(23) Ainsi, c'est l'absence, à la base de l'histoire, de toutes annales antérieures, propres à éclairer les hommes désireux de s'instruire et à confondre l'erreur, qui explique les nombreuses divergences des historiens. (24) En second lieu il faut ajouter à celle-là une cause importante. Ceux qui ont entrepris d'écrire ne se sont point attachés à chercher la vérité, malgré la profession qui revient toujours sous leur plume, mais ils ont fait montre de leur talent d'écrivain ; (25) et si par un moyen quelconque ils pensaient pouvoir en cela surpasser la réputation des autres, ils s'y pliaient, les uns se livrant aux récits mythiques, les autres, par flatterie, à l'éloge des cités et des rois. D'autres encore s'adonnèrent à la critique des événements et des historiens, dans la pensée d'établir ainsi leur réputation. (26) Bref, rien n'est plus opposé à l'histoire que la méthode dont ils usent continuellement. Car la preuve de la vérité historique serait la concordance sur les mêmes points des dires et des écrits de tous ; et, au contraire, chacun d'eux, en donnant des mêmes faits une version différente, espérait paraître par là le plus véridique de tous. (27) Ainsi pour l'éloquence et le talent littéraire nous devons céder le pas aux historiens grecs, mais non point aussi pour la vérité historique en ce qui concerne l'antiquité, et principalement quand il s'agit de l'histoire nationale de chaque pays.