1. Les suggestions ou les mauvaises pensées d'un méchant compagnon sont semblables à la piqûre d'un insecte dans une feuille de chêne. Cette piqûre provoque la naissance d'une noix de galle lorsque la feuille est arrivée à maturité. Un serpent ne se fait pas de mal à lui-même en s'inoculant son propre poison, mais d'autres créatures inoffensives en sont affectées. Ainsi, un homme porté au mal a déjà le poison du péché en lui, de sorte que l'influence empoisonnée du méchant lui fait moins de mal qu'à un homme bien disposé.
2. L'upas de l'arbre antjar ou anchar de Java ou le lierre empoisonné d'Amérique produisent une sorte d'huile ou de suc nocifs qui, emportés par le vent, propagent des maladies dangereuses et des épidémies dévastatrices dans les pays situés dans le rayon d'action de ces poisons. Ainsi, sans qu'on s'en rende compte, l'effet mauvais et empoisonné de la vie d'hommes méchants se répand autour d'eux, provoquant chez beaucoup des maladies spirituelles et la mort.
3. On a observé que les insectes qui percent les troncs les plus épais et les vers marins qui perforent les pierres, sont extrêmement mous et délicats ; pourtant avec le temps, ils détruisent entièrement le bois le plus dur ainsi que les pierres. De même, si nous ne veillons pas et si, avec le secours de Dieu, nous ne chassons pas les mauvaises pensées et les mauvaises habitudes qui souvent nous semblent peu importantes, elles rongent notre vie spirituelle au point de n'en laisser que l'apparence. Les reptiles et les insectes nuisibles comme les serpents venimeux et les scorpions, attaquent et blessent, injectant dans les blessures qu'ils ont faites le poison sécrété par leurs glandes, causant ainsi la souffrance et la mort. Les mouches et la vermine ne sont pas tenues pour aussi dangereuses, alors qu'en réalité, elles provoquent la mort en transmettant les germes de maladies qu'elles répandent partout. De même, nous ne rangeons pas au nombre des criminels dangereux des hommes qui, pourtant, sans qu'on le remarque, sont tout aussi redoutables, car ils propagent autour d'eux, avec leur langue qui n'a pas été bridée, le poison de doctrines morbides.
4. Certains insectes réussissent à se percer un chemin dans un fruit encore vert où ils déposent leurs œufs. A mesure que le fruit se développe, le trou se referme à l'extérieur. Les œufs éclosent et les petites chenilles se mettent à manger le fruit. A l'extérieur il n'en paraît rien, le fruit semble mûr, il est tentant, mais à l'intérieur il est vide et n'a aucune valeur. De même, les idées et les habitudes coupables que nous contractons dans notre enfance et dans notre jeunesse se développent progressivement et produisent au plus profond de notre âme la corruption de notre nature morale. Il est donc absolument nécessaire que dès notre plus tendre enfance nous soyons sur nos gardes à l'égard du péché qui déprave notre nature.
5. Au Mexique, il existe un sorte de fève nommée le grain dansant. Dès que les rayons du soleil la touchent, elle commence à se tordre et à tourner jusqu'à ce qu'elle trouve l'ombre d'une pierre ou d'un buisson. Cet étrange phénomène s'explique par la présence d'un insecte qui s'est introduit dans la fève, s'en est nourri et n'en a laissé que la cosse. Lorsque la chaleur du soleil l'atteint, l'insecte s'efforce de sortir de la fève et tourne continuellement dans la cosse jusqu'à ce qu'ayant atteint l'ombre, la fraîcheur met un terme à son agitation. De la même manière, lorsque des pensées et des désirs mauvais entrent dans le cœur de l'homme et que le soleil de justice répand sa lumière sur la vie impure d'un pécheur, celui-ci est troublé et cherche à se réfugier dans les ténèbres où les rayons divins ne luisent pas, ainsi il vit dans les ténèbres du dehors et ne jouit plus de la lumière et de la chaleur divines.
6. Dieu ayant fait l'homme à sa propre image, il n'y a rien qui puisse gêner celui-ci s'il remplit cette seule condition que, dans l'usage de sa libre volonté, il ne tombe dans le péché. Nous ne faisons aucun tort à Dieu en péchant, mais nous nous en faisons à nous-mêmes et à ceux qui nous sont apparentés. Le Dieu d'amour désire que nous soyons sauvés du péché sous toutes ses formes afin que nous puissions jouir de sa communion. Le péché nous exclut de cette sainte union avec Dieu. Entre individus, les relations sont si étroites que le mal dont nous souffrons fait souffrir les autres et le mal des autres nous fait souffrir. Il n'a jamais été et il ne sera jamais possible de commettre le mal sans que d'autres en souffrent. A un degré quelconque les hommes sont affectés par le bien ou le mal que nous faisons, c'est pourquoi le résultat de la repentance doit être de nous amener à nous abstenir d'actes nuisibles à nous et aux autres par le secours et la grâce de Dieu, de faire comme Zachée, qui répara le mal qu'il pouvait avoir commis (Luc XIX, 8 à 10).