Trois points nous arrêteront successivement : la doctrine du Canon, celle de l’Inspiration et celle de l’Interprétation de l’Écriture.
A. Ancien Testament. — Le canon de l’Ancien Testament était clos depuis longtemps. Les chrétiens le reçurent tout formé des mains de la synagogue. Mais à côté des livres canoniques, il y en avait d’autres, d’origine plus récente, au sujet desquels deux opinions différentes avaient cours parmi les juifs.
Les Juifs de Palestine, plus strictement attachés aux traditions théocratiques, excluaient du canon les Apocryphes (Tobie, Judith, Macchabées, Sagesse de Salomon, Sagesse de Jésus fils de Sirach, etc.). Ils n’accordaient à ces livres aucune autorité.
Les Juifs d’Alexandrie, animés d’un esprit plus large, et surtout jaloux d’opposer aux richesses littéraires des Grecs une littérature hébraïque aussi considérable que possible, les citaient volontiers et les entouraient d’une faveur marquée. Toutefois ils distinguaient entre ces livres et les livres canoniques, lesquels étaient lus régulièrement dans les synagogues. Ils traduisirent les uns et les autres en grec, mais rien n’autorise à penser qu’ils aient introduit les Apocryphes dans le canon hébraïque.
Quoi qu’il en soit, les Apocryphes figurent dans la Version des Septante, et c’est par elle qu’ils furent connus des chrétiens. Ils passèrent tout naturellement dans les versions latines, la Vetus Itala, et plus tard la Vulgate. La plupart des chrétiens ne connaissant que les Septante, et étant incapables de remonter au texte hébreu, ne pouvaient contrôler l’origine de ces livres. C’est seulement plus tard, lorsque, avec Origène, on revint au texte hébreu, que l’on apprit à distinguer les Apocryphes des Canoniques. Toutefois, les Apocryphes demeurèrent dans la Vulgate, qui fut déclarée version officielle et inspirée au Concile de Trente, et les bibles protestantes seules les rejettent.
B. Nouveau Testament. — Nous avons dit sous l’empire de quelles nécessités se forma le canon du Nouveau Testament. Aux prétendus livres et aux prétendues traditions des hérétiques, on voulut opposer une tradition écrite, fixe, un recueil authentique de livres apostoliques. Nous avons dit aussi à quel critère historique on s’était arrêté : on avait accepté comme canoniques les livres lus dans les églises apostoliques et universellement reconnus par elles.
1. Ainsi se forma le recueil des homologoumènes, composé de deux parties :
1° Τὸ εὐαγγέλιον, — ou τὸ εὐαγγελικόν, l’Évangile, considéré comme une histoire unique en quatre récits, suivant les divers narrateurs (κατὰ Ματθαῖον, κατὰ Μάρκον, κατὰ Λουκάν).
2° Ὁ ἀπόστολος, — ou τὸ ἀποστολικόν, l’Apôtre, nom donné à Paul, puis au recueil de ses lettres, et enfin étendu à toute la seconde collection du canon, dont les épîtres de Paul formaient la plus grande part. Le livre des Actes servait d’introduction à cette seconde collection, qu’il reliait à la première, et qui comprenait, outre les quatorze épîtres de Paul, les deux épîtres appelées καθολικαί ou ἐγκύκλιαι de Pierre et de Jean (1Pierre et 1Jean). — Les témoignages d’Irénée, de Clément et de Tertullien permettent d’affirmer que ce recueil était formé dès le milieu du iie siècle, vers 150.
2. A côté de ces livres s’en placèrent d’autres, qui n’étaient pas universellement connus et admis dans les églises et que l’on désignait, à cause de cela, sous le nom d’Antilégomènes : c’étaient l’épître de Jacques, la 2e de Pierre, la 2e et la 3e de Jean, celle de Jude et l’Apocalypse.
3. Enfin, une série de livres appelés d’abord utiles — ὠφέλιμα, γνήσια — et plus tard illégitimes — νόθα — jouissaient d’un grand crédit, sans être canoniques, et quelques-uns même étaient lus dans les assemblées. C’étaient le Pasteur d’Hermas, l’épître de Barnabas, celle de Clément Romain, et l’écrit intitulé κήρυγμα Πέτρου
Ce n’est qu’au ive siècle que, toute contestation ayant cessé au sujet des antilégomènes, et les livres tels que le Pasteur et les épîtres de Barnabas et de Clément ayant été écartés définitivement, le canon fut ce qu’il est demeuré jusqu’à nos jours.
C’est aussi seulement vers la fin de notre période que le recueil canonique ainsi formé prit le nom de Nouveau Testament. Origène l’appelle ἡ καινή διαθήκη, et Tertullien Novum Testamentum. Le mot διαθήκη est le terme par lequel les Septante avaient traduit l’hébreu berith, alliance. Les juifs appelaient l’Ancien Testament sepher haberith, car le fondement du mosaïsme était une alliance traitée avec Jéhovah et son peuple, avec promesses et engagements réciproques des deux parties contractantes. Ce mot se trouve appliqué par Paul à l’Évangile, qu’il considère comme une nouvelle alliance, une alliance de grâce, scellée par le sang de Jésus-Christ : ainsi, il oppose la καινή διαθήκη à la παλαία διαθήκη (2Cor.3.6, 14). Telle fut l’origine du terme grec qui servit à désigner les livres de la nouvelle alliance.
Voici maintenant l’origine du terme latin. Le mot διαθήκη signifie aussi testament, legs, et il est appliqué avec ce sens à l’Évangile dans l’épître aux Hébreux (Héb.9.15 et suiv). L’Évangile y est considéré comme un héritage, qui nous est assuré par la mort du testateur. C’est en s’attachant de préférence à ce sens spécial, que les Pères latins traduisirent διαθήκη par testamentum (Vetus Itala), et Tertullien se servit de ce même mot pour désigner le recueil apostolique, l’ensemble des documents authentiques de la nouvelle alliance.
A. Ancien Testament. — En même temps qu’ils reçurent des juifs le canon de l’Ancien Testament, les chrétiens leur prirent aussi leurs idées sur l’inspiration de ces livres sacrés. Or, ces idées étaient devenues fort étroites, depuis que la voix des prophètes avait cessé de se faire entendre. On s’attachait à la lettre de tous les documents de la révélation, des livres historiques aussi bien que des écrits prophétiques. On croyait à l’inspiration littérale de tous les auteurs sacrés ; on les regardait tous comme des instruments passifs entre les mains de Dieu. Ils n’avaient pensait-on, rien dit d’eux-mêmes : tout leur avait été directement donné et dicté par le Saint-Esprit, la forme comme le fond, les mots comme les pensées. Les fautes de langue elles-mêmes étaient considérées comme inspirées. Chaque mot, chaque lettre, chaque signe avait une valeur divine, une signification mystérieuse et prophétique. — De là les travaux minutieux et puérils auxquels se livraient les rabbins sur le texte de l’Ancien Testament : ils comptaient le nombre de lettres de chaque livre, notaient la lettre du commencement, celle de la fin et celle du milieu, et attribuaient une vertu mystique à chaque lettre de l’alphabet hébreu.
Cette notion littéraliste était appliquée par les juifs alexandrins à la version des Septante. On connaît la légende racontée par le juif Aristée sur les soixante-dix vieillards enfermés dans des cellules séparées par ordre de Ptolémée, et faisant dans le même temps, sans se concerter, soixante-dix traductions identiques de l’Ancien Testament.
Les chrétiens adoptèrent en général cette même notion de l’inspiration des Écritures, et nous la retrouvons chez la plupart des Pères de cette période. Il y a cependant entre eux quelques nuances, et nous saisissons encore sur ce point les deux tendances que nous avons déjà signalées.
a) La première, celle qui compte le plus grand nombre de représentants, c’est la tendance étroite et littéraliste.
1. Les Pères apostoliques ne sont pas des théologiens, et leurs écrits ont un caractère essentiellement pratique : aussi ne formulent-ils point de théorie de l’inspiration. Mais ils affirment le fait, et la manière dont ils citent et interprètent l’Ancien Testament montre bien qu’ils se font de cette inspiration une idée très étroite et très littéraliste. En effet, ils citent toujours les Écritures en faisant précéder le texte d’une de ces formules : λέγει τὸ πνεῦμα τὸ ἅγιον, λέγει τὸ στόμα τοῦ θεοῦ. Quant à leur méthode d’interprétation, c’est la méthode allégorique. Ils découvrent dans les moindres mots du texte sacré tout un monde de merveilles, tout un symbolisme profond, tout un enseignement mystique. Ils trouvent partout des types et des prophéties de Jésus-Christ et de sa croix. Ils font reposer quelquefois sur un mot, sur une lettre, tout un raisonnement laborieux et subtil, toute une doctrine mystique, toute une série d’applications morales et pratiques.
2. Le point de vue de Justin Martyr est le même que celui des Pères apostoliques ; mais ici, comme ailleurs, Justin se distingue de ses prédécesseurs par l’ampleur de son esprit. Tandis que ceux-ci se bornaient à affirmer le fait de l’inspiration littérale, Justin en donne l’explication et la théorie. « Il était impossible à des hommes, dit-il, d’avoir une telle connaissance des choses divines : aussi ne font-ils eue que par un don céleste et par l’énergie de l’Esprit de Dieu. Ils ont résonné sous le souffle de l’Esprit divin comme la lyre résonne sous le plectrum. Le Logos divin nous a révélé par leur bouche les choses du ciel. Voilà pourquoi, bien qu’ils soient venus en des temps et en des lieux divers, il nous ont enseigné, comme par une seule bouche et par une seule voix, tout ce qu’il nous est nécessaire de connaître sur Dieu, sur la création, sur la chute, sur l’immortalité de l’âme et sur le jugement à venir. » (Ad Græcos, 8.) — Ainsi les prophètes (et les apôtres sont placés sur le même rang) sont les instruments dont Dieu s’est servi. Leur rôle est purement passif. La lyre ne peut produire aucun son par elle-même : elle ne résonne que sous l’action du plectrum et de la main qui le dirige.
Remarquons cependant que la lyre n’est pas un instrument absolument brut et inerte. C’est un ensemble de cordes disposées dans un certain ordre et vibrant selon certaines lois, et chaque corde a son timbre particulier, qui la peut faire distinguer de toute autre. Il faut que le joueur de lyre tienne compte de la disposition et du timbre de toutes ces cordes. Le choix d’une telle image semble donc indiquer que, dans la pensée de Justin, le phénomène purement passif de l’inspiration ne détruisait pas l’individualité propre de l’homme inspiré. Mais il est certain que l’idée de la passivité domine.
Ajoutons que pour Justin l’inspiration ne s’étend pas en dehors du domaine religieux et des vérités nécessaires au salut.
3. Même conception chez Athénagore : « l’Esprit de Dieu, dit-il, s’est servi des prophètes comme le joueur de flûte se sert de son instrument » — ὡσεὶ αὐλητὴς αὐλὸν ἐμπνεύσας. — Il représente l’état des prophètes pendant l’inspiration comme une « extase ».
4. Irénée proclame en ces termes la perfection des Écritures : « Scripturæ perfectæ sunt, quippe a verbo Dei et Spiritu ejus dictæ. » (Adv. hœres, II, 28). Il attribue au Saint-Esprit, non pas seulement le fond des pensées, mais encore le choix des mots.
5. Tertullien pense de la même manière, et, comme les deux précédents, il attribue la même inspiration absolue à toutes les parties de la Bible. Il proclame son infaillibilité, non pas seulement en matières religieuses, mais en toutes choses (questions d’histoire, de chronologie, de cosmographie et de sciences naturelles.)
6. Ceux qui vont le plus loin dans cette voie, ce sont les Montanistes, qui font des écrivains sacrés des instruments absolument passifs, et de l’inspiration une extase où l’on perd la conscience de soi-même, une sorte de possession violente et brutale comme celle des pythonisses païennes, état où toutes les facultés sont suspendues, où disparaît toute conscience de soi-même, toute intelligence, toute volonté.
b) En face de cette tendance littéraliste, l’école d’Alexandrie se fait de l’inspiration une notion plus large, plus vivante et plus vraie, en même temps que plus spiritualiste. Clément, il est vrai, ne formule pas cette notion. Il se tient au point de vue de Justin. Il cite, lui aussi, les Écritures avec cette formule : τὸ στόμα κυρίου ἐλάλησε. Il écrit même dans son Pédagogue (I, 7) : ὁ νόμος διὰ Μώσεος ἐδόθη, οὐχὶ ὑπὸ Μώσεως, ἀλλὰ ὑπὸ μὲν τοῦ Λόγον, διὰ Μώσεως δὲ τοῦ θεράποντος. Mais Origène réagit franchement contre la conception montaniste, comme nous allons le voir en parlant de l’inspiration du Nouveau Testament.
B. Nouveau Testament. — Les chrétiens mirent les apôtres sur le même rang que les prophètes et furent peu à peu conduits à attribuer la même inspiration aux ouvrages des uns et des autres. Les apôtres étaient pour eux, non seulement, comme le prétend une certaine école, les témoins immédiats de Jésus-Christ, mais aussi des hommes inspirés par le Saint-Esprit et chargés par Dieu de nous révéler les mystères de la grâce. Les chrétiens croyaient au miracle de la Pentecôte, et voyaient dans les apôtres, à partir de ce moment, des organes spéciaux du Saint-Esprit. Ils s’en rapportaient, au reste, sur ce point, au témoignage des apôtres eux-mêmes. Aussi, quand leurs écrits furent réunis en canon, pour servir de drapeau à l’Église contre les hérétiques, on plaça ces écrits sur le même rang que ceux de l’Ancien Testament. Et, plus l’on s’éloigna du temps des apôtres, plus la lutte contre les hérésies devint vive, et plus aussi grandit l’importance de la tradition apostolique écrite, plus on s’attacha à la lettre de cette tradition comme à la parole même de Dieu.
Aussi voyons-nous les docteurs du iie et du iiie siècle appliquer en général au Nouveau Testament la même notion littéraliste de l’inspiration qu’ils appliquaient à l’Ancien, après l’avoir reçue des juifs.
1. On a contesté que les Pères Apostoliques aient cru à l’inspiration des écrits des Apôtres. On a objecté, d’une part, que ces Pères ne parlent pas d’une telle foi et surtout ne la formulent pas dogmatiquement ; mais ceci est facile à comprendre, car formuler à leur époque la doctrine de l’inspiration eût été inutile et prématuré. D’autre part, on a remarqué qu’ils ne citent pas très souvent les écrits apostoliques comme autorité inspirée ; mais cela s’explique aussi, car ils n’en connaissaient qu’un petit nombre et ils vivaient au temps où toutes les préférences étaient encore pour la tradition vivante et orale.
a) Mais il est un fait certain, qui ressort de toutes les pages de leurs écrits, c’est qu’ils plaçaient les apôtres sur la même ligne que les prophètes ; et cela suffit, quand on songe à ce qu’étaient pour eux les prophètes, leurs paroles et leurs livres. Ignace, par exemple, écrit aux Philadelphiens : « J’ai mon recours à l’Évangile, comme à la chair de Jésus-Christ, et aux apôtres, comme au presbytère de l’Église. Aimons aussi les prophètes, parce qu’ils ont annoncé ce qui regarde l’Évangile » (§ V). Et aux Smyrnéens : « Attachez-vous aux prophètes, mais surtout à l’Évangile » (§ VIII). De même, Polycarpe écrit aux Philippiens : « Servons le Seigneur avec crainte, comme il l’a commandé lui-même et comme l’ont prescrit les apôtres qui nous ont prêché l’Évangile et les prophètes, qui ont annoncé à l’avance la venue de Notre Seigneur » (§ VI),
b) Un autre fait, non moins significatif, c’est qu’ils mettent la parole des apôtres sur le même rang que celle de Jésus-Christ. « Les apôtres, dit Clément, nous ont annoncé l’Évangile de la part de Jésus-Christ, et Jésus-Christ de la part de Dieu. Jésus-Christ a été envoyé par Dieu, et les apôtres par Jésus-Christ ; l’un et l’autre de ces envois a été fait par la volonté de Dieu (Ad. Corinth., 42). Et Ignace : « Etudiez-vous à vous affermir dans la doctrine de Jésus-Christ et des apôtres » (Ad Magn., 13). « Suivez votre évêque comme Jésus-Christ, et la compagnie des anciens comme les apôtres » (Ad Smyrn., 8). « Comme le Seigneur n’a rien fait sans le Père, ni par lui-même, ni par les apôtres… » (Ad Magn., 7).
c) Ils affirment même positivement l’inspiration des écrits apostoliques : « Prenez en main l’épître du bienheureux apôtre Paul, écrit Clément de Rome aux Corinthiens, … certainement il vous écrivit par le Saint-Esprit » (47)
d) Au reste, les Apôtres, aux yeux des Pères apostoliques, tenaient moins leur autorité de leur qualité de témoins oculaires, que du don du Saint-Esprit qu’ils avaient reçu. Ce qui le prouve, c’est que, de tous les apôtres, celui qu’ils citent le plus, c’est saint Paul, lequel précisément n’avait point été témoin immédiat du Seigneur.
e) Enfin, l’épître de Barnabas nous fournit un dernier trait. D’après le codex sinaïticus, elle renferme une citation du Nouveau Testament avec la formule consacrée ὡς γέγραπται.
2. Si de l’âge des Pères apostoliques nous passons à celui des Apologètes, les témoignages abondent et il devient inutile d’insister. Justin, Irénée, Tertullien, Clément d’Alexandrie citent les écrivains du Nouveau Testament de la même manière que ceux de l’Ancien et assimilent l’inspiration des apôtres à celle des prophètes. Irénée attribue au Saint-Esprit, dans les écrits apostoliques, non seulement le fond de la pensée, mais le choix des mots. Il fait, par exemple, la réflexion que Matthieu aurait pu dire, au commencement de son évangile : « Jesu vera generatio sic erat » ; mais le Saint-Esprit, prévoyant l’abus qu’en pourraient faire de faux docteurs, dit par Matthieu : « Christi autem generatio sic erat. »
Il faut ajouter que certains Pères, comme Clément, attribuent aussi l’inspiration à Barnabas, au Pasteur d’Hermas, à Clément Romain, et même — nous l’avons vu — aux philosophes grecs, à Platon surtout, et, en quelque mesure, aux Livres Sibyllins. Mais ils reconnaissent à l’inspiration des Apôtres un caractère spécial et distinctif, donnant à leurs écrits une autorité que nulle parole humaine ne peut avoir.
3. Origène le premier arrive à une notion large et vivante de l’inspiration.
a) Il combat la grossière conception des Montanistes, et la qualifie de païenne, « C’est, dit-il, la Pythie qui est mise hors d’elle-même, dans un état d’inconscience assez semblable à la folie » — ἐξίσταται καὶ οὐκ ἐν ἑαυτῇ (C. Cels, ch. 7) ; — cela ne convient ni aux prophètes ni aux apôtres.
b) Il distingue, de plus, entre l’inspiration des prophètes et celle des apôtres. La première est extérieure, elle se traduit par des symboles et des visions. Aussi est-elle d’un rang moins élevé que l’inspiration intérieure des apôtres. Ceux-ci sont mis directement par le Verbe en contact avec l’Esprit. Leur inspiration est conforme au caractère général de la nouvelle alliance, qui rétablit notre communion avec Dieu, fait descendre l’Esprit divin dans nos cœurs et le mêle à notre propre esprit. Lorsque les apôtres étaient visités par l’Esprit de Dieu, ils ne perdaient pas la conscience d’eux-mêmes : au contraire, leur esprit était élevé à une plus haute puissance et acquérait de la vérité une connaissance parfaitement consciente et lumineuse. Et cela, parce que leur esprit entrait en communion avec le Logos et participait à la connaissance intuitive de la vérité, que le Logos possède par essence et par nature.
Du reste, Origène ne croit pas que l’Écriture soit partout également inspirée. Il insiste sur la distinction faite par saint Paul entre ce qu’il dit de la part du Seigneur et ce qu’il dit en son propre nom, comme il met à part dans l’Ancien Testament les passages qui commencent par ces mots : « Ainsi a dit le Seigneur. » — Ailleurs, il est vrai, il dit que toute l’Écriture est pleinement inspirée.
En résumé, à l’exception d’Origène, c’est, avec quelques nuances, la notion littéraliste de l’inspiration qui prévaut pendant toute cette période.
A. Méthode d’interprétation. — Avec la notion étroite et littéraliste que nous venons de caractériser, on s’attend à une interprétation littérale et stricte des Écritures. On rencontre, en effet, une telle interprétation chez plusieurs Pères. Cependant, c’est l’allégorie qui est surtout en faveur auprès d’eux. Cela s’explique. Quand on voit dans la Bible un livre dont tous les mots ont été prononcés par la bouche même de Dieu, on est conduit à donner à chacun de ces mots une importance que leur sens littéral ne suffit pas toujours à justifier. Il en faut alors chercher un autre. Les Écritures deviennent une sorte d’hiéroglyphe, dont il faut chercher la clef et pénétrer le mystère, où chaque lettre a une valeur divine et un sens caché.
Nous trouvons chez Philon un exemple de cette affinité naturelle entre la théorie de l’inspiration littérale et l’interprétation allégorique. C’est ainsi que Philon explique allégoriquement les généalogies de l’Ancien Testament. Et ces exemples ne furent que trop suivis par les docteurs de l’Église. Nous avons déjà dit comment Barnabas voit dans les 318 personnes qu’Abraham fit circoncire la prophétie de Jésus-Christ crucifié. Nous avons parlé aussi des distinctions établies par Clément et Origène entre les divers sens de la Bible, le sens littéral, le sens spirituel et quelquefois en outre le sens moral. Voici quelques règles que donne Origène au sujet de ces différents sens :
a) Il faut écarter le sens littéral toutes les fois que ce sens ne présente aucun caractère directement religieux ; par exemple, à propos des généalogies de l’Ancien et du Nouveau Testament. — C’est là un des résultats de la tendance intellectualiste d’Origène : il méconnaît l’importance historique de ces généalogies et l’importance de l’histoire au point de vue du salut ;
b) Il faut écarter encore le sens littéral de tous les récits qui présentent quelque chose de choquant au point de vue moral, comme, par exemple, certains traits de la vie des patriarches. — C’est un second résultat de cette même tendance ;
c) Il faut écarter enfin le sens littéral toutes les fois que l’on rencontre des détails qui contredisent la dignité et la spiritualité divines ; ainsi dans l’explication des théophanies de l’Ancien Testament. — Ici Origène cède à l’influence platonicienne, et l’on surprend chez lui quelques traces de dualisme.
On peut aller loin avec une telle méthode. De plus, dans le système d’Origène, le sens littéral ne donne que le Christ charnel : pour aller jusqu’au Logos divin, il faut le sens mystique. Et une fois qu’on est en contact avec le Logos, on n’a plus besoin du sens littéral et historique. Celui-ci n’est qu’un chemin, un passage, qu’il faut traverser sans s’y arrêter, pour arriver jusqu’au Christ spirituel ; c’est lui qui seul nous donnera l’eau jaillissante en vie éternelle. Ces vues sur les rapports de l’Écriture et de Christ sont excellentes, mais la manière dont Origène les expose n’est pas sans péril.
Quelques docteurs toutefois se défient de l’allégorie et recommandent le sens simple et immédiat de la Bible. En Orient, l’école d’Antioche fonde l’exégèse sur la grammaire. En Gaule, Irénée admet l’interprétation allégorique, mais il en blâme l’abus. Il s’élève aussi contre la prétention de tout expliquer dans l’Écriture. Il faut, dit-il, savoir s’incliner en silence devant les mystères de Dieu et devant les obscurités des Écritures ; il faut se tenir au sens le plus simple et le plus clair, sans prétendre tout comprendre et tout expliquer. « Si, dans la nature, il y a des choses qui nous sont accessibles, et d’autres dont Dieu s’est réservé le secret, combien plus, dans les révélations toutes spirituelles des Écritures, doit-il y avoir, à côté des choses que nous pouvons comprendre par la grâce divine, d’autres choses qui n’appartiennent qu’à Dieu ! Et cela, non seulement dans le siècle présent, mais encore dans le siècle à venir, afin que toujours Dieu enseigne et que toujours aussi l’homme soit instruit de Dieu. » (Adv. hæres II, 28).
B. Rapport de la tradition avec l’Écriture. — Nous avons à traiter une dernière question : A qui attribuait-on l’autorité souveraine et décisive : aux Écritures ou à la tradition ? Aux écrits apostoliques formant le recueil du Nouveau Testament ou à la tradition apostolique représentée par les Églises appelées sedes apostolicæ ?
Reconnaissons d’abord un fait qui est vrai, mais dont l’Église catholique a beaucoup abusé, et qu’elle invoque encore aujourd’hui pour établir la supériorité de la tradition sur les Écritures : C’est que la tradition orale est antérieure à la composition et à la réunion en recueil des écrits du Nouveau Testament. Il est certain, en effet, que c’est tout d’abord par la prédication, par le ministère de la parole que les apôtres ont accompli leur œuvre d’évangélisation et de conquête. Jusqu’à la fin de leur vie, ce ministère vivant de la parole tint la première place dans leur activité missionnaire. Ils prêchaient l’Évangile, ils enseignaient, ils instruisaient ; ils exhortaient les pécheurs à se convertir et les croyants à porter des fruits dignes de leur sainte vocation. C’était là leur mission et leur charge, le κήρυγμα, et le λόγος τοῦ θεοῦ. L’Évangile qu’ils avaient prêché, d’autres, après l’avoir reçu d’eux, le prêchèrent à leur tour. Ainsi se formait la παράδοσις par laquelle se transmettait et se répandait au loin la vérité évangélique.
Les Evangiles ne furent écrits que lorsque l’Évangile était depuis longtemps prêché et cru dans le monde, et que bien des Églises avaient été fondées par le ministère des apôtres et de leurs compagnons d’œuvre. Les apôtres n’écrivirent leurs Epîtres — ces lettres admirables où ils développaient tout le conseil de Dieu et traçaient les devoirs de la vie chrétienne — que pour suppléer à leur propre absence. Paul, quand il quittait les Églises qu’il venait de fonder pour aller porter ailleurs la parole de l’Évangile, écrivait aux nouveaux fidèles pour les affermir dans la foi, et leur donner de loin les conseils et les directions qu’il ne pouvait plus leur donner de bouche. Ou bien, il écrivait aux Églises qu’il se proposait de visiter, afin d’y préparer d’avance l’œuvre qu’il avait dessein d’y accomplir par son ministère actif et sa parole vivante.
Les apôtres aimaient mieux agir par la parole que par la plume. Ils visitaient une Église plus volontiers qu’ils ne lui écrivaient. En général, ils ne prenaient la plume que quand ils ne pouvaient pas se rendre de leur personne auprès des frères qu’ils avaient à cœur d’éclairer, d’avertir et d’instruire. Les fidèles, de leur côté, quelque prix qu’ils attachassent aux lettres des apôtres, aimaient mieux les posséder eux-mêmes et entendre leur parole que de lire leurs épîtres. Il en fut ainsi aussi longtemps que vécurent les apôtres.
Pendant les premières années qui suivirent leur mort, leurs disciples immédiats, comme Polycarpe et Papias, attachaient plus de prix aux paroles qu’ils avaient entendu sortir de leur bouche, et dont ils conservaient pieusement le souvenir, qu’à leurs lettres ou à leurs écrits. De leur côté, les chrétiens de la fin du premier siècle et du commencement du second recherchèrent avec le plus grand empressement le commerce de ceux qui avaient vu et entendu les apôtres, afin de leur faire répéter les paroles que ceux-ci avaient prononcées. On plaçait cette tradition vivante, orale, personnelle, au-dessus des écrits apostoliques. Nous avons sur ce point le témoignage formel de Papias, et certes Papias n’était pas seul à penser ainsi.
Mais il n’en fut pas de même plus tard. A mesure qu’on s’éloignait du temps des apôtres, à mesure que leurs disciples immédiats — ceux qui avaient vu leur visage et entendu leur voix — disparaissaient les uns après les autres, on attacha plus de prix aux écrits apostoliques, qui étaient désormais ce qu’il restait de plus certain d’eux et de leur enseignement. Les Évangiles écrits prirent aussi une plus grande valeur et une plus grande autorité. On vit dans ces Évangiles et dans les lettres des apôtres la règle suprême de la foi, le document fixe et immuable de la vérité chrétienne, destiné à préserver d’altération la tradition vivante et orale.
Nous avons vu que cette tradition, vivante elle-même, à laquelle on attachait aussi le plus grand prix et qui jouait un rôle si important dans la controverse contre les hérétiques, se fixa de bonne heure dans les règles de foi, et dans le symbole apostolique qui en est sorti. Il y eut donc de bonne heure pour les fidèles une double source et une double règle de foi : d’une part, les Écritures du Nouveau Testament, et, d’autre part, la tradition ecclésiastique, soit orale, et conservée dans les sedes apostolicæ, soit écrite, et rédigée dans les regulæ fidei. Ces deux règles jouissaient d’une autorité égale, elles portaient le même nom de κανὼν τὴς πίστεως, et passaient pour être absolument identiques au point de vue de leur contenu. Des deux côtés c’était le même enseignement, la doctrine des apôtres, que l’on opposait aux doctrines des hérétiques comme représentant seule le véritable christianisme. — La question du rapport de ces deux règles ne se posait même pas. On ne songeait pas à se demander laquelle déciderait en cas de conflit, tant on les considérait comme deux formes diverses d’une règle unique, la règle apostolique, le κανὼν ἀποστολικός, identique au κανὼν ἐκκλησιαστικός.
Un jour vint cependant où cette question fut posée : ce fut le jour où les hérétiques, qui surgissaient toujours plus nombreux au sein de l’Église, attaquèrent à la fois et opposèrent l’une à l’autre ces deux sources de la doctrine chrétienne, tantôt en invoquant contre la tradition de l’Église une tradition secrète, qui était, disaient-ils, la vrai tradition apostolique, — tantôt en dénaturant le sens des écrits apostoliques, ou en leur opposant d’autres écrits prétendus apostoliques et favorables à leurs propres doctrines, — tantôt enfin en mettant en opposition sur certains points la tradition orale et les écrits apostoliques. Il fallut alors avoir un critère fixe pour décider, soit entre les deux traditions orales qui se trouvaient en présence, soit entre les diverses interprétations des écrits sacrés, soit enfin entre la tradition orale et les documents apostoliques, lorsqu’on prétendait constater entre eux un conflit.
Ce critère fut, en général, l’Écriture. Ce qui décidait entre la tradition ecclésiastique et la tradition invoquée par l’hérésie, c’était l’Écriture : celle des deux qui était conforme à l’enseignement de l’Ancien et du Nouveau Testament, était déclarée la vraie tradition. Ce qui décidait entre les divers sens attribués à certains passages de l’Écriture, c’était encore l’Écriture : en vertu du principe de l’analogie de la foi, l’interprétation la plus conforme à l’enseignement général des saints Livres était déclarée la seule vraie ; les passages clairs expliquaient ainsi les passages obscurs. Ce qui décidait enfin, en cas de désaccord, entre la tradition orale de l’Église elle-même et l’Écriture, c’était encore et toujours l’Écriture : c’est elle qui corrigeait et redressait la tradition. — L’Église se rangeait, en définitive, au principe protestant de l’autorité souveraine et décisive des Saintes-Écritures s’interprétant elles-mêmes et interprétant la tradition.
Ce principe se trouve formulé par Irénée, par Clément, par Origène, et il est généralement appliqué par les Pères des iie et iiie siècles. « Le sens des Écritures, dit Irénée, est facilement intelligible pour tout esprit droit et simple. S’il est des passages obscurs, ils s’expliquent par d’autres plus clairs, de telle sorte que l’Écriture s’explique par l’Écriture, et n’a besoin, pour être interprétée, d’aucun secours étranger. » On pourrait citer bien d’autres passages dans le même sens.
Toutefois, à côté de ce point de vue qui est le point de vue dominant, s’en rencontrent d’autres qui paraissent se rapprocher davantage du point de vue catholique — la tradition interprétant l’Écriture, — ou du point de vue mystique et rationaliste — l’Écriture interprétée par la raison ou par l’inspiration, — l’illumination intérieure et individuelle.
1. Irénée lui-même, qui est, à cette époque, le représentant le plus fidèle du principe protestant, fait souvent appel à la tradition. Il conseille aux fidèles, pour éviter tout piège et toute surprise, de recourir à la regula fidei, à la παράδοσις ἐκκλησιαστική, qui résume fidèlement la doctrine des Écritures. Il voit dans cette règle de foi une épée plus portative que l’Écriture elle-même pour repousser les attaques des hérétiques. Et, comme les gnostiques invoquaient, eux aussi, une παράδοσις ἀποστολική, Irénée s’attache à établir la fausseté de cette prétendue tradition et la vérité de la tradition ecclésiastique. Pour cela, il met en avant divers arguments. Cette tradition, dit-il, est celle des sedes apostolicæ de plus elle est conforme à l’Écriture ; elle est encore unanime, universelle, constante et non mobile, contradictoire et changeante comme celle des gnostiques. Il ajoute que, si les apôtres avaient eu une doctrine secrète pour les parfaits — selon ce mot de saint Paul, invoqué par les gnostiques : σοφίαν λαλοῦμεν ἐν τοῖς τελείοις, — c’est sûrement à leurs successeurs immédiats dans les grandes Églises de Corinthe, Rome, Ephèse, qu’ils l’auraient transmise. « Ainsi, conclut Irénée, s’il y a quelque question secondaire (modica quæstio) que l’Écriture ne puisse résoudre, il faut s’en rapporter à la tradition des plus anciennes Églises apostoliques. Mais, sur les grandes questions de la foi et du salut, il n’y a pas d’incertitude possible : la Bible est claire et la tradition la confirme. »
2. Tertullien va plus loin qu’Irénée : il érige décidément la tradition en critère de la vérité chrétienne. Il s’en rapporte à elle pour décider les questions douteuses et déterminer le vrai sens des Écritures. A l’époque de sa vie où il parle ainsi, on peut le considérer comme représentant le principe catholique, Dans son fameux livre De præscriptionibus adversus hæreticos, il pose le principe de la præscriptio vetustatis contra novitatera (on reconnaît là le juriste romain), et il fait de la tradition des sedes apostolicæ le critère de la vérité, la règle de l’interprétation des Écritures. « Les hérétiques, dit-il, ont falsifié les Écritures et altéré la tradition qu’ils ont trouvée établie dans l’Église ; il faut leur opposer la tradition primitive transmise par les apôtres à leurs successeurs, et par ces derniers aux évêques qui occupent leurs sièges. »
Quand il fut devenu montaniste, Tertullien changea de langage. Il en appela, non plus à la tradition, mais aux révélations nouvelles du Saint-Esprit. « Les Écritures ne sont pas suffisamment claires, dit-il, elles peuvent donner lieu à de fausses interprétations, d’où proviennent les hérésies : il faut donc une révélation nouvelle, qui explique et achève la première. » Et Tertullien pose le principe, adopté aussi par la théologie catholique, de la continuité de la révélation au sein de l’Église. Du reste, il conserve l’ancienne tradition, et ne l’attaque que quand elle contredit ses nouvelles doctrines. Dans ce cas particulier, il tient un langage tout contraire à celui de son livre contre les hérétiques : « Il n’y a pas de prescription contre la vérité : ni la longueur du temps, ni l’autorité des personnes, ni l’antiquité de la coutume ne peuvent rien contre elle. Jésus-Christ n’a pas dit : Je suis la coutume ; il a dit : Je suis la vérité. »
Cyprien invoque les mêmes principes dans sa controverse contre l’évêque Etienne, à propos du baptême des hérétiques : « Consuetudo sine veritate vetustas erroris est, » écrit-il (ép. 74).
3. Les docteurs d’Alexandrie acceptent aussi comme autorité dans l’Église les Écritures confirmées par la παράδοσις ἐκκλησιαστική. C’est là, pour Clément et pour Origène, la κανὼν τῆς πίστεως, et Origène oppose à la gnose des gnostiques la γνῶσις εκκλησιαστική, qui se renferme dans les limites de ce canon. Il reconnaît que souvent l’interprétation des Écritures paraît difficile et douteuse : il faut alors en appeler, pour en déterminer le sens, soit à l’Écriture elle-même, soit à la tradition ecclésiastique, soit à la raison individuelle, soit aux inspirations particulières du Saint-Esprit, soit enfin à une certaine tradition orale, transmise à certains initiés et distincte de la tradition générale. Nous avons vu déjà qu’Origène admet l’existence d’une telle tradition secrète, analogue à celle qu’invoquaient les gnostiques. Et il la justifie de la même manière. Certaines vérités lui paraissent trop sublimes pour être confiées à l’Écriture ; elles ne pouvaient se communiquer que par la parole vivante. « Révélées par Jésus-Christ à ses disciples préférés, et transmises par eux à quelques hommes privilégiés, elles sont parvenues jusqu’à nous, et nous les annonçons à ceux à qui Dieu donne sa grâce pour les comprendre. »
En résumé, — à côté de la tendance à faire des Écritures la règle et l’autorité souveraine en matière de foi, tendance protestante, dont Irénée est le plus pur représentant, — on peut trouver chez les Pères le principe catholique, représenté surtout par Tertullien, et même le principe rationaliste et mystique, représenté, d’une part, par Origène, et de l’autre, par les Montanistes. Cependant, c’est aux Écritures qu’appartient, en somme, la plus haute autorité dogmatique. La tradition n’a de valeur qu’autant qu’elle est d’accord avec les Écritures, et celles ci demeurent la norme de toutes les grandes questions de foi intéressant le salut.
Ce qui prouve que le premier rang et la première autorité appartenaient bien aux Écritures, c’est que l’usage en était recommandé à tous les laïques comme un devoir et un privilège. Irénée, Clément, Origène sont unanimes sur ce point.