Le Chemin du Service

Chapitre 2

Les devoirs du berger

Dans ce travail, comme dans l’art de la pêche, il faut savoir ce qu’on fait et ce qu’on veut. L’apôtre le disait en ces termes : « Courez de manière à remporter le prix … non pas comme à l’aventure … Je frappe, non pas comme battant l’air » (1 Corinthiens 9.25, 26). Que de gens courent dans la lice des activités et des œuvres chrétiennes, mais … à l’aventure ! Que d’ouvriers frappent en l’air ! Est-ce peut-être nous ? Réfléchissons.

1. Le premier devoir du berger est de savoir soigner les brebis. Il y a dans la Parole de Dieu deux illustrations dont nous voulons nous laisser inspirer.

C’est d’abord une question de Samuel à Saül (2 Samuel 15.14), une question qui est en même temps un très solennel appel à la conscience du berger : « Qu’est-ce donc que ce bêlement de brebis ? » « Toute l’Ecriture est inspirée de Dieu — et précisément les passages que nous n’aimons pas — afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre » (2 Timothée 3.16). Donc, arrêtez-vous et écoutez cette question : Entendez-vous ce bêlement de brebis dans le troupeau ? Bergers d’âmes, il vous faut avoir l’oreille ouverte et super-sensible !

Pourquoi ces arrêts spirituels, ces surprises, ces rechutes chez les jeunes convertis ? Pourquoi ne se contentent-ils pas de la Parole de Dieu et leur faut-il toujours du nouveau ? N’est-ce pas un bêlement de brebis ? La nourriture que vous leur donnez leur suffit-elle ? L’amour que vous leur témoignez est-il vigilant et fidèle ? Les aimez-vous jusqu’au sacrifice de vos aises, de votre temps ? Le souverain Berger vous fait-Il lire ces lignes pour que vous entendiez le bêlement de vos brebis ? Bergers d’âmes, faites silence : « Entre dans ta chambre, ferme ta porte et prie … » (Matthieu 6.6). Tout berger accompli doit apprendre cela. La porte fermée aux amis, à la famille, à l’œuvre de Dieu même et …« prie ton Père qui est là, dans le lieu secret ; et ton Père qui voit dans le secret te le rendra ». C’est le meilleur moyen de faire cesser le bêlement des brebis : les mentionner une à une par leur nom, en secret devant le Père. Oui, ferme ta porte et prie. Créez une atmosphère de prière autour de chaque cas, trempez chacun dans la rosée de la prière. Réalisez vos lacunes en cette matière, humiliez-vous-en et supprimez au plus tôt la cause du bêlement.

L’autre image est celle de Matthieu 12.11. C’est le Souverain Berger qui parle : « Lequel d’entre vous, s’il n’a qu’une brebis, et qu’elle tombe dans une fosse ... ne la saisira pour l’en retirer ? … Combien un homme ne vaut-il pas plus qu’une brebis ! » Il arrive souvent — et ne vous en étonnez pas — qu’une brebis tombe dans la fosse ; et c’est à ce moment-là que souvent le berger fait défaut et ajoute ainsi au danger et à la détresse de la situation de la brebis. Il gronde, il prêche, il dit : « Tu n’aurais pas dû faire ceci, tu n’aurais pas dû aller là. » Il lui applique en quelque sorte la loi. Rien ne m’indigne et ne me pèse autant que d’entendre ces critiques de vieux chrétiens à l’égard des jeunes dans la foi. Ils oublient qu’ils ont été jeunes, eux aussi. Ils oublient que notre Dieu « ne brisera pas le roseau cassé … n’éteindra point la mèche qui brûle encore » (Esaïe 42.2). Ils oublient que c’est premièrement l’herbe qui pousse, ensuite l’épi, puis le grain tout formé dans l’épi (Marc 4.27). Chrétiens adultes, ne vous laissez jamais scandaliser par les jeunes, ne faites pas les pharisiens, aimez-les envers et contre tout ; qu’ils sentent en vous un père, une mère, un ami, un camarade, un appui. Déridez-vous et apprenez à sourire du sourire de Dieu. N’est-ce pas ce dont ont besoin ces jeunes convertis, qui n’ont pas encore perdu toutes les habitudes et tous les goûts de l’ancienne vie ? Combien nous nous y prenons mal ! Nous voudrions qu’ils soient tout de suite parfaits, qu’ils saisissent tout en une fois.

Oh ! n’oublions pas la gouvernante de Méphiboschet. Que faut-il donc faire avec la brebis tombée dans la fosse ? Tout simplement descendre dans la fosse avec elle, la saisir tendrement, la serrer sur son cœur, et la sortir de la fosse. C’est quelque chose de bien simple, mais de très rare. Il est plus facile de critiquer.

Demandons au souverain Berger qu’Il nous apprenne à descendre dans la fosse. Ne l’a-t-Il pas fait pour nous ? N’a-t-Il pas quitté la gloire pour venir jusqu’à nous dans la fosse, pour nous en faire sortir? Faisons de même. Ayons les mêmes sentiments que Jésus-Christ a eus. Il est des blessures qu’il faut panser, mais pas à la légère (Jérémie 8.11). Il y a des brebis malades qu’il faut soigner avec une grande tendresse. Il y a d’anciennes habitudes qu’il faut cautériser avec la puissance du sang de Jésus, avec la sainteté du Saint-Esprit. Il faut chercher les racines, les causes cachées du mal ; il faut leur apprendre à arracher l’œil, à couper le pied (Matthieu 18.8, 9), si Dieu l’exige. Remarquez que ces paroles solennelles sont immédiatement suivies de la parabole de la brebis perdue.

Avez-vous remarqué ce détail de la description du chandelier d’or : « Ses mouchettes et ses vases à cendre seront d’or pur. » Exode 25.38. Le travail du sacrificateur comprenait l’emploi des mouchettes pour mieux faire luire les lampes. Tout ce qui ternit le témoignage doit être révélé ; le jeune converti doit en être délivré. Ce travail est en effet de l’or pur. Votre Maître peut vous communiquer ce don. Ecoutez-Le : « C’est Moi qui ferai paître Mes brebis, c’est Moi qui les ferai reposer, dit le Seigneur, l’Eternel. Je chercherai celle qui était perdue, Je ramènerai celle qui était égarée, Je panserai celle qui est blessée, et Je fortifierai celle qui est malade … Je jugerai entre brebis et brebis » (Ezéchiel 34.15-17). Perdue, égarée, blessée, malade … Ah ! savoir juger entre brebis et brebis … Car chaque brebis demande des soins spéciaux, les cas ne se ressemblent pas. A nous d’avoir du discernement. Tout cela exige une oreille fine, comme nous l’avons déjà dit, mais aussi une main ferme et un cœur tendre. Oui, il faut savoir soigner les brebis, juger entre brebis et brebis.

2. Le deuxième devoir du berger, c’est de savoir conduire les brebis. Encore un travail très délicat. J’ai dit que le pêcheur doit avoir la main légère pour lancer la ligne ; le berger aussi doit avoir la main légère pour conduire les brebis dans le chemin de Dieu : « … Non comme dominant ceux qui vous sont échus en partage, mais en étant le modèle du troupeau » (1 Pierre 5.3). L’esprit clérical domine les âmes ; cet esprit se trouve partout, non seulement dans les grandes églises où le clergé est tout et fait tout, où souvent le troupeau n’ose rien faire, dire ou penser sans être approuvé ; mais hélas aussi dans des milieux où tout est sensé être conduit par le Saint-Esprit. La main de l’homme pèse sur l’héritage du Seigneur. Demandons à Dieu de nous délivrer de cet esprit de domination et de nous apprendre à conduire les âmes selon la vérité.

Voici un Psaume inspiré du berger d’Israël, David : « Il me fait reposer dans des parcs herbeux et me conduit le long des eaux tranquilles. Il restaure mon âme et Il me mène par des sentiers unis pour l’amour de Son Nom » (Psaume 23.2, 3). Voilà le secret du ministère de berger : ... pour l’amour de Son Nom. C’est l’amour de ce Nom qui nous empêchera de dominer sur l’héritage du Seigneur. Tout doit se faire pour Lui et non pour nous, notre milieu et nos principes. Oh ! combien nous avons tous besoin de cette révélation. La puissance inspiratrice et impulsive du vrai conducteur, du vrai berger d’âmes, c’est l’amour de Son Nom, ce merveilleux amour de Dieu qui agit en nous comme une puissance de vie, l’amour de Christ qui nous contraint, travaille profondément en nous d’abord, et ensuite dans les autres par nous. Recevons maintenant ce don d’en haut. Sans lui, il est impossible d’être berger.

Il y a encore une chose à dire ici : « Il me dirige près des eaux paisibles. » L’apôtre parle d’une Eglise glorifiée, sanctifiée et lavée dans l’eau de la Parole de Dieu. Il n’y a pas d’eaux qui puissent remplacer celle de la Parole de Dieu. Il n’y a pas de pâturages comparables à ceux que mentionne ce Psaume. Bergers d’âmes, apprenons à y conduire les brebis, à leur en donner le goût, à leur en montrer le chemin. David disait de l’épée de Goliath : « Il n’y en a point de pareille » (1 Samuel 21.9). Il n’y a rien de pareil à l’épée du Saint- Esprit qui est la Parole de Dieu (Ephésiens 6.17).

Personnellement, je vise toujours à donner le goût de la Parole aux jeunes convertis et à créer en eux une mentalité biblique. Il faut savoir faire une étude biblique. Il faut aussi savoir en donner le goût, de sorte que les âmes réclameront toujours davantage et, peu à peu, apprendront à étudier seules leur Bible.

Le don de docteur (Ephésiens 4.11), — ne vous laissez pas effrayer par ce mot que la chrétienté a tellement tordu et contrefait — peut se trouver à différents degrés de développement chez l’évangéliste et le pasteur. C’est la faculté divine d’enseigner la Parole de Dieu aux autres. Il faut pour cela être enseigné soi-même à l’école de Dieu. Il faut que toute la Bible, et rien que la Bible soit notre théologie et le Saint-Esprit notre professeur.

La Bible offre des « eaux tranquilles » au jeune converti ; combattez en eux l’esprit d’agitation, cet esprit fiévreux de « coureur de réunions », en les introduisant dans ce merveilleux pâturage. Une fois qu’ils y auront pris goût, ils n’auront plus envie d’aller brouter les quelques touffes d’herbe du désert. Que ce que dit Esaïe soit vrai de nous aussi : « Comme un berger, Il paîtra Son troupeau, Il prendra les agneaux dans Ses bras, Il les portera dans Son sein ; Il conduira les brebis qui allaitent » (Esaïe 40.11). Quelle profondeur de tendresse et de patience !

Je vous pose très solennellement cette question : Avez-vous appris à ouvrir votre cœur aux brebis, savez-vous les porter dans les passages difficiles du chemin ? Ainsi vous les conduirez sûrement et saintement, et le souverain Berger sera satisfait.

3. Le troisième devoir du berger est de savoir protéger les brebis.

Avez-vous remarqué ce qui précède le verset qui vient d’être cité : « Voici le Seigneur, l’Eternel, vient contre le puissant … Comme un berger, Il paîtra Son troupeau » (Esaïe 40.10). Si vous voulez être un berger d’âmes, vous aurez affaire au puissant, à l’homme fort de Luc 11.21, en un mot, à Satan, son système et ses esprits malins. « Le mercenaire qui n’est pas le berger et à qui n’appartiennent pas les brebis voit venir le loup, abandonne les brebis et prend la fuite ; et le loup les ravit et les disperse » (Jean 10.12). Le berger aussi doit voir venir le loup …

En vous parlant des pêcheurs d’hommes, j’ai précisé la nécessité d’avoir la vision d’océan. En vous parlant de bergers d’âmes, j’insiste sur ce que j’appellerai la vision du loup, du danger immédiat qui menace la brebis inconsciente et impuissante. La mission solennelle du berger, c’est de dévoiler le loup et le chasser. Si vous ne le faites pas, vous n’êtes pas devant Dieu un berger, un pasteur ; vous êtes un mercenaire. Les paroles de l’Evangile sont claires, nettes, et nous donnent à réfléchir. Que veut dire cette parole prophétique de Paul : « Je sais qu’il s’introduira parmi vous, après mon départ, des loups cruels qui n’épargneront pas le troupeau ? (Actes 20.29) Cela signifie que vous devez voir venir le loup et agir.

Comme David tua le lion et l’ours pour sauver les brebis qu’il paissait (1 Samuel 17.36), sachons terrasser le lion et l’ours, puis arracher les brebis de leur gueule ; alors, nous serons de fidèles bergers d’âmes.

Tant d’autres passages de l’Ecriture nous parlent de toutes les erreurs, hérésies et œuvres des hommes et du diable qui assaillent le peuple de Dieu afin de le détacher de la Bible et du Seigneur Lui-même. Oh ! l’inertie, la crainte et la lâcheté des croyants devant les loups ! Quelle superficialité, quel manque de discernement de l’heure actuelle, quelle absence de sincérité et de cœur parmi les chrétiens ! Tout en prétendant accepter la Bible, ils vivent de compromis et ils jugent ceux qui l’aiment assez pour souffrir pour elle. Ils critiquent ceux qui défendent l’honneur de Dieu en dévoilant et attaquant l’apostasie de la nouvelle théologie, ce loup qui ravit le troupeau et qui vole aux âmes la Parole de leur salut.

Quel privilège que ces égratignures faites par des griffes de loup, si elles parviennent à protéger et à sauver les brebis. A ce propos, voici une anecdote : J’avais un beau chien-loup. Comme je me promenais avec lui à la montagne, il se jeta par malheur sur un troupeau de chèvres et en blessa deux en un instant. Mais ce qui est remarquable, c’est que le chien, avant de se lancer sur le troupeau, attaqua le berger, le renversa — sans lui faire trop de mal heureusement — et c’est seulement ensuite qu’il se précipita sur les chèvres. Bergers d’âmes, comprenez-vous la leçon ? Si vous voulez être fidèles devant Dieu pour les âmes qui vous sont confiées, ne vous étonnez pas si le loup, le diable, s’acharne d’abord contre vous. C’est seulement dans la mesure où vous le connaissez et le vainquez (Apocalypse 12.11) dans votre propre vie que vous pourrez le discerner et le vaincre chez les autres. N’avez-vous pas remarqué comme l’ennemi réussit à jeter des craintes dans votre esprit, sur tout ce qui le concerne ? Il redoute que les saints ne reçoivent une instruction biblique sur sa nature, ses pièges, ses œuvres et ses séductions extraordinairement subtiles. Et plus ils se croient spirituels, plus ses pièges deviennent spirituels. Rien comme ce combat pour vous jeter dans les bras du Seigneur Jésus et vous faire connaître Sa puissance et Sa gloire ! Il pourra mieux Se servir de vous ensuite pour protéger les brebis, les avertir du danger, les rendre sages à salut, et leur apprendre à discerner entre Sa voix et celle de l’étranger (Jean 10.3-5).

J’ai vu un tableau de Léo-Paul Robert, un tableau aussi instructif qu’inspirant. Il représente le bon Berger avec tout un troupeau à Ses pieds ; les brebis se pressent contre Lui et Le regardent avec intensité. A côté de Lui est un grand dragon vaincu qui rugit de colère. Pourquoi ? Parce que la main percée et ensanglantée du Berger lui impose Son autorité et Sa victoire, et le dragon est obligé de reculer et de laisser les agneaux au Vainqueur. Oh ! cette main percée ! Servez-vous des meurtrissures et du sang de l’Agneau de Dieu pour vous garantir du loup, vous et les brebis qui vous sont confiées. Le sang de l’Agneau est tout-puissant, son efficacité infaillible. Dans la prière et dans votre témoignage, servez-vous du Nom de Jésus pour vaincre le loup ; et sauvez les brebis avec cette arme unique que le Maître nous a laissée (Luc 10.18-21 ; Actes 3.6 ; Apocalypse 12.11).

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