrième moyen, c’est de trouver une parade à tout prix ; de plonger dans la Bible à la recherche d’un mot, d’une allusion qui mette le Saint-Esprit en conflit avec lui-même, afin de respirer plus à l’aise. Chacun sait qu’à ce jeu-là, on peut faire dire à la Bible tout ce qu’on veut. En fait, presque toutes les hérésies ont trouvé leur origine dans la Bible. Au risque d’exposer son âme à la ruine en tordant le sens des Écritures comme le dit 2 Pierre 3.16, à quel texte va-t-on se raccrocher pour tenter de faire dire à la Parole le contraire de ce qu’elle dit ? Certains croient l’avoir trouvé en 1 Corinthiens 14.21 : “C’est par des hommes d’une autre langue que je parlerai à ce peuple”. Si Dieu parle à ce peuple par le moyen du parler en langues, c’est donc qu’il s’en sert pour parler aux hommes. Remarquons d’abord que si tel était le sens à donner à ces paroles, la contradiction entre les deux textes serait totale. Il suffit de se rappeler que tous les signes, quels qu’ils soient, parlent aux hommes. C’est selon Hébreux 1.1, une des “plusieurs manières” dont Dieu se sert pour nous parler. C’est ce qu’il a fait en Jean 17, où nous trouvons ce qui a été appelé à juste titre, la prière sacerdotale. Au premier degré, c’est exclusivement à son Père seul que Jésus s’adressait. Mais au second degré, sans nous adresser un seul mot, c’est à nous qu’il parle Cette prière à son Père nous parle de ses requêtes, de ses sentiments intimes, de son caractère personnel, de son intercession pour nous, et par-dessus tout de notre grand Souverain Sacrificateur. Ainsi en était-il de ces langues étrangères. Par elles, ceux qui les parlaient s’adressaient à Dieu, mais cela était très “parlant” pour ce peuple, en le renseignant dès le départ sur cette notion toute neuve qu’était le baptême de toute langue (ou toute chair) dans un même Esprit. De cette adoration en langues étrangères, Dieu, comme il le précise au verset 21 de 1 Corinthiens 14, allait s’en servir comme signe (ou pour faire signe) à à CE PEUPLE qui justement demandait des signes et des miracles (1 Corinthiens 1.22). De quoi ce signe leur parlait-il ? Puisque c’était un signe constitué avec des langues, le plus logiquement du monde, cela leur parlait d’une affaire de langues ; de langues qualifiées d’étrangères dans le même verset. Pour Dieu, il s’agissait simplement de dire à CE PEUPLE, son peuple d’Israël, que les étrangers et les langues dont ils étaient porteurs, avaient désormais le même accès qu’eux au Dieu d’Israël au point de pouvoir Lui parler comme eux le faisaient. Voilà de quoi ce signe leur parlait sans toutefois jamais s’adresser à eux verbalement. C’est ce qu’explique magistralement Pierre dans son mémorable discours du jour de la Pentecôte. À leur question : Ça veut dire quoi de parler dans ces langues étrangères ? Il donna la réponse de Dieu : “Je répandrai de mon esprit sur TOUTE CHAIR”, comprenez sur toutes langues, tous peuples, toutes tribus et toutes nations. Ce signe allait devenir très “parlant” pour ces Juifs qui n’avaient pas encore saisi la vocation des païens, ces gens aux langues étrangères.

Vérification biblique

Il n’est pas superflu de rappeler que, contrairement à ce que beaucoup pensent, la grande foule assemblée ce jour-là n’était pas composée de païens, d’étrangers ou de gens des nations (de Gentils où Goïm comme on les appelle ailleurs), mais de JUIFS venus de ces quinze pays étrangers. Avez-vous votre Bible bien ouverte devant vous ?

Lisons Actes 2.5 : “Or, il y avait en séjour à Jérusalem des… des quoi, des païens ?! non, des JUIFS, hommes pieux, de toutes les nations qui sont sous le ciel”.

Passons au verset 14 : “Pierre se présentant avec les onze, éleva la voix et leur parla en ces termes : Hommes d’entre les nations ?! non, Hommes JUIFS”.

Allons au verset 22. Pierre continuant à parler à la foule y ajoute cette précision : “Hommes ISRAÉLITES”.

Plus loin, au verset 29, il enchaîne par “Hommes FRÈRES”, appellation qui ne laisse planer aucun doute sur leur identité.

Et au verset 37, cette foule retourne le compliment aux apôtres JUIFS en ces termes : “Hommes FRÈRES, que ferons-nous ?

Outre que cela soit dit clairement et répété cinq fois, il tombe sous le sens que seul des juifs pieux venant de loin et à grands frais, allaient à la grande fête annuelle des juifs à Jérusalem. Cela n’intéressait qu’eux et quelques prosélytes convertis au Judaïsme. On ne voit pas des Français se déplacer en foule à Berne chaque 1er Août pour la fête nationale Suisse. Ni l’inverse pour le 14 Juillet à Paris, pas plus que les Européens ne traversent l’Atlantique exprès pour fêter l’Indépendance Day aux Etats-Unis. De même la Pentecôte était une fête purement juive et réservée aux juifs. Étant tous des juifs qui connaissaient l’Araméen, ils ont tous compris ce que leur prêchait Pierre dans cette langue (la sienne, la leur) sans qu’il fut besoin d’en parler quinze autres.

Il ne nous reste maintenant plus qu’à vérifier ce que l’Écriture dit de chaque occasion où un parler en langues nous est rapporté. Nous allons faire appel aux meilleurs auteurs pentecôtistes pour démontrer, à l’aide de leurs écrits, qu’en aucun cas il n’y eut jamais une seule parole adressée aux hommes bien que le signe fut donné à leur intention.

Donald Gee écrit : “Notre information, en ce qui concerne la manifestation donnée aux croyants lorsqu’ils sont baptisés de l’Esprit, se limite strictement aux cas relevés dans les Actes” (Glossolalia, Page 101). Cela veut dire qu’il ne veut prendre en considération aucune expérience autre que celles contenues dans la Parole de Dieu.

I. En Actes 2, il est dit qu’en de multiples langues réelles et contemporaines, on les entendait “parler des merveilles de Dieu". Beaucoup ont cru, à tort, qu’il s’agissait là de la prédication de l’évangile qui a amené trois mille personnes au salut. Un examen, même rapide, de ce chapitre montre que le parler en langues de ce jour-là n’a fait que soulever des questions ; c’est la prédication de Pierre, non pas en langue, qui a amené cette foule au salut. Donald Gee est indiscutablement le maître à penser des pentecôtistes. Il a tenté de mettre un peu d’ordre dans le mouvement au niveau des idées et de lui donner une doctrine tant soit peu cohérente. Pour la fraction modérée, il fut l’homme le plus écouté de sa génération. Dans son livre Les dons spirituels, voici ce qu’il dit du parler en langues de la Pentecôte : “Le jour de la Pentecôte, ils parlaient tous en langues avant que la foule se rassemble. Au bruit qui eut lieu, la multitude accourut. Ils surprirent leur propre dialecte dans la bouche des disciples qui annonçaient les merveilles de Dieu. Il est clair que cette foule entendit des paroles QUI NE LUI ÉTAIENT PAS ADRESSÉES. Quand le moment de prêcher fut venu, ce fut Pierre seul qui s’adressa à la foule pendant que les onze se tenaient avec lui. Il usa du langage commun à tous afin que tous puissent le comprendre… Ainsi est contredite l’assertion erronée et séculaire du don pour la prédication de l’évangile aux païens”.

Dennis Bennett est un homme renommé par ses écrits dans le pentecôtisme. Voici ce qu’il dit sur le même sujet : “Il est surprenant de constater combien de chrétiens, même fondés, pensent que les langues parlées à la Pentecôte l’étaient pour proclamer l’évangile dans les langues de ces gens qui écoutaient parce qu’ils venaient “de toutes les nations qui sont sous les cieux”. Mais ce que dit ce passage, c’est “qu’il y avait en séjour à Jérusalem DES JUIFS de toutes les nations”. C’était simplement des Juifs qui vivaient dans d’autres pays et qui étaient montés à Jérusalem pour la fête. Ils n’avaient pas besoin qu’on leur parle des langues étrangères. Ce qu’ils ont entendu n’était pas une proclamation de l’évangile, mais ils entendirent ces premiers chrétiens, LOUANT ET GLORIFIANT Dieu pour les merveilles qu’Il avait faites (verset 11)”.

Venant d’hommes aussi considérés ces témoignages sur ce point précis sont déterminants et nous marquons notre accord avec eux. Ce qui s’est dit en langues ne s’adressait pas aux hommes mais à Dieu.

II. La seconde relation apparaît à la conversion du centenier Corneille et de ceux de sa maison (Actes 10). La nature de cette glossolalie est identique à la première puisque Pierre nous y renvoie en disant aux apôtres à Jérusalem : “…le Saint-Esprit descendit sur eux comme sur nous au commencement”, et il ajoute cette précision : “Dieu leur a accordé le même don qu’à nous qui avons cru au Seigneur Jésus” (Actes 11.15-17).

III. La troisième et dernière mention du parler en langues en Actes 19.6 (la conversion des douze disciples de Jean-Baptiste) ne nous dit rien de plus.

IV. La quatrième preuve se trouve dans les textes qui servent de base à cette étude, le chapitre 14 de la première lettre aux Corinthiens. Comment Paul voit-il la chose ? Il n’y voit que prier, chanter et rendre grâce en langues (versets 15 et 16). Rien d’autre que la prière et la louange n’apparaît dans son enseignement sur les langues. Sans contredit possible, la prière et la louange ne s’adressent qu’à Dieu. On ne peut donc jamais y trouver un message destiné à des hommes.

V. La cinquième preuve est dans le verset-clé de ce chapitre. Il porte avec lui sa propre conclusion : “Celui qui parle en langues ne parle pas aux hommes mais à Dieu” (1 Corinthiens 14.2). Sur un point aussi capital, la pratique pentecôtiste de ce don est déjà en complet porte-à-faux. C’est au moins aussi faux que la glossolalie de leurs jumeaux charismatiques. Nous l’avons lu : “Une expérience, le “baptême du Saint-Esprit” qui entraîne les âmes à pratiquer le contraire de ce que dit l’Écriture, n’est pas du Saint-Esprit.” Comme le descellement de la clé de voûte d’une ogive surbaissée entraîne ipso-facto la dislocation de tout l’ouvrage, cette première erreur sur le sujet des langues, fait aussi s’écrouler tout le système (2) d’un seul coup.

(2) Par “système” il ne faut entendre ici que ce qui, chez les frères pentecôtistes, se rapporte au don des langues. Aucun jugement n’est porté sur leur position fondamentale que d’ailleurs nous partageons. Nous ne contestons pas leur prédication de l’évangile souvent très biblique, ni la sincérité d’un grand nombre d’entre eux, ni leur zèle, ni leur qualité d’enfants de Dieu.

Comme une partie crevassée qui menace ruine et fait saillie dans un mur élevé, dont l’écroulement arrive tout à coup, en un instant : il se brise comme se brise un vase de terre, que l’on casse sans ménagement, et dont les débris ne laissent pas un morceau pour prendre du feu au foyer, ou pour puiser de l’eau à la citerne” (Ésaïe 30.13-14).

Il n’est pas superflu de rappeler cette réflexion citée plus haut : “Quand cette parole de Paul (…pas aux hommes, 1 Corinthiens 14.2) a commencé à circuler dans nos Assemblées, ça a fait l’effet d’une bombe. Elle n’a pas été retenue car il aurait fallu admettre que TOUT CE QUI S’ÉTAIT FAIT JUSQUE-LÀ ÉTAIT FAUX !”.

Si pour nos amis pentecôtistes conservateurs, le don qu’ils ont passé aux autres sent le soufre, nous débouchons aussi sur l’incontournable évidence que leur glossolalie est aussi anti-scripturaire et de la même nature que celle qu’ils ont communiquée aux charismatiques catholiques par l’imposition de leurs mains.

Tentative de replâtrage

Le parler en langues — adoration ou prière ?

Avant de passer à l’erreur suivante, on ne peut pas ne pas dire un mot sur les Églises pentecôtistes qui ont fait volte-face sur ce point. Dans leurs réunions la pratique du parler en langues se continue mais, sur commande, l’interprétation s’est transformée en louange ou en prière. Que faut-il en penser ? S’ agit-il d’un courageux retour à plus de vérité ? À ce stade peu avancé de notre étude, la réponse ne serait que partielle au point d’en paraître partiale. Les chapitres suivants nous montreront d’autres aspects volontairement méconnus sur le sujet et nous permettrons de donner un avis définitif. Mais déjà on est obligé de constater que là où il y a eu rectification, rien n’est changé que l’interprétation. Le parler en langues, lui, est resté pareil à ce qu’il était avant : ce sont les mêmes gens, les mêmes articulations bizarres, les mêmes intonations et surtout, nous y reviendrons, les mêmes décalages chronologiques inacceptables entre l’énoncé en langue et le temps de son interprétation. En fait, c’est comme une chaîne de montage d’automobiles ayant des vices de fabrication et où, sans remédier aux défauts, on aurait décidé que le dernier coup de pistolet serait différent. Vernie de la sorte, cette “nouvelle” génération de parler en langues paraît plus biblique en bout de chaîne, mais reste aussi éloignée de la Bible et aussi défectueuse que l’autre quant au fond. L’esprit qui l’anime est le même. Son interprétation finale (3), soumise comme l’autre à tout l’enseignement apostolique sur le sujet, ou à une simple observation impartiale et objective, démontrera à suffisance dans quelle catégorie il faut la classer.

(3) Sujet traité au chapitre 6.

En 1990, c’est justement dans une Église de ce type que, récemment encore, j’ai été invité à faire une campagne d’évangélisation. Quelques années auparavant ils s’étaient séparés des Assemblées de Dieu sur la base d’une mondanité grandissante et d’excès de toutes sortes dans l’exercice des dons spirituels. Ils avaient compris que, selon 1 Corinthiens 14.2, le don d’interprétation qui contenait un message aux hommes (c’était presque toujours le cas) n’était pas du Saint-Esprit. Ce type d’interprétation fut abandonné, même condamné et obligatoirement remplacé par des paroles de prière ou de louange à Dieu. Ils s’étaient rapprochés des non-charismatiques et quelque peu assagis dans leurs réunions. Ce dimanche matin, au culte, une femme partit en langue, sur un mode plaintif au début, puis sur un tempo de plus en plus accéléré pour se terminer par des cris aigus. Elle répétât “Ding-ding-dou” vingt, trente fois ou plus. Cela fut suivi d’une interprétation qui était une très commune exhortation à l’Assemblée à se préparer à la Sainte-Cène.

Après la réunion, ma femme et moi, dès le premier regard, et sans nous concerter nous avons éclaté de rire (nous aurions plutôt dû pleurer) et nous nous sommes exclamés en même temps : “Les Cloches de Corneville !” où le chœur reprend et répète l’air célèbre du “Ding-Ding-Dong”. Quelques instants après, le pasteur nous rejoignit, visiblement contrarié, non pas à cause du fantaisiste parler en langue mais du miracle de l’interprétation qui s’était transformé en message aux hommes au lieu d’être une parole adressée à Dieu comme l’enseigne l’Écriture. Il nous dit : “Il faut excuser ce frère, il vient de quitter les Assemblées de Dieu et il n’est pas encore au courant de la bonne façon de faire”. Où était donc le Saint-Esprit dans tout cela ? N’était-ce pas plutôt un autre “esprit” qui animait ces deux personnes, esprit qui, lui, n’était pas au courant de la bonne façon de s’y prendre ? Je lui en fis la remarque, et cela ne fit que l’accabler davantage. Où était le vrai Saint-Esprit dans tout cela ? Ce soir-là, nous nous sommes quittés, apparemment en bons termes, mais il ne m’a plus jamais invité dans son église.

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