Traduction du Nouveau Testament – La foi et l’Écriture – Opposition – Importance de la publication de Luther – Besoin d’un exposé systématique. – Les lieux communs – Le péché originel – Salut – Libre arbitre – Effet des lieux communs
A peine le calme fut-il rétabli, que le Réformateur se tourna vers son cher Mélanchthon, et lui demanda son assistance pour mettre la dernière main à la version du Nouveau Testament, qu’il avait rapportée de la Wartbourga. Mélanchthon avait, dès l’an 1519, établi le grand principe, qu’il faut expliquer les Pères d’après l’Écriture, et non l’Écriture d’après les Pères. Approfondissant toujours plus les écrits du Nouveau Testament, il se sentait à la fois ravi de leur simplicité et frappé de leur profondeur. « Ce n’est que là, disait hautement cet homme si familier avec tous les philosophes de l’antiquité, que se trouve la vraie nourriture de l’âme. » Aussi se rendit-il avec joie à l’invitation de Luther ; et dès lors les deux amis passèrent ensemble de longues heures à étudier et à traduire la Parole inspirée. Souvent ils s’arrêtaient dans leurs laborieuses recherches pour donner cours à leur admiration. « La raison pense, disait Luther : Oh ! si seulement une fois je pouvais entendre Dieu ! je courrais pour cela au bout du monde… Écoute donc, ô homme, mon frère !… Dieu, le créateur des cieux et de la terre, te parle… »
a – Verum omnia nunc elimare cœpimus, Philippus et ego. (L. Epp. II. 176.)
On se mit à travailler à l’impression du Nouveau Testament avec un zèle sans exempleb. On eût dit que les ouvriers eux mêmes sentaient l’importance de l’œuvre qu’ils préparaient. Trois presses étaient employées à ce travail, et dix mille feuilles étaient imprimées chaque jourc.
b – Ingenti labore et studio. (L. Epp. II. 236.)
c – Singulis diebus decies millia chartarum sub tribus prelis… (Ibid.)
Enfin, le 21 septembre, parut l’édition complète, de trois mille exemplaires, en deux volumes in-folio, avec ce simple titre : Le Nouveau Testament. — Allemand. — Wittemberg. Il n’y avait point de nom d’hommes. Chaque Allemand put dès lors se procurer la Parole de Dieu pour une somme modiqued.
d – Un florin et demi.
La traduction nouvelle, écrite dans l’esprit même des livres saints, dans une langue vierge encore, et qui déployait pour la première fois ses grandes beautés, saisissait, ravissait, ébranlait les plus petits du peuple comme les plus élevés. C’était une œuvre nationale ; c’était le livre du peuple ; c’était plus, c’était vraiment le livre de Dieu. Des adversaires même ne purent refuser leur approbation à ce travail admirable ; et l’on vit des amis indiscrets de la Réformation, frappés de la beauté de cette œuvre, s’imaginer y reconnaître une seconde inspiration. Cette traduction servit à propager la piété chrétienne, plus que tous les autres écrits de Luther. L’œuvre du XVIe siècle fut ainsi placée sur une base où rien ne pourra l’ébranler. La Bible, donnée au peuple, ramena l’esprit humain, qui depuis des siècles errait dans le labyrinthe tortueux de la scolastique, à la source divine du salut. Aussi le succès de ce travail fut-il prodigieux. En peu de temps, tous les exemplaires furent enlevés. Au mois de décembre, une seconde édition parut. En 1533 on comptait déjà dix-sept éditions du Nouveau Testament de Luther, imprimées à Wittemberg, treize à Augsbourg, douze à Bâle, une à Erfurt, une à Grimma, une à Leipzig, treize à Strasbourge… Tels étaient les ressorts puissants qui soulevaient et transformaient l’Église et le monde.
e – Gesch. d. deutsch. Bibel Uebersetz.
La première édition du Nouveau Testament s’imprimait encore, que Luther entreprit déjà de traduire l’Ancien. Commencé en 1522, ce travail fut poursuivi sans interruption. Il publia cette traduction par parties, à mesure qu’elle avançait, afin de satisfaire plus vite l’impatience qu’on témoignait de toutes parts, et de faciliter aux pauvres l’acquisition du livre.
C’est de l’Écriture et de la foi, deux sources qui au fond n’en forment qu’une seule, que la vie évangélique a découlé et qu’elle se répand encore dans le monde. Ces deux principes combattaient deux erreurs fondamentales. La foi était opposée à la tendance pélagienne du catholicisme ; l’Écriture l’était à la théorie de la tradition et de l’autorité de Rome. L’Écriture amenait à la foi, et la foi ramenait à l’Écriture. « L’homme ne peut faire aucune œuvre méritoire ; la grâce libre de Dieu, qu’il reçoit par la foi en Christ, le sauve seule. » Telle était la doctrine proclamée dans la chrétienté. Or cette doctrine devait pousser la chrétienté vers l’Écriture. En effet, si la foi en Christ est tout dans le christianisme, si les pratiques et les ordonnances de l’Église ne sont rien, ce n’est pas à la parole de l’Église, mais à la parole de Christ que l’on doit adhérer. Le lien qui attache à Christ deviendra tout pour l’âme fidèle. Que lui importe le lien extérieur qui l’unit à une Église extérieure, asservie à des opinions d’hommes ?… Ainsi, comme la parole de la Bible avait poussé les contemporains de Luther vers Jésus-Christ, l’amour qu’ils avaient pour Jésus-Christ les poussait, à son tour, vers la Bible. Ce n’était pas, comme on se l’imagine de nos jours, par un principe philosophique, par suite d’un doute, ou par un besoin d’examen, qu’ils revenaient à l’Écriture ; c’était parce qu’ils y trouvaient la Parole de Celui qu’ils aimaient. « Vous nous avez annoncé Christ, disaient-ils au Réformateur, faites le-nous maintenant entendre lui-même. » Et ils se précipitaient sur les feuilles qui leur étaient livrées, comme une lettre venue du ciel.
Mais si la Bible fut reçue avec tant de joie par ceux qui aimaient Christ, elle fut repoussée avec haine par ceux qui préféraient les traditions et les pratiques des hommes. Une persécution violente accueillit cette œuvre du Réformateur. A l’ouïe de la publication de Luther, Rome trembla. La plume qui transcrivit les oracles sacrés fut vraiment celle que l’électeur Frédéric avait vue en songe, et qui, s’étendant jusqu’aux sept collines, avait fait chanceler la tiare de la papauté. Le moine dans sa cellule, le prince sur son trône, poussèrent un cri de colère. Les prêtres ignorants frémirent à la pensée que tout bourgeois, tout paysan même, serait maintenant en état de discuter avec eux sur les enseignements du Seigneur. Le roi d’Angleterre dénonça cette œuvre à l’électeur Frédéric et au duc George de Saxe. Mais déjà, dès le mois de novembre, le duc avait ordonné à tous ses sujets de remettre tout exemplaire du Nouveau Testament de Luther entre les mains du magistrat. La Bavière, le Brandebourg, l’Autriche, tous les États dévoués à Rome, rendirent les mêmes arrêts. En quelques lieux on fit de ces livres saints, sur la place publique, un bûcher sacrilègef. Ainsi Rome renouvelait, au XVIe siècle, les attentats par lesquels le paganisme avait voulu détruire la religion de Jésus-Christ, au moment où l’empire échappait aux prêtres et à leurs idoles. Mais qui peut arrêter la marche triomphante de l’Évangile ! « Même après mes défenses, écrivait le duc George, plusieurs milliers d’exemplaires ont été vendus et lus dans mes États. »
f – Qui et alicubi in unum congesti rogum publice combusti sunt.
Dieu se servit même, pour répandre sa Parole, des mains qui prétendaient la détruire. Les théologiens catholiques, voyant qu’ils ne pouvaient arrêter l’œuvre du Réformateur, publièrent eux-mêmes une traduction du Nouveau Testament. C’était la traduction de Luther, çà et là corrigée par les éditeurs. On ne fit aucune difficulté de la laisser lire. Rome ne savait pas encore que partout où la Parole de Dieu s’établit, sa puissance chancelle. Joachim de Brandebourg permit à tous ses sujets de lire toute traduction de la Bible, latine ou allemande, pourvu qu’elle ne vint pas de Wittemberg. Les peuples de l’Allemagne, ceux du Brandebourg en particulier, firent ainsi un grand pas dans la connaissance de la vérité.
La publication du Nouveau Testament en langue vulgaire est une des époques importantes de la Réformation. Si le mariage de Feldkirchen avait été le premier pas qu’avait fait la Réforme pour passer de la doctrine dans la vie ; si l’abolition des vœux monastiques fut le second ; si l’établissement de la cène du Seigneur fut le troisième, la publication du Nouveau Testament fut peut-être le plus important de tous. Elle opéra un changement total dans la société : non seulement dans le presbytère du prêtre, dans la cellule du moine ou dans le sanctuaire du Seigneur ; mais encore dans les maisons des grands, dans celles des bourgeois des villes et des habitants des campagnes. Quand on commença à lire la Bible dans les familles de la chrétienté, la chrétienté fut changée. Il y eut dès lors d’autres habitudes, d’autres mœurs, d’autres conversations, une autre vie. Avec la publication du Nouveau Testament, la Réformation sortit de l’École et de l’Église, et prit possession des foyers du peuple.
L’effet produit fut immense. Le christianisme de l’Église primitive, tiré par la publication des saintes Écritures, de l’oubli où depuis des siècles il était tombé, fut ainsi présenté aux regards de la nation ; et cette vue suffit pour justifier les attaques dont Rome avait été l’objet. Les hommes les plus simples, pourvu qu’ils connussent les lettres allemandes, des femmes, des artisans (c’est un contemporain, grand ennemi de la Réformation, qui nous le raconte) étudiaient avec avidité le Nouveau Testamentg. Ils le portaient partout avec eux ; bientôt ils le surent par cœur, et les pages de ce livre proclamaient hautement le parfait accord de la Réformation de Luther et de la Révélation de Dieu.
g – Ut sutores, mulieres, et quilibet idiotæ… avidissime legerent. (Cochlœus, p. 50.)
Cependant ce n’était que par fragments que la doctrine de la Bible et de la Réformation avait été jusqu’alors établie. Telle vérité avait été exposée dans un écrit ; telle erreur attaquée dans un autre. Sur un vaste terrain se trouvaient épars et confus les débris de l’ancien édifice et les matériaux du nouveau ; mais l’édifice lui-même manquait encore. La publication du Nouveau Testament répondait sans doute à ce besoin. La Réformation pouvait dire, en donnant ce livre : Voilà mon système ! Mais, comme chacun est libre de prétendre qu’il n’a d’autre système que la Bible, la Réformation devait formuler ce qu’elle avait trouvé dans l’Écriture. C’est ce que Mélanchthon fit en son nom.
Il avait marché à pas comptés, mais à pas assurés, dans son développement théologique, et avait toujours publié avec courage le fruit de ses recherches. Déjà, en 1520, il avait déclaré ne voir dans plusieurs des sept sacrements qu’une imitation des cérémonies judaïques ; et dans l’infaillibilité du pape, qu’une prétention orgueilleuse, également opposée à la sainte Écriture et au bon sens. « Pour combattre ces doctrines, il nous faut, avait-il dit, plus qu’un Herculeh. » Ainsi Mélanchthon était parvenu au même point que Luther, quoique par une voie plus scientifique et plus calme. Le moment était arrivé où il devait, à son tour, confesser sa foi.
h – Adversus quas non uno nobis, ut ita dicam, Hercule opus est. (Corp. Ref. I. 137.)
Dès 1521, pendant la captivité de Luther, son célèbre ouvrage sur les Lieux communs théologiques » avait présenté à l’Europe chrétienne un corps de doctrine, dont les bases étaient solides et les proportions admirables. Un ensemble simple et majestueux se dessinait devant les yeux étonnés de la génération nouvelle. La traduction du Nouveau Testament justifia la Réformation auprès du peuple ; les Lieux communs de Mélanchthon la justifièrent auprès des savants.
L’Église subsistait depuis quinze siècles et n’avait pas encore vu un pareil ouvrage. Abandonnant les développements ordinaires de la théologie scolastique, l’ami de Luther donnait enfin à la chrétienté un système théologique tiré uniquement de l’Écriture. On y trouvait un souffle de vie, un mouvement d’intelligence, une force de vérité, une simplicité d’exposition qui faisaient un étonnant contraste avec les subtils et pédantesques systèmes des écoles. Les esprits les plus philosophiques, comme les théologiens les plus sévères, en furent dans une égale admiration.
Érasme appela cet écrit : une armée merveilleusement rangée en bataille contre la tyrannie pharisaïque des faux docteursi, et, tout en avouant qu’il n’était pas d’accord avec l’auteur sur tous les points, il ajouta que, quoiqu’il l’eût toujours aimé, il ne l’avait jamais tant aimé qu’après avoir lu cet ouvrage. « Tant il y a, dit Calvin plus tard, en le présentant à la France, que la plus grande simplicité est la plus grande vertu à traiter la doctrine chrétiennej. »
i – Video dogmatum aciem pulchre instructam adversus tyrannidem pharisaicam. (Er. Epp. p. 949.)
j – La Somme de Théologie, par Philippe Mélanchthon, Genève, 1551. Jehan Calvin aux Lecteurs.
Mais nul n’éprouva une joie semblable à celle de Luther. Cet ouvrage fut toute sa vie l’objet de son admiration. Ces sons isolés que sa main agitée avait arrachés, dans la vive émotion de son âme, à la harpe des prophètes et des apôtres, se trouvaient ici ordonnés en une ravissante harmonie. Ces pierres éparses, qu’il avait détachées avec effort de la carrière des Écritures, étaient maintenant assemblées en un édifice majestueux. Aussi ne cessa-t-il de conseiller la lecture de cet écrit aux jeunes gens qui venaient chercher la science à Wittemberg, en leur disant : Si vous voulez être théologiens, lisez Mélanchthonk. »
k – Librum invictum, disait-il encore, non solum immortalitate sed et canone ecclesiastico dignum. (De Servo Arbitrio.)
Selon Mélanchthon, le sentiment profond de la misère à laquelle l’homme se trouve réduit par le péché, est la base sur laquelle doit s’élever l’édifice de la théologie chrétienne. Ce mal immense est le fait primitif, l’idée mère dont la science part ; il est le caractère qui distingue la théologie de toutes les sciences qui n’ont que la raison pour instrument.
Le théologien chrétien, plongeant au fond du cœur de l’homme, en expose les lois et les attractions mystérieuses, comme un autre savant exposa plus tard les lois et les attractions des corps. Le péché originel, dit-il, est une inclination née avec nous, un certain élan qui nous est agréable, une certaine force qui nous entraîne à pécher, et qui a été répandue par Adam dans toute sa postérité. De même qu’il y a dans le feu une force native qui le porte en haut, de même qu’il y a dans l’aimant une force naturelle par laquelle il attire à soi le fer, de même aussi il y a dans l’homme une force première qui le porte au mal. Je veux que, dans Socrate, dans Xénocrate, dans Zénon se soient trouvées la constance, la tempérance, la chasteté ; ces ombres de vertus étaient dans des esprits impurs et provenaient de l’amour de soi-même ; c’est pourquoi il faut les regarder non comme de vraies vertus, mais comme des vicesl. » Ces paroles peuvent paraître dures ; mais elles ne le sont que si l’on méconnaît le sens de Mélanchthon. Nul n’était plus que lui disposé à reconnaître, dans les païens, des vertus dignes de l’estime des hommes ; mais il établit cette grande vérité, que la loi souveraine, donnée de Dieu à toutes ses créatures, c’est de l’aimer par-dessus toutes choses ; or si l’homme, en faisant ce que Dieu commande, le fait non par amour pour Dieu, mais par amour pour soi-même, Dieu pourra-t-il tenir compte de ce qu’il ose se substituer lui-même à son infinie majesté ; et n’y aura-t-il point de vice dans un acte où se trouve une rébellion expresse contre le Dieu souverain ?
l – Loci communes theotogici. Bâle, 1521, p. 35. cette édition est très rare. Voyez, pour les révisions postérieures, cette d’Ertangen, 1828, faite sur cette de Bâle, 1561.
Le théologien de Wittemberg montre ensuite comment l’homme est sauvé de cette misère. « L’apôtre, dit-il, l’appelle à contempler, a la droite du père, le Fils de Dieu, puissant médiateur, qui intercède pour nous, et il te demande d’être assuré que tes péchés te sont remis, et que tu es réputé juste et reçu du Père, à cause de ce Fils, victime immolée sur la croixm. Ce qui rend surtout remarquable cette première édition des Lieux communs, c’est la manière dont le théologien de l’Allemagne y parle du libre arbitre. Il reconnaît, mieux peut-être encore que ne l’avait fait Luther, parce qu’il était plus théologien que lui, que cette doctrine ne pouvait être séparée de celle qui était l’essence de la Réformation. La justification de l’homme devant Dieu ne procède que de la foi, voilà le premier point ; cette foi ne procède dans le cœur de l’homme que de la grâce de Dieu. voilà le second. Mélanchthon sent fort bien que si l’on accorde à l’homme quelque habileté naturelle pour croire, on renversera dans le second point cette grande doctrine de la grâce que l’on a établie dans le premier. Il avait trop de discernement et d’intelligence des Écritures pour se tromper en une si grave matière. Mais il alla trop loin. Au lieu de se renfermer dans les limites de la question religieuse, il aborda la question métaphysique. Il établit un fatalisme qui pourrait faire regarder Dieu comme l’auteur du mal, et qui, par conséquent, n’a aucun fondement dans l’Écriture. « Tout ce qui arrive, dit-il, arrivant nécessairement en conformité avec la prédestination divine, il est évident que notre volonté n’a aucune libertén. »
m – Vult te intueri Filium Dei sedentem ad dextram Patris, mediatorem interpellantem pro nobis. (Ibid.)
n – Quandoquidem omnia quæ eveniunt, necessario eveniunt juxta divinam prædestinationem, nulla est voluntatis nostræ libertas. (Loc. Com. Theol. Basle, 1521, p. 35.)
Mais ce que Mélanchthon surtout se propose, c’est de présenter la théologie comme un système de piété. L’école avait disséqué le dogme jusqu’à lui faire perdre la vie. La tâche de la Réformation était donc de ramener la vie dans le dogme mort. Dans les éditions subséquentes, Mélanchthon sentit le besoin d’exposer avec une grande clarté les doctrineso. Mais il n’en fut pas tout à fait ainsi en 1521. « C’est connaître Christ, dit-il, que de connaître ses bienfaits. Paul, dans son Épître aux Romains, voulant donner un sommaire de la doctrine chrétienne, ne philosophe pas sur le mystère de la Trinité, sur le mode de l’incarnation, sur la création active et passive. De quoi parle-t-il donc ? – De la loi, du péché, de la grâce. C’est de cela que la connaissance de Christ dépendp. »
o – Voyez édit. de 1561, réimprimée en 1829, pages 14 à 44, les divers chapitres : De tribus personis – De divinitate Filii – De duabus naturis in Christo – Testimonia quod Filius sit persona ; Testimonia refutantia Arianos – De discernendis proprietatibus humanæ et divinæ naturæ Christi – De Spiritu Sancto, etc., etc.
p – Hoc est Christum cognoscere, beneficia ejus cognoscere. (Ibid.)
La publication de cette dogmatique fut d’un prix inestimable pour la cause de l’Évangile. Les calomnies furent réfutées ; les préjugés tombèrent. Dans les églises, dans les cours, dans les universités, on admirait le génie de Mélanchthon, et l’on aimait les grâces de son caractère. Ceux même qui ne connaissaient pas l’auteur, furent attirés à ses croyances par son ouvrage. La rudesse et quelquefois la violence du langage de Luther en avaient repoussé plusieurs. Mais voici un homme qui, avec une grande élégance de style, un goût exquis, une clarté admirable, un ordre parfait, expose ces vérités puissantes dont la soudaine explosion a ébranlé le monde. On recherche l’ouvrage, on le lit avec avidité, on l’étudie avec ardeur. Tant de douceur et de modestie gagnèrent les cœurs ; tant de noblesse et de force leur imposèrent ; et les classes supérieures de la société, jusqu’alors indécises, furent conquises à une sagesse qui adoptait enfin un si beau langage.
D’un autre côté, les ennemis de la vérité, que les coups terribles de Luther n’avaient pas abattus, demeurèrent quelque temps muets et déconcertés, lors de l’apparition de l’écrit de Mélanchthon. Ils reconnurent qu’il y avait un autre homme aussi digne que Luther de leur haine. Hélas ! s’écrièrent-ils, malheureuse Allemagne ! à quelle extrémité va te réduire cet enfantement nouveauq ! »
q – Heu! infelicem hoc novo partu Germaniam! Cochlœus.
Les Lieux communs eurent, de 1521 à 1595, soixante-sept éditions, sans parler des traductions. Ce livre est peut-être, après la Bible, celui qui a le plus contribué à l’établissement de la doctrine évangélique.