Non au yoga

I
Dix ans après…

L’homme est de naturel religieux. La foi chrétienne ne flatte pas ce « naturel ». Elle le combat plutôt. Elle en dévoile l’état corrompu et corrupteur. Ce que l’homme n’apprécie guère. C’est pourquoi il préfère la religion à la foi en Christ. Alors que la première est accommodante, la foi l’invite à la repentance et lui révèle les exigences d’une vie nouvelle.

Nul lieu de s’étonner donc si, pour de très nombreux « croyants », le refus de toute compromission avec l’occultisme et ses pratiques passe pour de l’étroitesse d’esprit, même du sectarisme.

En 1959, j’écrivais le livre paru sous le titre « L’occultisme à la lumière du Christ ». Aujourd’hui, je peux faire une triple constatation.

De nombreux chrétiens, découvrant qu’ils avaient, par ignorance, confondu foi en Christ et pratiques de l’occultisme, ont rompu absolument avec ces dernières. Ils seraient nombreux à dire les bienfaits — physiques, moraux, spirituels, personnels, conjugaux, familiaux, sociaux — qu’il en est résulté pour eux, souvent aussi pour leurs proches.

Deuxièmement, des personnes intriguées par le sujet, en ont découvert l’importance ; par comparaison, elles ont mieux saisi le caractère unique de la révélation chrétienne et se sont laissé convaincre.

Plusieurs, parmi les chrétiens adultes ou nouvellement venus à la foi, devraient ajouter que leur libération a dû passer par le chemin de l’exorcisme. On ne pactise jamais impunément avec le prince du monde des ténèbres. Toute compromission avec lui se solde par des droits qu’il aime à garder sur nous. Il ne cède que devant l’intervention effective du Christ libérateur. Soit dit en passant, cela explique le fait — trop rarement relevé — que le pouvoir de chasser les démons ait été le premier ministère confié par Jésus à ses disciples.

Troisièmement, de nombreux croyants dont la foi puise à d’autres sources qu’à celle de la seule vérité scripturaire, ont tenu ma prise de position farouchement opposée à l’occultisme pour une singularité. Ils m’ont laissé à « mes idées personnelles » et ont gardé… les leurs ! Sans devenir nécessairement des contradicteurs, ils ont estimé qu’une opposition aussi déclarée à l’égard de toute pratique relevant de l’occultisme s’apparentait à quelque… isme abhorré — légalisme, fondamentalisme, littéralisme… — et ils ont tourné la page, quand encore ils avaient pris la peine de la lire.

En d’autres termes, dans leur vie personnelle, dans la vie de leur communauté ou de leur paroisse, ils n’ont jamais porté réelle attention à l’occultisme, à ses influences et implications. Résultat : parfois ouvertement, parfois sous des déguisements religieux, l’occultisme a pu continuer son travail de sape ou de corruption de toute spiritualité chrétienne authentique.

C’est ainsi que dans l’espace de ces dix dernières années, il a gagné à sa cause des milliers d’adhérents sous une forme séduisante, attractive même, en tout cas nouvelle pour les Occidentaux alors qu’elle est des plus communes en Orient : le yoga.

C’est au point qu’il n’est pas de semaine où, dans la grande presse, illustrée ou non, sous une rubrique ou sous une autre, quelqu’un ne vous explique, ne vous recommande les pratiques et les bienfaits de cette nouvelle panacée : yoga chez soi, yoga à l’école-club, ski-yoga, santé par le yoga, yoga pour tous, yoga pour soi, gastronomie et yoga, etc. etc…

Sans l’ombre d’un doute ou d’un peu d’humour, même avec photographie à l’appui, un grand journal romand du 26 juillet 1968 disait : « C’est à bord de son avion privé que le Maharischi Yogin est arrivé hier en fin d’après-midi à Genève. Le Maharischi Yogin, qui a déjà notamment converti les Beatles, les Rolling Stones et Shirley Mac Laine, inaugurera à Genève le centre international de la méditation. Une conférence de presse donnée peu après sa descente d’avion a permis au Maharischi Yogin de prendre un premier contact avec la cité de Calvin. »

Pourquoi pas ?

On souhaiterait qu’à ce contact, le Maharischi Yogin découvre… l’abîme séparant son témoignage de celui d’un Calvin et de celui des chrétiens instruits de la seule vérité scripturaire.

Encore y aurait-il lieu de se demander si les protestants qui se veulent fils de la Réforme sauraient expliquer avec clarté — à ce Yogin-là, à un autre, ou à leurs adeptes — la raison de cet abîme…

En effet, on assiste aujourd’hui à de singuliers renversements. La « nouvelle (?) théologie » en est à mettre la méditation au rang de pratique surannée, même d’aliénation. Autre exemple typique : Un « club œcuménique et culturel » genevois prévoit au cours de la Semaine de l’Unité une brève prière commune à 8 h. 30 le matin ; café et croissants seront ensuite servis, avec la promesse qu’à 9 heures chacun pourra être à son travail. On mesure ainsi le temps donné à cette prière commune, la seule inscrite au programme de toute l’année. Par contre, une heure de yoga est proposée chaque semaine aux membres du club… Au reste, le fer de lance d’un certain christianisme actuel n’est plus la prière et encore moins la méditation, mais l’action. Dans ce même temps, c’est un Yogin qui inaugure à Genève, un centre international de méditation…

Et ce n’est pas tout. Il est des paroisses appelées réformées évangéliques où vous chercherez en vain une étude biblique à la tabelle des activités ecclésiastiques hebdomadaires ou mensuelles. Par contre, on y encourage les paroissiens à s’inscrire au cours de gymnastique yoga…

Dans ces paroisses-là, comme du reste dans les communautés chrétiennes non officielles, des chrétiens s’interrogent.

Doivent-ils dire oui à cette opinion générale — et qui tend à se généraliser — selon laquelle le yoga est une bonne chose, d’autant plus recommandable qu’elle est l’antidote nécessaire à la vie trépidante que nous menons ?

Ils ont eu parfois à souffrir d’une piété étriquée.

Ils souhaitent, eux les premiers, s’affranchir des préjugés qui ont quelquefois entaché la chrétienté contemporaine. Ils seraient donc attentifs à un mouvement du Saint-Esprit qui viendrait donner force et vie à leur volonté de témoignage. Ils ont entendu dire — peut-être même l’ont-ils lu — qu’il existe un cours de yoga chrétien en dix leçons (sic). Et si c’était là que soufflait l’Esprit ? Alors, chrétiens bien intentionnés et ignorants, ils se disent qu’ils ne risquent rien à essayer. Et ils s’engagent… parfois encouragés par leurs bergers.

D’autres, prudents, méfiants, s’interrogent, enquêtent. Les réponses reçues ne sont généralement pas à la mesure de leur juste curiosité. Elles se situent entre l’enthousiasme… et la menace du péché contre le Saint-Esprit, en passant par le « Je n’ai pas d’opinion à ce sujet ». Autant dire que la plupart ne savent pas — le mot est à sa place — à quel saint se vouer !

D’aucuns se souviennent qu’en ce pays, quelqu’un s’est intéressé à ces questions, en a parlé, en a écrit.

Ils pensent alors à lui écrire à leur tour et imaginent qu’en trois lignes, il va leur donner feu vert… ou rouge.

Si les choses étaient si simples…

C’est devant la répétition de ces demandes d’explication, de justification, de permission, que je me suis décidé à écrire ces pages.

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