Les cent quarante et un sermons, réunis dans les volumes V, VI et VII des Œuvres de John Wesley, sont extrêmement variés quant à leurs sujets.
Il y en a qui sont de simples homélies : les treize discours, par exemple, sur le Sermon sur la Montagne. Ils parurent en 1748, dans les volumes II et III du premier Recueil de Sermons publiés par Wesley. « Ces discours, dit M. Richard Green, dans sa Bibliographie des Œuvres de Wesley, paraissent les plus beaux modèles d’enseignement éthique écrits par Wesley. Ils méritent d’être abondamment lus. Ils sont le meilleur antidote à l’Antinomisme qui florissait alors et contre lequel Wesley écrivit et prêcha si vigoureusement. »
Ces discours parurent en français, en 1857, par les soins du pasteur James Hocart. Les Archives du Méthodismei, du 1er décembre 1857, consacrèrent à ce volume un article signé Matthieu Lelièvre. Jeune étudiant, j’écrivais avec l’inexpérience d’un débutant et je ne me doutais pas que, soixante-dix ans plus tard, je préparerais encore une étude sur la Théologie de Wesley, faisant suite à quatre éditions de sa Vie. Voici quelques lignes de cet article :
i – Dès le mois suivant, ce journal prit le nom de l’Évangéliste, sous lequel il paraît encore.
« Nous saluons avec joie l’apparition dans notre langue de cet ouvrage… A un siècle de distance, la voix de Wesley, dont Dieu se servit pour réveiller un peuple entier de son engourdissement spirituel, cette voix mérite d’être entendue parmi nous ; elle opéra des miracles, et nous avons la confiance qu’elle en opérera encore. Le Sermon sur la Montagne, que l’on a appelé avec justice « le Code de la Nouvelle Alliance », n’a pas encore été, que nous sachions, l’objet d’une étude aussi sérieuse et aussi approfondie qu’il l’eût mérité. Nous espérons que l’ouvrage de Wesley comblera cette lacune. »
Le succès modeste de cette traduction ne découragea pas ses éditeurs, qui publièrent, l’année suivante (1858), seize sermons de Wesley, sous le titre de la Voie du Salut, choisis parmi les plus importants et traduits avec un vrai talent par le pasteur Hippolyte Kruger.
[Une vingtaine d’années auparavant (en 1836), avait paru la traduction de cinquante-quatre Sermons choisis de Jean Wesley, traduits de l’anglais par Th. Marzials, pasteur de l’Église réformée de Lille (2 vol. in-8°, de 392 et 376 pages, imprimés à Lille, chez Leleux). Th. Marzials était le beau-frère de Charles Cook, qui fut sans doute l’inspirateur de ce travail, assez imparfait pour que les nouveaux éditeurs français n’aient pas cru pouvoir utiliser les traductions de 1836. Cette traduction paraît avoir eu une assez grande circulation et contribua à faire connaître Wesley.]
Un nouveau volume, paru en 1888, renferme vingt-quatre sermons, nouvellement traduits, la plupart avec une vraie maîtrise, par J.-W. Lelièvre. Ce volume complète, avec les deux demi-volumes parus précédemment, les cinquante trois sermons de Wesley, qui forment, avec ses Notes sur le Nouveau Testament, la base doctrinale des Églises méthodistes. Douze de ces sermons n’avaient jamais paru en français. Le texte original en a été reproduit avec fidélité, et sans que les traducteurs se soient jamais permis de retoucher ou d’abréger leur auteur. Comme l’a dit l’éditeur de ce dernier volume : « Wesley est assez grand pour que ses traducteurs respectent absolument son texte, même lorsqu’ils pourraient penser autrement que lui sur certains points secondaires. »
L’éditeur de ce volume (M. L.) ajoutait ce jugement, que confirment nos expériences depuis 1888 : « Si nous jugeons par l’édification que nous avons puisée dans ces discours, en les préparant pour l’impression, il nous est permis d’espérer que ceux qui les liront y apprendront, non seulement à vénérer la mémoire du grand serviteur de Dieu qui les a écrits, et à mieux comprendre la puissance du réveil religieux dont il fut l’instrument, mais aussi qu’ils chercheront à faire revivre en eux et à propager autour d’eux ce christianisme biblique qui sauva l’Angleterre du dix-huitième siècle et qui pourrait être le moyen de la régénération de la France à la fin du dix-neuvième siècle. »
Cet espoir ne s’est guère réalisé, et les sermons de Wesley sont restés une lecture que jugent ennuyeuse ceux que la paresse intellectuelle et la médiocrité religieuse ont rendus incapables d’aimer d’autre lecture que celle des romans.
Une édition de Sermons choisis de John Wesley (12 en tout) vient de paraître (1923) à Bruxelles ; c’est un choix de sermons extraits des volumes dont nous venons de parler. Nous empruntons à l’Avant-Propos de ce petit volume l’extrait suivant, signé W.-H. Guiton, qui nous paraît excellent :
« Wesley sait admirablement dévoiler les détresses humaines, l’état lamentable et tragique du cœur naturel, esclave de ses convoitises et de ses illusions, sans espérance, sans lumière, s’épuisant en efforts stériles pour se dégager de la mort. Sa psychologie clairvoyante, formée à l’école de la Bible et de l’expérience, est bien celle qui nous convient, à nous qui sommes fatigués des insanités et des mensonges de soi-disant prophètes, aussi incapables de connaître leur génération que de se connaître eux-mêmes. Wesley vient nous crier notre déchéance, notre culpabilité, notre perdition et mettre à nu toutes les ruses de notre incommensurable vanité.
Mais aussi, comme il sait admirablement nous révéler le Sauveur, et toutes les richesses de vie qu’il nous apporte ! Comme il sait prêcher Jésus-Christ, le Dieu Rédempteur, source de pardon et de délivrance pour tous ceux qui Le reçoivent ! Quelle force, quel enthousiasme, quelle poésie dans ses descriptions de l’action divine, des transformations produites par l’Esprit-Saint dans l’âme qui se donne ! Avec quelle joie il ouvre à nos regards les glorieuses perspectives de la sainteté, de l’amour parfait déjà sur la terre !
C’est en cela surtout qu’il est vraiment grand, vraiment prophète ; c’est en cela surtout qu’il nous est nécessaire. Jamais assurément, l’humanité n’a eu plus besoin qu’à l’heure actuelle de se trouver en présence du vrai christianisme, pris au sérieux, de ce christianisme qui est l’œuvre même de Jésus-Christ et non point l’œuvre des intérêts ou des préjugés, ou des traditions ; de ce christianisme qui est essentiellement l’imitation de Jésus-Christ par la communion avec Jésus-Christ. Aimer comme lui, aimer en lui, aimer de cet amour qui saisit le cœur et la vie tout entière, de cet amour qui inspire toutes les manifestations de la pensée et de l’action ; n’est-ce pas là, pour chaque individu, comme pour la société dans son ensemble, le seul moyen d’échapper à la mort et de vivre ? Hors de Jésus-Christ il n’y a point de salut, ni pour nous, ni pour ceux qui viendront après nous.
Telle est la prédication de Wesley dont ces pages nous donnent un écho. Nous y découvrirons aisément les qualités de son esprit, sa clarté, sa puissance d’argumentation, son jugement si sûr, sa profondeur et sa simplicité tout à la fois. Nous y découvrirons plus encore les qualités de son cœur si aimant, si passionné pour la gloire de Dieu et le service des frères, si ardent dans ses appels, dans ses supplications, dans ses larmes, si vibrant dans ses chants de louange et de victoire. Mais nous ne pourrons nous empêcher d’envier ceux qui eurent le privilège d’avoir plus qu’un écho, d’entendre la voix elle-même, cette voix douce, persuasive et sévère aussi parfois, cette voix qui savait tout à la fois troubler et rassurer, voix du serviteur fidèle qui dénonce le péché pour que le pécheur soit sauvé. »
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Les treize Sermons de Wesley, sur les chapitres V, VI et VII de l’Évangile de saint Matthieu (Sermon sur la Montagne), sont les seuls du genre Méditation, que Wesley ait livrés à l’impression. Ils furent prêchés sans doute pendant les séjours relativement prolongés qu’il fit à Londres, à Bristol ou à Newcastle ; probablement dans ces services de cinq heures du matin, où assistaient surtout les membres de la Société venus pour recevoir, avant le travail du jour, la provision journalière. Ces réunions se continuaient, lorsqu’il était parti, par ses prédicateurs laïques, auxquels il ne cessait de recommander, dans ses entretiens avec eux, la prédication de cinq heures du matin et les prédications en plein air.
Dans son Journal du 5 avril 1784, Wesley, âgé de 81 ans, se plaint de voir les prédications du matin tomber en désuétude. A Chester, on lui dit : « Les gens ne veulent plus y venir, au moins en hiver. —Ah ! s’écrie-t-il, c’est bien la preuve que les Méthodistes sont un peuple déchu ; ils ont perdu leur premier amour. » Et il ajoute : « Quand j’arrivai en Géorgie, en 1735, je commençai à prêcher à cinq heures du matin, et tous les communiants, c’est-à-dire les gens sérieux de la ville, continuèrent à y venir, hiver et été, jusqu’à mon départ, sauf en cas de maladie, et ils persévérèrent jusqu’à mon départ. En 1738, lorsque Dieu commença sa grande œuvre en Angleterre, j’établis le culte de cinq heures en toute saison, et il ne me manqua jamais des auditeurs. S’ils refusent de venir à ces réunions matinales, c’est parce qu’ils ont perdu le zèle d’autrefoisj. »
j – Journal, Standard Edition, vol. VI, p. 492.
Ces études de la Parole de Dieu étaient ce que nous appellerions aujourd’hui de la bonne et forte exégèse. Wesley, qui fut toujours très familier avec le texte grec du Nouveau Testament, ne craignait pas de corriger au besoin la version reçue. Il ne faisait pas étalage de son érudition, mais il en usait.
Ce qui forme le centre de la collection de Sermons que nous a laissés Wesley, ce sont évidemment les sermons de doctrine, qui, quoique composés en divers temps, forment une dogmatique qui pourrait bien soutenir la comparaison avec les manuels qui portent ce nom. Ce sont des exposés des doctrines du salut ; péché, repentance, justification par la foi, régénération, témoignage de l’Esprit, sanctification, etc. Ce qui est métaphysique et pure spéculation est écarté. La forme même du sermon a invité le prédicateur-théologien à faire prédominer les vérités de l’expérience sur les vérités théoriques. Il ne dédaigne pas l’orthodoxie, mais son but, en prêchant, n’est pas de faire des orthodoxes mais des chrétiens. « J’ai mis, dit-il, dans mes sermons ce que j’ai trouvé dans la Bible, concernant le chemin du ciel, dans le dessein de distinguer ce chemin de Dieu de ceux que les hommes ont inventés. J’ai essayé de décrire la religion véritable, scripturaire, expérimentale, de façon à ne rien omettre de ce qui en fait réellement partie, et aussi à n’y rien ajouter. Je désire spécialement par là, d’abord éloigner du formalisme, qui a presque banni de ce monde la vraie religion, ceux qui se sont mis en route pour le royaume des cieux, mais qui, ayant peu d’expérience des choses de Dieu, risquent plus aisément de se laisser détourner ; je veux, en second lieu, mettre sur leurs gardes ceux qui connaissent la religion du cœur et la foi agissante par la charité, de peur qu’il ne leur arrive un jour d’annuler la loi par la foi et de tomber dans les pièges du diable. »
Si Wesley met au premier rang la doctrine du salut, il ne néglige pas la morale. Les sujets qu’il traite sont toujours actuels et souvent en dehors du domaine ordinaire de la chaire ; ce sont des causeries originales et même réalistes, sur des questions pratiques, telles que celle-ci : la Médisance, l’Emploi de l’Argent, le Danger des Richesses, la Toilette, le Rachat du Temps, l’Education des Enfants, la Religion de Famille, les Visites de Malades, la Mondanité, les Péchés nationaux, etc.
Un des sujets de morale pratique sur lequel Wesley revient fréquemment, c’est le danger des richesses. La plupart des convertis amenés à la piété par le Méthodisme étaient à l’origine des gens appartenant aux classes les plus humbles de la société ; en devenant pieux, ils devenaient économes, et par l’économie s’élevaient à la fortune, et la fortune, récompense de la vertu, amenait souvent avec elle l’avarice, l’orgueil, la sensualité, en un mot le cortège des vices qui croissent naturellement dans un tel terrain. Ce sujet mérite que nous lui consacrions un chapitre spécial.
Les sermons imprimés de Wesley ne nous font pas connaître ce que fut sa prédication ordinaire, surtout celle en plein air. Il fut un improvisateur. Comment en eût-il pu être autrement avec une moyenne de quinze prédications par semaine ? Ses textes, surtout dans la dernière partie de sa vie, il les trouvait en général dans la lecture indiquée pour la journée par la liturgie anglicane. Sa préparation, il la faisait dans cette heure matinale qu’il consacrait au recueillement, ou dans ses longues courses à cheval, en se rendant à ses lieux de prédication. Il possédait d’ailleurs un fonds inépuisable de faits et d’idées amassés dans son esprit et thésaurisés dans sa mémoire, tant par les fortes études de sa jeunesse que comme fruit de ses immenses lectures et de sa pratique des hommes et des affaires. En un temps où la lecture des sermons était universelle en Angleterre, ce fut un coup d’éclat, presque une révolution, que cette soudaine apparition de la prédication improvisée, et il y a lieu de croire que cette question de forme fut pour quelque chose dans l’opposition qui accueillit les jeunes réformateurs. Mais cette question de forme était pour le réveil une question de vie ou de mort ; en s’enfermant dans le sermon manuscrit, il se serait lui-même emprisonné dans un linceul et condamné à l’impuissance.
Nous n’avons pas de moyen sûr de connaître et de juger la prédication ordinaire de Wesley, soit celle qu’il faisait dans ses chapelles ou dans d’autres lieux de culte, soit surtout celles qui n’avaient d’autres sanctuaires que ce que les Huguenots appelaient le Désert. Quoique la sténographie fût alors connue et que Wesley s’en servît pour son journal intime et ses notes de sermons, on ne l’utilisait pas, comme de nos jours, pour conserver le texte intégral des discours religieux ou politiques, et nous n’avons pas, pour les prédications de Wesley et de Whitefield le privilège de lire leurs sermons tels qu’ils les prononcèrent, privilège qu’auront nos arrière-neveux pour les prédications d’un Spurgeon ou d’un Beecher.
Nous possédons cependant, depuis la publication de la Standard Edition du Journal de Wesley un Registre des Textes de ses sermons, s’étendant du 14 janvier 1747 au 25 décembre 1761, soit quinze années. Ce serait un travail long et peut-être fastidieux de dépouiller et d’analyser ce document. On y verrait à quels livres de la Bible Wesley donnait la préférence, quelle place il faisait à l’Ancien et au Nouveau Testament, s’il répétait fréquemment ses prédications, etc.
C’est surtout dans les applications des sermons imprimés de Wesley qu’il faut sans doute chercher le caractère oratoire de sa prédication parlée. Voici l’un de ces morceaux :
« Réveille-toi donc, toi qui dors, et invoque ton Dieu ! Cherche-le au temps qu’on le trouve. Ne le laisse point aller qu’il n’ait fait passer devant toi toute sa bonté et qu’il n’ait crié devant toi le nom de l’Éternel : l’Éternel, le Dieu fort, pitoyable, miséricordieux, tardif à colère, abondant en miséricorde et en vérité, gardant en mille générations sa miséricorde, ôtant l’iniquité, le crime et le péché. Que personne ne te persuade, par de vains discours, de manquer ce prix de ta vocation céleste. Mais crie jour et nuit à Celui qui, lorsque nous étions sans aucune force, mourut pour des impies, jusqu’à ce que, sachant en qui tu as cru, tu puisses lui dire : Mon Seigneur et mon Dieu ! Aie soin de toujours prier, sans te lasser, jusqu’à ce que tu puisses, toi aussi, lever la main au ciel et dire à Celui qui vit aux siècles des siècles : Seigneur, tu sais toutes choses, tu sais que je t’aime.
Puissions-nous tous apprendre ainsi, par expérience, ce que c’est que d’être, non seulement presque, mais tout à fait chrétien ! Etant justifiés gratuitement par grâce, par la rédemption qui est en Jésus, puissions-nous savoir que nous avons la paix avec Dieu par Jésus-Christ, et nous réjouir dans l’espérance de la gloire de Dieu, parce que l’amour de Dieu sera répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit ! »
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Les Cantiques presque innombrables composés par les frères Wesley ont eu une place considérable dans l’histoire du Réveil. La plupart de ces cantiques sont l’œuvre de Charles Wesley, que Montgomery a placé avec raison immédiatement après Watts comme lyrique religieux. On dit que Watts déclarait qu’il donnerait tous ses cantiques pour avoir composé le Wrestling Jacob, de Charles Wesley. D’après Schérer, « il est fâcheux que plusieurs des cantiques de ce recueil aient une tendance, non seulement dogmatique, mais polémique très marquée, et soient destinés à exposer ou à défendre les dogmes de la perfection et de la rédemption universelle ». Wesley, au contraire, y trouvait un avantage et se plaisait à remarquer que sa collection de cantiques forme une sorte de corpus theologiæ, embrassant les plus importantes vérités religieuses spéculatives ou pratiques. Il suffit de parcourir les recueils parus sous les noms réunis des deux frères Wesley, pour s’assurer que la plupart des hymnes qui ont passé dans le culte des Églises n’ont pas le caractère dogmatique et polémique qu’on leur a reproché, et que l’adoration, l’humiliation, la reconnaissance en forment les thèmes habituels.
Les recueils parus du vivant des frères Wesley portaient habituellement leurs deux noms ; mais il n’est pas douteux que Charles Wesley fut le grand hymnographe du Réveil, et que John se borna le plus souvent à réviser les œuvres poétiques de son frère cadet. Celui-ci a composé, dit-on, 6000 hymnes, dont le plus grand nombre n’ont vu le jour que dans la collection, en 13 volumes, publiée par le docteur George Osborn. D’après le chanoine Overton, « il semble que, en tenant compte de la quantité et de la qualité des morceaux de poésie sacrée composés par Charles Wesley, il doit être considéré comme le premier des hymnologues de tous les âges ».
Quoi qu’il en soit de cette appréciation, une chose est certaine, c’est que le peuple méthodiste de langue anglaise est justement fier de ce qu’il continue à appeler les Wesley’s Hymns, quoique le recueil actuel compte un millier de numéros, dûs à un grand nombre d’auteurs, sans acception de couleurs ou de nuances dogmatiques ou ecclésiastiques. Il faut avoir entendu chanter à l’unisson de grandes assemblées de plusieurs centaines de personnes, pour se rendre compte de la puissance d’édification qu’il y a dans la psalmodie telle que le réveil du xviiie siècle l’a produite. Wesley a plus fait que de prêcher l’Évangile aux foules ; il leur a appris à le chanter.
Il nous est naturellement impossible de traduire, pour nos lecteurs, quelques-uns de ces hymnes qui ont fait du peuple anglais un peuple qui chante de tout son cœur au Seigneur. La traduction de la poésie anglaise est une tâche devant laquelle nous reculons. Nous tenterons seulement, en terminant ce chapitre, de traduire, en prose rythmée, l’un de ces cantiques.
Comme les apôtres, Wesley et ses missionnaires chantaient des cantiques au plus fort de la persécution. Charles Wesley, le barde inspiré du réveil, après en avoir été l’un des héros, publia en 1744, au moment où la persécution faisait rage, un recueil de trente cantiques « pour les temps de trouble et de persécution ». Les uns font entendre la note plaintive et résignée ; d’autres ressemblent à une sonnerie de clairon et ont l’accent de la victoire. L’un de ces cantiques porte cette indication : « pour être chanté dans un tumulte ». On se représente aisément une troupe de méthodistes poursuivis à coups de pierres et se retirant en bon ordre, en chantant cet hymne, dont nous traduisons les premières strophes :
Vous, serviteurs de Dieu, proclamez votre Maître,
Et publiez au loin son nom merveilleux,
Exaltez de Jésus le nom victorieux ;
Son règne glorieux domine sur tout.
Les vagues de la mer ont élevé leurs voix,
Irritées de nous voir nous réjouir en Jésus ;
Les flots mugissent, mais Jésus est là,
Quand nous adorons, il est toujours près.
Les hommes, les démons se liguent, les vagues se soulèvent
Et font rage horriblement, et semblent menacer les cieux.
Leur furie n’ébranlera jamais notre fermeté,
Le plus faible croyant est bâti sur le Roc.
Dieu règne dans les cieux, tout-puissant, pour sauver,
Et pourtant Il est près, nous avons sa présence ;
La grande assemblée chantera son triomphe,
Et dira que le salut vient de Jésus notre Roi.
De cette secte méprisée, « à laquelle on s’opposait partout », comme ce fut le cas pour le christianisme apostolique, on peut bien dire qu’elle a fait revivre les beaux jours de l’Église primitive.