9 Que le frère qui est de basse condition se glorifie de son élévation, 10 et le riche de son abaissement, parce qu’il passera comme la fleur de l’herbe ; 11 car à peine le soleil ardent s’est-il levé qu’il a séché l’herbe, et sa fleur est tombée et son aspect gracieux a disparu. C’est que le riche se flétrira dans ses voies.
Jacques qui a passé par une transition facile des recommandations touchant la fermeté dans les épreuves aux préceptes relatifs à la prière, porte maintenant ses pensées sur les pauvres dont se composaient en très grande partie ces communautés de chrétiens et qui avaient beaucoup à souffrir de l’oppression des riches. Il les console en leur disant : Que le frère qui est de basse condition se glorifie de son élévation. Bien loin d’être abattu par 1e sentiment de son indigence et de sa basse condition dans ce monde, le chrétien pauvre doit au contraire se réjouir dans le sentiment de son élévation intérieure ; car elle surpasse toute élévation mondaine ; elle lui vient de Dieu ; elle a sa source dans la communion avec lui et dans le glorieux titre d’enfant de Dieu. Le chrétien est invité à se glorifier de cette basse condition, sans qu’il y ait là pour lui le moindre motif d’orgueil, car il ne s’agit point d’une grandeur dont l’homme soit redevable à ses propres ressources ou à ses propres efforts, mais d’une gloire qui sans aucun mérite de sa part, lui vient de Dieu et n’a pu venir que de lui seul. Cette gloire du chrétien est même tellement opposée à l’orgueil et à la présomption, qu’elle ne peut exister en dehors de l’humilité ; elle en est inséparable ; elle n’est qu’une forme de l’humilité.
Mais, de même que cette élévation n’est pas promise aux pauvres par cela seul qu’ils sont pauvres, de même les riches n’en sont point exclus par cela seul qu’ils sont riches. Bien que les richesses, ainsi que nous l’avons fait remarquer, risquent de devenir pour beaucoup d’hommes un obstacle à cette élévation spirituelle, toutefois il ne leur est nullement impossible de l’atteindre ; une voie leur est ouverte et Jacques l’indique : Que le riche se glorifie de son abaissement, c’est-à-dire qu’il s’humilie, que tout ce qui passe pour grand dans le monde perde à ses yeux de sa valeur ; alors seulement il arrivera à comprendre la vraie grandeur qui ne peut se concevoir qu’autant que l’on a aperçu le néant de toute grandeur terrestre. Lorsque le riche est parvenu à sentir la vanité de ses richesses, c’est alors qu’il est porté à chercher la vraie richesse et la vraie grandeur. Son humiliation a frayé la voie à son élévation. Tant que le riche se confie en ses richesses terrestres et se figure posséder, par elles, les richesses véritables, il ne peut sentir se réveiller en lui ni le besoin des richesses spirituelles, les seules qui méritent ce nom, ni le désir de l’élévation réelle ; or, ce désir, ce besoin est pour, chacun une condition nécessaire de sa participation personnelle aux dons de Dieu. Ainsi riches et pauvres, parmi les chrétiens, doivent s’unir entre eux par le sentiment commun d’une même grandeur spirituelle. Jacques dépeint ensuite la vanité des Richesses par de vives images que lui fournit le spectacle de la nature en Orient. Comme on voit le matin s’épanouir dans tout son éclat la fleur de l’herbe, qui peu d’heures après, se fane rapidement au contact brûlant du soleil, ainsi le riche périra (littéralement : se flétrira) dans ses voies de luxe et de jouissances. Le riche a tellement concentré son affection sur des objets terrestres, il s’est à tel point identifié avec ses richesses, que l’écrivain sacré lui applique à lui-même ce qu’il dit de la fragilité des biens auxquels il s’est attaché.