Constantin était mort le 22 mai 337, laissant l’empire à ses trois fils. Constantin le jeune eut l’Espagne, la Gaule et la Bretagne ; Constance gouverna l’Orient, et à Constant échurent l’Italie et l’Afrique. Les évêques exilés furent rappelés, et Athanase rentra à Alexandrie (23 novembre 338). Mais en Constance les eusébiens avaient trouvé l’homme qu’il leur fallait, un empereur possédé de la manie de dogmatiser, d’ailleurs versatile et facile à influencer. Privé de son siège et menacé dans sa vie, Athanase, le 19 mars 340, dut fuir précipitamment et se réfugier à Rome. Il s’y trouvait en sûreté sous la protection du pape Jules et du jeune Constant qui, cette année même, vainqueur de son frère Constantin, était devenu maître de tout l’Occident sauf la Thrace. Un concile de cinquante évêques se tint à Rome en octobre 341, auquel les eusébiens, qui l’avaient d’abord demandé, refusèrent de se rendre, et qui reconnut les droits d’Athanase et de Marcel d’Ancyre. Le pape informa de ces décisions les eusébiens tout en se plaignant que l’affaire d’un patriarche d’Alexandrie eût été instruite et tranchée en Orient sans qu’on lui eût préalablement écrit à lui, évêque de Rome, « comme c’est l’usage ».
Mais les eusébiens, qui n’avaient pas le temps de venir au concile de Rome, trouvaient le temps d’en tenir d’autres en Orient. En 341, mai-septembre, ils célébrèrent celui d’Antioche in encaeniis. Il adopta trois formules de foi, commencement de cette série de symboles qui vont se multiplier pendant vingt ans, et qui se distinguent en général par les deux traits suivants : 1° Ils taisent ou, quelquefois, écartent l’ὁμοούσιος ; 2° ils condamnent l’arianisme pur. Ils flottent ainsi entre l’erreur et l’orthodoxie, se rapprochant plus ou moins de l’une ou de l’autre, suivant la fraction du parti prépondérante dans le concile. Ils n’énoncent pas toujours l’erreur ; mais ils ne proclament pas la pleine vérité : ils pèchent surtout par insuffisance et prétérition.
Les trois formules du concile in encaeniis ont été conservées par saint Athanase. La première est dogmatiquement insignifiante. A remarquer seulement contre Marcel l’affirmation du règne éternel du Christ, affirmation qui reviendra fréquemment dans les autres formules. La deuxième est celle que l’on a vu attribuer à Lucien d’Antioche. Elle est dirigée surtout contre les sabelliens. Saint Hilaire s’en montre satisfait, et elle est, en effet, assez nette sur la divinité du Fils qu’elle déclare ϑεòν ἐκ ϑεοῦ… ἄτρεπτόν τε καὶ ἀναλλαίωτον τῆς ϑεότητος οὐσαίς τε καὶ βουλῆς καὶ δυνάμεως καὶ δόξης τοῦ πατρὸς ἀπαράλλακτον εἰκόνα, et très catégorique sur son éternité. Des termes de la trinité elle énonçait τῇ μὲν ὑποστάσει τρία, τῇ δὲ συμφωνίᾳ ἕν. La troisième formule, proposée par Theophronius de Tyane, vise directement Marcel d’Ancyre, et proclame le Fils ϑεὸν τέλειον ἐκ ϑεοῦ τελείου, καὶ ὄντα πρὸς τὸν ϑεὸν ἐν ὑποστάσει.
Une quatrième formule est cependant attribuée à ce même concile d’Antioche, dont on ne saurait dire si elle est son œuvre ou seulement celle des quatre évêques qu’il députa à Constant. Elle condamne nettement à la fois le marcellianisme et l’arianisme pur. La partie positive est fort vague. Cette formule fut remise à Constant par les quatre députés : à cela se borna leur ambassade.
Pendant ce temps, Eusèbe de Nicomédie qui, depuis 339, s’était installé évêque de Constantinople, mourait (fin de 441), et sa mort devenait l’occasion dans cette dernière ville de troubles violents. Sur les conseils du pape, d’Hosius et d’Athanase, Constant s’entendit avec son frère Constance pour la convocation d’un grand concile qui travaillerait à ramener la paix. Ce fut celui de Sardique (343).
Le concile fut présidé par Hosius. Après lui signèrent les deux légats du pape, Archidamus et Philoxène. Les orthodoxes, pour la moitié occidentaux proprement dits, se trouvèrent environ quatre-vingts, et parmi eux Athanase et Marcel d’Ancyre. Les dissidents — on ne peut plus les appeler eusébiens — étaient un peu moins nombreux. Leurs chefs étaient Acace de Césarée de Palestine, Basile d’Ancyre, Maris de Chalcédoine et les deux évêques Ursace de Singidunum et Valens de Mursa. Ne se sentant pas en force, ils refusèrent, sous un prétexte de procédure, de siéger avec le concile et se retirèrent à Philippopolis, où ils adoptèrent une nouvelle profession de foi. C’était la quatrième d’Antioche portée à Constant, à laquelle on avait ajouté un second anathématisme contre les sabelliens et ceux qui prétendent que le Père n’a pas engendré le Fils par sa volonté (οὐ βουλήσει οὐδὲ ϑελήσει).
Cependant le concile légitime de Sardique ne laissait pas que de se tenir. Il rétablit sur leurs sièges Athanase et Marcel, déposa Acace de Césarée, Georges de Laodicée, Ursace et Valens, et fit vingt canons. Il y fut question de promulguer une nouvelle profession de foi en supplément de celle de Nicée jugée incomplète. Théodoret en a conservé le texte. Elle proclamait μίαν εἶναι ὑπόστασιν, ἣν αὐτοὶ οἱ αἱρετικοὶ οὐσίαν προσαγορεύουσι τοῦ πατρὸς καὶ τοῦ υἱοῦ καὶ τοῦ ἁγίου πνεύματος, mais ajoutait d’ailleurs que le Père n’est pas le Fils, ni le Fils le Père. Le mot ὑπόστασις est regardé évidemment ici comme l’équivalent de substantia. Mais, étant donnée la disposition des dissidents à l’employer dans le sens de personne, l’adoption de la formule proposée eût encore embrouillé les questions et aigri les esprits. Le concile eut la sagesse de s’en abstenir.
Ses décisions furent communiquées à Constance. Celui-ci, comprenant qu’il fallait ménager Constant, répondit à cette communication par une ambassade de deux évêques à son frère et aux latins. Elle apportait une nouvelle formule de foi, préparée probablement dans un concile d’Antioche tenu en 345, et à laquelle on a donné, à cause de sa longueur, le surnom de macrostiche (μακρόστιχος, à longues lignes). Elle comprenait : a) la quatrième formule d’Antioche ; b) l’addition de Philippopolis ; c) des explications six ou sept fois plus longues que ces deux textes. Le Fils y était proclamé de l’hypostase du Père (iii), Dieu parfait et vrai par nature (Θεὸν κατὰ φύσιν τέλειον εἶναι καὶ ἀληϑῆ, iv), joint sans intervalle (ἀμεσιτεύτως καὶ ἀδιαστάτως) au Père, et ayant avec lui une seule dignité divine, ἑν τῆς ϑεότητος ἀξίωμα (ix), mais d’ailleurs subordonné à lui, engendré par lui spontanément et volontairement (ἐκουσίως καὶ ἐϑελοντήν, viii). On condamnait Paul de Samosate, Marcel, Photin, les patripassiens et les sabelliens.
En somme, si l’on excepte l’omission de l’ὁμοούσιος et la note subordinatienne, cette formule marquait un progrès vers l’entente doctrinale. L’année suivante, le 21 octobre 346, Athanase put rentrer à Alexandrie. Une sorte de lassitude s’emparait des partis. Athanase semblait disposé à sacrifier Marcel, à la suite de l’éclat et de la condamnation de Photin. L’apaisement allait peut-être se faire peu à peu, lorsque, en janvier 450, Constant mourut. Cet événement, qui donnait tout l’empire à Contance, doublait les forces des dissidents.