Histoire de la Réformation au temps de Calvin

Chapitre 6
Les partis contraires se préparent au combat

(1518 à 1517)

1.6

Un voleur gracié par l’évêque – Colère du duc – Les envoyés ducaux soupent à Saint-Victor – La Val-d’Isère veut gagner Bonivard. Il échoue – Les envoyés et l’évêque se sauvent – Le duc et l’évêque complotent – Bonivard et Berthelier s’entendent – Caractère de Bonivard, de Berthelier, de Calvin – Sinistre présage

Une nouvelle et puissante opposition se formant dans Genève, il était nécessaire que l’évêque et le duc s’unissent plus étroitement. Un événement de peu d’importance fut alors sur le point de les brouiller et de hâter ainsi l’émancipation genevoise.

Un jour que le podagre bâtard, couché sur un lit de douleur, y souffrait cruellement de la goutte, il entendit quelque bruit dans la rue. « Qu’est-ce ? dit-il. — Un voleur qu’on mène pendre, » lui répondit la vieille femme qui le soignait ; elle ajouta : « Si vous lui faisiez grâce, Monseigneur, il prierait toute sa vie pour votre santé. » L’évêque, entraîné par la manie des malades qui veulent essayer de tout ce qui peut les guérir, dit : « Eh bien, qu’on le mette en liberté. » La coutume était dans Genève (coutume étrange), que les syndics remissent au vidame les hommes qu’ils avaient condamnés ; que le vidame les remît au châtelain de Gaillard (en Savoie), et le châtelain au bourreau. Le bourreau, appuyé du châtelain, allait donc pendre cet homme, quand des olliciers de l’évêque vinrent lui apporter l’ordre de le relâcher. « Je suis serviteur de mon très redouté seigneur le duc de Savoye, dit le châtelain, et je m’acquitterai de l’office dont il m’a chargé. » On convint cependant que l’exécution serait suspendue, et l’évêque fit assembler son conseil pour examiner s’il n’avait pas le droit de faire grâce à un malfaiteur, même quand il était déjà dans les mains du duc chargé de l’exécuter. Il y avait parmi les membres du conseil épiscopal un homme d’un beau caractère, qui allait prendre place dans l’histoire de Genève à côté de Berthelier et même au-dessus de lui. Aimé Lévrier, juge des excès, d’un ancien syndic, ne connaissait de règle que la loi, et n’avait de mobile que le devoir. Sérieux, calme, plein de dignité, doué, si je puis ainsi dire, de la sagesse de Nestor, il était décidé, énergique, pour faire exécuter les lois, et dès que sa conscience se faisait entendre, il lui obéissait dans son obscure sphère, avec l’impétuosité dun Achille, s’il est permis de comparer les petites choses aux grandes. L’agitation du peuple et l’arbitraire des princes le trouvaient également inébranlable. Il vit dans ce petit incident la grande querelle entre l’autorité légitime de l’évêque et les usurpations du duc. « Le prince de Genève, dit-il, a le droit de faire grâce à tout criminel, même si celui-ci se trouve sur les terres de Savoie et déjà au pied de l’échelle. » Puis, voulant saisir l’occasion qui se présentait de montrer que le duc était serviteur dans Genève et non maître, il sortit de la salle, courut vers le patient, coupa ses cordes, le prit par la main, et le menant à l’évêque, il dit au pauvre homme : « Dites merci à Dieu et à Monseigneur ; » après cela il le mit hardiment en liberté. Mais le prélat, qui ne s’était jamais su tant de puissance, commençait déjà à en trembler.

En effet, la colère du duc ne se fit pas attendre. S’il avait donné à son cousin le diocèse de Genève, c’était afin d’y acquérir lui-même le pouvoir souverain ; et voilà que l’évêque, saisi d’un vertige d’indépendance, allait jusqu’à lui contester ses droits de vidame, ses fonctions de bourreau !… Il fallait profiter de cette hardiesse étrange, pour remettre le bâtard à sa place, se défaire de Lévrier, détruire les restes de liberté qui se trouvaient dans cette ville, et y établir l’autorité ducale. Le sieur de La Val-d’Isère, accompagné de deux autres députés, arriva à Genève afin de faire exécuter la volonté de Son Altesse. Ce seigneur entrant la tête haute dans les salles de l’évêché, parla très rudement au bâtard de la part du duc irrité. En vain l’évêque se confondait-il en révérences, en prévenances, en égards, La Val-d’Isère, qui savait bien sa leçon, élevait toujours plus la voix. Malheureux bâtard ! qu’avait-il besoin, se disait-il, de faire grâce à un homme qu’on allait pendre ? Il était à la torture et plus mort que vif. Enfin l’envoyé ducal ayant fini sa verte réprimande, le pauvre prélat tout tremblant s’excusa « comme notre père Adam quand il jeta sa faute sur Ève, » dit Bonivarda. « C’est un certain M. Lévrier, docteur en droit et juge, qui l’a fait ! » dit-il. Le sieur de La Val-d’Isère fit comprendre à l’évêque que loin de se livrer à des velléités d’indépendance, il devait réunir ses efforts à ceux du duc pour combattre dans Genève l’esprit de liberté.

a – Bonivard, Chroniq., II, p. 276.

Cependant l’envoyé ducal admettait jusqu’à un certain point l’excuse du prélat ; il connaissait sa faiblesse et comprenait qu’une autre volonté que la sienne avait agi dans cette affaire. Il communiqua au duc le méfait de Lévrier, et dès lors ce juge intrépide devint l’objet des haines de la cour de Turin et fut voué à la destruction. Les Savoyards disaient que puisqu’il avait détaché le larron de la potence, on devait le mettre à la place du pendu. Le duc et ses ministres comprenaient que toute tentative d’assujettir Genève échouerait tant qu’un défenseur si énergique du droit s’y trouverait. Le soir du jour où La Val-d’Isère avait lavé la tête à l’évêque, cet envoyé ducal, l’un de ses collègues et le vidame soupaient au prieuré de Saint-Victor ; l’ambassadeur était oncle à la mode de Bretagne de Bonivard, et s’était à dessein invité chez lui. Il voulait faire de son cousin un agent dévoué de la Savoie dans Genève, et l’employer, pour commencer, à l’arrestation du juge récalcitrant. Après le repas, La Val-d’Isère prit à part le prieur, et lui fit, dit celui-ci, un grand flattabo. « Mon cher neveu, lui dit-il, le duc n’a homme en ses pays mieux fait que vous pour lui rendre service. Je vous connais ; je vous ai vu quand vous étiez à l’étude par delà les monts, esprit intelligent et spadassin habile, toujours prompt à exécuter quelque œuvre de fait, si cela rendait service à vos amis. Vos ancêtres ont été de loyaux serviteurs de la maison de Savoie, et Monseigneur s’attend à ce que vous vous montriez digne d’eux. » Bonivard fort étonné ne répondait rien. Alors La Val-d’Isère lui exposa comment il pouvait servir le duc dans ses desseins sur Genève ; il ajouta qu’à l’heure même, il pouvait lui rendre un service important. Il s’agissait d’Aimé Lévrier, frondeur déterminé, rebelle comme son père, qu’il fallait arrêter… La Val-d’Isère communiqua son plan à Bonivard. Aimé Lévrier allait d’ordinaire faire ses dévotions à l’église de Notre-Dame de Grâce, près du pont d’Arve. Bonivard le suivrait, le saisirait au moment où il arriverait près de l’église, et le tenant à la gorge, il passerait avec lui le pont d’Arve et le livrerait aux soldats ducaux, qui seraient de l’autre côté, tout prêts à le recevoir. « Ceci est pour vous chose facile, ajouta l’ambassadeur ; chacun connaît, Monsieur mon neveu, votre esprit et vos prouesses… » La Vald’Isère ajouta que Bonivard ferait ainsi deux profits : il se vengerait d’abord de l’évêque qu’il n’aimait guère ; et il recevrait ensuite de Monseigneur de Savoie une superbe récompense. Singulière idée que de charger de ce guet-apens le prieur d’un monastère ; toutefois elle était dans les mœurs du temps. L’intérêt de Bonivard et ses traditions de famille devaient l’engager à servir la Savoie ; mais il avait une intelligence éclairée, une âme indépendante ; il était pour les temps nouveaux. « Depuis que je commençai à lire les histoires, disait-il, j’ai toujours mieux aimé l’État d’une république que celui d’une monarchie, et singulièrement de celles où l’on règne par succession. » Le duc lui eût donné en abondance honneurs et richesses, tandis qu’il ne reçut de la cause qu’il embrassa que pauvreté et prison ; toutefois jamais il n’hésita. L’amour de la liberté s’était emparé de cet esprit distingué, et il lui fut toujours fidèle ; quelles qu’aient été ses faiblesses, c’est là une gloire qu’on ne peut lui ôter. Bonivard voulait rejeter la proposition, sans pourtant trop irriter l’ambassadeur, cela n’était pas difficile ; il lui montra ses habits, son livre d’offices, ses moines, son prieuré, et lui dit : « Monsieur mon oncle, ce n’est plus mon métier de manier l’épée, je l’ai changée contre le bréviaire. » — Lors le sieur de La Val-d’Isère, fort désappointé, s’échauffa et dit : « Eh bien, je le jure, j’irai moi-même, cette nuit, prendre Lévrier dans son lit, et je l’emmènerai pieds et mains liés en Savoie… » Bonivard le regarda en souriant : « Voulez-vous vraiment entreprendre cela, mon oncle ?… dit-il ; eh bien, touchez là. » L’ambassadeur croyant l’avoir gagné lui donna la main. — « Vous allez vous préparer à faire le coup, Monsieur mon neveu. —Non, Monsieur mon oncle, répondit Bonivard en le saluant, je connais le peuple de Genève, il n’est pas tolérant, je vous le déclare, et je vais mettre à part trente florins afin de faire dire demain matin une messe pour votre âme. » Les ambassadeurs sortirent fort courroucésb.

b – Bonivard, Chroniq., II, p. 277, 278.

Bonivard comprit que la vie de Lévrier était en grand danger. On soupait alors de bonne heure ; le prieur attendit que la nuit fût venue ; sortant alors du monastère, sous un déguisement, il se glissa furtivement dans les rues, et entrant dans la maison de son ami, le juge des excès, il l’avertit de tout. Lévrier courut à son tour chez Berthelier. « Oh ! oh ! dit celui-ci qui était capitaine de la ville, Messieurs de Savoie veulent faire les maîtres chez nous ! nous allons leur apprendre que ce n’est pas si facile. »

Dans ce même moment, on apportait aux syndics la nouvelle que des lansquenets se trouvaient au Vengeron (à demi-lieue de la ville sur la rive droite du lac), et s’apprêtaient à envahir le faubourg de Saint-Gervais ; il était clair que la Savoie voulait enlever le juge. Les syndics ordonnèrent à Berthelier de faire la garde à main armée pendant toute la nuit. Il assembla les compagnies ; et tous les compagnons, serrant leurs rangs, se promenèrent tambour battant dans les rues, passant et repassant devant la maison du vidame, Aymon Conseil, où logeaient les ambassadeurs.

Le sieur de La Val-d’Isère, le sieur J. de Crans et Pierre Lambert, ses collègues, croyaient à tout moment qu’ils allaient se voir attaqués par ces hommes d’armes. Ils se rappelèrent la messe des trépassés dont Bonivard avait parlé, et ils passèrent une horrible nuit. Vers le matin la ville se calma, et à peine fut-il jour que les envoyés de Savoie, faisant seller leurs chevaux, sortirent par une fausse porte dont l’évêque avait la clef, et coururent raconter le tout à leur maîtrec. Malgré cette retraite précipitée, l’un des buts de leur mission fut atteint. Les députés de Savoie ne furent pas les seuls à quitter Genève ; le bâtard était encore plus effrayé qu’eux ; la peur lui ôta la goutte, il sortit de son lit ; et prenant avec lui le comte de Genevois, frère du duc, il se rendit au delà des monts, à Turin, afin d’apaiser son terrible cousin. Celui-ci était fort irrité. Ce n’était pas assez d’empiéter sur ses droits, on contraignait encore ses envoyés à s’enfuir de Genève. Le bâtard n’oubliait rien pour se justifier ; il rampait aux pieds de Charles III. Il était, disait-il, le plus à plaindre ; ces Genevois l’épouvantaient jour et nuit. « J’oublie tout, lui dit enfin le prince, pourvu que vous me prêtiez main forte pour mettre ces républicains à la raison. » C’était ce qu’avait prévu le prieur de Saint-Victor. « Comme Hérode et Pilate s’accordèrent pour la mort de Jésus-Christ, dit-il, ainsi font le duc et l’évêque pour la mort de Genève. — Mon cousin, continua le duc, entendons-nous ; vous avez dans votre bergerie certains chiens qui aboient très fort et défendent vigoureusement vos brebis, il faut s’en défaire… Je ne parle pas seulement de Lévrier le fils, il y a encore Lévrier le père et Berthelier, contre lesquels il vous faut avoir la dent. — Le père Lévrier, répondit le bâtard, est envieux renard cault (précautionneux) et rusé, qui se sait bien garder de prise ; quant à Berthelier, il est chaud, colérique, et chante incontinent ce qu’il pense ; on peut trouver sur lui meilleure occasion de l’attraper ; et celui-ci une fois abattu, nous aurons bon marché des autres. » C’est ainsi que les princes de Savoie, réunis dans le cabinet de Son Altesse, au palais de Turin, conspiraient la ruine de Genève, et préparaient la mort de ses meilleurs citoyens. Charles le bon était le plus cruel et le plus obstiné des trois. « Jouons le jeu à bon escient, redisait-il, il faut les avoir morts ou vifs. » Le duc, le comte et l’évêque se distribuèrent les rôles, puis les loups (c’est le nom que leur donnait Bonivard) attendirent quelque bonne occasion de se jeter sur les chiensd.

cChroniq. du pays de Vaud, Bibl. imp., n° 16720. — Bonivard, Chroniq., II, p. 276 à 279.

d – Bonivard, Chroniq., II, p. 279, 383. —Manuscrit de Roset, liv. I, ch. xxvi. — Matériaux pour l'histoire de Genève, II, p. 111, 119, 136.

Tandis que l’on se préparait ainsi à Turin à écraser la liberté, on se préparait à Genève à combattre et à mourir pour elle. Des deux côtés on courait aux armes ; la rencontre ne pouvait manquer d’être rude, et l’issue devait en être importante pour Genève et pour la société. Deux amis surtout ne perdaient pas de vue la lutte qui s’approchait. Berthelier poussait au renouvellement de Genève par des motifs démocratiques ; Bonivard y poussait par l’amour des lettres, de la philosophie et des idées nouvelles. Assis à côté l’un de l’autre dans le prieuré de Saint-Victor, le vin doux et piquant sur la table, ils devisaient sur les temps nouveaux. Bonivard avait pour Berthelier un charme inexprimable. Le jeune prieur, esprit plein de grâce, de naïveté, de poésie, d’imagination, mais aussi de malice, s’éveillait alors avec le seizième siècle, et jetait sur la nature et sur le monde un regard animé. Son style dénote son caractère ; il trouvait toujours l’expression la plus forte, la plus mordante, sans les ombres de la délicatesse ni les ambages de la subtilité. Il y avait pourtant en lui des parties élevées ; il était enthousiaste des idées. Une pensée qui traversait son esprit faisait naître dans son âme de hautes aspirations, et découler de ses lèvres les accents de l’éloquence. Mais, en général, les hommes lui déplaisaient. Gentilhomme bien élevé, esprit fin et gracieux, homme du monde, il trouvait un peu vulgaires les bourgeois qui l’entouraient, et ne leur épargnait pas le sel de la satire. Quand Berthelier, au milieu du bruit des tavernes, secouait chaudement les mains des enfants de Genève et les enrôlait pour la grande campagne de l’indépendance, Bonivard embarrassé se retirait et mettait ses gants. « Les petites gens, disait-il avec quelque dédain, n’aiment la justice que dans autrui, et quant aux riches marchands, ils préfèrent certes les fêtes et les écus des nobles savoyards aux charmes de l’indépendance. » Il était enclin à soupçonner le mal ; c’est là un des traits fâcheux de son caractère. Besançon Hugues lui-même n’était à ses yeux que l’orgueil, caché sous le masque d’un citoyen. Bonivard, comme Érasme, se riait de tous et de tout, sauf deux choses pourtant : il était comme lui grand amateur des lettres, et il l’était plus que lui de la liberté. Il fut à Genève l’homme de la Renaissance, comme Calvin celui de la Réformation. Il surmontait ses délicatesses, il se mettait à table avec les enfants de Genève ; il semait dans leurs conversations des paroles brillantes, et allumait dans leurs intelligences des lumières qui ne devaient pas s’éteindre. Léger et grave, aimable et passionné, studieux et frivole, Bonivard attaqua la vieille société, mais il n’aima pas la nouvelle. Il flagella les désordres des moines, mais il s’effraya des doctrines sévères de la Réformation. Il voulut enterrer joyeusement le passé, mais il ne sut quel avenir il fallait mettre à la place.

Berthelier, qui croyait le savoir, exposait ses plans à son ami dans leurs colloques familiers. La liberté des républiques italiennes, liberté égoïste, pleine de discorde et de partis, avait pris fin ; une liberté plus noble, plus vitale, plus durable, devait paraître. Mais ni le politique Berthelier, ni l’esthétique Bonivard, ne pensaient au nouvel élément qui, dans les temps nouveaux, devait donner vie à la liberté nouvelle : cet élément c’était une foi puissante, c’était l’autorité de Dieu, bien haut élevée, qui devait affermir la société au milieu du grand ébranlement qu’elle allait subir. Après Berthelier le républicain, après Bonivard le classique, devait paraître un autre homme, tertium genus, une « troisième espèce, » comme on disait au moment où le paganisme et le judaïsme disparaissaient devant l’Évangile. Un héros chrétien se tenant debout, avec courage, sur le volcan des passions populaires, devait, au milieu des convulsions de la papauté, poser dans Genève les bases d’une société éclairée, d’une morale inflexible, d’une foi inébranlable, et sauver ainsi la cause de la liberté. L’œuvre de Calvin venant après celle de Berthelier et de Bonivard, offre sans doute une juxtaposition des plus étranges ; mais trois siècles en ont montré la nécessité. La Réformation est indispensable à l’émancipation des peuples.

Berthelier, Bonivard et leurs amis portèrent d’un autre côté leurs regards. « Assez de banquets, assez de danses, dit Berthelier à son ami ; il faut organiser les enfants de Genève en ligue de défense. — Oui, marchons de l’avant, répondit Bonivard, et Dieu donnera bonne issue à nos folles entreprises !… » Berthelier lui tendit la main. « Monsieur mon compère, lui dit-il, touchez làe ! » Puis comme il tenait la main de Bonivard dans la sienne il fut saisi d’une profonde émotion ; un nuage se répandit sur ses traits, et il ajouta : « Mais sachez que pour la liberté de Genève, vous perdrez votre bénéfice, et moi… je perdrai la tête. » « Il m’a dit « cela cent fois, » ajoute le prieur de Saint-Victor, qui nous a transmis cette conversation. Ce sinistre présage ne devait que trop s’accomplir.

e – Bonivard, Chroniq., I, p. 28, 29. — Ibid., p. 238.

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