L’histoire de la Bible

LORSQUE LE SAINT-ESPRIT CONDUIT DANS TOUTE LA VÉRITÉ

6. LA FORMATION DU NOUVEAU TESTAMENT

« Quand le Consolateur sera venu, l’Esprit de vérité, Il vous conduira dans toute la vérité » 1

1 Jean 16.13.



Papyrus datant de la seconde moitié du 2e siècle (Papyrus Bodmer XIV, XV, Evangiles de Luc et Jean, Bibliothèque Bodmer, Cologny, Genève).

La venue de Jésus-Christ sur la terre est effectivement le plus grand événement de l’histoire. Les promesses de l’Ancien Testament se réalisent : le Messie accomplit ce qui a été écrit de Lui. Les foules sont saisies ; les miracles du Seigneur font l’objet de toutes les conversations ; Ses enseignements se répandent.

Mais, bien vite, l’opposition religieuse s’organise, aboutissant au plus abominable des crimes : la crucifixion du Fils de Dieu sur la colline de Golgotha. Trois jours après, Sa résurrection fait trembler l’enfer et ouvre une ère nouvelle pour le monde. Toutefois, le Seigneur ressuscité n’apparaît pas sur les places publiques ou dans les rues de Jérusalem, mais seulement aux disciples qu’il a choisis comme témoins de Son triomphe sur la mort.

Les événements se précipitent. Le Seigneur est enlevé au ciel dans une nuée, et le Saint-Esprit descend sur les disciples réunis dans la chambre haute à Jérusalem. Toute la ville accourt, pour entendre la prédication de Pierre le jour de la Pentecôte. Et, en quelques années, une poignée d’hommes remplis du feu d’En haut bouleversent le monde civilisé 2. Les habitants de Palestine sont l’objet d’une visitation divine qui atteint ensuite les Juifs de la dispersion et les païens des rives de la Méditerranée. L’Eglise du Dieu vivant est née : une armée invincible s’est levée. Au cours des siècles, elle puisera sa force dans les Ecritures : elle les mettra en pratique et les annoncera aux autres.

2 Actes 17.6.

L’Ancien Testament jette une vive lumière sur ces événements : il sert de base à la prédication des apôtres ; il réfute les arguments de leurs adversaires. En ce 1er siècle de l’ère chrétienne, l’Ancien Testament va recevoir de Dieu son complément indispensable, sous forme de 27 nouveaux livres inspirés. Peu après l’an 50, les disciples, poussés par le Saint-Esprit, commencent à écrire *.

* Note : Il est frappant d’apprendre qu’en 1972, un jésuite espagnol, le père José O’Callaghan, professeur à l’Institut Biblique de Rome, aurait identifié parmi les manuscrits de la mer Morte un fragment de l’Evangile selon Marc datant de l’an 50 de l’ère chrétienne. Cette découverte a toutefois besoin d’ère confirmée.

Les Epîtres sont les premiers éléments du Nouveau Testament à voir le jour. D’avance, le Seigneur a sanctionné leur autorité spirituelle par une promesse à Ses disciples : « Quand le Consolateur sera venu, l’Esprit de vérité, Il vous conduira dans toute la vérité » 1. Or, ces lettres apostoliques établissent la vérité absolue de Dieu, dans laquelle l’Eglise doit être instruite et fondée.

Passant d’une contrée à l’autre pour annoncer l’Evangile, les apôtres s’efforcent de maintenir le contact avec leurs enfants dans la foi. D’autres communautés ne tardent pas à profiter de leurs missives. Les Epîtres de Paul sont lues et relues avant d’être transmises plus loin, si possible en échange d’un autre écrit inspiré 3. Dans des conditions très mouvementées, mais sous la bénédiction de Dieu, leur message édifie un peuple de vainqueurs qui part à la conquête du paganisme, de la philosophie et de la mondanité, et en arrache de nombreuses victimes. A leur tour, les jeunes convertis portent plus loin le flambeau de l’Evangile, confessant leur Sauveur, même s’ils doivent pour cela endurer le martyre.

3 cp. Colossiens 4.16.



Jérusalem : sépulcre du « jardin du tombeau » (Garden Tomb). Au premier plan, le muret retenant la pierre circulaire qui fermait l’accès au tombeau ; à droite, le cran d’arrêt où elle butait (cp. Matthieu 27.60 ; Marc 15.46 ; 16.3-4 ; Luc 24.2 ; Jean 20.1).

Tandis que le message du salut se diffuse partout, le nombre des témoins oculaires de la vie terrestre du Seigneur Jésus diminue. Il devient de plus en plus nécessaire de posséder par écrit les admirables enseignements de Jésus-Christ. Le Maître n’avait-Il pas promis une assistance toute particulière à ceux qui seraient appelés à rédiger Sa « biographie » ? « L’Esprit-Saint, que le Père enverra en Mon Nom, vous enseignera toutes choses, et vous rappellera tout ce que Je vous ai dit » 4.

4 Jean 14.26.

Pour relater ces faits, fondements de notre foi et nourriture spirituelle pour les rachetés au travers des siècles, un seul récit ne peut suffire. Aussi le Saint-Esprit met-ll à part quatre hommes qui reçoivent la capacité divine de rédiger dans le langage le plus simple le message transcendant de la venue du Fils de Dieu sur la terre. Chacun en relève un aspect différent.



La mer de Galilée, où Jésus-Christ appela Ses premiers disciples : « Suivez-Moi, et Je vous ferai pêcheurs d’hommes » (Marc 1.17).

Matthieu, ex-percepteur d’impôts, est appelé à révéler aux Juifs la Personne du Messie. Conformément à sa formation professionnelle, il fait toujours ressortir l’importance de ce qui est écrit 5.

5 cp. Matthieu 1.22 ; 2.5, 15, 17, 23, etc.

Marc, probablement serviteur de Pierre 6, met l’accent sur ce qui a touché le plus profondément son cœur : le sacrifice du parfait Serviteur de l’Eternel et Sa patience à toute épreuve dans l’éducation des disciples.

6 cp. 1 Pierre 5.13.

Luc, « le médecin bien-aimé » 7, donne des détails particulièrement précis sur les nombreux miracles et guérisons du Fils de l’homme, et avant tout sur le mystère de Sa conception dans le sein de la vierge Marie 8.

7 Colossiens 4.14.

8 Luc 1.34-35.

Jean, « le disciple que Jésus aimait » 9, fait surtout ressortir les paroles d’amour et de grâce du Fils de Dieu, en qui il faut croire pour avoir la vie éternelle. Il est probable que cet Evangile ait été le dernier en date des écrits du Nouveau Testament. Et pourtant, c’est Jean qui relate le plus de paroles du Seigneur Jésus. Ce fait n’a qu’une explication possible : le Saint-Esprit avait rempli et renouvelé la mémoire de Son serviteur.

9 Jean 13.23.

Ainsi, le Saint-Esprit a inspiré quatre merveilleux tableaux de la Personne du Fils de Dieu, choisissant pour cela quatre instruments humains fort différents : Il emploie leur personnalité et leur caractère propres pour décrire de la façon la plus sobre et la plus puissante l’événement central de l’histoire.



Athènes : plaque de bronze rapportant le discours de Paul (Actes 17.22-31). Elle est fixée à l’endroit présumé de cette prédication.

Il incombe à Luc de rédiger le magnifique livre des Actes des Apôtres. Dès le deuxième voyage missionnaire de Paul, il est son fidèle compagnon et son médecin particulier. Témoin des glorieuses étapes des temps apostoliques, Luc est le plus qualifié pour écrire ce premier chapitre des conquêtes de l’Eglise militante de Jésus-Christ.

Vers la fin de sa vie, Jean est déporté sur l’île de Patmos, dans la mer Egée 10. Le Seigneur permet cet emprisonnement pour révéler à Son serviteur Ses plans divins pour l’avenir du monde. L’Apocalypse — nom grec signifiant révélation — est donc le couronnement du temple des saintes Ecritures. Ce dernier livre de notre Bible achève cet édifice divin ; c’est l’aboutissement de toutes les grandes doctrines bibliques, reliant ainsi l’histoire aux perspectives terribles ou glorieuses de l’éternité.

10 Apocalypse 1.9.



Thessalonique : église du 4e siècle. A droite, le minaret d’une mosquée de construction récente.

L’Ancien Testament hébreu comporte trois sections : la Loi, les Prophètes, les Psaumes. Après Sa résurrection, le Seigneur a tenu à les sceller de Son autorité divine 11. Or, au cours de Son dernier entretien avec les disciples, Il avait fait de même, par anticipation, à l’égard des trois sections du Nouveau Testament, mettant les écrivains au bénéfice de promesses particulières 12 :

11 Luc 24.44.

12 cp. Jean 14.26 et 16.13.

  1. le Saint-Esprit vous rappellera tout ce que Je vous ai dit = les Evangiles
  2. le Saint-Esprit vous conduira dans toute la vérité = les Actes et les Epîtres apostoliques
  3. le Saint-Esprit vous annoncera les choses à venir = l’Apocalypse.

Cependant, une série d’« évangiles » et d’« épîtres » apocryphes apparaissent au sein de la chrétienté des premiers siècles. D’autres écrivains s’arrogent le droit de consigner leurs impressions du plus grand événement de leur époque, sans y être appelés par Dieu. Luc mentionne ce fait : « Plusieurs ayant entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous… » 13

13 Luc 1.1.

Une chose est d’écrire, une autre, bien différente, est celle d’être « poussé par le Saint-Esprit » 14 pour transmettre ce que Dieu désire communiquer au monde.

14 2 Pierre 1.21.



Éphèse : l’amphithéâtre, vu d’en haut. Là, les Éphésiens s’écrièrent : « Grande est la Diane des Éphésiens ! » (Actes 19.34)

Parmi les récits apocryphes, on a dénombré dix pseudo-évangiles, les plus connus étant ceux de Nicodème, de Pierre et de Thomas ; citons encore les « actes » de Pierre, de Paul, de Jean, d’André et de Thomas, une série d’« épîtres » et d’« apocalypses », et plusieurs autres narrations fantaisistes rédigées durant les premiers siècles du Moyen Age. Bien entendu, c’est à tort qu’on a attribué aux apôtres ces textes composés longtemps après leur mort. Tous ces écrits sont truffés de légendes, plusieurs ont été perdus et, dans ceux qui nous restent, on décèle un mélange de superstitions, de traditions juives, de gnosticisme avec un christianisme entaché d’erreurs. Les premiers croyants ne tardent pas à les différencier de la Révélation et à les éliminer.

Le Saint-Esprit ne s’est pas contenté d’écarter tout écrivain indésirable, mais Il a aussi délimité la tâche rédactionnelle des auteurs sacrés :

« Jésus a fait encore beaucoup d’autres choses ; si on les écrivait en détail, je ne pense pas que le monde même pût contenir les livres qu’on écrirait. » 15

15 Jean 21.25.

Il n’était pas nécessaire que tous les miracles du Seigneur ou que toutes Ses paroles nous fussent rapportés. Un Evangile supplémentaire n’eût en rien complété notre Bible ou enrichi notre foi. Tels quels, les textes sacrés étaient et sont la vérité, rien que la vérité, toute la vérité :

« Jésus a fait encore, en présence de Ses disciples, beaucoup d’autres miracles, qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ces choses ont été écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu’en croyant vous ayez la vie en Son Nom. » 16

16 Jean 20.30-31.

Sitôt achevée, l’Ecriture démontre son origine et sa puissance en affermissant les croyants, engendrant des conversions, suscitant des communautés nouvelles, portant un fruit digne de son message et dévoilant les fausses doctrines. Les serviteurs de Christ des premiers siècles reconnurent très tôt l’inspiration des écrits apostoliques et dénoncèrent avec véhémence l’emploi abusif des livres apocryphes qui semaient partout la confusion.

Il est frappant de constater qu’Irénée (140-202), Tertullien (160-220), Clément d’Alexandrie (mort en 220), Origène (185-254), Athanase (296-372), principaux Pères de l’Eglise, citent dans leurs écrits tous les livres du canon sacré, sans en omettre un seul, comme étant reconnus pour leur autorité divine. Déjà en l’an 115, Ignace est conscient de cette autorité ; il met ses propres œuvres sur un autre plan : « Je vous en conjure, comme l’ont fait Pierre et Paul : mais ils étaient apôtres, je ne suis qu’un converti… »



Les murailles de Jéricho, telles qu’elles se présentent aujourd’hui.

Et voici un fragment montrant à quel point ces géants de la foi des premiers siècles se soumettaient indiscutablement à la primauté des textes du Nouveau Testament. Dans son commentaire du livre de Josué, Origène mentionne tous les livres Canoniques du Nouveau Testament. A propos des trompettes qui firent tomber Jéricho, il déclare :

« Quand vint notre Seigneur Jésus (Lui dont Josué, fils de Nun, préfigurait la venue), Il fit marcher Ses apôtres comme sacrificateurs portant les trompettes de là magnifique et céleste prédication. C’est d’abord Matthieu qui, le premier, dans son Evangile, fait retentir le clairon sacerdotal. Puis Marc, puis Luc, puis Jean font sonner aussi chacun leur trompette ; puis Pierre après eux éclate des deux trompettes de ses Epîtres. Puis, aussi Jacques, ainsi que Jude. Malgré ces premiers éclats, Jean vient en faire entendre encore d’autres par ses Epîtres et par l’Apocalypse. Enfin, vient celui qui a dit (1 Corinthiens 4.9) : « Je pense que Dieu nous a produits, nous les derniers apôtres. » Et quand il eut fait retentir comme un tonnerre les trompettes de ses quatorze Epîtres, il a renversé jusqu’en leurs fondements les murs de Jéricho, toutes les machines de guerre de l’idolâtrie et de tous les dogmes de la philosophie » 17.

17 Origène : cité par L. Gaussen dans « Le canon des saintes Ecritures », p. 38.

Coïncidence remarquable, si les 22 lettres de l’alphabet hébreu correspondaient au nombre primitif des livres de l’Ancien Testament, les 27 lettres de l’alphabet grec correspondaient, elles aussi, au nombre des livres du Nouveau Testament ; l’Eglise persécutée des premiers siècles interpréta cette coïncidence comme une confirmation permise par Dieu.

Le livre des Actes des Apôtres et les Epîtres évoquent à diverses reprises la lutte acerbe menée par les Juifs contre le christianisme. Elle devient toujours plus âpre et se cristallise dans une opposition farouche dirigée contre les textes sacrés : Ancien et Nouveau Testament. Partant de la Version des Septante, les apôtres ont démontré par les Ecritures que Jésus-Christ était bien le Messie promis. Aux yeux des Juifs, ce texte est donc la cause de tout le trouble ; ils considèrent désormais comme une trahison l’acte des 72 savants juifs descendus en Egypte pour livrer les oracles de Dieu aux païens. Ils vont jusqu’à comparer cette « iniquité » à l’apostasie du veau d’or, relatée en Exode 32.

Conséquence logique de ce courant d’opinions, il devient nécessaire de retraduire l’Ancien Testament en grec, pour appuyer les affirmations des ennemis de l’Evangile et mieux lutter contre le christianisme. Aquila, Juif originaire de Sinope, sur les rives de la mer Noire, s’en charge, de façon tendancieuse évidemment. Pénétrée d’interprétations rationalistes, la version d’Aquila prépare la venue de Marcion ; ce philosophe romain jette à son tour le trouble dans la chrétienté aux environs de l’an 140, en déclarant l’Ancien Testament périmé, puisque à ses yeux le Nouveau Testament s’y est substitué comme révélation parfaitement suffisante.

C’est ainsi qu’au temps de l’Eglise primitive, la Parole de Dieu livre les premiers combats de son histoire mouvementée. D’une part, l’Ancien Testament est écarté, d’autre part on assimile Evangiles et Epîtres canoniques aux nombreux livres apocryphes qui mêlent leurs légendes grossières aux vérités fondamentales de la doctrine biblique. Il est donc nécessaire que des voix autorisées s’é- lèvent avec force pour dénoncer ces abus. Les Pères de l’Eglise reprennent alors pour eux la vocation que l’Eternel avait adressée aux prophètes, vocation qu’il précisa en ces termes à Jérémie :

« Si tu te rattaches à Moi, Je te répondrai, et tu te tiendras devant Moi ;
Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil, tu seras comme Ma bouche. » 18

18 Jérémie 15.19.



Laodicée : porte en ruines, évoquant l’appel du Seigneur à l’Eglise de Laodicée : « Je me tiens à la porte et Je frappe » (Apocalypse 3.20).

Les ravages causés par tant d’opinions contraires à la Révélation expliquent les raisons de l’insistance de ces courageux témoins, pour affirmer l’inspiration des textes bibliques et les différencier des écrits profanes de l’époque. Les Eglises des premiers siècles s’assemblent à diverses reprises en conciles solennels, pour dresser la liste définitive des livres canoniques : Laodicée (360) ; Carthage (397 et 419) ; Chalcédoine (451). Et, moyen supplémentaire de préservation et de diffusion de leur message divin, les saintes Ecritures sont à cette époque traduites en latin.

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