Nous n’avons pas voulu faire le bilan du patrimoine authentiquement évangélique de l’Eglise de Rome. Il est considérable. Nous n’avons pas voulu non plus dégager les points sur lesquels les catholiques donnent aux « évangéliques » des exemples à imiter. Des ouvrages importants insistent sur ces éléments, non négligeables. Nous nous sommes bornés à préciser les domaines où l’Eglise nous paraît fort éloignée de l’Evangile qu’elle veut servir. Ce diagnostic lucide a été fait pour venir en aide à toutes les âmes désireuses de se soumettre à la Vérité révélée par Dieu dans Sa Parole.
Au cours de notre étude attentive des doctrines et des pratiques catholiques romaines, nous avons toujours découvert la même position fondamentale : l’Eglise visible, organisée dans ses formes et sa hiérarchie, remplace le Christ sur la terre ; elle prend sa place. Cela nous apparaît une substitution dangereuse. Au lieu de conduire à Jésus-Christ, elle en écarte. Il y a là comme une usurpation intolérable. L’institution humaine est devenue comme un écran entre Dieu et l’homme.
En voilà une illustration : supposons, par hypothèse, que l’humanité étant détruite par un cataclysme, seule une centaine d’habitants de la terre survivent sur un navire en plein océan. Ils abordent un continent et recommencent une nouvelle humanité après ce nouveau déluge. Qu’il y ait un chrétien ou non dans cette centaine de survivants, si l’un d’entre eux se donne à Jésus-Christ il sera sauvé. Dès qu’ils seront deux à le faire, l’Eglise sera constituée. Tel est l’enseignement de la Parole de Dieu. D’après Rome, même si les survivants sont tous chrétiens, ils ne peuvent former d’Eglise s’ils n’ont pas au moins un prêtre. La succession apostolique étant rompue, les sacrements ne pourront plus être donnés (sauf le baptême), partant, pas de grâce accessible. Une hypothèse comme celle-ci nous fait toucher du doigt que l’Eglise romaine repose sur des éléments humains et charnels, et non, comme l’enseigne l’Ecriture, sur une base spirituelle.
Pour en arriver là, l’Eglise catholique nous paraît avoir dévié, de l’antique Eglise apostolique, par un progressif et lent abandon de la simplicité primitive. Le coup le plus dur porté à l’Eglise fut l’entrée massive des païens et.de leurs coutumes, après l’Edit de Milan, au IVe siècle. L’Eglise possède une grande partie de la vérité, maïs souvent déformée et recouverte de pratiques qui la dénaturent. Le grand péché de l’Eglise, c’est d’avoir voulu prendre la place de Jésus-Christ, sous prétexte d’être son corps ; c’est d’avoir mis indûment l’accent sur les pratiques extérieures et d’avoir oublié l’esprit de l’Evangile. L’Eglise nous paraît donc induire les âmes en erreur : on ne peut y être sauvé que malgré ses pratiques et son enseigne- ment. Il s’agit donc de mettre en garde, avec amour, ceux qui sont égarés par ces doctrines si peu conformes au christianisme réel, celui du Nouveau Testament.
Nous croyons, en effet, que le christianisme n’est pas une « religion » parmi d’autres ; il est à l’origine un phénomène unique. Des hommes, des femmes, appartenant à toutes les classes de la société, sont saisis intérieurement par l’Esprit de Dieu, et vivent ensemble dans la communion fraternelle. Ils éprouvent la joie du salut, car ils ont reconnu en Jésus-Christ leur Sauveur qui est mort et ressuscité pour les laver de leur péché et leur donner la vie éternelle. Ils ont la même foi dans le Christ Sauveur. Ils se différencient nettement du monde où ils se trouvent. Certes, chacun reste dans sa profession : commerçant, cultivateur, mère de famille, mais leur vie est nouvelle et leur langage, leurs pensées, leurs gestes, leur comportement sont totalement neufs.
On se moque d’eux, puis on les persécute puisqu’ils se présentent dans la société comme un corps étranger. Peu à peu, leur foi rayonnante, leur joie, leur charité font impression sur ceux qui les entourent : on cherche à les imiter, croyant ainsi posséder leur secret. Quand plusieurs générations se sont succédées, il y a de nombreux enfants de chrétiens, qui par vénération pour leurs parents refont leurs gestes et reprennent leurs paroles, sans toutefois partager leurs convictions intimes. C’est ainsi que se développe un christianisme de façade, qui est un hommage au véritable, mais qui n’est plus que de la comédie. On porte le masque de la joie, mais sur un visage ravagé par les soucis.
Le christianisme est devenu de la sorte une « religion », installée, respectée, mais qui n’est plus qu’un ensemble de formes, de paroles et d’habitudes. Il n’est plus différent des autres religions, telles le bouddhisme ou l’islam. L’hindouisme peut même paraître attacher plus de valeur que lui à la vie intérieure.
Or, cette évolution nous paraît une trahison de la pensée du Christ qui reproche au Judaïsme d’avoir été victime de ce processus de sclérose. Il dit que son Père veut être « adoré en Esprit et en Vérité », et que les gestes, s’ils ne sont pas le fruit d’une réalité interne, sont une coquille vide, ou plutôt un monument funéraire masquant par ses splendeurs extérieures les horribles choses sans nom qui se décomposent à l’intérieur.
Nous croyons que le christianisme évangélique doit revenir à cette sobriété, à cette pureté des origines. Nos gestes, notre langage ne doivent être que l’expression d’une vérité spirituelle qui se trouve « dans notre cœur », en nous-mêmes. Les gestes, Les paroles, les formes ne servent de rien si elle ne sont pas l’expression d’une vie de l’Esprit en nous.
Nous adressons, solennellement, à tous ceux qui portent le beau nom de chrétiens (c’est-à-dire de christiens) de revenir à la simplicité de l’enseignement du Christ, et de ses apôtres, afin de recevoir la grâce de vivre « en esprit et en vérité », dans une communion vivante, personnelle, intime, avec le Christ mort et ressuscité.
Chaque chrétien doit avoir en lui-même la vie de l’Esprit : « Ne savez-vous pas, écrit l’apôtre Paul aux chrétiens de Corinthe (1 Corinthiens 3.16), que vous êtes un temple de Dieu et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » Ou comme le disait Jésus en parlant de ses disciples : « celui qui croit en moi, de son sein couleront des fleuves d’eau vive » (Jean 7.38).
Cette foi intérieure, en esprit et en vérité, peut s’exprimer de bien des manières ; par exemple, en conclusion de notre ouvrage nous affirmons que :
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Nous préférons toutefois terminer en précisant notre foi dans une Confession qui est adoptée par une multitude de chrétiens évangéliques dans le monde :
(Déclaration de foi de l’Alliance Evangélique Française.)