Alors Antoine, comme si Dieu lui-même eût rappelé à son esprit le souvenir des saints, et comme si la lecture eût été faite pour lui seul, sortit à l’instant de l’église, et toute la fortune que lui avaient laissée ses parents, et qui consistait en trois cents arpents de bonnes terres, il en fit don aux habitants du village, afin que sa sœur et lui fussent débarrassés de toute espèce de soin ; tout le mobilier qui leur appartenait, il le vendit, et après en avoir retiré une somme assez considérable, il la distribua aux pauvres, n’en réservant qu’une faible part pour sa sœur. Mais étant entré de nouveau dans l’église, il entendit le Seigneur qui disait dans l’Évangile : « Ne vous inquiétez pas du lendemain. (Math., vi, 34.) » Il ne put rester plus longtemps ; il sortit et donna ce qui lui restait à des gens peu aisés. Pour lui, après avoir confié sa sœur à des vierges d’une foi et d’une piété reconnues, pour être élevée dans leur chaste demeure, il s’adonna près de sa maison à la vie ascétique, veillant sur lui-même et se traitant avec rigueur. Il n’y avait pas encore à cette époque de véritables monastères en Égypte, mais celui qui voulait travailler à sa perfection s’y exerçait à part en se retirant à quelque distance de son village.