« Rends mon cœur semblable au Tien
Par Ta merveilleuse puissance,
Par Ta grâce de tous les instants,
Rends mon cœur semblable au Tien.
De tout notre cœur, nous chantions un matin les paroles ci-dessus dans une heure d’humiliation et d’examen de soi-même. J’étais alors cadet à l’École militaire. Un de mes camarades pénétré de l’esprit de ce cantique s’approcha de moi, la réunion terminée, et, très sérieux, sur un ton d’ardente investigation, me demanda : « Voulons-nous réellement dire que nous puissions avoir un cœur semblable au Sien ? » Je lui répondis que j’en étais certain puisque le Seigneur ne demande qu’à nous rendre semblables à Lui :
Un cœur humble et contrit
Plein de foi et de pureté,
Un cœur pleinement renouvelé
Rempli de charité divine,
Parfait et droit et pur et bon,
Un cœur, Seigneur, semblable au tien.
Jésus a été en effet « le premier-né parmi les frères. » Il est notre « frère aîné » et nous devons Lui être semblables. Nous sommes dans ce monde présent comme Il y fut et Il dit que « celui qui demeure en Lui doit marcher comme Il a marché Lui-même. » Or, il nous est impossible de marcher comme Lui, de vivre comme Lui, à moins d’avoir un cœur semblable au Sien.
Nous ne pouvons porter les mêmes fruits que Lui qu’à la condition de posséder la même nature que Lui ; c’est pourquoi Il veut nous rendre semblables à Lui. C’est à ses fruits qu’on juge un arbre ; c’est par ses œuvres que nous pouvons connaître le cœur de Jésus.
Nous trouvons l’amour dans sa vie, par conséquent son cœur était rempli d’amour. Il portait le fruit délicieux du parfait amour. Ni haine, ni fiel, ni dédain, ni égoïsme ne se mêlaient à cet amour : Il aimait Ses ennemis et priait pour Ses bourreaux. Ce n’était point un amour inconstant, changeant au gré des saisons, mais un amour immuable et éternel. « Je vous ai aimés d’un amour éternel », dit-Il. Gloire à Dieu ! que tout cela est merveilleux !
Voilà précisément l’amour qu’Il désire voir en nous. Écoutez : « Je vous donne, dit-Il, un commandement nouveau : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. » Il peut paraître extraordinaire de me commander d’aimer mon frère comme Jésus m’a aimé ; telles sont cependant Ses paroles, et pour y parvenir, il me faut un cœur semblable à celui du Sauveur.
Nous savons que l’amour renferme toutes les autres grâces. Regardons au cœur de Jésus pour les chercher et les trouver. Jésus était humble de cœur. Il dit de Lui-même : « Je suis doux et humble de cœur », et Paul nous dit : qu’Il « s’est dépouillé lui-même en prenant une forme de serviteur, Il s’est humilié lui-même. »
Béni soit son nom ! Il s’est humilié Lui-même, car bien qu’Il fût le Seigneur de vie et de gloire, Il a condescendu à naître d’une humble vierge, dans une crèche et à travailler trente ans comme un obscur charpentier ; Il a voulu vivre avec les pauvres, les ignorants et les gens de la plus basse classe, plutôt qu’avec les riches, les grands et les savants.
Si Jésus ne fut jamais embarrassé en présence des puissants et des sages de ce monde, Son cœur simple et humble sut également s’accommoder du contact journalier des gens du peuple, des rudes travailleurs de la plus modeste origine. Il s’attacha à eux, ne voulant pas être élevé. Lorsqu’ils cherchèrent à le faire, Jésus leur échappa et alla prier sur la montagne, et lorsqu’Il revint, Il parla à Ses disciples d’une façon si intransigeante que presque tous l’abandonnèrent.
Peu avant sa mort, Il prit la vile place d’un esclave et lava les pieds de Ses apôtres, puis Il leur dit : « Je vous ai donné un exemple, afin que vous fassiez comme je vous ai fait. »
De quel secours ceci ne m’a-t-il pas été dans notre École militaire ! Le lendemain de mon arrivée, on m’envoya dans un étroit réduit pour cirer une quantité de souliers sales appartenant aux cadets. Le diable s’approcha de moi pour me rappeler que peu d’années auparavant j’avais pris mes grades universitaires et passé deux ans dans une des premières facultés de théologie du pays ; qu’ensuite ayant été pasteur d’une église de la capitale, je venais d’abandonner mon travail d’évangélisation où j’avais vu des centaines d’hommes chercher leur Sauveur, et que maintenant je cirais les souliers de garçons ignorants. Le diable est mon vieil ennemi ; mais je lui rappelai l’exemple de mon Sauveur, et il s’éloigna. Jésus a dit : « Si vous savez ces choses, vous êtes heureux pourvu que vous les pratiquiez. » – Je les pratiquais, le diable le savait, il me laissa et je fus heureux : ce petit réduit s’était transformé pour moi en un parvis du ciel et mon Seigneur m’y visita.
« Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles. » Si vous voulez avoir un cœur semblable à celui de Jésus, qu’il soit rempli d’humilité et non gonflé d’orgueil, ne se cherchant pas lui-même. « Revêtez-vous d’humilité. » Jésus était doux et humble de cœur. Paul parle de sa douceur et Pierre nous dit que : « injurié, il ne rendait point d’injures, maltraité, ne faisait point de menaces, mais s’en remettait à celui qui juge justement. » Il ne frappait pas quand on L’injuriait ; Il ne cherchait pas à se justifier, mais remettait Sa cause à son Père céleste et attendait. « Semblable à un agneau qu’on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la tondent, Il n’a point ouvert la bouche. »
C’était la douceur portée à sa perfection ; car non seulement Il se refusait à rendre les coups, mais Il subissait les plus cruelles et les plus humiliantes injustices. « De l’abondance du cœur la bouche parle. » Son cœur étant plein de douceur, sa bouche ne récriminait pas contre ses ennemis. C’est précisément ce qu’Il exige de nous dans ces paroles : « Je vous dis de ne pas résister au méchant. Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre, et si quelqu’un te contraint à faire un mille, fais-en deux avec lui. »
Je connais un frère nègre, haut de plus de six pieds, à la forte charpente, aux bras musculeux, qui fut il y a peu de temps, repoussé d’un tramway d’une manière inconvenante et brutale, tandis qu’il avait autant de droit à sa place que le conducteur lui-même. Une personne, connaissant ses exploits passés et sa force au pugilat, lui dit :
– Pourquoi, Georges, ne l’avez-vous pas corrigé ?
– Je n’aurais pu, car Dieu m’avait enlevé toute envie de lutter, répondit le bon nègre.
« Si vous passez votre couteau au feu et en enlevez le tranchant, il ne coupe plus, » ajouta-t-il avec une exclamation joyeuse. « Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. »