Sa présence

CHERCHEZ MA FACE

« Mon cœur dit de ta part : Cherchez ma face ! Je cherche ta face, ô Éternel. »

(Psaumes 27.8)

Un homme de basse extraction qui tenterait de franchir les grilles du palais d’un chef d’État serait éconduit manu militari par une garde vigilante et toujours présente. Tel n’est pas le cas pour nous, les rachetés : il nous est loisible, en tout temps, de nous approcher du Roi des rois sans redouter l’expulsion (Jean 6.37 ; Hébreux 4.16 et 10.19). C’est Lui qui réclame notre amitié et nous invite à chercher sa face (Psaumes 27.8). Plus encore, il nous destine à le voir tel qu’il est dans sa demeure céleste où Jésus est allé nous préparer une place (1 Jean 3.1-3 et Jean 14.1-2). C’est extraordinaire !

« Cherchez ma face » dit l’Eternel (Psaumes 27.8).

Une chrétienne fort âgée, dévouée à l’œuvre du Seigneur et d’une authentique piété, m’avouait lors d’une récente visite :

— Moi, il me faut du temps quand je me recueille le matin.

— Du temps ? Que voulez-vous dire ?

— Oui, il me faut du temps avant de me trouver vraiment dans la présence de Dieu ; je veux dire. du temps pour que mes pensées se disciplinent et se portent uniquement sur la Personne de mon Seigneur ; du temps encore pour que je sois dans un paisible abandon devant lui…

Après tout, si Dieu nous ordonne de chercher sa face c’est bien la preuve que nous ne nous trouvons pas toujours, d’emblée, dans sa présence lorsque nous l’invoquons. Bramwell, ce prédicateur exceptionnel qui consacrait à la prière jusqu’à six heures par jour, reconnaissait qu’il ne commençait jamais à prier qu’à contrecœur. Parfois même, il devait se faire violence au début car sa prière semblait aride… mais il tenait bon et persévérait dans la foi… « Alors les cieux s’ouvraient… » Lui aussi, malgré sa grande piété, devait « chercher » la face de Dieu. Alors pourquoi nous laisserions-nous arrêter par une impression de sécheresse ou un vague malaise ressenti lorsque nous joignons les mains ? Satan sait embroussailler le chemin du sanctuaire… mais avec Dieu on ne persévère jamais en vain. « Qui cherche trouve, a promis Jésus. Et l’on ouvre à celui qui frappe » (Matthieu 7.8).

Quand donc serons-nous amenés à rechercher la face du Seigneur ? Sans aucun doute après un temps, même très bref, de relâchement dans la prière et la méditation de l’Écriture, ce qui arrive fréquemment en période de vacances, au cours d’absences répétées ou de longs déplacements, ou lorsqu’un surcroît d’activité accapare notre esprit. La poursuite des richesses, une infidélité entretenue, « l’abandon des saintes assemblées » font que nous décrochons d’avec Dieu. Aussi se fait-il attendre lorsque nous revenons à lui. Et d’ailleurs, plus nous tardons à « renouer » avec notre Seigneur et plus le retour exige persévérance et volonté de le rencontrer. On ne dispose pas de lui à sa guise. Il se laisse trouver c’est vrai, mais seulement quand il le juge bon et nous voit le chercher avec un cœur sincère et résolu.

Sommes-nous conscients d’avoir « lâché » le Maître ? Alors nous revenons simplement à lui avec un cœur ouvert à son action. Aussi longtemps que nos pensées vagabondent et ne se fixent pas sur le Seigneur nous persistons dans notre attente, demandant à Dieu de maîtriser ces pensées et de « les garder en Jésus-Christ » (Philippiens 4.7).

Peut-être avons-nous présentement de la peine à nous concentrer et à établir le contact avec Dieu. Cela ne viendrait-il pas de ce que nous éprouvons une vague réticence à affronter sa sainte Personne ? Il peut advenir même qu’en nous approchant de lui et de sa Parole (elle ne devrait pas nous quitter quand nous prions), le Saint-Esprit mette en évidence une malhonnêteté, un mensonge, une rancœur, un refus d’aimer et de pardonner, une faute précise… Alors comment pourrons-nous supporter la présence du Saint et du Juste et nous complaire devant sa face aussi longtemps que nous ne renoncerons pas au péché signalé ? Si nous sommes fermement résolus à le rencontrer, le Saint-Esprit « amènera nos pensées captives à l’obéissance de Christ » : il apaisera notre cœur et nous donnera cette bonne conscience qui rend l’homme libre devant Dieu. Le Bon Berger nous conduira « vers des eaux paisibles et restaurera notre âme » (Psaumes 23.2). Cette sérénité est signe de sa présence. « Que la paix de Christ à laquelle vous avez été appelés pour former un seul corps, règne dans votre cœur » (Colossiens 3.15). C’est elle qui « gardera votre cœur et vos pensées en Jésus-Christ » (Philippiens 4.7).

Le moment le plus favorable pour chercher sa face et le prier sans être harcelé par quoi que ce soit est sans conteste le matin, au saut du lit. Jésus tenait pour précieuse cette première heure de la journée, lui qui se retirait à l’écart alors qu’il faisait encore sombre (Marc 1.35). Dans le silence et le calme d’une aube nouvelle, l’esprit est libre et serein, donc réceptif et prêt à s’élever vers Dieu. Et c’est vrai ! Au lever nous sommes détendus, renouvelés dans nos forces, frais et dispos pour méditer l’Écriture et contempler notre Seigneur. Il serait réellement dommageable pour nous de gaspiller ou d’escamoter ce temps de ressourcement si nécessaire pour rester en bonne santé spirituelle. Veillons donc et faisons tous nos efforts pour vivre jour après jour, et le mieux possible, ces instants de communion.

Il nous arrivera certainement d’être en retard à ce rendez-vous quotidien et cela pour divers motifs : une nuit perturbée par les cris de bébé, un coucher tardif, un surcroît de fatigue, un peu de paresse ou de pitié de soi. Autant de raisons pour s’attarder au lit… Pressé par le temps – les aiguilles ont tourné – nous serons alors tentés de nous précipiter dans la prière tel un cheval lancé dans la bataille. Une rencontre bâclée ne laisse que déception et tristesse. Au lieu de nous accuser en nous répétant : « La journée est manquée, tout ira de travers ! » et plutôt que de ressasser d’inutiles regrets qui nous priveraient de tout ressort, nous reviendrons à Dieu en lui demandant la grâce de ne pas l’oublier tout au long du jour, même dans notre activité, car nous tenons à l’exalter pour son amour fidèle et « sa miséricorde qui dure toujours ».

Il vaut la peine, déjà la veille au soir, de préparer sérieusement le recueillement du matin. Peu avant le coucher nous nous appliquerons à chercher sa présence et nous l’invoquerons pour quatre motifs au moins.

a) D’abord pour nous souvenir de ses bontés afin de lui témoigner notre reconnaissance. Ces instants de communion nous fourniront l’occasion de vivre et, pourquoi pas, de chanter le cantique bien connu :

« Compte les bienfaits de Dieu.
Mets-les tous devant tes yeux.
Tu verras, en adorant,
Combien le nombre en est grand. »

b) Nous garderons le silence un instant pour permettre à l’Esprit Saint de nous révéler, s’il y a lieu, ce qui a pu l’attrister dans nos paroles ou notre comportement durant la journée qui s’achève. Il est des fautes qui exigent humiliation et changement d’attitude. (Précisons ici qu’il ne s’agit pas de s’introspecter mais de rester ouvert à Son action. C’est lui seul qui peut nous éclairer et nous signaler ce qui doit être confessé et abandonné. Ne prenons pas Sa place.) Il n’y a pas de progrès sans cet indispensable examen.

c) Dans cette prière du soir, nous lui ferons part d’un double désir : Que dès le réveil, notre première pensée consciente soit pour le Seigneur. Il est digne que nous le bénissions avant toute chose, lui qui a veillé sur nous durant les heures de la nuit. Également, que nos heures d’insomnie – s’il y en a – ne soient pas perdues. Nous voudrions tant imiter le psalmiste qui déclarait : « Lorsque je pense à toi sur ma couche, je médite sur toi pendant les veilles de la nuit… Je suis dans l’allégresse à l’ombre de tes ailes » (Psaumes 63.7-8).

d) Enfin et surtout, nous désirons exprimer au Père céleste notre ferme intention de nous lever de bonne heure pour être fidèles au rendez-vous du matin auquel nous tenons beaucoup. Nous réclamons son aide et lui demandons la grâce d’entrer d’emblée dans sa présence. Il faut donner toute sa valeur à ce temps de communion qui devrait inaugurer chacune de nos journées.

Que faut-il entendre par l’expression : « Cherchez ma face » ? Et que faire pour le rencontrer ? Une illustration nous éclairera sans doute. Supposez que je passe la soirée avec des amis. Alors que je bavarde gaiement avec eux dans le salon, soudain… plus d’électricité. C’est la panne. Surpris, chacun se tait et attend que revienne la lumière. Mes yeux ont beau fouiller l’obscurité, je ne distingue pas le couple sympathique qui me reçoit. Aucun bruit n’est perçu, pas même les respirations qu’on semble retenir. Et quoique rien ne me permette de déceler la présence de mes amis, cette présence est pour moi une réalité. Ils sont bien là, je les sais (et non pas je les sens) tout près de moi. Je puis donc reprendre et poursuivre la conversation interrompue peu auparavant.

1) Chercher sa face ce n’est pas se concentrer pour essayer de se représenter le visage de Dieu. Il ne s’agit surtout pas de le visualiser, je veux dire, de vouloir créer en soi une image visuelle de Dieu ou de Jésus. Avec vigueur nous dénonçons cette tentative qui n’est rien moins qu’une forme camouflée d’idolâtrie. Le décalogue est catégorique : « Tu ne te feras aucune représentation des choses qui sont là-haut… et tu ne les serviras pas » (Exode 20.3). Avais-je besoin de me représenter mes amis pour me savoir en leur présence ? Et quand le lendemain il m’aurait pris la fantaisie de les imaginer près de moi, auraient-ils été pour autant en ma compagnie, prêts à converser avec moi ?

2) Chercher sa face ce n’est pas non plus s’attendre à éprouver des sentiments merveilleux, à goûter le céleste. Certains veulent d’abord sentir qu’ils se trouvent dans la proximité de Dieu pour croire au don de Sa présence. Autant dire qu’ils veulent voir pour croire alors que l’Évangile ordonne le contraire : « Crois et tu verras » (Jean 11.40).

Il est vrai que cette présence ne me laissera ni insensible ni froid mais la poursuite de l’ineffable – quoique sa présence soit ineffable – ne serait en définitive que recherche de soi et mondanité camouflée. Le Moi est avide de merveilleux. Or, « le juste vit par la foi » et non par la joie ou les sentiments qui sans cesse fluctuent (Habakuk 2.4).

3) Chercher sa face ce n’est pas s’attendre à des visions ou à des manifestations d’ordre spirituel (bien que Dieu reste libre d’en accorder). Toute expérience qui bouleverse agréablement n’est pas nécessairement d’origine divine. Ne confondons pas un quelconque nirvana avec le sanctuaire du Dieu de Jésus-Christ. Ceci dit, le chrétien reste lucidement ouvert à tout ce que son Seigneur est disposé à lui donner, pourvu qu’il ne s’avise pas de Lui dicter à l’avance ce qu’il souhaite recevoir. Que sa volonté soit faite. Dieu est souverain. Lui d’abord et non les bonnes choses dont il ne manquera pas de combler son enfant. Donc, vigilance. Au risque de nous répéter car ce sujet est tellement important, précisons qu’il n’est nul besoin d’éprouver quoi que ce soit pour être conscient d’un fait, d’une chose ou de la présence de Dieu. L’illustration qui ouvre ce chapitre nous en fournit la preuve. La présence du Seigneur est une réalité. Elle est un don accordé à la foi.

On déduira de ce qui précède que :

1) Les gens pressés qui se contentent d’un « petit bout » de prière ne s’approchent pas vraiment du Seigneur. Dieu a le temps. A nous d’en trouver aussi pour nous présenter devant lui, sans hâte, détendus et confiants. Donnons-Lui l’occasion de nous visiter.

2) Le Seigneur n’accorde pas sa présence à ceux qui l’oublient et font peu de cas de sa personne. En vérité, ils se montrent plus préoccupés de leurs besoins que de Celui qui veut y répondre.

3) C’est manquer de sagesse que de se jeter dans un flot de paroles sitôt que nous l’invoquons. Le conseil de l’Ecclésiaste n’est jamais caduc. « Ne te presse pas d’ouvrir la bouche et que ton cœur ne se hâte pas d’exprimer une parole devant Dieu… Approche-toi pour écouter » (Ecclésiaste 4.17-5.1).

4) Il est bon de prendre le temps de s’isoler intérieurement pour ne pas être distrait par les bruits venant d’ailleurs. Notre esprit les capte si aisément. C’est pourquoi, faisons taire toute préoccupation en nous approchant du Seigneur. Par l’action du Saint-Esprit, Dieu nous en rendra capables.

Notre Dieu est proche de ceux qui l’invoquent avec sincérité.

Questions :

  1. Sommes-nous de ceux qui se sont éloignés du Seigneur ? Si oui, pourquoi l’avons-nous tenu à l’écart ? Y aurait-il quelque infidélité à confesser ? Plutôt que de nous laisser aller à l’introspection, nous nous ouvrons à la lumière de Dieu et d’avance, acceptons son verdict.
  2. Sommes-nous vraiment résolus à vivre en étroite communion avec le Maître pour le mieux servir et l’adorer ?
  3. La paix de Christ règne-t-elle dans notre cœur ? Pourquoi ne nous approcherions-nous pas de lui comme nous y invite l’Écriture (Hébreux 4.16) ?

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