Quand nous disons que la conscience chrétienne a le pouvoir de reproduire scientifiquement, avec son propre fonds, l’enseignement de l’Écriture et de l’Église, nous n’affirmons rien d’autre que ce qu’implique la doctrine, bien entendue, du témoignage du Saint-Esprit (testimonium Spiritus sancti). Le témoignage de l’Esprit serait, en effet, entendu dans un sens par trop restreint, si on ne lui donnait qu’une signification, pratique pour la conscience, le sentiment et le cœur, et si on ne l’admettait pas, en même temps, comme l’Esprit de Dieu s’attestant lui-même à l’esprit de l’homme par la vérité de la pensée et de l’intelligence. Quoique nous sachions fort bien que le témoignage essentiel de l’Esprit, celui qui nous importe le plus, consiste dans la démonstration de la puissance de la vérité chrétienne, nous n’en affirmons pas moins que l’intelligence en est une partie intégrante, et que sans son concours il resterait incomplet et insuffisant pour l’accomplissement de son œuvre. En attribuant ainsi au témoignage du Saint-Esprit non seulement une valeur pratique mais intellectuelle, nous présupposons dans la conscience du croyant, en face de la vérité révélée, un idéal de vérité chrétienne, et nous établissons ainsi un moyen de connaître cette vérité relativement indépendante de l’Écriture et de l’Église ; mais, si exorbitante que puisse paraître cette prétention, elle ne fait qu’affirmer, au point de vue intellectuel, ce que tous concèdent sans peine dans les domaines de l’art et de la morale. Au point de vue moral, en effet, on est forcé d’admettre qu’il existe a priori, dans le cœur de l’homme, une faculté d’intuition chrétienne indépendante ; car, sans parler de la morale chrétienne en tant que science, on rencontre à chaque instant, dans la vie et dans l’histoire, un fonds commun de conceptions et d’idées morales, sorte de christianisme pratique, qui bien loin d’être le décalque du christianisme révélé, coexiste avec lui, lui prenant et lui donnant sans cesse, devenant, par le fait de la conscience chrétienne dont il émane, une puissance qui sait poser et résoudre des problèmes nouveaux. Au point de vue esthétique, on se voit également contraint à la même conclusion. L’art chrétien a produit tout un monde de créations nouvelles qui ont certainement leur modèle dans la Révélation elle-même, mais qui n’en supposent pas moins un beau idéal chrétien éclos au cœur de l’artiste lui-même. Si nous admettons un beau idéal moral sans lequel la force morale serait incapable de s’affirmer, un beau idéal esthétique sans lequel l’art chrétien n’existerait pas, pourquoi n’admettrions-nous pas également un idéal de vérité chrétienne, son existence nous étant attestée par la science chrétienne, par le labeur dogmatique que nous retrouvons à tous les âges, et surtout par la symbolique ecclésiastique.
Remarque. — La Bible appelle l’idée : la sagesse, non point la sagesse en tant que propriété, mais en tant que pensée divine, et elle la représente comme s’ébattant, avant même la fondation du monde, devant le trône de Dieu. En elle-même, la vérité chrétienne, idée, expression de cette sagesse divine, dont l’empreinte nous est manifestée dans l’œuvre de la Révélation, peut être considérée comme le principe qui, dans l’ensemble si multiple et si vivant des faits révélés, coordonne et distingue, assemble et sépare, combine et réalise le plan et l’intention suprêmes. Mais cette sagesse sainte, comme une lumière intérieure, doit être présente dans l’esprit de l’homme qui a cru à la révélation ; elle doit en éclairer et en manifester la pensée véritable. Par le moyen de cette sagesse divine, devenue dans la conscience du croyant le principe de l’intelligence, la pensée humaine peut sonder les profondeurs de la révélation et saisir les faits chrétiens à la hauteur où ils se rencontrent, unis et distincts, dans la même cause ; c’est elle encore qui nous rend capables de contempler, dans notre propre pensée, la sagesse révélée reflétant sa propre image.
La connaissance chrétienne est une connaissance dans la foi, car ce n’est que par la foi que l’esprit de l’homme peut être fait participant de la sagesse divine. (Credo ut intelligam. — Croire pour comprendre.) La science qui veut procéder d’une autonomie indépendante de toute présupposition antérieure, croyant que l’esprit de l’homme, par sa propre force, avec la substance de sa pensée, peut créer la vérité, se prenant lui-même comme le centre et la cause du savoir universel, méconnaît la nature créée de l’intelligence, et ne voit pas que l’homme ne peut être qu’à la condition d’avoir un Créateur. Mais la foi confesse l’intelligence humaine comme une création incapable de subsister, à moins qu’elle ne vive en rapport constant avec sa cause, son objet, pour acquérir et conquérir sans cesse cette lumière qui vient d’en haut, et qui ne peut être qu’à la condition de provoquer en nous, tout en nous humiliant, un sentiment de reconnaissance et de confiance pour Celui dont elle émaned. Pour l’intelligence humaine, il n’y a point d’existence indépendante sans le sentiment de la dépendance, point d’action sans soumission ; elle ne peut agir qu’à la condition d’être d’abord sujette. L’intellectus activus, l’intelligence qui agit, reste dans la dépendance de l’intellectus passivus, de l’intelligence qui reçoit. La fausse science, qui ne veut pas croire pour connaître, nie non seulement la création de l’homme, mais aussi son état de péché et, par conséquent, la nécessité de la rédemption. Car ce n’est que par la nouvelle naissance que l’esprit de l’homme, obscurci par le péché, peut s’élever à cette hauteur de l’être et de la vie où l’on recouvre la vue des choses humaines et divines. Mais ce n’est que dans la foi que la nouvelle naissance peut trouver sa cause et son expression. L’axiome chrétien, la foi mère de l’intelligence, créatrice du savoir, se trouve confirmé et préfiguré par les conditions premières que toutes les sciences humaines sont obligées d’accepter comme leur raison d’être et leur véritable point de départ. Il n’en est pas une, en effet, qui ne réclame un sens spécial en harmonie avec l’objet dont elle veut être l’expression. Il est inutile de parler musique à celui qui n’a pas le sens de l’ouïe, et d’exposer à un aveugle la théorie des couleurs ; inutile encore de dire les choses saintes à celui qui n’aurait pas la faculté capable de les saisir. « La cathédrale de Strasbourg et le dôme de Cologne, dit Steffens, bien haut vers le ciel font monter leurs flèches saintes et recueillies ; et cependant, pour combien de siècles et de générations, ces sublimes et grandes œuvres ne sont-elles pas aussi profondément ensevelies que les ruines de Pompéï et d’Herculanum ? Des siècles et des générations vivent et passent à leurs pieds, et jamais ne les aperçoivent, parce qu’ils n’ont pas l’œil qui peut les voir ! » Et nous, dirons-nous à notre tour, que d’hommes qui n’ont jamais su voir l’Église dans l’histoire, quoiqu’elle soit la Cité sise sur la haute montagne, parce qu’ils n’ont pas la foi, c’est-à-dire l’œil qui sait voir !
d – Voir la dissertation de l’auteur sur l’autonomie de la conscience humaine.
Par son principe : croire pour comprendre, credo ut intelligam, la Dogmatique chrétienne se distingue de la philosophie qui prend pour son premier axiome le doute universel, de omnibus dubitandum, et qui croit que la vérité ne peut se rencontrer qu’au terme d’une longue exploration, que celui-là seul peut entreprendre et mener à bien, qui sait au préalable s’affranchir de toute idée préconçue. La science chrétienne, au contraire, reçoit son impulsion non point du doute, mais de la foi. Si le doute tient encore sa place dans la Dogmatique, ce n’est que pour autant qu’il exprime l’instinct critique et dialectique, le besoin de clarté et d’évidence, l’un des traits distinctifs de la foi véritable. Appelée à conquérir un monde de péché, de mensonge et d’erreur, ce monde étant non seulement contre l’Église mais dans l’Église, il faut que la foi possède le sens critique, le don d’éprouver les esprits, de reconnaître s’ils sont de Dieu, de discerner ce qui n’est qu’à l’Église et ce qui est au Christ, de se juger elle-même et de se démontrer à elle-même sa propre réalité. De plus, la foi étant aussi un savoir (§ 8), elle doit également posséder la faculté dialectique nécessaire pour se rendre compte des antinomies intellectuelles, qu’elle porte en elle-même. La foi chrétienne ne sera jamais la naïve crédulité avec laquelle certains se plaisent à la confondre. Et lorsque l’Évangile nous recommande la foi des simples et des petits enfants, il faut nous rappeler le grain de sel, granum salis, que le Seigneur nous exhorte à porter toujours en nous-mêmes ; car la foi, plus elle est simple et vraie, et mieux elle a le don d’éprouver les esprits et de s’éprouver elle-même. C’est au nom de cette foi que Luther a douté de la tradition ecclésiastique et de son christianisme monacal. Nous voyons, à toutes les époques de l’histoire ecclésiastique, les docteurs illustres, ceux qui se sont le plus distingués par l’héroïsme et la simplicité de leur foi, se signaler surtout dans la défense de la vérité chrétienne par la puissance de leur dialectique. Cet instinct critique, dès les temps les plus anciens, a été nécessaire à l’Église pour qu’elle pût rigoureusement établir ce qui était à elle et ce qui était contre elle, ce qui était la vérité et ce qui était l’erreur. Ce jugement ne pouvait se faire que par l’application de la dialectique la plus rigoureuse aux doctrines chrétiennes. Il fallait prendre un à un les faits contestés, les comparer à l’idée chrétienne fondamentale, prononcer sur leur convenance ou leur disconvenance, puis, cette première épreuve accomplie, la démonstration exigeait qu’intervînt la comparaison du fait en litige avec chacun des dogmes chrétiens considérés isolément et avec ces dogmes formant un seul ensemble. Ce n’est qu’en ce sens critique et dialectique que peut intervenir le doute dans la Dogmatique. On ne peut le concevoir distinct de la foi ; et, lorsqu’au lieu de servir à la glorification de la vie et de la vérité chrétiennes, il ne sait plus que se servir lui-même, n’ayant plus en vue que sa propre indépendance, alors on voit apparaître, ainsi que l’histoire du protestantisme l’a surabondamment et douloureusement démontré, le rationalisme avec sa critique dissolvante et sa dialectique impuissante et bornée.
Remarque. — L’expérience bien souvent nous en a donné la preuve : un doute absolu aux vérités premières de l’Évangile peut être la préparation à une conviction chrétienne définitive. Si intéressant que puisse être ce doute, au point de vue moral et religieux, et même sous le rapport scientifique, il ne peut pas revendiquer sa place dans la Dogmatique. Pour celui qui doute, l’intérêt dogmatique n’existe pas encore, absorbé qu’il est par une seule question, la recherche d’un point d’appui, le δός μοι ποῦ στῶ. Ce n’est qu’après la réponse à cette question fondamentale que peut commencer l’étude de la Dogmatique proprement dite.
Si nous maintenons contre le rationalisme autonomiste le principe credo ut intelligam, nous ne le concevons point cependant comme l’ont conçu le mysticisme et le scolasticisme. Le scolasticisme l’acceptait trop souvent sous une forme morte et artificielle ; il recevait au nom de l’autorité, et sans aucune critique, le contenu de la foi. Ce contenu n’était donc pour lui qu’une chose purement extérieure, sans rapport aucun avec la réalité intime. En opposition à cette erreur de la scolastique, le mysticisme et Schleiermacher, de nos jours, conçoivent la foi comme le principe de la vie et font procéder la connaissance du sentiment religieux ; mais le mysticisme, en méconnaissant l’idée de la révélation, et la théologie du sentiment, en concevant la Dogmatique comme la description des émotions et des expériences de l’âme pieuse, font du principe : croire pour comprendre, une nouvelle erreur. La Dogmatique n’est plus dès lors qu’une simple exposition du moi religieux et un manuel de piété ; au lieu d’être la doctrine de Dieu et de la révélation, elle devient la description des aspirations chrétiennes de l’homme et du christianisme par lui expérimenté ; elle cesse d’être l’enseignement du christianisme, tel qu’il s’adresse à l’homme, dans son éternelle vérité, et tel qu’il veut être cru. La Dogmatique devient ainsi une étude sur la manière dont s’accomplit en nous le salut. Quant aux grands faits de la révélation, les fondements et les assises de la vérité, qui doivent avant tout la préoccuper, elle en dispose d’après des besoins purement subjectifs. Pour que la vérité obtienne toute sa signification, il faut que la foi, non seulement soit le principe de la vie intérieure, mais que, réserve faite de la nécessité du rapport de cette vie au christianisme objectif, il soit bien entendu que cette foi n’est pas la simple expérimentation des effets du christianisme, mais qu’elle est en même temps le sens intellectuel, l’organe principal, l’œil en un mot qui saisit et contemple le monde révélé dans son ensemble. Cette vérité a été reconnue par la théosophie et le mysticisme spéculatif ; Jacob Boehme lui-même enseigne que la foi doit être un regard. Quoique ces systèmes aient souvent fait fausse route, détournant les âmes de la réalité, ils n’en ont pas moins affirmé la nécessité du rapport de la foi avec le fait extérieur. Maintenant la nécessité de ce rapport, nous définissons donc la Dogmatique, non point une science décrivant l’état d’âme particulier au croyant (cette science est l’objet spécial de la morale) mais une exposition de la foi (fides quæ creditur). Cette exposition ne nous donnera pas les émotions et les états d’âme du croyant, mais une analyse fidèle des vérités chrétiennes ; elle ne nous dira pas non plus les expériences intimes d’un cœur pieux, mais elle développera dans tout son ensemble la conception chrétienne de la Révélation. Nous savons bien, par l’expérience des anciens et des modernes, qu’en partant de cette définition on peut arriver à une conception extérieure et morte de la Révélation, et par conséquent à un intellectualisme énervant pour la vie chrétienne. Mais cette conséquence n’est pas nécessairement impliquée dans une connaissance qui, pour être une connaissance sur la religion, n’en est pas moins, et avant tout, une connaissance religieuse. Le sentiment ne peut pas être le principe de cette connaissance, mais il en est cependant la condition préalable et toute première ; quant au principe lui-même de la connaissance, il n’est pas autre que l’idée, que la pensée de la sagesse divine. Ce n’est que lorsque nous sommes dans un rapport vivant et personnel avec Dieu, que cette idée projette pour nous sa clarté ; mais ce rapport cessant, cette lumière s’éteint comme s’éteignirent, faute d’huile, les lampes des vierges folles. Aussi est-ce avec raison que les plus profonds penseurs du moyen-âge ont appelé de tous leurs vœux l’union de la mystique et de la scolastique, l’intelligence (intellectus) pensant avec le cœur (affectus).
Remarque. — La Dogmatique, envisagée comme l’étude des différents moments d’une âme pieuse, peut s’appuyer en un certain sens sur l’autorité et l’exemple des premiers Réformateurs. Dès l’abord, par dégoût de la théologie scolastique, ils s’attachèrent de préférence à la foi par laquelle on croit (fides qua creditur), insistant sur la manière dont se fait en nous le salut. Ils mirent en relief, et non sans une certaine prédilection, le côté pratique, la question d’édification ; nous en avons la preuve dans ce passage si connu de la 1re édition des Loci theologici de Mélanchton : « Non est cur multum operæ ponamus in locis illis supremis, de Deo, de unitate, de trinitate, de mysterio creationis, de modo incarnationis. Quæso te, quid adsecuti sunt jam tot sæculis scolastici theologistæ, quum in his locis solis versarentur ? Hoc est Christum cognoscere, beneficia ejus cognoscere. »
[Il n’est pas nécessaire de nous arrêter longuement sur ces grandes questions : Dieu, son unité, la trinité, le mystère de la création, le mode de l’incarnation. Je vous le demande, en effet, qu’ont obtenu les théologiens scolastiques, qui pendant tant de siècles se sont obstinés dans l’étude exclusive de ces mystères ? Pour nous, il n’y a qu’une seule manière de connaître Christ : connaître ses bienfaits.]
Si Mélanchton, dans les éditions subséquentes, omit ce passage, ce fut sans doute dans la crainte qu’il ne favorisât l’erreur qui prétend juger le christianisme d’après les besoins de l’homme et d’après les effets qu’il produit en lui, tandis qu’au christianisme seul il appartient de nous donner la règle en vertu de laquelle nous pouvons apprécier les besoins et les expériences du fidèle. Mais à se préoccuper exclusivement du croyant et de ses états d’âme, on devient indifférent à la foi historique, qui est essentiellement la foi qui doit être crue (fides quæ creditur). Dans l’intérêt de l’édification, il ne faut donc pas oublier le contenu de la foi, c’est-à-dire la cause elle-même qui produit l’édification. Le protestantisme nous donne à cet égard un bien sévère avertissement, et, si nous étions tentés de l’oublier, la piété individualiste, de plus en plus en honneur au milieu de nous, serait là pour nous le rappeler par ses inconséquences, son arbitraire, en un mot par son atomisme sectaire. Luther, que l’on ne peut certes pas accuser d’indifférence quand il s’agit de l’intérêt de l’édification, distingue soigneusement entre la chose elle-même, la croyance, et l’usage que l’on peut en faire — res ipsa et usus. C’est ainsi que dans la question des sacrements il dit d’abord la nature, la signification intime du sacrement, et puis la pratique du sacrement. Il veut toujours que l’on soit premièrement bien instruit sur la doctrine qui constitue l’essence du christianisme, avant d’en venir à l’application et à la pratique, car sans cela, dit-il, on ne commettrait, à propos et sous prétexte d’édification, qu’un inutile et plat verbiage. Tel est précisément le but de la Dogmatique : nous représenter si réellement le type fondamental de la doctrine chrétienne, qu’étant donnée une époque, ses besoins, ses circonstances morales et intellectuelles, le prédicateur sache lui annoncer l’Évangile sous sa forme la plus utile et la plus directement applicable. Mais indépendamment de ce but pratique et ecclésiastique, la Dogmatique a en elle-même son propre but. Tout en donnant notre entier assentiment au dire de Mélanchton dans le passage cité plus haut, sur l’inutilité d’une spéculation oiseuse et sans rapports avec la vie, nous ne pouvons pas ne pas reconnaître qu’il est bon et édifiant d’avoir à constater et à reconnaître les mystères et la gloire de Dieu. Quand bien même, par cette étude, on ne pourrait obtenir d’autre résultat que la conviction de l’inutilité de nos efforts pour sonder les voies de Dieu, les forces et le temps employés à cet effet, bien loin d’être perdus, serviraient grandement pour accroître en nous la crainte et l’adoration que nous devons à Celui qu’entourent les mystères insondables de l’éternité. On comprend sans peine, en effet, qu’une ignorance conquise par ce labeur incessant de la recherche scientifique doit avoir une tout autre signification que celle qui ne sait pas qu’elle ignore, et qui n’a jamais été tentée par la curiosité intellectuelle. De même qu’il est un savoir qui doit distinguer le théologien du laïque (et par cette distinction nous n’entendons autoriser aucune manière d’ésotérisme ou d’exotérisme au sens gnostique), il est aussi une ignorance que, plus que le laïque, doit posséder le théologien. Contrairement à ce que nous disons ici, on a souvent vu l’orgueil théologique se dissimuler, tour à tour, sous l’ignorance ou sous le savoir ésotériques, échangeant, tout aussi bien que l’orgueil philosophique, le masque de Socrate pour celui de Paracelse.
La Dogmatique a donc pour but de représenter l’idée, la conception chrétiennes, à l’aide de doctrines rigoureusement dépendantes les unes des autres et formant un ensemble systématique. Cette étude représente d’abord un travail analytique exposant le fait implicitement renfermé dans la conception, et expliquant la force, le principe organique, qu’il contient virtuellement. Mais ce travail ne peut pas se poursuivre sans provoquer la curiosité scientifique, la spéculation proprement dite ; il ne saurait lui suffire de dire le fait en lui-même et les conséquences qu’il appelle : il en vient forcément à se demander si le fait est réel et quelle est sa cause première. Il lui est impossible de dire : « Il en est ainsi (ita) », sans poser en même temps la question du quare, pourquoi. Plus sérieusement se poursuit ce travail analytique, et plus nécessairement il nous fait rencontrer des idées représentant des dualités, des antinomies, qui attendent, pour pouvoir se concilier entre elles, une conception supérieure. Car, ainsi que le dit Sirach : « Les œuvres du Très-Haut vont toujours deux à deux, l’une est ordonnée contre l’autre, (23.16) ». La spéculation a pour but de résoudre ces contraires dans l’unité de l’idée chrétienne. La contemplation spéculative du fait chrétien doit toujours être à la base de ce travail, si on ne veut pas qu’il aille s’égarer dans un rationalisme desséchant et inintelligible, ou qu’il se réduise, sous prétexte d’une application immédiate et pratique, à une froide nomenclature des vérités révélées. Malgré toutes les méfiances qu’un Irénée ou qu’un Luther ne cessent de témoigner à la pensée spéculative, toutes leurs œuvres attestent qu’ils n’en possèdent pas moins ce regard du voyant, contemplant tous les faits particuliers, à la grande lumière de l’idée chrétienne première. Nous accordons volontiers que, pour Luther, la forme préférée de la Dogmatique et de la théologie positive en général, est le ita, le oui, et non le pourquoi, le quare. On ne saurait, en effet, oublier le zèle avec lequel il a toujours combattu le pourquoi de la curiosité sophistique des scolastiques, et ses incessantes exhortations à retenir humblement le oui. Néanmoins, nous ne savons pas trouver une ligne de démarcation bien nette et toujours infranchissable pour séparer le travail qui reçoit le fait chrétien et l’analyse, de l’effort spéculatif proprement dit. Il n’est pas de oui qui ne contienne un pourquoi. Et le pourquoi, par le travail de l’analyse, provoque une spéculation d’une nature plus élevée. Mais nous ne devons pas oublier que, dans l’état actuel de nos connaissances, nous ne pouvons comprendre qu’imparfaitement, et que seul le regard de la foi peut saisir la réalité vivante et vraie dans cette plénitude qu’aucune compréhension humaine ne pourra jamais ni posséder ni épuiser. Si ceux-là qui prétendent au pouvoir de tout expliquer se réservent de cruelles déceptions, il en est de même des adversaires qui veulent leur imposer un nec plus ultra, une barrière infranchissable, au delà de laquelle il leur serait à tout jamais interdit de regarder. L’expérience se charge de nous apprendre que le nec plus ultra de la veille n’est plus celui du lendemain, et que ces colonnes d’Hercule que l’on tenait pour infranchissables se laissent volontiers dépasser, se dérobant à notre poursuite, agrandissant incessamment notre horizon. Il est par conséquent d’une saine raison de reconnaître que la puissance spéculative est un fait intellectuel, changeant, mobile, que l’on ne peut satisfaire avec un oui ou un non définitif, pas plus qu’on ne saurait le contenir dans l’alternative d’un dilemme exigeant qu’une chose soit telle qu’il la comprend, ou qu’elle ne soit pas. Cette puissance, à proprement parler, n’existe qu’à l’état de devenir. Aussi l’on peut dire que toute conclusion, bien qu’on la tienne pour définitive, n’est que relative, et que le problème qu’on vient de résoudre est un problème qui s’impose à nouveau, attendant encore une nouvelle solution. En l’état actuel de nos connaissances, une chose est certaine, c’est ce je ne sais quoi divinateur, qui attend et qui prophétise une solution meilleure et plus élevée que toutes celles que nous possédons ici-bas.
La méthode scientifique employée par notre discipline est apologétique et dogmatique : apologétique, elle affirme et justifie la vérité chrétienne, en attaquant et renversant ce qui n’est pas chrétien et ce qui est antichrétien ; dogmatique, au sens strict du mot, elle expose directement la vérité chrétienne, et nous montre tout ce qu’elle renferme en elle-même de richesse et de puissance. Les premiers développements du dogme chrétien se sont réalisés dans la lutte contre le judaïsme et le paganisme ; aussi sont-ils tous d’une signification essentiellement apologétique ou, si l’on aime mieux, polémique, car au point de vue chrétien l’apologétique et la polémique, l’attaque et la défense sont inséparablese. Mais le vieil esprit juif et païen est encore à l’œuvre au milieu de nous, se manifestant sous des apparences bien diverses ; il faut donc que le christianisme retienne, pour démontrer sa foi, la puissance critique qui juge le monde. Au reste, la différence entre l’apologétique et la dogmatique proprement dite ne saurait être absolue, car si, d’une part, l’erreur et le mensonge ne peuvent être confondus que par la connaissance complète de la vérité, de l’autre, la vérité ne peut apparaître dans tout son éclat qu’à la condition de triompher de tous les adversaires qui s’élèvent contre elle.
e – 1 Pierre 3.15 ; 2 Corinthiens 10.5.
Si nous nous demandons maintenant quels sont les rapports que la dogmatique est appelée à soutenir avec la philosophie, étant donnée la philosophie païenne qui a la prétention de créer la vérité par elle-même et avec ses seules forces, il est évident que ces rapports ne peuvent être que ceux de l’opposition la plus complète. Le christianisme étant apparu dans le monde comme un appel à la repentance, avec une doctrine se réclamant d’une origine tout autre que celle de la philosophie, il a dû dès l’abord combattre la sagesse du siècle, s’efforçant de soustraire les âmes à son exclusive domination. Mais en même temps que, par le seul fait de son apparition, le christianisme a su produire une science nouvelle, une théologie, nous sommes bien obligés de nous demander si, à côté de cette théologie, il peut y avoir encore de la place pour une philosophie chrétienne, et quels doivent être, dans ce cas, les rapports qu’elle pourra soutenir avec la théologie. Étant donnée une philosophie chrétienne, nous devons admettre qu’elle doit être liée aux mêmes lois, aux mêmes principes fondamentaux, pour toutes ses opérations intellectuelles, que la théologie ; par conséquent, elle doit procéder comme elle du « Credo ut intelligam » de la foi, condition première de l’intelligence. La seule différence qui les distingue, c’est que la philosophie, et surtout la philosophie chrétienne, est un savoir qui embrasse l’univers tout entier, tandis que la théologie est la connaissance de Dieu, différence il est vrai toute relative, mais différence néanmoins qui subsiste et ne veut pas être méconnue. La philosophie cherche la loi cosmique universelle, telle qu’elle se manifeste dans la création tout entière, dans les domaines si divers de la nature et du monde des esprits, s’efforçant de démontrer dans le christianisme la plus parfaite réalisation de cette loi. La philosophie prend donc pour son domaine l’universel ; elle s’efforce de le ramener à l’unité, au royaume de Dieu, comme au point central, au foyer dont la lumière doit expliquer toutes les contradictions. La théologie, la dogmatique au contraire prend son point de départ dans le royaume de Dieu envisagé comme le centre et l’unité par excellence. Ainsi donc la philosophie religieuse et chrétienne prend son point de départ dans l’univers, cherchant, par une série de déductions sur les principes généraux qui président à la manifestation de la vie sur cette terre, à retrouver dans le christianisme l’expression de l’être, dans ce qu’il a de plus puissant et de plus élevé : la dogmatique, au contraire, procède de l’Église, mais tout en s’efforçant de saisir les éléments de la vérité chrétienne, dans leur nature et leur connexion intime, elle doit, surtout au point de vue apologétique, apprendre à connaître la philosophie chrétienne. Nous dirons encore que si la philosophie représente ce qu’il y a d’universel dans le christianisme, la théologie retient pour elle ce qu’il a de central et de vivifiant. Pour mieux et complètement résumer notre pensée, nous dirons en terminant que si la philosophie peut successivement transporter ses foyers dans tous les domaines de la pensée, la théologie a une patrie, l’Église, et il n’est en son pouvoir ni de l’oublier ni de la répudier.
Remarque. — Si l’on veut rendre plus sensible encore la différence de la philosophie et de la théologie, on n’a qu’à caractériser, en les mettant en regard l’un de l’autre, le génie philosophique et le génie théologique. Le génie philosophique se signale toujours par la découverte de catégories, de classifications qui, embrassant tous les êtres dans leur diversité, les font apparaître dans leur ensemble sous une lumière toute nouvelle. Ainsi, par exemple, la gloire de Jean Scot Érigène, le premier philosophe chrétien, c’est sa célèbre division de la nature, comprise tout entière dans ce triple concept : nature incréée, nature créatrice, et nature créée. La monade, catégorie universelle, grâce à laquelle nous pouvons étudier l’univers sous un nouvel aspect, est la grande découverte de Leibnitz. Pour Spinosa, c’est la substance ; pour Fichte, le moi et le non moi ; pour Hegel, le concept, l’idée ; pour Schelling enfin, l’absolu. Il n’y a pas de philosophie, vraiment digne de ce nom, qui n’apporte avec elle une classification des êtres à l’aide de laquelle la pensée peut se frayer sa voie dans le labyrinthe de l’infini vivant. On peut donc mesurer sa valeur réelle à la puissance avec laquelle elle sait imposer et réaliser la méthode dont elle se réclame. Tout autre est la sphère dans laquelle se produit l’activité théologique. Pour qu’elle puisse faire la loi à la science religieuse et à l’Église, il n’est pas nécessaire qu’elle découvre de nouvelles catégories, mais qu’elle mette en lumière un fait révélé dont la véritable signification restait amoindrie ou ignorée. Que l’on se rappelle, par exemple, comment, pour Augustin, pour les réformateurs et Schleiermacher, les idées de péché et de rédemption, de loi et de grâce, ont été le point de départ d’une conception toute nouvelle du christianisme, ou bien encore, comment l’idée trinitaire, les noms du Père, du Fils et du Saint-Esprit, ont permis à Athanase et à ses émules du moyen âge et des temps modernes de rajeunir, en la rendant plus précise et plus féconde, l’exposition de la vérité chrétienne. On ne peut pas oublier non plus l’influence décisive qu’exerça sur la formation du type réformé, en opposition au type luthérien, dans la lutte sacramentaire, le célèbre « ceci est » en regard du « ceci représente ». Le génie philosophique est d’une nature toujours encyclopédique ; le génie théologique, au contraire, ne peut se produire qu’en restant toujours plus étroitement attaché au point central, au cœur de la vérité révélée.
Ce n’est pas seulement avec la philosophie chrétienne, mais aussi avec la philosophie antichrétienne, que la Dogmatique est appelée à soutenir d’actifs et incessants rapports. L’Église étant dans le monde, il faut qu’elle vive en contact avec sa civilisation et sa science. La Dogmatique est donc obligée, non seulement de combattre la philosophie régnante, mais de lui faire aussi de continuels emprunts ; elle doit apprendre à connaître, pour se les approprier, les éléments de vérité qu’une philosophie véritable et digne de ce nom ne manque jamais de produire au grand jour. Mais ce rapport de reconnaissance envers la philosophie pourrait facilement provoquer une erreur qui, tout ancienne qu’elle est dans l’Église, se reproduit bien souvent, sous la forme d’un faux concordat, d’un syncrétisme vulgaire, imposant à la Dogmatique une alliance philosophique dont elle est seule à faire les frais. Bientôt, et insensiblement, on la réduit à n’être plus qu’un fief de la philosophie. On la voit alors, ainsi que bien souvent on a eu le droit de le lui reprocher, vendre de l’Aristote, au lieu et place du Christ, « Aristotelem pro Christo vendere ». Nous voyons un exemple de cette alliance menteuse chez les théologiens alexandrins, nous donnant pour du christianisme les catégories platoniciennes. Le même fait s’est renouvelé au moyen-âge au profit d’Aristote. Et de nos jours, on n’a pas encore eu le temps d’oublier comment le nouvel Aristote, Hegel, a su provoquer la même infidèle confusion Cette fausse pénétration, cette alliance infidèle de la philosophie et de la dogmatique, saint Augustin nous apprend, dans ses rétractations, comment elle se réalise. Il croyait, disait-il alors qu’il était encore dans toute sa ferveur platonicienne, inaugurer l’alliance de la foi et de la philosophie. Quand il avait pu lire Platon entre les lignes de l’Évangile, quand le christianisme parlait de la sagesse du siècle, il traduisait : la sagesse qui ne comprend que les choses visibles et ne sait pas s’élever au-dessus des apparences du monde sensible (κοσμος αἰσθητός), et pour laquelle le monde de la pensée (κόσμος νοητός) reste toujours un non-être. De même encore, lorsque l’Évangile l’exhortait à saisir ce royaume qui n’est pas de ce monde, il aimait à se représenter le royaume des idées. L’homme régénéré et vraiment spirituel était donc pour lui celui qui vit dans la sphère idéale, en opposition à l’homme charnel et psychique. En présence d’une pareille confusion qui, sous le faux prétexte d’une alliance véritable, s’est rencontrée si souvent dans l’Église, et se rencontre sous nos yeux encore, quant à ses traits essentiels, nous ne saurions trop nous répéter qu’il faut, à tout prix, que la théologie persévère dans la folie de la croix, se gardant bien de sacrifier son propre fonds, ses réelles richesses, pour un semblant de lumière et pour un succès toujours contestable. Mais si, au mépris de son développement véritable et naturel, ne se produisant que lentement, à son heure, en vertu de la force latente et nécessairement expansive qu’implique la vérité, et sous la protection de l’ombre toujours bienfaisante que projette le mystère chrétien, elle voulait avant son temps cueillir le fruit de la science, ce fruit ne serait pour elle qu’une amère déception. Luther a dit : « Celui qui veut aristotéliser avec profit doit commencer par devenir fou en Christ. » Nous devons donc poser comme une règle absolue et toute première que, à l’égard de la philosophie, la dogmatique doit prendre l’attitude expectante du doute et de la critique. Mais cette attitude implique entre ces deux puissances des rapports attentifs et fréquents, car on ne saurait juger ce que l’on n’aurait pas pris la peine de connaître. Ce procédé est bien différent de celui de certains théologiens, qui séparent soigneusement la théologie de la philosophie, comme on sépare d’une nourriture saine un aliment impur, se bornant à en interdire l’usage, et ne donnant à cet interdit d’autre raison que le vieil adage : « N’y touchez pas et n’en goûtez pas. » Pour le faire, ils sont obligés d’oublier que leur propre théologie, bien qu’elle s’intitule « ecclésiastique ou biblique », n’en est pas moins une œuvre d’homme, et qu’elle ne peut être nettoyée de toutes ses scories que par la philosophie. S’ils disent vrai quand ils affirment qu’une philosophie qui n’a pas été pénétrée par le principe chrétien n’a rien à nous enseigner, ils doivent se rappeler que si, directement, elle ne peut rien nous apprendre des choses concernant le royaume de Dieu, indirectement, cependant, elle nous rendra capables de les contempler sous un jour tout nouveau ; par cela seul qu’elle est une philosophie, et une philosophie véritable, elle doit nous apporter des données et des connaissances nouvelles sur le royaume de la nature, qui n’est après tout que le péristyle du royaume de la grâce. Il ne faut donc, pas oublier que le même logos, le même verbe, agit dans le royaume de la nature et dans celui de la grâce ; et que les puissances toutes grandes écloses dans le royaume de Dieu, se retrouvent partout éparses, et à l’état de germe, dans le royaume de la nature. En outre, la philosophie telle qu’elle s’est développée dans l’histoire, au foyer de ses grandes écoles et sous l’autorité de ses maîtres illustres, fournit à toutes les autres sciences leur point de départ et leur méthode. De plus, la théologie implique la logique et l’ontologie, et l’on peut voir par la querelle des nominalistes et des réalistes, si souvent reproduite dans les temps modernes, que ces sciences ne peuvent pas se développer sans exercer les unes sur les autres une décisive influence. Au reste, comment pourrait-on concevoir une philosophie réellement puissante, n’entraînant pas avec elle un ébranlement de l’opinion, une impulsion nouvelle, tout aussitôt irrésistible dans toutes les sphères de la pensée contemporaine ? En présence de ce mouvement, dont plus que toute autre science la dogmatique est obligée de s’assimiler les résultats vraiment décisifs, plus d’une fois il pourra se faire que le philosophe et le théologien se rencontrent dans l’affirmation des mêmes principes ; mais le théologien, en cette rencontre, devra se rappeler que, si deux témoins peuvent déposer le même témoignage, ils n’en sont que plus rigoureusement tenus à être deux, et non pas une seule et même personne. Quant à ceux qui, de parti pris, voudront ignorer la pensée philosophique de leur temps, se forclore de ses atteintes, et pratiquer consciencieusement envers elle le « n’y touchez et n’y goûtez pas », ils en viendront bientôt à ne rechercher et à n’estimer que la fausse sécurité qu’inspire la possession de la vérité traditionnelle ; et, ils auront beau se dire et se croire les dépositaires d’une science chrétienne et vivante, cette science n’en deviendra pas moins pour eux une nomenclature morte, ne valant que pour les isoler, au sein même de leur patrie et de leur propre génération, de tout contact avec la vie véritable et ses plus nobles aspirations. Quant à nous, à la maxime « n’y touchez pas et n’en goûtez pas, » nous aimons à substituer la parole de l’apôtref : « Tout est à vous, soit Pierre, soit le monde ; » et volontiers nous traduisons : « Tout est pour vous, soit la sagesse apostolique, soit la sagesse du siècle, soit Pierre et Paul, soit Platon et Schelling, Aristote et Hegel ; » mais plus nous préciserons le sens de cette belle parole, et moins elle permettra qu’on nous suspecte comme effaçant toute différence entre la sagesse révélée et la sagesse du présent siècle.
f – 1 Corinthiens 3.22.