Nos enfants

LE NUMÉRO DEUX

Vous TOUS que je porte dans mon cœur … je vous chéris TOUS avec la tendresse de Jésus-Christ.

Philippiens 1.7, 8

Me voici très à l’aise dans un foyer sympathique. Au palmarès, trois enfants : l’aînée, une fillette de six ans, fait ses premières armes à l’école primaire. La cadette (1) est plus effacée, un brin craintive mais pas sotte du tout ; du genre mélancolique. Le dernier est un gros poupon d’un an dont les facéties attirent les regards.

(1) Celui ou celle qui, par ordre de naissance, vient après l’aîné.

Je discerne très vite que l’attention se porte sur l’ainée et le benjamin. Et cela s’explique ! Une grande fille qui fait son entrée dans la vie scolaire, c’est un événement ! Avec quelle émotion papa et maman guettent les retours de classe et quel accueil lorsqu’elle franchit le seuil de la maison ! Alors, pleuvent les questions. Chacun tient à connaître, dans le détail, l’emploi du temps de sa journée et l’on se montrera insistant pour entendre fredonner le chant ou réciter le poème appris quelques heures auparavant. L’enfant doit ouvrir son sac, étaler des cahiers impeccablement recouverts d’un plastique tout neuf. Et tandis que la jeune élève tourne les pages, les têtes se penchent pour admirer – avec exclamations à l’appui – un dessin naïf ou quelques lignes d’écriture maladroite. Quant au garçon qui s’agite sur sa chaise, papa et maman suivent jour après jour, ses indiscutables progrès :

— Tiens, une dent de plus. Elle n’y était pas ce matin.

— As-tu remarqué ? Il se tient plus ferme sur ses jambes. Bientôt il marchera.

— Tout à l’heure, il a dit : papa ! J’en suis certain.

Je note que la cadette – la fillette timide –, sans être vraiment négligée, m’apparaît quelque peu oubliée. Par la force des choses après tout. Les parents sont tellement occupés ! Seule dans son coin, elle joue sans bruit, paraissant vivre dans un autre univers qu’elle s’est créé parce qu’il lui en faut un. Elle semble satisfaite et ne réclame rien.

Alors je prends la gosse sur mes genoux et lui raconte une histoire du genre fantastique. D’abord inquiète, elle me regarde comme si j’étais un ogre, puis étonnée de ce que je m’intéresse à elle, l’enfant se laisse très vite gagner. Elle écoute mon récit sans broncher, littéralement suspendue à mes lèvres. Mon histoire terminée, elle en réclame une autre, puis une autre. Les enfants sont insatiables. Après trois ou quatre improvisations qu’elle paraît apprécier, nous nous penchons tête contre tête sur un grand livre d’images. Maintenant, je suis adopté. Elle ne me quitte plus et me caresse le visage. Demain, elle me verra partir. Son joli regard tout embué déjà redevenu mélancolique, m’attendrit un peu.

Il y a des petits que l’on oublie tout simplement parce qu’ils s’isolent et ne demandent rien. Attention ! Ne délaissez pas de tels enfants. Ils pourraient, à tort, se croire lésés ou moins aimés et avoir, plus tard, d’inexplicables réactions : un brusque besoin de s’affirmer jusqu’à humilier père et mère ou des sautes d’humeur sans raison valable, ou encore une sorte de langueur désespérante pour l’entourage qui ne comprend pas.

Je me suis longuement entretenu avec une jeune fille de vingt ans qui traînait depuis de longs mois dans le brouillard de la dépression. Chose curieuse, elle ne manifestait aucunement le désir d’en sortir ; elle s’y complaisait même. Pourquoi ? Cette personne se plaignait – à tort – de ne pas avoir eu son compte d’affection lorsqu’elle était enfant, prétendant qu’on lui avait préféré ses frères. Maintenant, elle se vengeait en obligeant les siens à s’occuper d’elle, à rester auprès d’elle pour lui restituer un peu de tendresse dont elle croyait avoir été privée.

On sait que les hommes politiques se battent pour obtenir un temps d’antenne suffisant qui les fera connaître du grand public. Ils ne souffriraient pas de rester dans l’ombre tandis que s’expriment et se montrent leurs adversaires. L’enfant craintif, caché, ne se bat pas pour être écouté mais il n’en ressent pas moins, bien qu’il n’en paraisse rien, un sentiment de frustration aux conséquences imprévisibles. Ne l’aigrissons pas en l’oubliant. Témoignez à l’égard des vôtres un égal intérêt, accordant à chacun son temps d’antenne afin qu’il soit écouté comme les autres. Et si vous estimez que l’un d’entre eux a été le « parent pauvre » de la famille, rendez-lui un peu de l’affection dont il a été privé. Dieu n’est-il pas notre modèle qui ne fait « acception de personne » et montre un égal amour à toutes ses créatures ?

LES PARENTS S’INTERROGENT

  1. Passez vos enfants en revue et demandez-vous s’il ont eu, chacun, « leur temps d’antenne ». L’un d’entre eux aurait-il été négligé ? Alors, cherchez à savoir pourquoi.
  2. Un de vos enfants a-t-il souffert d’avoir été Le parent pauvre de la famille ? Dans ce cas et s’il est en mesure de le faire, invitez-le à vous dire franchement ce qu’il vous reproche à ce sujet. Donnez-lui raison et cherchez avec lui comment il vous sera possible de lui restituer ce dont il croit avoir été frustré. Si le « petit » n’est pas encore conscient de la chose, veillez désormais à vous montrer juste à son égard.
  3. Bénissez le Père qui nous aime tous d’un égal amour. Chez vous, que l’on sache que vous désirez marcher sur ses traces.

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