Le voyage du Pèlerin

7. Le Pèlerin passe près des lions, et entre dans le palais Plein-de-Beauté, où il trouve la consolation et les instructions nécessaires

En songe, je vis Chrétien se hâter, dans l'espérance qu'il pourrait passer la nuit dans le Palais.

Il arriva bientôt dans un étroit passage, distant d'environ deux cents mètres de la loge du portier. Comme il regardait attentivement devant lui, il vit deux lions dans le chemin.

— Je comprends maintenant, pensa-t-il, ce qui a fait rebrousser chemin à Craintif et à Méfiant.

Les lions étaient enchaînés, mais il ne le voyait pas, aussi fut-il très effrayé et eut-il, un instant, la pensée de fuir. Cependant le portier du Palais, nommé Vigilant, s'apercevant que Chrétien n'osait avancer, lui cria :

— As-tu si peu de courage ? Ne crains pas les lions, car ils sont enchaînés et ne servent qu'à éprouver la foi des pèlerins et à manifester ceux qui n'en ont point. Marche au milieu du chemin et aucun mal ne t'arrivera.

Alors je le vis s'avancer, tremblant de crainte, à cause des lions ; cependant il se confia en la parole du portier ensuivit ses directions.


Alors je le vis s'avancer, tremblant de crainte, à cause des lions.

Il entendit bien rugir les lions, mais ils ne lui firent aucun mal. Délivré de ce danger, il frappa des mains pour témoigner sa joie et s'avança vers la loge.

— Monsieur, demanda Chrétien au portier, voudriez-vous me dire à qui appartient cette maison, et si je puis y passer la nuit.

— Cette maison a été construite par le Maître de la colline pour servir au repos et à la sécurité des pèlerins, répondit le portier. Puis-je savoir qui tu es, d'où tu viens, et où tu vas ?

— Je viens de la cité de Destruction, et je me rends à la montagne de Sion. Mais le soleil étant couché, je désirerais, si possible, passer la nuit ici.

— Quel est ton nom ?

— Je me nomme maintenant Chrétien, mais auparavant je me nommais Privé-de-la-Grâce. Je suis de la race de Japhet, (Genèse 9.27) que l'Éternel a fait habiter dans les tentes de Sem.

— Comment se fait-il que tu arrives si tard ? Le soleil est couché.

— Je serais arrivé plus tôt, mais, pauvre misérable que je suis ! je me suis endormi dans la cabane qui se trouve à mi-hauteur de la colline. Et pour comble de malheur, j'y perdis le rouleau qui doit me servir de passe-port ; je fus donc forcé de redescendre, le coeur plein de chagrin, jusqu'à l'endroit où je m'étais endormi. Je l'ai heureusement retrouvé, et je me suis hâté jusqu'ici.

— Bien. Je vais appeler une des jeunes filles de ce lieu. Si ta conversation lui plaît, elle t'introduira auprès des autres membres de la famille, comme c'est l'usage dans cette maison.

Là-dessus, Vigilant sonna une cloche, dont les tintements firent accourir une belle et sérieuse jeune personne, nommée Discrétion. Elle demanda au portier pourquoi il l'avait appelée.

— Cet homme est un pèlerin, qui se rend de la cité de Destruction à la montagne de Sion, répondit Vigilant ; mais comme il est fatigué et surpris par l'obscurité, il demande s'il peut passer la nuit ici. Je lui ai dit que j'allais t'appeler, et que si sa conversation te plaisait, tu pourrais l'introduire dans la maison, selon notre coutume.

La jeune fille demanda à Chrétien d'où il venait et où il allait, et il le lui dit. Elle lui demanda aussi comment il avait trouvé son chemin, qui il y avait rencontré. Il répondit à toutes ses questions. Puis elle lui demanda encore quel était son nom.

— Je me nomme Chrétien, et je désire vivement passer la nuit ici, parce que je viens d'apprendre que cette maison a été construite par le Maître de la colline pour le repos et la sécurité des pèlerins.

La jeune fille sourit, puis ses yeux se remplirent de larmes. Après une courte pause, elle dit : Je vais appeler deux ou trois autres membres de la famille. Elle courut à la porte et appela Prudence, Crainte-de-Dieu et Charité, qui, après avoir parlé, un moment avec Chrétien, l'introduisirent dans la famille. D'autres membres vinrent sur le seuil de la porte, et l'accueillirent avec ces paroles :

— « Entre, béni de l'Eternel ! (Jean 24.31) La maison est faite pour accueillir des pèlerins tels que toi. »

Chrétien s'inclina et les suivit à l'intérieur du palais. On lui offrit une excellente boisson, puis, en attendant le repas, on proposa, afin de mettre le temps à profit, que quelques-unes des sœurs eussent un entretien avec Chrétien. Celles qui furent choisies pour cela étaient Prudence, Crainte-de-Dieu et Charité. Crainte-de-Dieu prit la parole la première :

— Puisque nous t'avons témoigné de la bienveillance en te recevant chez nous, ce soir, raconte-nous ce qui t'est arrivé pendant ton pèlerinage. Peut-être en retirerons-nous quelque instruction qui nous sera profitable.

— Très volontiers, répondit Chrétien, je suis charmé de vous voir si bien disposées.

— Qu'est-ce qui t'a décidé à entreprendre ce voyage ?

— J'ai été poussé à quitter ma patrie par une voix qui résonnait à mon oreille, et m'avertissait qu'une destruction inévitable m'atteindrait, si je restais où j'étais.

— Mais qu'est-ce qui t'a décidé à prendre le chemin qui conduit ici ?

— C'est, sans doute, Dieu qui m'a conduit, car j'étais si épouvanté que je ne savais où aller ; alors un homme, nommé Evangéliste, s'approcha de moi, tandis que je tremblais et pleurais ; il me montra la petite porte étroite que je n'aurais jamais pu trouver seul, et me plaça ainsi dans le chemin qui m'a conduit jusqu'à ce Palais.

— Mais n'es-tu pas entré dans la maison de l'Interprète ?

— Oui, et j'y ai vu des choses dont je me souviendrai toute ma vie. J'en ai remarqué surtout trois :

  1. La manière dont Christ, en dépit de Satan, entretient l'œuvre de la grâce dans le cœur.
  2. Comment un homme peut, par ses péchés, se priver à tout jamais de la miséricorde de Dieu.
  3. Le songe d'un homme qui croit assister au jugement dernier.

— T'a-t-il raconté son rêve ?

— Oui, et c'était terrible ; mon cœur souffrait en l'écoutant ; mais je suis cependant heureux de l'avoir entendu.

— Est-ce tout ce que tu as vu chez l'Interprète ?

— Non, il m'a montré un palais magnifique dont les habitants portaient des vêtements d'or. J'ai vu un homme, plein de courage et de force, pénétrer dans ce palais, malgré les efforts que faisaient, pour le repousser, les soldats qui en gardaient l'entrée. Je le vis revêtir d'un splendide habit. Toutes ces choses ont ravi mon coeur. Je serais volontiers resté une année dans ce lieu, si je n'avais pas su que je devais aller plus loin.

— Et qu'as-tu vu sur ton chemin ?

— Ce que j'ai vu ! Je n'avais pas beaucoup avancé, lorsque j'arrivai près d'une croix, sur laquelle un homme était cloué. Au moment où je levai les yeux sur lui, mon fardeau, qui m'avait accablé jusque-là, tomba de mes épaules. Je fus très surpris, car je n'avais jamais vu chose semblable. Pendant que je regardais cet homme — car je ne pouvais pas m'empêcher de le contempler — trois personnages resplendissants se présentèrent à moi. Le premier m'assura que mes péchés étaient pardonnés, le deuxième m'enleva mes haillons et me revêtit de l'habit que je porte maintenant, et le troisième me mit une marque au front et me donna ce rouleau scellé.

En disant cela, il le sortit de son sein.

— Mais tu as vu encore d'autres choses, n'est-ce pas ?

— Je vous ai raconté ce que j'ai vu de plus remarquable. Cependant je puis vous parler aussi de ma rencontre avec trois hommes, nommés Stupide, Paresseux et Présomptueux. Ils dormaient un peu en-dehors du chemin, et avaient les pieds liés avec des chaînes ; mais croyez-vous que j'aie pu les éveiller ? J'ai vu, enfin, Formaliste et Hypocrite qui enjambaient la muraille et prétendaient parvenir ainsi à la montagne de Sion; ils se sont bientôt égarés comme je les en avais prévenus, mais. ils n'avaient pas voulu me croire. J'ai surtout eu beaucoup de peine à gravir cette colline, et à éviter les lions. Et vraiment, sans le bon portier de ce Palais, qui m'a rassuré, je crois que j'aurais rebroussé chemin. Mais grâce à Dieu, je suis ici, et je vous remercie, de tout mon cœur, de m'avoir reçu.

Prudence voulut aussi lui adresser quelques questions, auxquelles elle le pria de répondre.

— Penses-tu quelquefois au pays que tu as quitté ?

— Oui, mais avec honte et horreur. Vraiment, si j'avais conservé de l'amour pour la patrie dont je suis sorti, j'aurais pu y retourner, mais maintenant j'en désire une meilleure, c'est-à-dire une céleste. (Hébreux 11.15-16)

— N'as-tu rien emporté avec toi des choses que tu possédais ?

— Oui, mais tout à fait contre mon désir ; ainsi les mouvements et les convoitises intérieures de la chair, auxquelles les gens de ce pays sont fort attachés, comme je l'ai été aussi. Mais maintenant toutes ces choses sont pour moi des sujets de tristesse et d'amertume ; je voudrais n'avoir plus rien à faire avec elles. Cependant, lorsque je veux faire le bien, je découvre que le mal est attaché à moi. (Romains 7.15-21)

— Ne te semble-t-il pas, parfois, que ces choses sont vaincues en toi, alors qu'elles t'auraient, à d'autres moments, causé beaucoup de peine et d'anxiété ?

— Oui, mais cela ne m'arrive que rarement ; ce sont alors pour moi des heures dorées.

— Peux-tu te souvenir quand tu éprouves ce sentiment de victoire ?

— Cela arrive quand je pense à ce que j'ai vu sur la croix, ou lorsque je jette mes yeux sur le superbe vêtement que j'ai reçu, ou encore lorsque je lis le rouleau que je porte dans mon sein ; enfin, quand je pense au lieu où je me rends.

— Et qu'est-ce qui te donne un tel désir de te rendre à la montagne de Sion ?

— C'est que j'espère rencontrer là, vivant, Celui que j'ai vu mort sur la croix ; puis j'espère être débarrassé de toutes les choses qui me troublent et me peinent. Là, il n'y aura plus de mort, et je jouirai de la présence de Celui que j'aime parce qu'il m'a délivré de mon fardeau. Je suis fatigué de ma misère intérieure, je soupire après le séjour de l'immortalité et la société de ceux qui disent sans cesse : « Saint ! Saint ! Saint ! Charité s'adressa alors à Chrétien, et lui demanda :

— As-tu une famille ? Es-tu marié ?

— J'ai une femme et quatre enfants.

— Pourquoi ne les as-tu pas amenés avec toi ? Chrétien se mit à pleurer et répondit :

— Avec quelle joie je l'aurais fait ! mais ils, étaient tous opposés à ce que je fasse ce voyage.

— Tu aurais dû leur parier, essayer de leur montrer le danger qu'ils couraient en restant en arrière.

— Je l'ai fait ; je leur ai dit que Dieu m'avait averti de la destruction de notre ville, mais ils crurent que je plaisantais, et ne voulurent pas me suivre.

— As-tu demandé à Dieu de bénir le conseil que tu leur donnais.

— Oui, je l'ai fait, avec beaucoup d'amour, car vous devez bien penser que ma femme et mes enfants m'étaient très chers.

— Leur as-tu fait connaître ton chagrin et la crainte que tu avais de la destruction de votre ville ? Car je suppose que tu en étais, toi-même, tout à fait persuadé ?

— Je l'ai fait plus d'une fois. Ils pouvaient voir ma frayeur dans mes larmes et le tremblement que j'éprouvais à l'appréhension du jugement suspendu au-dessus de nos têtes. Mais tout cela ne fut pas suffisant pour les décider à me suivre.

— Quelles raisons donnaient-ils pour expliquer leur refus ?

— Ma femme redoutait d'abandonner le monde dans lequel elle vivait, et mes enfants étaient plongés dans les plaisirs de la jeunesse. Pour une raison et pour une autre, ils trouvaient tant de prétextes à rester, qu'ils m'ont laissé partir seul.

— Es-tu bien sûr que ta vie ne démentait pas tes paroles ?

— En vérité, je ne puis pas dire que cela n'arrivait jamais, car je me sens coupable de bien des péchés. Je sais aussi qu'un homme peut, par son exemple, détruire ce qu'il essaye de persuader aux autres pour leur bien. Cependant, je puis dire que je prenais grand soin de ne pas leur fournir l'occasion, par quelque action malséante, de blâmer mon pèlerinage. Ils m'accusaient d'être trop strict, et me reprochaient de me refuser des choses — je le faisais par amour pour eux — dans lesquelles ils ne voyaient aucun mal. Je crois que je puis dire que ce qui les indisposait contre moi, c'était mon grand désir de plaire à Dieu en toutes choses et de ne faire aucun tort à mes voisins.

— Il est vrai, dit alors Charité, que Caïn haïssait son frère parce que ses œuvres étaient mauvaises et que celles de son frère étaient justes, (1 Jean 3.12) et si ta femme et tes enfants ont ainsi mal interprété les tiennes, ils montrent, par là, qu'ils sont ennemis du bien ; mais toi, tu sauveras ton âme. (Ezéchiel 3.19)

Je les vis ainsi, dans mon rêve, causer ensemble jusqu'à ce que le souper fut prêt. Alors ils se mirent à manger. La table était couverte de mets exquis et de vins délicieux. Leur entre tien roula sur le Seigneur du lieu, sur ses actions admirables et sur le but qu'il s'était proposé en construisant cette maison. Je compris à leur discours, que ce Seigneur avait été un grand guerrier, et qu'il avait combattu et vaincu celui qui avait la puissance de la mort, (Hébreux 2.14-15) non sans avoir couru de grands dangers, ce qui me le fit aimer davantage.

— Car, disaient-ils, — et Chrétien, se joignit à leurs affirmations — il a exposé sa vie et versé son sang par pur amour pour les siens. Quelques-unes des personnes présentes assuraient qu'elles l'avaient vu et lui avaient parlé depuis qu'il était mort sur la croix ; elles attestaient avoir entendu, de sa propre bouche, qu'il avait un si grand amour pour les pauvres pèlerins, qu'on ne saurait en trouver un semblable dans tout l'univers.

Pour confirmer ce qu'elles disaient, elles rappelèrent qu'il s'était dépouillé de toutes ses richesses et de toute sa gloire (2 Corinthiens 8.9 ; Philippiens 2.6-11) pour accomplir son œuvre en faveur des pauvres pécheurs, et qu'elles l'avaient entendu dire et affirmer, qu'il ne voulait pas habiter seul sur la montagne de Sion. Elles ajoutèrent qu'il avait fait princes beaucoup de pèlerins, quoiqu'ils fussent nés mendiants, et qu'ils eussent été tirés de la poussière. (1 Samuel 2.8 ; Psaumes 113.7)

Ils s'entretinrent ainsi jusque tard dans la nuit, et après s'être placés sous la bénédiction et la protection du Seigneur, ils se séparèrent pour se livrer au repos.

Le Pèlerin fut conduit dans une belle chambre, haute et très spacieuse, dont les fenêtres ouvraient au levant. Le nom de cette chambre était Paix. Il y dormit jusqu'à ce que le jour parut. Alors il s'éveilla et chanta :

Daigne entendre, ô bon Sauveur !
Le cantique de mon cœur.
Au retour de la lumière,
Je veux t'offrir ma prière,
Et célébrer, dès le jour,
Ton grand et fidèle amour.

Par ton sang, tous mes péchés
Devant mon Dieu sont cachés.
Ton esprit vers toi m'attire
Fais-moi sentir son empire !
Que dans la foi son secours
M'affermisse pour toujours !

Alors en paix je serai,
Et doucement je vivrai.
Mon âme fera sa joie
De suivre la sainte voie
Qui conduit, de ces bas lieux,
Jusqu'au royaume des cieux.

Dès que chacun fut levé, les mêmes personnes que la veille se rendirent auprès du Pèlerin, et lui dirent qu'elles ne voulaient pas le laisser partir avant de lui avoir montré toutes les curiosités du Palais. Elles le conduisirent, en premier lieu, dans la salle d'études, où elles lui montrèrent des registres de la plus haute antiquité, dans lesquels, autant que je me souviens de mon rêve, elles lui firent remarquer l'arbre généalogique du Seigneur du lieu. Chrétien sut ainsi qu'il était le fils de l'Ancien des jours, par une génération éternelle. Là, aussi, étaient inscrits tout au long ses faits historiques et les noms des milliers de personnes qu'il avait prises à son service et placées dans des demeures qui ne pourraient être détruites ni par le temps, ni par les bouleversements de la nature. Elles lui lurent aussi le récit d'actions mémorables de quelques-uns de ses serviteurs, comment ils avaient « vaincu des royaumes, exercé la justice, obtenu des promesses, fermé la gueule des lions, éteint la puissance du feu, échappé au tranchant de l'épée, guéri de leurs maladies; comment ils s'étaient montrés vaillants à la guerre et avaient mis en fuite des armées étrangères. » (Hébreux 11.33-34)

Elles lui lurent encore, dans un autre registre, que leur Seigneur était disposé à faire grâce à tous les hommes, même à ceux qui l'avaient offensé et repoussé bien des fois. Chrétien prit aussi connaissance du récit de plusieurs autres histoires d'événements anciens et modernes, ainsi que de prophéties et de prédictions de choses qui auront leur accomplissement certain, pour la terreur des ennemis, comme pour la consolation et l'encouragement des pèlerins.

Le jour suivant, elles le conduisirent à l'arsenal, où elles lui montrèrent toutes les armes que le Seigneur du lieu avait préparées pour les pèlerins, telles que : épées, boucliers, casques, cuirasses et chaussures ne s'usant jamais. Il y en avait un si grand nombre, qu'on aurait pu armer, pour le service du Seigneur, autant d'hommes qu'il y a d'étoiles au ciel.

Elles lui montrèrent aussi certains objets avec lesquels quelques-uns des serviteurs avaient accompli des choses merveilleuses : la verge de Moïse, le marteau et le clou avec lesquels Jaël tua Sisera, les cruches, les trompettes et les flambeaux qui servirent à Gédéon pour mettre en fuite les Madianites. Puis l'aiguillon de bouvier avec lequel Schamgar battit six cents hommes, la mâchoire d'âne qui servit à Samson pour tuer mille hommes, la fronde et la pierre avec lesquelles David abattit le géant Goliath ; enfin, l'épée avec laquelle le Seigneur « tuera l'homme de péché » au jour où il se lèvera pour fondre sur sa proie.

Elles lui firent voir encore plusieurs choses merveilleuses qui intéressèrent vivement Chrétien ; après quoi, chacun alla se livrer au repos.

Le lendemain matin, le Pèlerin voulut continuer son voyage, mais les habitantes du Palais le prièrent d'attendre au jour suivant ; car, dirent-elles, si le temps est clair, nous te montrerons les Montagnes Délectables qui contribueront à ta consolation parce qu'elles sont très rapprochées du port désiré.

Il y consentit et resta encore ce jour-là. Le lendemain, elles le conduisirent sur le faîte de la maison, et lui dirent de regarder du côté du sud ; ce qu'il fit. Et voici, à une grande distance, il aperçut une contrée agréable et montagneuse, couverte de forêts, de vignobles, de fleurs et de fruits de toutes espèces, avec des sources et des ruisseaux délicieux à contempler.

Chrétien demanda le nom de ce pays ; elles lui répondirent qu'il se nommait le Pays d'Emmanuel.

— Il est, ajoutèrent-elles, à l'usage des pèlerins, comme cette colline-ci. Quand tu y seras arrivé, tu verras la porte de la Cité céleste, comme les bergers qui habitent cette contrée te l'apprendront.

Le Pèlerin voulut alors continuer son voyage, et elles y consentirent.

— Mais auparavant, dirent-elles, viens avec nous, à l'arsenal. Là, elles le revêtirent, de pied en cap, d'armes de toutes espèces, au cas où il serait exposé à quelque assaut, dans la suite de son voyage.

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