Échec à l’oppresseur

10. Vingt questions et réponses

J’ai conscience que la description du ministère de délivrance faite dans les pages précédentes laisse dans l’ombre de très nombreuses questions ou donne des réponses qui auraient nécessité des nuances, des explications complémentaires. A plusieurs reprises, devant des auditoires catholiques ou protestants, j’ai été appelé à donner un enseignement sur la libération. Des questions précises m’ont alors été posées. Je les ai groupées ici, sans avoir la pensée qu’en y répondant, nous aurons fait le tour du problème. Loin de là ! Il suffit de rappeler la promesse du Christ — elle est en même temps un ordre : En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera aussi les œuvres que je fais, et il en fera de plus grandes… 1 — pour que nous mesurions aussitôt tout ce que nous aurions à reconnaître et à pratiquer si nous voulions marcher d’une manière digne de notre vocation.

1 Jean 14.12.

Par la grâce de Dieu, dans le monde entier des chrétiens prennent conscience de leurs insuffisances et, dans la repentance et la foi, s’approchent de la table dressée par le Seigneur face à l’Adversaire 2. Comme eux, j’en suis à découvrir tout ce que le Seigneur y a déposé. Ce que j’ai pu en saisir jusqu’ici n’est pas le tout. Les réponses que je donne sont donc l’expression de ma recherche encore inachevée. L’ordre dans lequel je les apporte est arbitraire.

2 Psaumes 23.5.

1. Sans en faire une règle, n’y a-t-il pas quelques vérités élémentaires à connaître et à appliquer dans l’exercice de ce ministère ?

a) L’information apportée par la statistique nous apprend qu’en Occident, une femme sur dix et un homme sur neuf courent le risque de faire une dépression. On sait aussi que ce risque est grand à l’adolescence et qu’il réapparaît à l’âge critique des 50 à 60 ans. Cela s’explique ! Dans le premier cas, suivant l’éducation et les conditions familiales, l’affrontement avec les dures nécessités de la vie — en particulier la maîtrise des pulsions affectives et sexuelles très violentes à cet âge — peut singulièrement perturber les jeunes. Dans le second cas, il peut y avoir difficile adaptation de l’homme ou de la femme à sa nouvelle condition d’existence. Les parents sont décédés, les enfants ont quitté la maison, à cause de la retraite ou de changements dus à l’âge, il y a rupture de certaines relations professionnelles et le tout coïncide avec les premières manifestations du vieillissement. Cela aussi peut être perturbateur d’un équilibre psychique jusque-là sauvegardé.

Autrement dit, il n’y a pas lieu de s’étonner qu’un tel ministère nous fasse rencontrer plus de femmes que d’hommes, plus de jeunes ou d’aînés que de gens dans la force de l’âge. Cependant, cette constatation concerne surtout les dépressifs ; elle ne correspond plus lorsqu’il s’agit de patients aux prises avec l’Ennemi. Ceux-là sont de tous les âges.

b) Il ne faudrait pas trop vite imaginer que les chrétiens soient moins atteints que les agnostiques. Tout d’abord, ils ont une hérédité qui les fait, les uns et les autres, fils d’Adam, assujettis aux mêmes conséquences de la chute. L’Evangile devrait, en principe, guérir ceux qui l’écoutent. Les chapitres précédents ont suffisamment souligné les distorsions qu’a subies la bonne nouvelle du salut pour que l’on ne s’étonne pas que les chrétiens, autant que les autres, aient besoin de libération. Il pourrait même arriver qu’ils soient davantage atteints, suite à l’oppression qu’a exercées sur eux cette déformation de la loi qu’est le moralisme. La seule différence se verra dans la manière qu’a le patient de dire ce qu’il éprouve. Là où le chrétien s’accuse d’avoir fauté, l’agnostique dit qu’il a raté son affaire ou ne dispose plus de la force en rapport avec son ambition.

c) Il a été clairement dit que maladies psychiques et maladies démoniaques offrent beaucoup de ressemblances et qu’elles ont, les unes et les autres, des répercussions au niveau physique. Un ulcère du duodénum est presque toujours l’expression d’une tension d’esprit, alors que devant un eczéma, on est en droit de s’interroger si le patient a eu quelques contacts avec l’occultisme. Cependant, la dépression se manifeste par des troubles connus qui affectent la pensée (difficulté de concentration, fatigue intellectuelle, accablement devant tout problème et, pour le chrétien, culpabilité obsédante), l’âme (sentiments d’incompréhension et de rejet de la part des autres, angoisses, vide intérieur, blocages affectifs et spirituels), le comportement (agressivité, mélancolie, actes irréfléchis ou inattendus, perte des moyens de contrôle de soi). L’analyse de la situation vue par le patient dépressif a des aspects avant tout négatifs alors qu’un bien-portant la trouverait normale. Ce pessimisme s’accompagne souvent de pitié de soi, de peurs irrationnelles parfois conjurées par des gestes rituels répétés, d’accusations gratuites, quelquefois même de blasphèmes. Cela se traduit aussi par des fuites progressives dans la suroccupation, dans les plaisirs, dans l’alcool, dans l’emploi abusif de remèdes. Ce terrain maladif peut avoir pour origine une hérédité chargée, offrir à l’Ennemi des possibilités de liens ou d’habitation, être le résultat de sa présence active depuis deux ou trois générations.

d) Si nous en avons le temps et la possibilité — il faut choisir de prendre du temps, exiger qu’il nous soit donné — un premier contact, avec quel patient que ce soit, amènera aux questions suivantes :

Qui est ce patient, au plan personnel, conjugal, familial ?

Est-ce que je m’adresse à un agnostique, à un athée, à un chrétien de tradition, à un chrétien professant ? Qui est le Christ pour lui ?

Sa famille, lui-même, ont-ils eu des contacts avec l’occultisme (à ce sujet, il est nécessaire souvent d’éclairer ce terme par des questions précises) ?

Est-il suivi par un médecin, par un psychothérapeute ?

Quelles sont ses propres considérations sur les difficultés qu’il rencontre et qui l’amènent à recourir à notre ministère ?

Que se reproche-t-il ou que reproche-t-il à d’autres (cela, bien sûr, d’abord en relation avec sa difficulté présente) ?

Y a-t-il quelque autre membre de sa famille qui ait connu ou connaisse des difficultés semblables aux siennes ?

Ces quelques éléments permettent un cadrage un peu plus assuré dans l’établissement d’un juste diagnostic. Rappelons aussi que, dans la mesure du possible, avant toute intervention, il faut donner au patient une explication claire du sens et de la portée de la délivrance envisagée.

2. Comment établir une frontière entre maladie psychique et maladie œuvre de l’Ennemi ?

Dans un petit livre écrit en équipe 3, j’ai partiellement répondu à cette question. Mais quelques remarques complémentaires peuvent être apportées ici :

3 Souffrir peut-être… mais guérir, éd. P.B.U., route de Berne 90, 1010 Lausanne.

a) Cette frontière existe… théoriquement. Tous ceux qui s’occupent de médecine de la personne établissent une différence entre maladie psychique et maladie physique, tout en admettant d’évidentes relations entre l’une et l’autre. Il n’en va pas autrement dans ce qui nous préoccupe. La part à faire aux causes strictement psychologiques de la maladie par rapport à celle attribuable à l’Ennemi n’est pas toujours facile à établir. Il va de soi également qu’en certains cas, la cause est uniquement psychologique ; d’autres fois, elle est uniquement démoniaque.

b) Pour ma part, je m’’interdirais l’assertion lue dans un livre récemment paru. Dans un chapitre sous-titré ‘‘maladies démoniaques”, l’auteur donne une liste de ces maladies… A croire que le fait d’être affligé de l’une ou l’autre d’entre elles nous range ipso facto sous l’esclavage du démon… C’est aberrant !

c) De toute manière, il faut rappeler à ceux qui souffrent la parole du Psaume 32 : Heureux celui à qui la transgression est remise, à qui le péché est pardonné… Tant que je me suis tu,… je gémissais toute la journée… Je t’ai fait connaître mon péché… j’ai dit : J’avouerai mes transgressions à l’Eternel, et tu as effacé la peine de mon péché… ou celle de l’épitre de Jacques : Confessez vos péchés les uns aux autres et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez guéris 4. Si Ennemi il y a, il ne peut être lié, chassé, empêché de revenir en nombre que là où la purification est réelle et totale. C’est vrai en médecine. C’est aussi vrai spirituellement. Vice versa, la guérison ne peut intervenir que là où le démon est chassé. En médecine, également, l’infection ne cesse que là où est ôté le corps étranger.

4 Psaumes 32.1-5 ; Jacques 5.16.

d) Il y a deux tentations à éviter, aussi bien par le praticien que par le patient : échapper à la psychologie par l’exorcisme, ou échapper à l’exorcisme par la psychologie. Mais une troisième tentation guette le praticien : c’est de faire acte d’autorité par clairvoyance psychologique dans l’oubli que le démon ne cède qu’à l’invocation du nom et de la puissance de Jésus. La lucidité ne nous dispense ni de l’humilité, ni de la sainteté.

e) Un problème psychologique requiert l’aide de la psychologie. Si le problème est spirituel, seule une intervention spirituelle est libératrice. La guérison ne sera qu’apparente ou momentanée si l’on croit guérir une souffrance spirituelle par une intervention psychologique. Et vice versa…

f) Une guérison ou une délivrance peut être suivie, à plus ou moins longue échéance, par une rechute. Ce n’est pas nécessairement le constat d’un échec. Une nouvelle difficulté peut avoir surgi, ou alors n’être apparue qu’à la suite de la libération précédente.

g) La prédication chrétienne a beaucoup insisté sur la souffrance éducatrice. Cette vérité est à retenir. Encore faudrait-il que ceux qui l’apportent ne soient pas justement ceux qui regorgent de santé ! Mais deux aspects de la vie d’aujourd’hui doivent retenir notre attention.

L’homme contemporain a rayé la souffrance de son horizon. Il ne veut même plus vieillir. Et quand la souffrance est là, il refuse de la prendre en considération et cherche, entre autres par l’abus de médicaments, à l’évacuer de sa vie.

Autre phénomène : l’éducation tend à accorder à l’enfant tout ce qu’il veut, à l’instant même où il le demande. Toute contrariété est considérée comme inadmissible, insupportable. La même impatience est perceptible chez beaucoup de chrétiens qui recourent à l’intervention du Seigneur ou de ses ministres. Ils veulent tout, et tout de suite. Certes, le doute est un obstacle à l’exaucement 5. L’impatience aussi ! Il y aurait lieu de rappeler parfois la parole du Deutéronome : Je t’ai éprouvé pour savoir quelles étaient les dispositions de ton cœur et si tu garderais ou non mes commandements… pour t’apprendre que l’homme ne vit pas de pain seulement, mais de la parole qui sort de la bouche de l’Eterne 6.

5 Jacques 1.6-8.

6 Deutéronome 8.2-3.

h) La force… mais aussi la faiblesse de la médecine d’aujourd’hui (de la médecine psychiatrique aussi) c’est d’appliquer des techniques (opératoires, pharmaceutiques, conceptualistes) qui pourchassent le mal… quelquefois dans l’oubli de la personne souffrante ! La relation praticien - malade ignore trop souvent la notion de compassion et de charité. Quand on sait que ce manque d’amour, dès l’enfance et tout au long de la vie, a des séquelles tenaces et qui sont souvent à l’origine des maladies psychosomatiques sur lesquelles le démon vient greffer son travail destructeur, il n’est pas difficile de comprendre que l’important n’est pas tellement de fixer la frontière entre maladie psychique ou démoniaque, mais de savoir si notre intervention manifeste la qualité technique seulement (serait-elle même “spirituelle”), ou si elle s’accompagne de compassion et d’amour.

i) La question posée pourrait nous amener à nous interroger sur la différence à faire entre le ministère de la délivrance tel que nous l’envisageons et celui d’un psychothérapeute. Deux remarques me paraissent ici à leur place :

Un chrétien, quelle que soit sa profession, ne sera jamais un Janus connu pour son double visage, serait-il précisément psychothérapeute. Il ne sera pas parfois psychologue, parfois chrétien. Il sera d’abord un chrétien qui, dans l’aide qu’il apporte à ses patients, fait de la psychologie ou de la psychiatrie.

Parce qu’il est d’abord chrétien, son écoute du patient sera en soi semblable à celle de n’importe quel psychothérapeute, même agnostique ; mais les suites de cette écoute seront différentes. L’agnostique aide le patient à revivre son passé, à comprendre les mécanismes de sa personne en rapport avec ce passé. Le chrétien apporte une aide semblable, sauf qu’il conduit son patient à la découverte de la grâce et du pardon de Dieu. Il lui offre au nom du Christ une libération qui, au besoin, peut s’accompagner de délivrance.

3. Comment intervenir quand il s’agit d’un enfant ?

Toute règle a ses exceptions. Je m’en tiens à la règle. Une libération ne saurait se faire sans l’accord des parents, pour le moins de l’un ou l’autre d’entre eux. A cela, il y a des raisons évidentes :

Quelle que puisse être la part personnelle de l’enfant, celle des parents ne saurait être niée ou ignorée. Il importe même d’en tenir compte. Avant de chasser l’esprit muet qui asservissait un garçon, Jésus interpella le père 7. La réponse de ce dernier apporta des informations sur la nature du mal, son origine, implicitement sur la responsabilité des ascendants, au nombre desquels sans doute il se comptait.

7 Marc 9.21-24.

Dans les deux récits de libération racontés par les évangiles 8, Jésus instruit les parents et sollicite leur libre décision de le laisser intervenir. Dans les deux cas, il est expressément souligné que son intervention a eu pour mobile la foi, même faible, de celui des parents qui s’est tourné vers lui.

8 Marc 9.21-24 ; 7.24-30.

Cette collaboration des parents est d’autant plus nécessaire qu’après délivrance, leur fils ou leur fille leur sera à nouveau confié. Quel médecin soignerait un enfant sans s’inquiéter des conditions qu’il trouvera à son retour au foyer ? Notre responsabilité est semblable.

Jésus a dit de laisser venir à lui les petits enfants 9. Il a ajouté que le Royaume était pour ceux qui leur ressemblent. Aussi bien que les adultes, si ce n’est parfois avec moins de préjugés et de réticences, ils peuvent entendre l’Evangile avec intelligence, accueillir le Libérateur, refuser l’oppression et les tourments que leur impose l’Ennemi. Il faut donc les rendre participants de la grâce, et, à cette fin, prendre le temps de leur expliquer, avec des mots à leur portée, ce que le Christ leur offre.

9 Marc 10.14.

4. Faut-il avoir la même exigence avec les jeunes ou encore avec un conjoint venu à l’insu de l’autre conjoint ?

Le récit de la liberté prise par Jésus dès l’âge de 12 ans 10 est une indication précieuse. Cet âge marque un passage important : la soumission aux parents s’accompagne d’une obéissance éclairée par la Parole et par la découverte de la responsabilité personnelle de l’enfant devant Dieu.

10 Luc 2.41-52.

En règle générale, il est souhaitable que les parents soient d’abord informés. Mais il peut arriver que, dans une première étape, notre intervention ait à répondre d’abord au besoin de l’enfant venu partager sa détresse. A cet âge, elle peut être très grande. L’expérience m’a appris qu’en laissant dans l’ignorance des faits des parents incrédules ou même hostiles, nous apaisons l’enfant, nous facilitons sa croissance spirituelle. Cependant, dès que possible, nous l’accompagnerons et le seconderons dans le témoignage qu’il se doit d’apporter à sa famille. Et nous informerons cette dernière du sens de notre démarche et de notre intervention.

Cette même règle générale concerne les époux dont l’Ecriture dit justement “qu’ils ne sont plus deux maïs un” 11. Toutefois, elle dit aussi que “nous sommes appelés à vivre en paix” et que “chacun est appelé à marcher selon l’appel qu’il a reçu de Dieu” 12. Quand donc le conjoint peut être associé à un entretien, sa présence est très désirable. N’a-t-il pas sa part dans les difficultés du foyer ? N’aurait- il pas à connaître, lui aussi et conjointement, une délivrance ? Mais là encore, il peut arriver que la présence du conjoint soit momentanément un obstacle majeur à l’aide sollicitée. En fait, la règle est donc de discerner en chaque cas ce qu’il convient de faire pour apporter le secours attendu, dans le respect et la liberté de celui ou de celle qui demande notre intervention.

11 Matthieu 19.6.

12 1 Corintiens 7.15, 17.

Quand les deux époux sont présents, il est juste parfois de leur demander préalablement cette confiance qui permettra de solliciter que l’un des conjoints puisse s’exprimer indépendamment de l’autre.

Il est heureux, lorsque c’est possible, qu’un tel dialogue soit conduit par un praticien accompagné de son épouse.

Il n’est pas indispensable qu’une délivrance se fasse sous les yeux du conjoint. Le médecin n’opère pas nécessairement en présence du mari ou de l’épouse du patient.

5. Quel rapport, mais aussi quelle différence établir entre lier les esprits et chasser les démons ?

Ici encore, il faut admettre que notre désir légitime de clarifier les situations — de les circonscrire de manière que soit évitée toute erreur au niveau de la connaissance, partant au niveau de l’action — ne sera pas entièrement satisfait. Lier est une intervention précise, chasser en est une autre, et l’on ne saurait les confondre. Cependant, dire à coup sûr quand il faut “lier” ou quand il faut “chasser” n’est guère possible. Je peux toutefois apporter les précisions suivantes, en complément de ce qui a été dit au chapitre 6 :

a) Le Seigneur ne nous appelle pas à lier ou à délier ce qui serait désir ou œuvre de la chair. Je peux être charnellement jaloux et, à cause de ma jalousie, être charnellement querelleur jusqu’à chercher charnellement dans l’alcool une consolation à mon dépit. Mais, Satan pourrait aussi me tenter, puis me faire chuter par un esprit de jalousie ; secondé par un esprit de mensonge, cet esprit me ferait imaginer des choses insensées. Profitant de mon désarroi et de ma faiblesse, un esprit de découragement pourrait me pousser à boire plus que de raison. Enfin, un esprit accusateur pourrait alors me culpabiliser et, avec l’aide d’un esprit d’étourdissement, me lier à l’alcool.

Une telle situation fera dire à quelqu’un que je vis dans le péché. Il n’aura pas tort. Dans les deux cas, j’aurai à me repentir et à me saisir du pardon. Dans le premier cas, c’est par l’Esprit que je resterai victorieux de ma chair et accepterai qu’elle soit crucifiée. Dans le second cas, il y aura à combattre contre les esprits méchants, peut-être quelqu’un aura-t-il même à intervenir pour me délier de leur action.

Ces esprits ne m’habitent pas. Ils agissent du dehors. Comme le dit le Dr van Dam dans une illustration de ces choses, ils cherchent à investir la cité. Ils l’ont encerclée, ils circulent déjà dans les faubourgs extérieurs 13. Délier, c’est rétablir notre liberté, notre responsabilité et nos droits personnels là où l’Ennemi travaillait à nous en priver. Si nous n’intervenions pas, il ne tarderait pas à nous “occuper” et chercherait à gagner même le cœur de notre vie.

13 Opus cité, p. 157.

b) Dans le Notre Père apparaît clairement la relation entre Satan, nos tentations et nos chutes possibles 14. Et dans les épîtres, à trois reprises, l’ordre retentit : Ne donnez pas accès au diable… résistez au diable… résistez-lui avec une foi ferme 15, en accord avec le texte déjà largement commenté : Nous avons à lutter contre les esprits méchants. Je pourrais citer des expériences précises où le fait de les lier a été suivi d’une libération immédiate ou progressive.

14 Matthieu 6.13.

15 Dans l’ordre : Ephésiens 4.27 ; Jacques 4.7 ; 1 Pierre 5.9.

Un exemple : Alors que je devais disposer de tous mes moyens pour un travail précis, je fus pris de maux de tête qui paralysaient ma réflexion et me permettaient à peine de garder les yeux ouverts. Je priai en m’interrogeant. Aucun excès alimentaire, aucune désobéissance consciente n’expliquaient ce mal. J’eus la pensée alors que l’Ennemi était à l’œuvre. Au nom du Christ, je liai ce méchant esprit et lui refusai le droit de marteler ma tête. L’instant d’après, mon mal avait disparu et je disposai de tous mes moyens.

Dans une période de ma vie où j’étais particulièrement engagé dans un ministère de délivrance, je vis s’accumuler sur mon chemin des obstacles inattendus. Aucune raison valable, qui aurait justifié les complications rencontrées, ne pouvait être retenue. Je liai les puissances à l’œuvre et les obstacles disparurent.

Comme nous l’avons déjà vu, ces esprits agissent dans toutes sortes de domaines. Ils peuvent paralyser quelqu’un dans sa liberté de témoigner, l’empêcher de prier à haute voix dans la présence d’autres personnes. Beaucoup de chrétiens sont liés par des esprits négateurs. Dans toute situation, ils soulignent les difficultés et les impossibilités, sèment la méfiance et le doute. D’autres sont liés par des esprits religieux, imitateurs du Saint-Esprit. Ils lient certainement les fanatiques dont les pensées orgueilleuses équivalent aux jugements qu’ils prononcent. Nous sommes à notre tour leurs victimes quand nous réagissons à cette attitude par des propos véhéments qui sont aussi des jugements. L’apôtre Pierre était victime d’un esprit religieux lorsqu’il reprit le Seigneur en disant : A Dieu ne plaise, cela ne t’arrivera pas 16.

16 Matthieu 16.21-23.

Dans de telles situations, nous faisons œuvre utile si, au nom du Seigneur, nous lions les esprits méchants, si nous délions les personnes et demandons sur elles une onction de l’Esprit. En effet, nous avons à lier l’Ennemi, et à délier les personnes qu’il a asservies.

c) Si la tentation est le moyen habituel utilisé par Satan pour nous avoir à sa merci, la peur est aussi un de ses instruments de coercition. Encore faut-il bien entendre ce qui caractérise cet esprit mauvais.

Il y a une peur salutaire. Fuir devant le danger et les tentations est un ordre de Dieu 17. Cependant, nous cherchons en vain dans la vie de Jésus une place pour la peur. Il ne faut donc pas la considérer sous le seul angle d’une saine réaction instinctive ou spirituelle. En d’innombrables occasions, elle est un lien de l’Ennemi, paralysant notre obéissance, notre service, ou simplement notre vie dans la foi. L’exhortation de Paul à Timothée d’avoir à refuser l’esprit de servitude ou de timidité 18 le dit à sa manière. Au reste, il suffit d’entendre les gens ou de les voir vivre pour discerner en combien de domaines ils sont liés par l’esprit de peur : peur du lendemain, peur de manquer du nécessaire, peur du qu’en dira-t-on, peur des courants d’air, peur des microbes, peur de ceci… peur de cela.

17 Matthieu 2.13 ; 10.23 ; 1 Corinthiens 6.18 ; 10.14 ; 1 Timothée 6.11 ; 2 Timothée 2.22.

18 2 Timothée 1.7.

C’est à l’enseigne de cet esprit que s’élaborent aujourd’hui tant de ces régimes légalistes diététiques, hygiéniques, fortifiants, désinfectants, anti-ceci… anti-cela…

Et au niveau moral et spirituel, on découvre que le comportement d’innombrables gens n’est pas l’expression d’une joyeuse liberté dans le respect de soi-même et des autres, mais, une fois encore, un asservissement dû à l’esprit de peur et à ses acolytes : l’esprit de division, l’esprit de méfiance, l’esprit de jalousie, en bref, des esprits méchants, à l’œuvre pour opposer mari et femme, pour envenimer toute divergence de vue ou d’opinion ; à l’œuvre aussi pour briser l’amitié entre familles, entre régions, entre peuples, entre races, entre classes.

Les chrétiens sont la cible de prédilection de ces flèches de l’Ennemi. Voir leurs querelles, leurs méfiances réciproques, leurs divisions, leurs incompréhensions. Ils se justifient par des arguments théologiques alors qu’en réalité, ils sont liés par de méchants esprits. Mais les païens en sont aussi les victimes. Paul nous l’enseigne clairement 19.

19 Ephésiens 2.2.

d) Dans le dialogue avec une personne à la recherche de sa libération, il est souvent avantageux de se souvenir de la promesse du Christ : ce que nous lions sur la terre est lié dans le ciel 20, Avant d’engager le dialogue, ou alors par une prière intérieure pendant l’entretien, il faut lier l’esprit qui se plairait à paralyser l’entendement de notre interlocuteur, à cautériser sa conscience, à circonvenir sa volonté, ou encore tenterait la même démarche au détriment du praticien lui-même.

20 Matthieu 18.18.

e) Une certaine peur des démons vient des démons eux-mêmes. Le diable est semeur de panique. Il cherche à impressionner en grossissant l’importance de ses pouvoirs et de leur étendue. S’il le peut, il nous inquiète par une prise de conscience de tous les obstacles à franchir et de toutes les difficultés à résoudre. Il en arrive même à nous faire prendre au sérieux son œuvre, au mépris de celle de Dieu. Plus encore, alors que Dieu est amour, le diable cherche à nous faire croire que Dieu est redoutable, vindicatif, capable de maudire, toujours enclin à nous rejeter. Lorsqu’il n’a pu empêcher les hommes de parvenir au salut, il les lie par la peur de perdre ce salut. Il les incite à se protéger des pécheurs, du monde du péché, et pour cela à s’occuper surtout d’eux-mêmes. Il leur fait craindre les gens malades, en particulier les dépressifs et les mentaux. Dans le passé, il a réussi à convaincre les chrétiens de détruire les démoniaques par le feu des bûchers. Aujourd’hui, il pousse l’Église à s’en désintéresser et à les enfermer dans des asiles.

Oui, l’heure est venue de délier l’Église des esprits de la peur.

6. Faut-il penser que quelqu’un en proie au doute, alors qu’il désire être chrétien, est lié par l’Ennemi ?

Certes, il peut l’être ! Mais ce report au compte du diable est un peu facile. Du reste, en règle générale, le praticien doit s’interdire à lui-même une vue des choses qui mettrait le diable au premier plan. Le Seigneur est souverain. Dans sa volonté de nous sauver, il s’est fait suffisamment homme et nous a rejoints suffisamment bas (jusque dans l’enfer !) et sur la croix a suffisamment dépouillé l’Ennemi de ses prétentions pour que nous n’allions pas, de nous-mêmes, rétablir ce dernier dans ses droits. Donc, en de tels cas, une première démarche aura pour objet une importante clarification en rapport avec l’enseignement de Paul : La foi vient de ce qu’on entend et ce qu’on entend vient de la Parole du Christ 21.

21 Romains 10.17.

Neuf fois sur dix, les gens en proie au doute sont les victimes d’un mauvais enseignement quant au fondement de la foi. Ils le cherchent, non pas dans ce que le Christ dit, mais dans ce qu’ils en pensent, dans ce qu’ils en ressentent. Du fait que neuf fois sur dix aussi la Parole du Christ ne correspond pas à ce qu’ils pensent, ils ne peuvent que ressentir des doutes et les opposer à la foi que le Seigneur voudrait leur donner. Elle est fondée sur ses promesses et ses ordres, elle s’affermit par leur mise en pratique. Donc, en l’occurence, le premier véritable ennemi du douteur, c’est lui-même.

Il peut arriver aussi que sous l’étiquette du doute se cache, en l’homme, un dépit, voire un mépris de lui-même, qui l’empêche véritablement de croire que Dieu s’intéresse à lui. En conséquence, il ne saurait fonder sa foi sur la parole du Seigneur. Là encore, il est donc son premier véritable ennemi.

7. Y a-t-il transmission d’esprits, donc malédiction, d’une génération à l’autre ?

Il faut dire d’abord et sans restriction aucune qu’en Jésus-Christ, toute malédiction peut être ôtée, donc toute transmission coupée. Si certains textes de l’ancienne alliance soulignent la solidarité dans le mal d’une génération à l’autre 22, déjà les prophètes Jérémie et Ezéchiel 23 annoncent une autre économie : l’Evangile libérateur qui nous régit maintenant.

22 Exode 34.6-7 ; Deutéronome 28.45-46 ; Jérémie 32.18.

23 Jérémie 31.29-34 ; Ezéchiel 18.19-23.

En ce qui concerne les démons, on peut discerner deux voies de transmission.

a) Dans la famille X, il y a de constantes querelles. Le père, colérique, à chaque instant trouve occasion d’élever la voix, de faire des scènes, de frapper les siens. La mère est aussi oisive que timorée. Elle subit. Les enfants réagiront par imitation de ce qu’ils voient et entendent. Aussi les démons auront-ils tout loisir de s’implanter dans un tel milieu, et ils passeront d’une génération à l’autre non par l’hérédité, mais par l’état d’esprit qui marque cette famille.

Il est évident que par la conversion d’un des parents ou des enfants une transformation avec libération pourra s’opérer en chacun des membres de cette famille.

b) La voie occulte est la plus courante… et, à certains égards, la plus effrayante dans ses conséquences. Les gènes d’un individu portent les traces de l’alcoolisme ou de la syphilis des parents. C’est à croire qu’ils portent également des tares résultant de l’idolâtrie. Ainsi que le montraient déjà les exemples cités au chapitre 8, les démons acquièrent des droits et exercent leurs pouvoirs d’une génération à l’autre, conformément à ce que dit le deuxième commandement de la loi mosaïque.

Là aussi, la conversion au Seigneur peut rompre la chaîne de l’hérédité. Mais une vraie libération n’interviendra que si le patient confesse ses propres contacts avec l’occultisme et, dans la mesure où il en serait informé, ceux qu’auraient eus, avant lui ou parallèlement à lui, les membres de sa famille. A cet égard, deux remarques peuvent être faites.

Dans l’économie de la grâce, il serait curieux qu’on introduise un nouveau légalisme : celui de la libération du péché des ancêtres. Quand les tenants d’une génération seraient au courant de l’occultisme pratiqué par leurs ascendants, ils auront, à la manière de Jérémie 24 ou d’Ezéchias 25 à confesser les désobéissances de leurs parents. Dans un acte de vraie solidarité et de vraie repentance, ils demanderont pardon, et au nom du Seigneur, refuseront dorénavant la mainmise de Satan sur leur famille. Mais là où ils seraient dans l’ignorance du passé, ils s’en remettront à la grâce de Dieu, proclameront leur opposition à l’Ennemi dans la foi au Seigneur omniscient.

24 Jérémie 3.25.

25 2 Chroniques 29.5-6.

La tradition biblique ne fait jamais état d’une technique de la libération. Mais les plus anciennes liturgies de baptême comprenaient un acte d’exorcisme du baptisé, dans la juste pensée de le libérer des droits que l’Ennemi aurait gardés sur lui par l’hérédité. Luther avait inclus l’exorcisme dans l’acte baptismal. Le rationalisme de la fin du 18e siècle s’est cru avisé de débarrasser nos liturgies réformées de toute trace d’exorcisme. Des liturgies réformées récentes ont réintroduit une parole d’exorcisme dans les services de baptême 26.

26 Par exemple, celle composée par le pasteur Louis Dallière, en usage dans l’ERF, en particulier dans les services de baptême de l’Union de prière. — Dans Le numéro 1/1975 de Ichthus, le théologien J.W. Montgomery fait état des formules rituelles rassemblées dans un livre d’exorcisme en usage dans l’Eglise catholique et le recommande aux protestants. Ce rituel romain comporte un grand nombre de textes bibliques, parmi eux des citations des psaumes 3, 10, 12, 21, 30, 34, 53, 67. Il signale également la publication anglicane récente intitulée : “L’exorcisme, rapport de la commission nommée par l’évêque Exeter”, édité par Dom Robert Petitpierre, London, SPCK 1972. Il comprend “des directives simples, saines et précises” ainsi qu’un certain nombre de prières, dont celle-ci : “O Dieu Saint, Père Tout-Puissant, qui as envoyé ton Fils unique dans le monde pour qu’il détruise les œuvres du diable, exauce-nous promptement, nous t’en prions. Donne à tes serviteurs la force de lutter vaillamment contre le Malin. Que la puissance de ta main droite oblige Satan à libérer ton serviteur X et à ne plus oser tenir captif celui que tu as créé à ton image et que tu as sauvé par ton Fils, qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit, éternellement. Amen.”

8. Un chrétien peut-il “avoir un démon” ?

A première vue, l’association “chrétien” et “démoniaque” est choquante. On admettrait encore que, sur le chemin de la sanctification, un chrétien ait à connaître la libération de certains liens d’iniquité. Mais on a peine à croire qu’un disciple de Jésus-Christ puisse avoir un ou des démons.

C’est oublier un peu vite ce que rapporte l’évangile de Jean. Alors que Pierre avait fait profession de foi : Nous avons cru et nous avons connu que tu es le Christ, le Saint de Dieu, Jésus lui répondit : N’est-ce pas moi qui vous ai choisis, vous les douze ? Et l’un de vous est un démon. Or, il parlait de Judas Iscariot 27.

27 Jean 6.70-71.

Par cette déclaration, Jésus nous rend attentifs au fait qu’une profession de foi communautaire n’est pas la garantie que ceux qui l’entendent, ou s’en réclament, soient exempts de duplicité. L’affirmation : L’un de vous est un démon exprimait sinon l’indignation de Jésus, en tout cas la possibilité offerte à Judas d’être délivré de son mal. Jusqu’ici, il n’avait certainement pas eu conscience de son véritable état. La parole de Jésus l’éclairait à salut. Judas avait été le témoin de nombreuses délivrances, il savait donc qu’une même libération lui était offerte. Le Seigneur ne nous affranchit jamais sans le libre accord de notre volonté. Dévoilerait-il en nous la présence du démon, il n’interviendra que si nous le lui demandons. Cela s’applique du reste à toute forme d’aliénation qui nous caractériserait. Nous sommes exhortés, et non contraints à la sainteté.

Quelqu’un répliquera peut-être que la venue de l’Esprit de Pentecôte a introduit un ordre nouveau et qu’il est difficilement concevable qu’un chrétien régénéré puisse, en même temps, abriter l’Esprit Saint et un démon.

Je le sais, il ne suffit pas de dire que cette situation se rencontre souvent et qu’elle est confirmée par tous ceux qui exercent le ministère de la délivrance. L’objection justifiée demande une autre réponse. Celle-ci doit tenir compte de plusieurs facteurs :

a) Il est connu qu’en chrétienté, la conversion est souvent assimilée à une adhésion sincère, même réfléchie, à un credo, ou encore à un engagement loyal envers une Eglise locale. Dans un tel contexte, on peut comprendre que vie de l’Esprit et démons puissent quand même voisiner.

b) Il est aussi connu qu’à l’heure où le Christ est accueilli dans une vie, il ne force aucune des portes de notre être intérieur. Dans l’espace non occupé ou progressivement soustrait à l’autorité et à la présence du Seigneur, n’y a-t-il pas place pour le démon ? La description de chacune des sept églises de l’Apocalypse 28 nous en dit long sur les défaillances des chrétiens, suite à “l’abandon de leur premier amour” 29. A Laodicée, ils avaient même poussé l’inconscience jusqu’à tenir le Christ dehors !

28 Apocalypse ch 2 et 3.

29 Apocalypse 2.4.

c) Il y a l’œuvre de l’Esprit… et il y a l’œuvre confiée aux serviteurs. Même s’il vient en aide à leur faiblesse, l’Esprit ne s’accapare jamais des responsabilités que le Seigneur leur avait confiées. C’est aux disciples qu’il a ordonné de chasser les démons. Plus tard, c’est aux pasteurs qu’il confie les soins à donner aux brebis. Quand, par le baptême, elles passent du “train de ce monde” 30 à la communauté des croyants, y sont-elles guéries, pansées, délivrées (je n’’insiste plus sur l’étendue de ce terme), de telle manière qu’elles goûtent au vrai repos de la foi ?

30 Ephésiens 2.2.

d) N’’est-il pas éclairant que, dans l’épître aux Ephésiens, l’exhortation à ne pas “donner accès au diable” soit adressée à ceux qui ont été “renouvelés dans l’Esprit” et “ont revêtu l’homme nouveau” 31 ? C’est donc qu’après une authentique conversion, le manque de vigilance pourrait permettre au démon d’occuper tout ou partie de la maison.

31 Ephésiens 4.27, 23-24.

e) A l’heure d’une naissance “d’eau et d’Esprit”, les choses anciennes sont effacées, toutes choses deviennent nouvelles 32. Toutefois, le pardon du péché n’est pas la réparation du péché. Zachée a traduit son accueil du Christ par un remboursement généreux des biens qu’il avait volés. Vivrions-nous dans l’adultère, l’acte de rupture résultant d’une conversion s’accompagnera d’une explication auprès du concubin ou de la concubine. Il y a aussi “réparation” à faire auprès du ou des démons auxquels nous aurions donné des droits. Or, cette mise en ordre est rarement faite après une conversion. Certes, la nouvelle gérance de l’Esprit Saint dérange le ou les “chambreurs” : ils s’en accommodent plus ou moins, comptent sur les faiblesses de la chair pour maintenir, voire augmenter leur pouvoir d’intervention. A mon sens, cela éclaire la situation souvent rencontrée de chrétiens inexplicablement mal dans leur peau. Ils ont besoin d’une délivrance. Ils l’ignorent, bien sûr, ou alors ne savent pas à qui la demander.

32 2 Corinthiens 5.17.

f) Il ne faudrait pas conclure de cela que nous avons à nous sonder avec inquiétude à la recherche des démons que nous pourrions héberger occasionnellement ou à plein temps. L’Esprit rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Tout est manifesté par la lumière 33. Il est certain que les liens ou démons, s’ils subsistent en nous, tôt ou tard, ne serait-ce que sous l’onction de l’Esprit Saint, seront découverts et dénoncés. Cela explique ce double fait, souvent constaté :

33 Romains 8.16 ; Ephésiens 5.13.

9. Est-il possible qu’à distance nous intervenions contre un démon ?

La distance n’a jamais empêché Jésus de guérir les malades 34. Mais l’Ecriture ne nous apporte aucun récit tendant à montrer qu’à distance il ait chassé un démon. Dans l’histoire de la guérison de la fille cananéenne, il est précisé que le démon la tourmentait 35 sans qu’on puisse déduire de là que le démon l’habitait.

34 Matthieu 8.5-13.

35 Matthieu 15.22.

Eclairé par la parole déjà citée, ce que vous liez sur la terre est lié dans le ciel, j’en conclus : à distance, de toute manière, nous pouvons lier et paralyser l’action de l’Ennemi. L’expérience du reste le confirme. J’ai vu s’opérer une transformation remarquable chez une jeune fille retenue à l’étranger. Dès l’instant où, à quelques-uns, nous avons pris conscience de l’œuvre de Satan dans sa vie, en priant au nom de Jésus, nous avons lié celui ou ceux qui la tourmentaient. Ce fut le début de son chemin de libération.

Tout est possible à celui qui croit. On pourrait imaginer qu’empêchés de nous rencontrer, nous étant cependant préalablement mis d’accord, nous puissions, unis par l’Esprit, ordonner à un démon de sortir d’une personne. Et Dieu honorerait notre foi. Mais dans la règle, une expulsion est à opérer à l’heure où patient et praticien se trouvent dans un même lieu.

10. Un chrétien est-il nécessairement lié ou démonisé parce qu’une fois dans sa vie il a eu recours à un radiesthésiste ou à un guérisseur ou à un devin ?

A une telle question, je réponds volontiers par une autre question : un enfant ou un adulte est-il nécessairement contaminé parce qu’une fois dans sa vie, il a côtoyé un tuberculeux bacillaire ? Une réponse négative ferait dire à un médecin consciencieux : Je prendrais tout de même la précaution de vérifier qu’il n’y a pas eu contamination. Car il est connu qu’après un seul contact des gens se sont trouvés atteints.

C’est pourquoi, en praticien consciencieux, devant tout aveu de recours à l’occultisme, je demande à mon interlocuteur de confesser à Dieu son ignorance ou sa désobéissance consciente, de déclarer qu’il ne pêchera plus de cette manière, qu’il en appelle au sang du Christ pour être lavé de toute souillure. Au nom du Seigneur, je brise tout lien résultant de ce recours à l’occultisme et ôte pour toujours à l’Ennemi les droits qu’il aurait gardés sur cette personne.

En rapport avec la question posée, il me paraît nécessaire d’ajouter : à maintes reprises, j’ai constaté combien les enfants sont vulnérables. Très vite, ils sont contaminés. S’ils ont une hérédité marquée par l’occultisme, ils sont alors véritablement prédisposés, ont une attirance irraisonnée vers toute forme d’occultisme. S’ils cèdent, ne serait-ce que par simple curiosité, leur essai pratique connaîtra la réussite. Il convient donc de mettre les enfants en garde en leur expliquant les dangers réels qu’ils courent lorsque, par jeu de société, ils s’essayent à la radiesthésie, à la consultation spirite, à la divination par les cartes ou à l’hypnotisme. Il faut aussi les avertir du dangereux encouragement à ces pratiques que leur apporte par exemple la lecture de bandes dessinées. En effet, depuis quelques années, la littérature pour enfants fourmille d’histoires dont les héros ont recours aux pratiques de l’occultisme. Les enfants lisent les journaux et peuvent aussi, de très bonne heure, être intéressés par les pages de réclame recommandant des fétiches, des talismans, des amulettes, des pierres ou des croix magnétisées, des bagues ou bijoux porteurs d’un des signes du zodiac. Ces pages recommandent également le recours à l’astrologie, à la voyance, à la magie. Il faut non seulement dénoncer devant eux ce crédit accordé à la superstition, mais le danger que courent ceux qui se laissent séduire par ses appâts prometteurs et empoisonnés. L’avertissement de la parole biblique doit faire réfléchir les chrétiens et, parmi eux, les parents : Ils sacrifiaient aux idoles fabriquées de leurs mains… alors Dieu se détourna d’eux et les livra au culte de l’armée du ciel 36.

36 Actes 7.42.

11. Quelques livres et brochures mettent en garde les chrétiens contre des méthodes thérapeutiques telles l’hypnotisme, l’acupuncture, l’iridiologie, le yoga, ou même certaines techniques de combat telles le judo, le karaté. Que faut-il en penser ?

L’étude de ces méthodes a déjà fait l’objet de deux de mes livres 37 auxquels je renvoie mes lecteurs. Cependant, en réponse à la question posée, je fais ici les brèves remarques suivantes :

37 Opus cités.

L’hypnotisme : Ce procédé provoque un sommeil partiel et artificiel. Il utilise à cette fin une méthode redoutable. Elle conduit le patient à l’abandon de toute volonté propre et de toute activité consciente. En un mot, elle l’entraine à la passivité. Résultat : il devient un terrain de prédilection pour toute incursion de l’Ennemi.

Certains remèdes ont été interdits lorsqu’on a découvert leurs séquelles. J’en ferai autant de l’hypnotisme.

L’acupuncture : Cette pratique médicale chinoise a été l’objet d’études et de rapports sérieux faits par des médecins 38. Il en ressort qu’aucune base scientifique n’a été trouvée pour expliquer ces résultats, que “les malades ne sont pas tous réceptifs à cette méthode, … qu’elle n’offre aucun effet assuré”. De là à penser qu’elle agit par autosuggestion, le pas est vite franchi, surtout si l’on sait que “canaux” et “méridiens”’ qu’elle déclare courir sous notre peau et sur lesquels agissent les aiguilles “même pour des interventions identiques… ont des localisations variables suivant l’acupuncteur et l’école à laquelle il appartient.” Une énergie vitale mystérieuse, le “chi”, selon un rythme précis, se communiquerait par ces méridiens et circulerait dans tout le corps. L’équilibre de cette énergie, rompu par la maladie, serait rétabli par les aiguilles.

38 Ils ont paru : dans “Le Monde” des 8.11.72, 16/17.11.72, 23.5.73 ; dans le “Bulletin des médecins suisses” du 16.8.72. Ils sont cités dans la brochure de E. Kremer, 1974, éd. Réveil, Mulhouse.

En médecine aussi, le “placebo” 39, par autosuggestion, guérit des maladies psychosomatiques… sauf qu’ici, comme dans le yoga, intervient le recours à une énergie vitale inexpliquée !

39 Médicament “neutre”, à base d’amidon, de sucre et d’eau, donc sans effet thérapeutique. Administré en remplacement d’un médicament actif, à l’insu du patient, le soulagement obtenu est le même, dans 60 à 70% des cas !

Ma seule remarque : dans le doute, abstiens-toi !

L’iridiologie : L’examen scientifique de l’iris permet au médecin de déceler les traces laissées par certaines maladies qu’a connues le patient. Le repérage de foutes les maladies par cette méthode tient non plus de la science, mais de la divination. Tout ophtalmologue sérieux vous le dira !

Le yoga : Il faut d’emblée préciser ! Il ne doit pas être confondu avec une technique connue : celle de la relaxation. Car le yoga puise à une autre source et vise de tout autres fins. Selon l’enseignement yogi, par la force du “prana” — une énergie émanant directement de Dieu (?) — l’homme apprend à libérer, de la gangue de la matière, l’essence divine (?) qui le constitue. C’est une technique spirituelle d’autorésurrection. La passivité, l’annihilation de toutes les fonctions du mental, sont l’abc de cette pratique. En fait, il n’est pas d’école qui, mieux que celle-ci, prédispose et finalement ouvre l’homme à l’action des Puissances occultes.

Le karaté ainsi que le judo sont des sports de combat d’origine japonaise. Au premier abord, il paraîtrait aberrant que nous mêlions quoi que ce soit d’occulte à ces pratiques sportives. Cependant, deux expériences récentes m’obligent à me poser quelques questions, non sur le sport lui-même, mais sur les exigences auxquelles pourraient être astreints ceux qui aimeraient se qualifier dans l’une ou l’autre de ces disciplines. Dans les deux cas venus à ma connaissance, il s’agissait de chrétiens qui ont partagé avec moi leur perplexité.

Premier cas : “Les enfants de mon quartier reçoivent des leçons de judo. Par cette discipline, le maître veut les développer physiquement et, pour certains, stabiliser leurs facultés d’attention, Or, depuis qu’ils ont commencé ces cours, nous remarquons un changement singulier et pour nous très troublant. Ces enfants ont une difficulté toujours plus grande à prononcer le nom de Jésus. Lorsqu’ils prient, ils en reviennent toujours à “Dieu”. Ce qui est visible aussi, c’est maintenant leur incapacité à fixer leur attention sur la Parole de Dieu… Deux heures de télévision par jour peuvent expliquer cela. Mais le judo y serait-il aussi pour quelque chose ?”

Deuxième cas : Un jeune chrétien a observé que la pratique du karaté perturbait sa vie spirituelle. Quelques remarques entendues dans sa bouche ne laissent pas d’être troublantes, en effet : “Au début et à la fin de chaque cours, le maître nous appelle à nous prosterner devant une image représentant soit un ancêtre, soit un expert parmi les fondateurs de la discipline enseignée. On nous apprend qu’un acte réfléchi n’est pas efficace. C’est pourquoi la technique aux effets assurés s’accompagne d’une élimination de la pensée. C’est pour la même raison que l’on pratique parfois le zazen. Assis sur les talons, pieds à plat, on essaie de concentrer toute notre attention sur un endroit du corps, afin de mieux vider notre esprit…”

Par quelques mystérieux chemins se rejoignent ici le vide mental des yogi et celui nécessaire à une pratique efficace du karaté…

Si nous déclarons terrain propice à l’action de l’Ennemi la pratique yogique — cela est attesté par de nombreux témoignages dont celui de Liliane Florian 40 — pouvons-nous, sans autre réflexion, tenir pour recommandable le judo ou le karaté ?

40 Paru dans la Revue des Hommes d’affaires chrétiens, ACTE, n° 29.

Ma réponse : On peut faire du vélo, voire des courses cyclistes, en ignorant absolument le dopping. Autrement dit : si le judo et le karaté sont pratiqués comme des disciplines uniquement sportives, ils sont recommandables. Toutefois, le maître qui enseigne pourrait joindre à la pratique de ces sports certains “excitants”… Comme le dit mon dictionnaire : “Le dopping est dangereux et interdit.”

12. La schizophrénie peut-elle être considérée parfois comme une maladie d’origine démoniaque ?

C’est à dessein que je transcris cette question, souvent entendue, et, disons-le aussitôt, posée en des termes maladroits. Je pourrais l’accompagner d’autres questions du même type, se rapportant par exemple à l’homosexualité.

Que répondrait le questionneur si on lui demandait : “L’alcoolisme peut-il être considéré parfois comme une maladie d’origine démoniaque ?” Sans doute dirait-il qu’avant de mettre ce mal au compte du démon, il faudrait en chercher l’origine bien ailleurs !

Et il aurait mille fois raison : qu’elle soit mentale, psychique ou physique, qu’elle soit d’ordre caractériel, relationnel ou spirituel, une maladie, ou une infirmité, ou même une faute, n’est jamais étiquetable : “Œuvre du diable”. Qu’il y soit pour quelque chose — dans l’hérédité, dans l’éducation, dans les circonstances — c’est possible ! Encore cela demande-t-il vérification et nuances.

C’est pourquoi il faut écarter à toujours de notre esprit ce simplisme redoutable qui range l’homme, ses faiblesses et ses défaillances, à l’enseigne du démon. C’est faire beaucoup d’honneur à ce dernier, c’est manquer de respect envers l’homme, c’est oublier que Dieu est Dieu, et qu’il l’est encore et toujours.

Les schizophrènes ont une histoire semblable à la nôtre. Les hommes y ont leur part, et non le démon d’abord. Cette part doit être vue. Il se peut qu’en certains cas, on puisse aussi discerner celle de Satan. Mais il est impossible d’en parler d’une manière générale et en théorie.

C’est pour les mêmes raisons que, dans ce livre, je me suis abstenu d’évoquer le ministère auprès des drogués. Leur délivrance a aujourd’hui une importance accrue, et j’ai la certitude qu’en Christ elle est possible. Wilkerson et bien d’autres en apportent le témoignage vécu…

Mais justement, dans mon obéissance au Seigneur, je n’ai jamais été conduit à m’occuper personnellement des drogués. Cela demande une formation et une vocation dont on ne parle pas en théorie.

13. Lors de l’expulsion d’un démon, où faut-il le chasser ?

La réponse à cette question est l’occasion d’apporter une information supplémentaire sur certains faits pouvant accompagner une délivrance.

Deux passages de l’Apocalypse éclairent les indications données : Il y eut guerre dans le ciel. Michel et ses anges combattirent contre le dragon. Il fut précipité sur la terre… Ils l’ont vaincu, l’Accusateur de nos frères, celui qui les accusait devant notre Dieu jour et nuit. Ils l’ont vaincu à cause du sang de l’Agneau et à cause de la parole de leur témoignage. Et ils n’ont pas aimé leur vie jusqu’à craindre la mort… Malheur à la terre et à la mer, car le diable est descendu vers nous, animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps.

Le cinquième ange sonna la trompette… la clef du puits de l’abîme lui fut donnée… L’ange, roi de l’abîme, est nommé en hébreuAbaddon (destructeur) et en grec Apollyon… 41.

41 Apocalypse 12.7, 9-12 ; 9.1, 11.

Il est important de rappeler que :

a) La victoire sur le diable ne tient pas d’abord aux anges. Elle n’est encore et toujours que “le contre-coup de la victoire terrestre remportée par Jésus-Christ sur la croix” 42. Cette victoire donne aux croyants l’autorité et le pouvoir auxquels l’Ennemi ne peut se soustraire. Cependant — et sur la terre précisément — la colère du diable renforce la résistance qu’il peut offrir à un ordre d’expulsion. Certains combats peuvent rencontrer une opposition opiniâtre de sa part. Elle le sera d’autant plus que le ou les praticiens seraient faibles spirituellement, ou n’auraient pas conduit avec sagesse et discernement la préparation à l’acte d’expulsion. Cependant, il est avéré que la résistance de l’Ennemi faiblit à la mesure de la persévérance des praticiens.

42 Ch. Brutsch : Clarté de l’Apocalypse, de éd. Labor et Fides, p. 135.

b) Sauf dans un passage 43 où il désigne le séjour des morts, l’abîme est le nom donné dans le Nouveau-Testament à l’endroit où sont enfermés les démons dans la dépendance de Dieu 44, A l’heure de l’expulsion, c’est dans l’abîme qu’il est possible d’envoyer le démon. A ma connaissance, c’est ce que font plusieurs serviteurs de Dieu. D’autres, dont je suis, laissent au Seigneur sa souveraineté sur toute créature au ciel et sur la terre et sa pleine liberté de décider du sort qui les concerne. L’expulsion du démon s’accompagne alors d’un ordre de renvoi sous les pieds du Seigneur, conformément à la vision, de l’Apocalypse révélant le Christ dans sa gloire d’aujourd’hui 45.

43 Romains 10.7.

44 Luc 8.31 ; Apocalypse 9.1, 2, 11 ; 11.7 ; 17.8 ; 20.1-3.

45 Apocalypse 1.12-16.

c) Il n’est pas inutile de rappeler que le démon cède, non à la force de la voix des praticiens, mais à leur autorité spirituelle. Et il la discerne d’emblée !

d) Quand il se voit à la merci des praticiens, le démon peut se fâcher, injurier grossièrement ses opposants. Selon l’enseignement de l’Ecriture 46, ce serait déchoir à notre tour que de lui répondre par des injures semblables. “Que le Seigneur te réprime !” demeure notre seule réaction à ces insultes.

46 Jude 9.

e) Comme nous l’avons vu dans les récits de délivrance, l’ordre d’expulsion peut s’accompagner de manifestations diverses qui ne doivent jamais nous effrayer. Tout au plus faut-il parfois prendre quelques précautions, par exemple écarter du champ de l’action ce qui pourrait devenir une arme dans la main du démoniaque, ou le blesser lui-même s’il venait à tomber.

f) Il faut veiller aussi à placer les assistants et les membres de la famille sous la protection du Seigneur, car ils pourraient devenir les objets de la colère de Satan ou encore ceux dans lesquels il chercherait un abri.

14. Que faut-il accepter de ces nouvelles sagesses qui, à l’heure actuelle, envahissent l’Europe sous des noms divers ? Elles nous offrent la santé, l’équilibre, le bonheur, la réussite, et sont agréées plus facilement que l’Evangile ?

C’est bien un nouvel évangile qu’elles apportent, d’autant plus alléchant qu’il s’occupe essentiellement du bonheur présent des hommes et non de leur avenir. Prenons pour exemple :

La sophrologie. Elle a l’honnêteté de se présenter comme “une connaissance qui se cherche encore” 47. Elle se veut un mouvement de dépassement de l’homme sur lui-même aussi bien dans le sens horizontal (augmentation de ses possibilités d’action) que vertical (un nouvel art d’exister). A cette fin, elle utilise une méthode dont le point d’impact peut être atteint par d’autres voies connues, mais qu’elle n’approuve pas nécessairement :

47 Toutes les citations concernant la sophrologie sont tirées de “Qu’est-ce que la sophrologie ?” de R. Cherchève et E, Berranger, Regard, éd. Privat Toulouse 1970.

Chacune de ces actions peut être utilisée pour atteindre ce niveau ou cet état que la sophrologie appelle ‘‘la déconnexion”. Il s’agit d’une rupture de continuité ou d’équilibre entre notre système cérébro-spinal et notre système neuro-végétatif. On le sait, le premier, grâce à ses milliards de neurones, est informé de ce qui pourrait nous menacer de l’extérieur et permet de réagir en conséquence.

Le second organise l’équilibre de la vie de nos organes et de nos glandes. Cette déconnexion s’opère naturellement et à notre insu à l’instant de notre sommeil. Le système neuro-végétatif continue son travail tandis que se repose le système cérébro-spinal.

Or, la sophrologie vise à prendre en main le contrôle momentané de ce niveau d’assoupissement. Lorsque le patient atteint le palier intermédiaire où ses muscles sont relâchés, où son être conscient se trouve en état de pré-assoupissement, l’action du praticien sophrologue vient interférer. En effet, tandis que le système cérébro-spinal est inactif, le praticien sophrologue agit sur l’être irrationnel, viscéral, auquel il donne des directives qui modifient l’état de conscience, donc opèrent des changements tant au point de vue physiologique que psychologique. Comme l’écrit le professeur Caycedo, créateur de la sophrologie, “dans cet état d’acceptation passive, … toute idée suggérée ou formulée passe sans censure en interférence au centre de la vie profonde, ordonnant dans la mesure du possible la vie végétative elle-même”.

En conséquence de cette disjonction, le système organo-végétatif connaît alors une réceptivité exceptionnelle. “Il a tendance à obéir d’une façon passive, totale et absolue, au verbe tel qu’il est exprimé par le praticien.” Il nous est précisé que le praticien agit en attendant que le sujet lui-même puisse, à son gré, utiliser les pouvoirs que lui donne la déconnexion, c’est-à-dire “se débarrasser des stimulis qui le gênent, récupérer sa personnalité vraie en poursuivant son propre épanouissement, poursuivre la thérapeutique somatique psychique instaurée par le médecin”.

On le voit : l’intention de la sophrologie est louable et ne saurait être mise en cause. Par contre, l’état de ‘‘conscience sophrologique”’ et, ipso facto, la méthode qui vise à l’établir, font courir à celui qui s’y prête des dangers que la sophrologie paraît ignorer.

Certes, on peut faire confiance au médecin, même si cela comporte des risques. Ils seront atténués dans la mesure même où l’on connaît celui qui prend la liberté d’interférer jusqu’en notre être très profond. Mais dès l’instant où le patient devient son propre opérateur, ce crédit laisse supposer, d’une part que l’homme connaît son meilleur bien, d’autre part qu’il est inatteignable par la pensée de l’Ennemi. Qu’en est-il en vérité ?

Pierre, l’apôtre, a durement appris que même à l’état conscient, nous sommes terriblement vulnérables 48 et qu’à l’école du Christ nous apprenons progressivement à aimer Dieu, le prochain et nous-même de toute notre pensée. Et encore cet apprentissage est-il inséparable de ce maître à penser qu’est le Saint-Esprit.

48 Matthieu 16.23.

Or, se mettre soi-même en état de réceptivité et d’acceptation passive, c’est offrir à l’Ennemi des possibilités inégalées. Pour reprendre les termes mêmes utilisés en sophrologie, nous laissons au diable liberté ‘‘de passer sans censure au centre de notre vie profonde”. Il ne manquera pas de profiter d’une telle aubaine. Il ira jusqu’à nous encourager à la déconnexion, puisqu’elle lui prépare des disciples dociles !

Une seconde critique fondamentale peut être faite à ce nouvel évangile. Cette libération de l’homme par l’homme, cette prise en main de soi-même allant jusqu’à l’autothérapie physique et psychique, est une copie conforme d’un salut personnel par nos propres œuvres, dans un régime d’autarcie dont Dieu est totalement absent. Pour tout dire, cet évangile-là est la négation du véritable Evangile. Certes, le praticien dira que sa sagesse ne nie pas l’existence de Dieu. En effet, il laisse à chacun la liberté de s’en réclamer. Mais en fait, l’homme engagé dans le mouvement sophrologique, vit nécessairement dans une autonomie où il remplit à lui seul tous les rôles, en tout cas celui du Fils et celui du Saint-Esprit. Il se guérit lui-même, il se rachète lui-même, il se libère lui-même, il travaille lui-même à son propre épanouissement, il alimente lui-même son dynamisme, il se donne à lui-même une nouvelle manière d’exister. C’est l’évangile de l’Homme. Ce n’est plus l’Evangile du Royaume de Dieu, c’est celui du royaume de ce monde. Dieu le Père, le Fils et le Saint-Esprit peuvent prendre des vacances. Ça se passe très bien sans eux !

La scientologie, venue d’Amérique, est une autre panacée. Disons d’emblée que l’approche pédagogique qu’elle développe est digne d’intérêt 49. On souhaiterait même à tous les parents de faire provision de cette pédagogie en vue de l’éducation de leurs enfants. Un seul reproche pourrait être formulé à son endroit : elle présente ses principes éducatifs en des termes scientifiques recherchés. Serait-ce qu’en les habillant de mots savants, elle veuille laisser croire à leur nouveauté, alors qu’on les trouve ailleurs, dans la Bible en particulier, en termes beaucoup plus simples ?

49 cf. Ruth Minshull, Miracles au petit déjeuner, Verlag für angewandte Philosophie, Wiesbaden.

Cependant, si les principes pédagogiques de la scientologie sont tout à fait recommandables, la philosophie à laquelle elle nous renvoie a des aspects étonnants et repose sur un positivisme d’une rare naïveté, explicable peut-être par son origine américaine (on a peine à croire qu’il vienne tout droit de Rousseau !). Voici comment elle se présente elle-même :

“La scientologie est une religion dans le sens le plus ancien du terme : une étude de la sagesse. Elle est ouverte aux personnes de toutes croyances et religions. Elle permet de mieux comprendre sa propre religion. Les scientologues gardent la religion dans laquelle ils ont été élevés, s’ils le désirent. La scientologie œuvre pour un retour aux valeurs familiales et religieuses traditionnelles” 50.

50 Propectus, oct. 1977, annonçant une retraite scientologique à Berne.

En vérité, que recouvrent ces “valeurs religieuses” ? Deux définitions nous aideront à donner une réponse éclairée :

a) La scientologie (du latin scire = savoir, et du grec logos = étude) est une philosophie traitant du sujet de la connaissance dont l’application (la technologie) vise à opérer des changements désirables dans les conditions de vie des individus.

b) La dianétique (du grec dia = à travers, et nous = pensée) est la première étape de la scientologie. Il s’agit d’une technologie scientifique d’approche des problèmes et difficultés du mental humain.

Le fondateur de la scientologie, Ron Hubbard, part d’un a priori : L’homme naît bon et apporte à sa naissance un capital de possibilités extraordinaires.

Son cerveau en particulier est une merveilleuse calculatrice électronique, infiniment plus perfectionnée que n’importe quel ordinateur : il ne se trompe jamais. Or, visiblement, l’homme se trompe. Il y a dans son comportement des aberrations (psychoses, névroses, complexes, refoulements de toutes sortes) qui le rendent malheureux et malfaisant.

Cela tient à la nature même du mental humain formé de deux parties : l’analytique et le réactif. Le premier perçoit et enregistre les données de l’expérience, ce qui lui permet de poser et de résoudre les problèmes. Le second retient les “engrammes” c’est-à-dire enregistre toute émotion ou douleur lors d’états d’inconscience. Ainsi, lors d’un choc, d’une narcose, d’une émotion submergeante, le mental analytique est mis hors circuit et c’est le mental réactif qui assure la survie.

Or, dit Ron Hubbard, ce mental réactif est un crétin qui, lorsque les circonstances extérieures présentent des analogies avec celles ayant entouré l’apparition de l’engramme, restimule l’individu au point qu’il se sent “mal”, somatiquement et psychiquement, comme à la naissance de l’engramme. Et ceci se produit invariablement chaque fois que l’individu est restimulé. Là intervient la dianétique. Par elle, en effet, le patient, aidé du thérapeute, peut remonter le long du fil du temps jusqu’à la genèse de l’engramme, le décomposer et en faire passer le contenu dans le mental analytique.

On pourrait faire remarquer que la psychanalyse poursuit la même démarche. Certes, mais elle le fait au gré souvent capricieux des interventions du praticien; tandis qu’en dianétique, le patient est poussé invariablement le long de la chaîne des souvenirs, jusqu’à ce que l’électromètre qu’il tient entre les mains comme témoin de son émotion n’enregistre plus rien. Ron Hubbard prétend que tous les cas traités par la dianétique ont été des succès. Les gens sont libérés de leurs troubles psychosomatiques, de leurs angoisses, de leurs médicaments.

Jusque-là, hormis les prémices sur lesquelles elle repose, nous n’avons rien à redire à cette technologie. Tant mieux pour ses succès, s’ils correspondent à ce qu’on nous en dit.

Mais la dianétique n’est que l’introduction à la scientologie. Le patient est invité à aller plus loin que cette libération psychosomatique. Il est appelé à la libération de son esprit, de sa conscience. Par diverses étapes, il est assuré de parvenir à la Connaissance totale, celle où il sera un O.T. (Operating Thetan), c’est-à-dire un homme Esprit, et non plus un homme matière soumis à la matière. Cette promotion fera de lui un Homme cause, et non plus effet. Il saura imposer ses vues aux personnes et aux choses. Il sera maître de toutes circonstances. Au bénéfice de tous les souvenirs récupérés le long du fil du temps lors de la guerre aux engrammes, il connaîtra sa naissance, même son avant-naissance et ses vies antérieures. Il ne sera plus entravé par des comportements de restimulation engrammique, il aura vue sur l’avenir. Mourra-t-il ? Tombera-t-il malade ? Là, tout de même, R. Hubbard admet le mystère. Mais cela ne l’inquiète guère. D’abord parce que la vie antérieure promet une vie à venir. De plus, cet homme né bon et libéré par la scientologie est une sorte de dieu. Et un dieu ne meurt pas !

Devant de tels propos, deux remarques peuvent être faites.

a) Cet homme appelé à la Connaissance totale et assuré qu’il sera dieu n’est pas d’aujourd’hui et n’est pas né en Amérique. Au jardin d’Eden, celui qui déjà lui tenait de tels discours et lui faisait de telles promesses s’appelait d’un nom connu: Satan 51. R. Hubbard et ses adeptes l’ignorent-ils vraiment ?

51 Apocalypse 12.9.

b) Si la scientologie conduisait vraiment à ce qu’elle promet, depuis des millénaires prophètes et apôtres, Jésus lui-même, seraient des égarés. Ne prêchent-ils pas la repentance et la foi sur un chemin où Dieu en personne vient recommencer en l’homme sa création abîmée par le péché ? Erreur que tout cela, si l’on en croit M. Hubbard ! L’homme est bon… Si dans toute l’humanité il n’y a pas un seul être parfait, c’est que les hommes ont négligé de faire le bien.

Il suffit de le leur enseigner et de les rééduquer, et le monde changera !

En d’autres termes : inutile la croix, superflue la résurrection, parfaitement vain l’appel à la nouvelle naissance et à la marche par l’Esprit ! A portée de mains, santé, équilibre, bonheur, efficience ; liberté et vie éternelle vous sont accessibles grâce à la scientologie…

Il n’’y a rien à ajouter.

Cependant, dans le genre “libération de l’homme par l’homme”, et cela par un évangile copie conforme au véritable 52, le summum est atteint par le mouvement P.R.H. (Personnalité Relations Humaines).

52 Sauf que vous n’y trouvez pas trace de la personne de Jésus-Christ.

A partir d’une juste critique de la société occidentale où la réussite est le leitmotiv détestable du système social et éducatif, ce mouvement vise la reconstruction de l’homme et de la société sur un fondement recommandable entre tous : l’amour. Résultat, attendu dans la logique du système : “apparaissent alors des communautés humaines, cellules de base d’une société nouvelle qui se construira de proche en proche mais qui sera radicalement différente de la précédente parce que fondée sur l’être et non sur le paraître” 53.

53 Toutes les citations rapportées sont tirées de Notes de cours pro manuscripto, P.R.H., 1975, 7, rue des Feuillants, F-86000 Poitiers.

Le point de départ de cette généreuse entreprise : la “zone profonde” qui, dans la typologie P.R.H. correspond au meilleur moi jusqu’alors étouffé sous la domination du “cérébral volontaire” et de “l’instinctif sensible”. Pour l’atteindre et le remettre en valeur, la conscientisation accompagnée de discernement est la méthode par excellence. Pour les personnes non formées à cette “intériorisation”, le zen ou encore le yoga seront de précieux adjuvants.

En effet, comme dans le véritable Evangile, qui cherche trouve. Je cite : “Quand on a peu à peu l’habitude de cette rencontre profonde avec soi-même, on est tout étonné de ce monde nouveau.” Quelle découverte inattendue en effet ! A ce niveau de l’être, on rencontre “la vérité de toutes choses… un vrai roc, un lieu solide auquel on peut revenir toujours pour y prendre appui et retrouver de l’assurance… une source de vie qui peut conduire vers un infini de soi. Cette expérience de l’infini de l’être libère des frontières étroites de la vie quotidienne et fait intuitionner (sic) qu’il est possible d’être soi-même en totalité profonde dans n’importe quelle situation.” Et l’apogée (si l’on ose employer ce terme alors qu’il s’agit d’une conscientisation de notre être le plus profond !), c’est la révélation que “le centre de l’être, la réalité la plus puissante en l’homme, c’est l’amour... fait de douceur, de tendresse, d’harmonie, l’amour calme, vaste, puissant”.

Dans ce contexte, il vaut la peine de citer cette subtile mise en garde : “Certains qui croient en Dieu dédaignent ces aspects naturels d’eux-mêmes pour se centrer sur Dieu seul, oubliant que si leur être vient de Dieu, c’est tourner le dos à Dieu que de dédaigner son être naturel, et que c’est se priver de son énergie que de refuser de boire à sa propre source.”

Autre citation significative : ‘En nous attardant à considérer cet au-delà de nous-mêmes… nous sommes entraînés sur des voies d’approche qui conduisent à l’expérience de l’Absolu perçu comme une réalité intérieure à soi, profonde et très intime. Cette perception est un moment important de l’évolution d’un être… Il sera suivi d’un autre moment important : celui où l’on accepte que toute la vie soit vécue en docilité à l’Absolu.”

— Mais, demanderez-vous naïvement, quel nom porte cet Absolu ?

— Votre question est justement de celles qu’il ne faut pas poser, à moins que vous teniez à persévérer dans les erreurs idéologiques et religieuses qui avaient cours jusqu’ici ! Chacune d’elles a cru devoir absolutiser tel concept : Dieu, Amour, Vérité, Justice, Vie, etc. Elles n’ont réussi qu’à favoriser l’intolérance et à entraîner l’humanité à la poursuite de mirages. C’est pourquoi le nom de l’Absolu est secondaire, relatif, sans intérêt. L’essentiel, c’est l’expérience, en se souvenant que la recherche de l’Absolu se poursuit toute la vie. “Le signe qu’on est dans la bonne voie est une progression en plénitude d’être et en plénitude de vie.”

— Mais, direz-vous encore avec étonnement : Et la souffrance, et les difficultés, et les frustrations ?

— “Les souffrances du passé sont enfermées dans une partie de soi comme des loups dans la forêt. Conscientisé, regardé en face, accepté et intégré, ce passé perdra de sa nocivité. Le loup mourra… Un seuil de solidité et d’amour sera un jour franchi. La sensibilité sera toujours là, des perturbations pourront naître, provoquées par des contrariétés extérieures, mais elles seront de courte durée. La conscientisation les fera s’évaporer comme rosée au soleil…” Le jour vient où “la vie triomphera de la mort”.

A vous couper le souffle ! Car ici, en vérité, on atteint des sommets. Et l’on est en droit de se demander s’ils sont ceux de l’illusion naïve ou ceux de la foi en l’Homme, c’est-à-dire ceux du mensonge de l’Adversaire.

Sophrologie, scientologie, P.R.H., cette dernière surtout, se veulent fondées non sur le paraître mais sur l’être. Cette bonne intention ne les empêche pas d’avoir plus d’apparence de vérité que de contenu réel. Non pas que leurs observations de la réalité soient erronées. Au contraire. Nous l’avons relevé en parlant de la scientologie. Nous pouvons le souligner aussi dans le P.R.H. Il est bien vrai que cette fausse valeur de l’efficience au service de la réussite sociale ou économique a des pieds d’argile et conduit l’Occident à sa perte. Le mépris dans lequel est tenu l’homme, même parfois par ceux qui croiraient ainsi être fidèles à Dieu, est un scandale. Il est également vrai que l’homme est riche de potentialités extraordinaires qu’il gâche en les exploitant jusqu’à l’épuisement ou alors en les ignorant. Et il est conforme à la vérité de relever la folie de beaucoup de nos contemporains qui vivent cérébralement, c’est-à-dire dans l’ignorance — dans l’inconscience, dit le mouvement P.R.H. — de richesses combien plus désirables. Ils les découvriraient s’ils vivaient à la hauteur de ce qu’ils sont, alors que la plupart s’échinent à se conformer à ce qu’ils ne sont justement pas. Quant à l’observation des fanatismes nés de l’absolutisation des concepts, elle correspond à la réalité d’une histoire, meurtrière s’il en fût.

Mais l’ensemble de ces justes observations ne suffit pas à nous convaincre jusqu’à nous faire tenir pour sagesse la folie de leurs prétentions.

Et c’est là que surgit notre étonnement. Comment est-il possible que cette caricature de l’Evangile de Jésus-Christ qu’est le P.R.H. puisse trouver crédit auprès de ceux qu’on croyait informés des vérités élémentaires de l’Evangile ?

Aller à la découverte du Moi, c’est rencontrer non la vérité ou l’amour, mais l’injustice et l’impossibilité d’aimer. Quand je veux faire le bien, disait Paul, je fais le mal que je ne veux pas 54. Et Jésus fait entendre ce sévère diagnostic : Du cœur de l’homme procèdent toutes les formes de la méchanceté 55.

54 Romains 7.21.

55 Matthieu 12.35 ; 15.19.

Aussi bien comprenons-nous que l’inspirateur de cette nouvelle sagesse et des libérations qu’elle promet tient à être reconnu comme Absolu, mais refuse de dire son nom. Il sait, lui, que Jésus est le nom du seul libérateur qui en ce monde puisse permettre d’entrevoir une vraie libération. C’est pourquoi littéralement “il fait le malin”. Il reprend à son compte les principaux aspects de l’Evangile de Jésus-Christ, il a soin d’en renier et d’en modifier les fondements — et sous les apparences de la lumière, il invite à la docilité et à l’expérience qui conditionnent toutes les promesses de l’Absolu.

Devant les affirmations du P.R.H., je pense à cette parole de Jean : Bien-aimés, n’ajoutez pas foi à tout esprit ; mais éprouvez les esprits pour savoir s’ils sont de Dieu, car plusieurs faux prophètes sont venus dans le monde. Reconnaissez à ceci l’Esprit de Dieu : tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu en chair est de Dieu ; et tout esprit qui ne confesse pas Jésus n’est pas de Dieu. C’est celui de l’Antichrist dont vous avez appris la venue, et qui maintenant est déjà dans le monde 56.

56 1 Jean 4.1-3.

La Méditation Transcendantale est encore une des panacées qui, via l’Amérique, cherche à gagner l’Europe à sa cause. D’où l’intérêt qu’il faut y porter.

Elle se présente, elle aussi, sous l’aspect souriant de techniques de relaxation, faciles et bon marché, apportant remède à toute peine et frustration. Elle enseigne que l’homme dispose naturellement de possibilités créatrices à même de donner à son existence le bonheur auquel il aspire. Elle rejoint ainsi ceux qui croient que Dieu est à l’œuvre dans les efforts de l’homme pour s’améliorer. Aide-toi, le ciel t’aidera! Se réclamant de méthodes dites scientifiques, elle rejoint également ceux qui professent que certaines techniques contribuent à la maîtrise de puissances spirituelles capables de nous régénérer nous-mêmes et de transformer le monde.

Ce n’est pas là faciles propos. Le leader le plus connu de ce mouvement, Maharischi Mahesh Yogi (maha = grand ; rishi = sage, voyant ou saint : mahesh = nom de famille ;; yogi = maître de yoga), dès 1958 consacre sa vie à la régénération spirituelle du monde. Son programme est conforme à ce dessein : développer le plein potentiel de tout individu, renouveler les méthodes d’éducation, éliminer toute forme de mal, développer de nouvelles utilisations de l’environnement, accomplir les aspirations économiques de l’homme, améliorer les gouvernements.

A dire vrai, il y a dix ans encore, ce programme ne comportait pas ces visées d’aspect singulièrement américain et occidental. Il était essentiellement religieux, s’appelait le Mouvement de régénération spirituelle, était l’expression d’une théologie connue, dont voici très sommairement les grandes lignes :

Il n’y a pas de distinction entre Créateur et créature ; ce qui existe est une phase continuellement changeante d’une réalité, l’Etre, qui lui ne change jamais. Le monde n’est pas créé. Il émane de l’Etre divin et éternel. Ce que nous percevons par nos sens est illusoire. Le mal n’existe que par l’importance que nous lui donnons. Maharischi déclare : “La réponse à chaque problème, c’est qu’il n’y a pas de problème.” Que l’homme reçoive cette vérité, ce sera le commencement de sa libération. Car l’homme se crée ses propres problèmes, a donc la capacité de les résoudre lui-même. La Méditation Transcendantale (M.T.) est une communion retrouvée avec la Conscience Impersonnelle (Dieu) qui est la seule réalité. Il y a des milliers de dieux dans le panthéon, tous émanation de Dieu. Par la M.T., on entre en communion avec eux. Le chant rituel attire leur attention.

Avec l’aide des Beatles, des Beach Boys, de Mia Farrow, Maharischi et ses missionnaires connurent un certain succès durant les années 60, mais bien vite le mouvement strictement spirituel perdit son attrait. M. Mahesh se retira alors aux Indes d’où il revint en 1970, porteur d’un nouveau message, annoncé sous un nom nouveau et avec le programme énoncé plus haut.

Le mouvement de régénération spirituelle est devenu “the World Plan Executive Council” (l’Assemblée exécutive d’un dessein de portée mondiale). La pensée métaphysique a été rebaptisée la Science de l’Intelligence Créative (S.I.C). La plupart des concepts de l’hindouisme ont été habillés de termes scientifiques. On ne parle plus de Brahman mais du Champ de la Conscience. La M.T. n’insiste plus sur l’union avec l’Etre impersonnel, elle est devenue un processus de recherche et de normalisation de différents systèmes mis sur pied d’égalité. La nouvelle philosophie concède l’existence de problèmes humains, hormis celui du mal. Mais elle les “désobjective”. Par la pensée positive, la souffrance provenant de la faiblesse de l’individu est progressivement éliminée.

Cette terminologie est un effort visant à rendre assimilable, par l’homme occidental, un produit d’origine hindoue. Pour autant, la M.T. se présente-t-elle comme compatible avec le christianisme ou d’autres expressions de la foi ? Son catéchisme est simple :

Après une session d’initiation, le disciple reçoit un mantra secret, c’est-à-dire un mot, une formule sans signification apparente, qu’il aura à répéter chaque fois que sa pensée de méditateur s’égarerait vers ce qui est concret. Deux fois par jour (20 minutes le matin, 20 minutes le soir) il consacrera du temps à la méditation qui le libérera et le mettra en communion avec Dieu.

Au dire de ses adeptes, la M.T. engage la personne dans la découverte de son plein potentiel mental et lui procure une profonde sensation de repos. La pensée se désaltère à la source, c’est-à-dire l’Intelligence Créative Pure. La M.T. libère du stress et des narcotiques. On dit également que la M.T. donne un esprit clair et décidé ; elle prévient la dépression et procure une stabilité émotive. Elle a des effets positifs sur le rythme de la respiration et du cœur, sur les changements biochimiques, sur les ondes cérébrales, sur le sommeil…

Scientifiquement parlant, il serait possible de souscrire à ces résultats. Cependant, connaisseurs et contestateurs de la M.T. disent que 40 minutes de simple repos quotidien pendant trois mois produisent les mêmes effets. D’autres mettent en garde les gens émotifs. De longues périodes de M.T. aggraveraient leur état. D’autres enfin contestent absolument à la M.T. sa prétention au dynamisme créateur; la méditation réduirait de 17% l’absorpsion d’oxygène…

Ce qui nous intéresse bien davantage, c’est l’affirmation que la M.T. est praticable par les chrétiens. En effet, des millions de personnes dans le monde entier sont aujourd’hui confrontées avec les techniques de méditation. Et on assiste — sans doute en réaction au matérialisme athée et aliénant — à un véritable revirement philosophique et religieux. L’homme désenchanté redécouvre la possibilité de communiquer avec des forces surnaturelles.

Nous ne pouvons faire ici une étude comparative entre les assertions de l’Evangile de Jésus-Christ et celles de la philosophie à la source de la M.T. Nous ne pouvons donner qu’une sommaire appréciation.

Il est symptomatique déjà qu’un des leaders de la M.T. dise loyalement : “Si les chrétiens ont raison, alors Maharischi a tort.” O combien !

Le Dieu personnel des chrétiens, Père, Fils et Saint-Esprit n’est nullement identique à l’Etre impersonnel dont se réclame la M.T, Ce dernier n’est finalement qu’une conscientisation glorifiée du monde. Quand la M.T. prétend qu’à partir du moi on peut atteindre le Moi transcendé, elle abuse ses disciples. Aussi pour maintenir quelque crédit à cette supercherie, elle fait intervenir la réincarnation. Ainsi transpose-t-elle dans de nombreuses vies à venir la perfection inatteignable. A ce taux-là, elle ne risque rien de la promettre.

Présenter la M.T. comme une technique de relaxation est un emballage trompeur. Lorsque la M.T. est honnête, elle ne dit pas que son but premier soit la libération du stress ou la recherche du bonheur dans l’équilibre intérieur.

En vérité, elle tend à nous faire perdre notre individualité afin de nous rendre plus identiques à l’Etre pur. Mais ce qui l’intéresse, c’est moins encore cette pureté d’état que la mise en valeur du “potentiel” à unifier avec celui des autres (en anglais : isness). Ainsi apparaît la trilogie hindouiste : l’être moniste, la conscience de l’unité, la béatitude, cet état de félicité qui transcende misère et souffrance sans tension ni confusion ni désharmonie. Cet accomplissement, c’est l’homme passé à l’état de Dieu. Le Maharischi déclare qu’une personne est accomplie quand ‘‘l’homme est la vivante expression de l’existence omniprésente, omnisciente et cosmique”. En d’autres termes, la M.T. est un processus de divinisation de l’homme. On pourrait ajouter qu’elle est une haute école d’égocentrisme et d’égoïsme, car personne ne peut aider autrui à se transcender. Chaque méditateur doit se transformer lui-même.

Il faut être plus sévère encore. Sous l’étiquette d’une technique scientifique de santé et d’éducation de soi, la pratique de la M.T. est facteur d’une grave confusion : c’est une sanctification sans repentance, sans conversion, sans régénération. C’est une échelle de Jacob posée sur le fondement qui fait de l’homme un être naturellement bon et perfectible. Jésus n’a plus à descendre pour nous sauver. A son exemple, nous montons vers Dieu. Cette propre déification, une fois de plus, laisse entendre de qui elle procède. Car le méditateur qui serait parvenu à cette autosanctification, même en se réclamant du nom de Jésus-Christ, pourrait finalement s’exclamer sans scrupule : “Je suis l’Eternel tout-puissant… En vérité, je le suis, il n’y a pas d’autre Dieu que moi, adorez-Moi…”

Quant au voyage vers l’intérieur de soi, il comporte des dangers que veulent ignorer les promoteurs de la M.T. : la fuite de la réalité, un retrait dans notre propre monde imaginaire, une incapacité de contrôle des expériences mystiques auxquelles conduit la méditation. C’est une porte largement ouverte aux démons. Dans ce contexte, en effet, le mantra pourrait être considéré comme l’invocation à la Puissance céleste, sa répétition balisant sans cesse un libre accès de cette Puissance à notre être profond.

15. A entendre certains, il y aurait opposition entre foi chrétienne et recours à la psychanalyse. Qu’en pensez-vous ?

C’est là une question difficile, délicate même quant au vocabulaire à utiliser dans une réponse honnête. En effet, ce qu’en théorie on peut dire de positif ou de négatif pourrait, en pratique, se révéler totalement faux. Expliquons-nous ! Psychanalyse, psychologie, psychiatrie sont des sciences sérieuses, enseignées dans des Ecoles réputées formant des spécialistes diplômés. Les “psy…” peuvent se montrer praticiens parfois très recommandables, parfois très contestables.

Par exemple, si le “psy” est disciple de Freud, il peut faire usage de choses excellentes que son maître a dites sur l’homme, mais suivre ce maître dans son refus du phénomène religieux. Donc, dans sa notion de la culpabilité, à cause de son athéisme il peut involontairement influencer le patient et lui fermer l’accès à la grâce que, sans le savoir, cherchait son malade 57.

57 Ici, il faudrait avoir l’honnêteté de dire que ce même danger est couru par le fidèle, malade ou non, recourant aux soins de son “berger”. Ce dernier, bien sûr, se réclame de Jésus-Christ. Mais sous ce nom peut s’abriter une théologie qui engage le fidèle à la résignation plutôt qu’à la libération. Cela s’est vu à quelques reprises.

Autre aspect de la question : beaucoup de gens perdent pied à cause de leurs affrontements aux conditions d’existence inquiétantes d’aujourd’hui. Le monde, la vie, leur posent trop de problèmes.

Sans interdire aux “psy” la liberté de faire connaître à leurs patients leur conception du monde et de son devenir, il faut admettre que leur art ne vise pas d’abord à influencer le patient et encore moins à lui fournir une réponse devant le fait de l’existence. Tout au plus, leurs soins veulent-ils réconcilier le patient avec lui-même et lui rendre la possibilité d’entrer en relation avec le prochain. A ce niveau, tel praticien serait donc recommandable. Mais s’il s’agit de guérir l’homme en le réconciliant d’abord avec Dieu son Créateur, on peut douter de la valeur d’une psychanalyse menée par un agnostique.

Il faudrait aussi s’entendre sur l’usage de certains mots. Il est connu que le psychanalyste ne dialogue pas avec le patient, mais laisse celui-ci se connaître lui-même en s’exprimant. Le psychothérapeute, lui, engage la conversation. Certes, l’un et l’autre, à leur manière, peuvent apporter soulagement, sinon guérison. Avec cette remarque complémentaire importante, même si elle n’a rien d’original : il n’est pas vrai qu’un patient se libère en racontant son histoire devant témoin. Peut-être apprend-il à revivre son passé, à se connaître par pièces détachées et à s’expliquer enfin à lui-même ses actions ou réactions. Cela peut certainement faciliter son approche de problèmes existentiels. Mais cela ne sera jamais leur solution. Car celle-ci se trouve dans l’amour de Dieu révélé en Jésus-Christ, crucifié et ressuscité.

Cela explique que les chrétiens puissent hésiter, et parfois refuser, de confier à des ‘‘psy”’ apparemment athées ou agnostiques, leur propre âme ou celle de leur prochain.

Et puis, il faut avoir la simplicité de dire que la grâce de Dieu est parfois difficilement discernable derrière le coût de certaines cures psychanalytiques.

16. La dynamique de groupe peut-elle être recommandée comme un moyen de libération ?

Ma réponse paraîtra sévère, peut-être inacceptable pour certains. Ils sont des “professionnels” de la dynamique de groupe, tiennent cette méthode — certes faillible comme tout ce qui est humain — pour recommandable à tous égards. Or, suite à quelques expériences, je considère pour ma part que la “dynamique de groupe” tient davantage de la manipulation que de l’amour du prochain. En outre, elle entraîne les participants dans une dangereuse mise à disposition d’eux-mêmes au service d’esprits confondus avec le Saint-Esprit.

Je sais qu’en disant cela, je peine des compagnons de route. J’userais volontiers à leur égard de la parole de Paul à l’heure de son désaccord avec quelques-uns : Dussé-je, en vous aimant davantage, être moins aimé de vous 58. J’aurais volontiers tenu pour subjectives mes réactions lors de rencontres qui se voulaient dynamiques et non directives. Déjà la contradiction entre les deux termes me les rendait suspectes. Car la dynamis biblique (en grec = puissance, caractérisant la personne du Saint-Esprit) est par essence accompagnée d’autorité puisqu’elle est Dieu. Comment donc, s’il s’agit d’elle vraiment, pourrait-elle ne pas être directive ? Un groupe de chrétiens, en recherche, ou en partage d’Evangile, ou en réunion de sanctification est, de fait, un membre du Corps de Christ. Peut-il l’être en vérité sans que s’exerce aussitôt un ministère d’autorité, de présidence, de direction, au besoin accordé tel un charisme ?

58 2 Corinthiens 12.15.

A chaque fois, le malaise éprouvé était une tristesse, où se mêlait de l’irritation envers certains participants et le soupçon d’être leur jouet. J’avais le sentiment détestable que la non directivité était une fiction, qu’à l’envers de ce décor, des mains invisibles habilement tiraient des ficelles. Elles nous orientaient justement là où nous ne voulions pas aller ; et j’en ressortais avec la pensée que j’avais été pris dans un piège.

Allez dire cela à ceux qui enseignent ou se réclament précisément de la non directivité ! Allez leur faire entendre que de telles méthodes conduisent à une disponibilité ne profitant qu’à l’Ennemi ! Allez leur faire comprendre que très vite et en dépit d’une vigilance extrême, le Menteur et le Séducteur devient le grand maître de ces cérémonies ! C’était à coup sûr provoquer une remarque facile et définitive : “Décidément, tu vois le diable partout !…”

Béni soit Dieu ! Le Seigneur n’est jamais à cours de témoins pour faire entendre sa vérité. Peu importe en quelles circonstances j’ai reçu les deux témoignages ci-dessous rapportés. Avec clarté et autorité, ils disent mieux que je n’aurais su le faire ce que peut receler la dynamique de groupe soi-disant non directive.

Le premier est de la plume de Mlle Liliane Fleurian, le second de Mlle Nelly de Visme, deux Françaises, engagées dans un témoignage et un ministère accrédités par l’église locale à laquelle elles appartiennent 59. Je les transcris tels quels. Ce qu’ils disent se passe de commentaires.

59 Pour l’instant à Albi et à Aix-en-Provence.

Premier témoignage. “Que le Seigneur nous accorde son Esprit de discernement pour que nous ne soyons pas au nombre des malheureux qui appellent le mal bien et le bien mal 60. Qu’il nous garde aussi de juger les personnes et de prononcer des condamnations hâtives.

60 Esaïe 5.20.

Il ne saurait, en effet, être question de rejeter en bloc tout l’apport de la psychologie et des sciences humaines. Mais il est urgent de prendre conscience des dangers que présentent les activités désignées généralement sous le terme ‘dynamique des groupes’.

Enseignante de mon métier, j’ai personnellement suivi, à titre volontaire, un cycle de formation en psycho-pédagogie qui comportait, outre des séances d’étude et d’information, plusieurs sessions de ‘sensibilisation à la dynamique des groupes’. Cela se passait, en ce qui me concerne, avant ma conversion à Jésus-Christ. Pendant plusieurs jours, nous nous retrouvions à 9 ou 10, en présence d’un moniteur, mais en situation de totale non-directivité. Cette petite cellule s’appelait aussi ‘training-group’, ou encore ‘groupe de formation’. Nous avions un triple but : parvenir à une meilleure compréhension des phénomènes de groupe, à une plus grande connaissance de nous-mêmes, et à une meilleure connaissance de la psychologie humaine, non plus au travers d’un apport intellectuel, mais à un niveau plus profond, puisque nous nous engagions ensemble dans une expérience vécue.

Je suis certaine qu’en définissant ainsi leurs objectifs, les animateurs et les stagiaires étaient d’une parfaite bonne foi. Mais la sincérité n’est pas une garantie suffisante ; il nous faut examiner ces choses à la lumière de la Parole de Dieu et de la prière, à la lumière du discernement que le Saint-Esprit est seul à pouvoir donner 61.

61 Jérémie 17.9.

Aujourd’hui, je me rends compte que derrière une respectable façade huma-niste et scientifique se cachait une sorte de rituel, avec ses ‘prêtres’ et ses ‘fidèles’, une véritable contre-liturgie. Y prenaient part des gens sûrs d’eux-mêmes, plus où moins extravertis, et aussi des ‘faibles’ en quête de sécurité et de certitudes. Malgré la bonne foi et la bonne volonté des uns et des autres, inévitablement la loi de la jungle régit cette sorte de jeu. Quoique les affrontements prennent à l’occasion des formes déguisées, voire raffinées, seuls les plus aptes à la lutte survivent. Bien sûr, certains gardent une apparence de neutralité ; il n’en reste pas moins vrai qu’il y a combat, avec des vainqueurs et des vaincus. A maintes reprises, des personnes sont sorties de là broyées, ou du moins blessées, un peu comme des opérés qu’on ferait descendre de la table d’opération le ventre encore ouvert. J’ai aussi vu des personnes qu’il a fallu, suite à de telles séances, embarquer de force pour la clinique psychiatrique. A d’autres, on conseillait telle ou telle forme de psychothérapie. Tous ces ‘blessés’ étaient, bien sûr, objet de compassion pour les ‘survivants’ ; mais il s’agissait de cette compassion toute humaine qui se borne à plaindre l’autre, et demeure incapable de lui communiquer la guérison au nom de Jésus dans la puissance de l’Esprit Saint.

Quant aux ‘forts’, aux ‘plus aptes’, ou soi-disant tels, ils se virent souvent admirer, et jalouser aussi. Ils n’étaient sans doute pas plus indemnes que les autres, mais ils avaient su dissimuler leurs blessures, à leurs propres yeux comme aux yeux d’autrui, Plusieurs firent l’exaltante découverte de leurs capacités de résistance, voire de domination. Dans le pire des cas, il semble s’être produit chez eux un éveil à la volonté de puissance qui équivaut à une contrefaçon de la nouvelle naissance, Et après cette ‘nouvelle naissance’ humaniste, ils se sont mis à recruter des adeptes pour les ‘groupes de sensibilisation’ avec l’ardeur des néophytes. L’effet de ces séances est comparable à celui du yoga, dont les incontestables ‘bienfaits’ musclent le vieil homme et le fortifient dans sa capa- cité de rester indépendant du Sauveur. Ainsi s’enracine cette illusion tenace chez tout homme : il croit pouvoir se sauver lui-même, au moins un peu si ce n’est entièrement, en faisant ainsi l’économie de la repentance et de la conversion du cœur.

Dans d’autres groupes, sous des formes tantôt raffinées, tantôt plus grossières, on a assisté à l’éveil de pulsions sexuelles incontrôlables, soit chez des individus, soit à l’échelle du groupe tout entier. Dans l’euphorie générale, la notion même de bien et de mal devenait de plus en plus floue ; une sorte de consensus planait sur le groupe : au nom de la ‘créativité’, de la ‘découverte du moi profond’, on affirmait explicitement ou implicitement que tout était permis.

On peut donc dire sans exagération qu’en pareil cas il s’agit d’une liturgie démoniaque qui ne veut pas dire son nom, avec sacrifices humains à la clé — ou encore avec orgie à la clé. La réalité reste identique à elle-même en dépit d’une honnête façade scientifique, et malgré la présence, dans certains cas, d’un vernis Chrétien.

En prenant moi-même part à ces activités autrefois, j’en avais largement sous-estimé les dangers, et je n’en avais guère vu que l’aspect exaltant. Le Seigneur m’a donc montré que je devais me repentir de cette attitude, et que seul son sang pouvait laver les traces qui en restaient. Je lui rends grâces pour sa miséricorde et son pardon.

Redisons-le : il s’agit de discerner, et non de trancher à la hâte, à tort et à travers. Toute activité de groupe n’est pas une abomination, pas plus que tout exercice physique ou spirituel n’est du yoga. Mais tant de personnes acceptent d’emblée tout ce qui semble leur ‘faire du bien’, tout ce qu’on leur propose en vue d’un ‘déblocage’, d’une ‘découverte du moi profond’. Le piège est des plus subtils : car dans sa bonté, le Seigneur veut effectivement nous débarrasser de tout blocage et de tout empêchement à la joie et à la liberté. C’est au niveau des moyens qu’il faut exercer le discernement.

Demandons au Seigneur de nous rendre de plus en plus dépendants de lui. Ne faut-il pas qu’il croisse et que je diminue 62 ? Et attendons en paix la réponse qu’il ne manquera pas de nous révéler si notre cœur est simple et droit devant lui.”

62 Jean 3.30.

Deuxième témoignage. “Cette expérience de dynamique de groupe fut vécue dans le cadre général d’un cycle de formation chrétienne. Notre animateur veillait — conformément aux techniques de la dynamique de groupe — à se faire en quelque sorte oublier des participants en limitant autant que possible ses interventions dans la vie du groupe. Il y est parvenu, au début. Alors que, par moments, un mot, une simple phrase, inspirés de l’Esprit, auraient suffi pour ramener l’expérience dans la lumière du Christ, à d’autres moments, quelques minutes de prière auraient peut-être remplacé les tensions ressenties dans le. groupe par un climat de confiance et de paix.

Par la suite, il a suivi l’orientation prise par divers participants — j’irai même jusqu’à dire qu’il a su (consciemment ou inconsciemment ?) rassembler les éléments apparus dans le groupe par l’intermédiaire des plus ‘bavards’ (ou des plus agressifs) pour diriger l’évolution du groupe vers sa ‘pente naturelle’ — au point d’intervenir à son tour avec agressivité au même titre que tel ou tel participant (ce qu’un membre du groupe n’a pas manqué de lui faire remarquer).

Chaque période de la vie du groupe durait environ 1 heure ou 1 heure 30. Voici comment se sont déroulés ces moments, en général : un silence lourd, gêné, tendu, au commencement ; un climat de destruction étonnant dans ce silence (je peux dire que c’est tout de suite ce qui m’a le plus frappée), et pour m’en protéger, je me suis mise assez vite à prier en esprit 63. Puis tel ou tel participant se mettait à parler. Certains parlaient beaucoup, d’autres peu ou pas du tout. L’expérience a rapidement pris un tour d’agressivité, tant sur le plan des paroles que des thèmes abordés. Incompréhensions, tensions, frottements, arrière-pensées, condamnations, accusations, jalousies, etc. — qui sans doute comptaient aussi dans la lourdeur destructrice des silences — ont commencé à resurgir d’un passé proche ou d’un présent immédiat. Que ne se passe-t-il pas dans les cœurs en pareil cas ! Je me souviens de mon ahurissement, un peu naïf peut-être, devant tout ce qui se trouvait dans le cœur et la pensée de ces frères et sœurs avec lesquels je vivais depuis plusieurs semaines déjà. Cela se déversait dans le groupe, en particulier sur 3 ou 4 participants (braves ‘boucs émissaires’ ou individus refusant de se livrer à pareils ‘exercices’). En quelque sorte, un ‘déballage libre’ de ce que tel ou tel, selon ‘l’abondance de son cœur’ pouvait reprocher à tel ou tel. Sous prétexte de ‘vérité chrétienne’, de ‘lumière’, de charité chrétienne (mot souvent employé !), de ‘discernement communautaire’ et de ‘transparence’, tout pouvait se dire, vrai ou faux, justifié ou non : ‘Je le pense ici et maintenant, je le dis donc.’ Résultat immédiat : un déferlement d’obscurité, un ballet dans les ténèbres. Quelques rayons de vraie lumière, sans doute, dont s’est aussitôt saisi l’Accusateur des frères, le père du mensonge pour entrainer le groupe plus avant dans l’illusion de la vérité. Un déballage incontrôlé où chaque parole agit comme un coup de poignard pénétrant jusqu’au plus profond du cœur. Une sorte de massacre par la parole, organisé au nom de Jésus-Christ. On mesure alors la destruction intérieure que peut opérer une parole apparemment insignifiante — en fait, juste celle qu’il fallait pour tuer ou déchirer — et la disproportion qui existe entre l’attitude extérieure calme, voire même impassible, gardée par tel ou tel participant et le broyage intérieur qui s’accomplit en lui par suite de la parole de quelques membres du groupe. De temps en temps, des rires plus ou moins nerveux, accueillis comme une détente (vraie ou fausse ?) où comme une bienheureuse échappatoire faisant passer le temps plus vite et moins péniblement.

63 1 Corinthiens 14.2.

Quelques ‘retours de conscience’ ont fait dire à tel ou tel membre du groupe : ‘Ce que nous avons dit nous remet aussi en cause !’ Mais ‘retour de conscience” n’est pas repentance et changement de direction, si bien que nous avons hardiment poursuivi ‘l’expérience’. Un temps de prière et de louange en groupe ramena un peu de paix dans les cœurs blessés et permit à Jésus de bander quelques plaies. Mais le lendemain, le jeu de fléchettes reprenait, et aux coups de poignard de la veille s’ajoutaient les fléchettes du jour nouveau. Le plus surprenant, c’est qu’en vivant ces heures, on ne se rend pas vraiment compte de la profondeur des plaies ainsi ouvertes ; ce n’est que quelques heures, quelques jours ou quelques mois plus tard, quand on essaie de ramasser les morceaux, qu’on mesure l’ampleur des dégâts opérés.

Je classerais volontiers la dynamique de groupe avec les sessions P.R.H. (Personnalité Relations Humaines) en vogue dans les milieux catholiques français où ils touchent ecclésiastiques, religieuses, couples, etc. En tout cas, ‘doctrine” et objectif sont les mêmes, l’un s’appliquant à l’individu, l’autre au groupe. Leur but commun est d’offrir les moyens de se regarder, de s’examiner, afin de parvenir à travers les différents ‘exercices’ à mieux se connaître pour résoudre ses problèmes, repousser ses limites par la prise de conscience de leur existence, et se dépasser soi-même. C’est une sagesse humaine de libération et de dépassement de soi, sagesse qui devient vite ‘panacée universelle’ pour l’homme d’aujourd’hui et idolâtrie, pour beaucoup de non-chrétiens… et de chrétiens. Ces moyens de libération, souvent caricature de la vraie libération qu’apporte Jésus-Christ, se réclament de son nom et souvent de sa Parole mais, en définitive, exigent de la foi en Jésus-Christ qu’elle se ‘coule’ dans le moule de telle ou telle méthode psychologique employée. Une sorte d’aveuglement s’installe. On parle souvent de la mort et de la résurrection du Christ, si bien que le mystère central de la foi chrétienne devient une sorte de somnifère endormant la vigilance et la fidélité à la Parole de Dieu du chrétien non averti. Ou alors, ces mêmes éléments essentiels de la foi servent de riposte ou d’appât pour accrocher au hameçon de telle ou telle méthode psychologique les chrétiens méfiants. Au cours de plusieurs de ces ‘exercices’, on nous a souvent laissé entendre qu’au fond, refuser ces techniques humaines, c’était refuser l’incarnation ! Comme si l’incarnation pouvait se confondre avec quelque méthode psychologique ou psychanalytique !

Je tiens pour une illusion mortelle, un empoisonnement subtil, un mensonge contraire à la Parole inspirée de Dieu cette sorte de ‘purification’ et de ‘libération’.

En conclusion, trois comparaisons peuvent illustrer ce type d’expériences de groupe :

— Chiens et chats en cage ; une certaine lumière passe à travers le grillage ; un esprit mène la danse ; on s’arrête lorsque les chiens en ont assez ; quelques chats sont restés sur le carreau.

— Une dissection sous le microscope de l’animateur impassible qui observe ce qui se passe avec intérêt; ce qu’il advient des animaux disséqués, une fois l’opération terminée, n’entre même pas en considération; de la mort naît la vie, alléluia pour la mort… des sacrifiés.

— Une escalade vers un sommet que l’on imagine baigné de lumière, celui de la présence de Dieu. Mais en cours d’ascension, on se rend compte que le guide s’est trompé de sommet ; c’est vers l’obscurité et la demeure de Satan que l’on grimpe. Impossible de faire marche arrière, tout le monde est encordé ; le temps que certains décident de redescendre, il est déjà trop tard…”


Ma conclusion personnelle : Ces témoignages révèlent combien il peut être dangereux de participer à des expériences à la mode, sans connaître les motivations des organisateurs de telles sessions, ni surtout leurs objectifs et leurs intentions. Par ailleurs, nous devons nous garder des généralisations. Il existe des formations à l’animation ou d’autres perfectionnements professionnels en groupes restreints, qui ont toute leur valeur, garantie par la foi, le sens de la responsabilité, la compétence des animateurs.

17. Quelle part faut-donner à l’imposition des mains dans le ministère de délivrance ?

Dans les limites d’une réponse brève par nécessité, il est juste de rappeler d’abord que ce signe de l’imposition des mains trouve dans l’Ecriture cinq aspects différents :

64 Genèse 48.13-16.

65 Lévitique 24.14.

66 Lévitique 16.20-22.

67 Marc 6.5 ; 16.18.

68 Actes 13.3.

69 Actes 9.17 ; 19.6.

On peut donc dire que ce geste rappelle l’identification entre la personne sur qui les mains sont posées et le Seigneur au nom duquel le serviteur intervient. Par l’imposition des mains, celui qui en est le bénéficiaire est assuré que Jésus, dans son amour, se solidarise à lui, le bénit, lui enlève toute iniquité et toute malédiction, lui octroie la guérison, l’accompagne de son Esprit présent dans l’Eglise.

Sous cet éclairage, on peut admettre que des praticiens, non seulement ne voient aucune raison de s’abstenir d’imposer les mains à leurs patients, mais s’empressent de le faire. Il ne m’appartient pas de décider s’ils ont raison ou s’il faut, au contraire, désapprouver leur zèle. En effet, une autre considération pourrait ici nous appeler sinon à l’abstention, du moins à la prudence. Elle est en relation avec l’avertissement de Paul à Timothée : N’impose les mains à personne avec précipitation 70.

70 1 Timothée 5.22.

Le contexte de cette exhortation mérite d’être cité : Ne participe pas au péché d’autrui, conserve-toi pur. Il ne s’agit pas de devenir craintif et méfiant, mais de savoir si le praticien, même doté du don de discernement, peut sans hésitation, voire avec un zèle intempestif, se solidariser avec un démoniaque. On rétorquera que, d’après un récit de Luc 71, Jésus aurait imposé les mains à une femme “démonisée”. Or, à lire le texte, chronologiquement c’est après avoir délivré cette femme que Jésus lui imposa les mains. Cela n’est pas nécessairement normatif. Mais c’est tout de même à entendre.

71 Luc 13.11-13.

Par ailleurs, on peut tirer de l’exhortation de l’apôtre un avertissement aux patients. Ils ne devraient pas se précipiter sous l’imposition des mains de quiconque la leur proposerait. Le Christ n’est pas toujours engagé par celui qui se dit son messager. Dans le Sermon sur la montagne, il ne cache pas que l’étiquette “Seigneur, Seigneur” ne correspond pas toujours au contenu 72. Se laisser donc imposer les mains par n’importe qui, c’est, au pire, rejoindre ceux qui font appel aux guérisseurs dans la pensée qu’ils sont des instruments du Seigneur. Cela se solde par une contamination aggravée et non par une libération.

72 Matthieu 7.21-23.

En conclusion, nous ne voulons mettre personne sous une loi, celle de l’imposition ou celle de la non imposition des mains. Par ce geste, à la manière de Moïse, dans le combat qui déjà nous opposerait à l’Ennemi, nous lui signifions que Christ prend fait et cause pour tout homme asservi.

Mais, en limitant l’usage de ce geste ou en le retardant, nous faisons aussi preuve de sagesse. Nous évitons qu’on nous prenne pour des magiciens. Nous permettons que le patient, avant d’en être bénéficiaire, apprenne le sens profond de cette identification du Christ avec nous.

18. Pourquoi, dans les cas de libération où démons et puissances sont en cause, faut-il être au moins deux lors de la confession des péchés ?

Une confession devant témoin est nécessaire quand ce dernier est impliqué et doit recevoir réparation. Il en est de même pour tout péché en rapport avec les Puissances célestes. Elles sont des créatures. A ce titre, elles ne savent que ce que nous disons à voix claire et devant elles. Elles doivent entendre notre humiliation, notre décision de rupture, notre désir de voir le Seigneur régir notre vie et enlever aux démons et Puissances les droits qu’ils voudraient garder parce que nous les leur avions cédés.

Or, les créatures célestes, même révoltées ou dévoyées, connais- sent la justice divine et peuvent s’en prévaloir.

Ce n’est pas sans raison si, jusque devant Dieu, elles peuvent accuser 73. Elles connaissent toutes nos défaillances, plus encore, elles connaissent leurs droits. Or, il est écrit qu’un seul témoin ne suffit pas dans un constat ; le fait ne s’établit que sur la déposition de deux ou trois témoins 74. Ce qui était écrit dans l’Ancienne alliance reste dans la Nouvelle, lorsque réparation est demandée aussi bien pour les affaires de la terre que pour celles en relation avec les créatures célestes 75.

73 Job 1.9-11 ; Zacharie 3.1 ; Apocalypse 12.10.

74 Deutéronome 19.15.

75 Matthieu 18.15-20.

C’est donc devant témoin que cette confession doit être faite. Il n’y a pas de puissance contre la vérité de la Parole de Dieu lorsque celle-ci est mise en pratique. Devant cette confession à deux, l’Ennemi a la bouche fermée et perd tous ses droits contre nous.

19. Jésus a enseigné que certaines délivrances n’étaient possibles que précédées du jeûne et de la prière 76. Comment, en pratique, entendre cela ?

76 Matthieu 17.21.

Cet enseignement peut être entendu aussi bien par le patient que par le praticien. L’habitation des esprits méchants en l’homme est facilitée lorsque le terrain psychique, moral, physique, se trouve détérioré. Les facteurs de cette détérioration sont nombreux : le stress ou son contraire l’oisiveté, les tensions dues aux disputes, à l’instabilité ; toute toxicomanie (alcool, tabac, drogues, médicaments), les passions, etc.

Bien sûr, en rapport avec cette exhortation à la sobriété, il faut se souvenir que la volonté des démons d’habiter en l’homme, dans un animal où dans un lieu, correspond à leur nature déchue ou à leur désir. Ils sont menteurs, impurs, séducteurs, meurtriers, etc. Nous ne confondons pas la nature charnelle du vieil homme avec les démons. Mais l’association chair et démons n’est pas fortuite. Ces derniers jettent leur dévolu sur les êtres qui, charnellement, leur permettent d’exercer leurs vices : mentir, tenter, séduire, agiter, asservir, souiller, avilir, mépriser, torturer, tuer…

Cette action de guérison du terrain par des exigences de sobriété (jeûne de la pensée et du travail fébrile, rupture avec une passion, refus de toute servitude charnelle, etc.) est en accord avec l’exhortation d’Esaïe de détacher les chaînes de la méchanceté, de dénouer les liens de la servitude… de rompre toute espèce de joug 77. Certes, cette action n’est pas toujours possible préalablement. Il est des occasions où il faut d’abord chasser le démon, dénouer des liens, et ensuite seulement exhorter à un jeûne, facteur d’équilibre et de santé.

77 Esaïe 58.6.

Cependant, dans le contexte du récit qui amena Jésus à recommander le jeûne, son enseignement s’adressait d’abord aux praticiens. En effet, leur équipement spirituel ne tient pas nécessairement à leur profession de foi orthodoxe ou à leur titre ecclésiastique. Quand Paul nous appelle à combattre non selon la chair… mais par la vertu de Dieu 78, cette vertu (du latin virtus = force, puissance) a l’exacte mesure de notre communion personnelle et communautaire avec le Seigneur. Jeûne et prière nous rapprochent de Dieu.

78 2 Corinthiens 10.3-4.

Avec raison, sous l’appellation du jeûne, on entend une abstention de nourriture ou de boisson, dont la digestion entraverait la vigilance et la pleine disposition de notre esprit. Soit dit en passant, cela pourrait être aussi un jeûne “conjugal” 79, Mais, chez beaucoup de praticiens, ce jeûne pourrait être celui de leur pré… ou suroccupation. Entrer dans la pensée de Dieu, dans la vie et la puissance du Saint-Esprit, cela demande du temps, une prière prolongée, seul ou à plusieurs. Cela demande du silence, parfois donc une mise à l’écart du téléphone, du journal, de la radio, de la télévision, de nos occupations ou de nos aises habituelles.

79 1 Corinthiens 7.5.

Disons enfin que si les Juifs, à la manière de tant de chrétiens, avaient été esclaves du tabac, l’Eternel aurait complété son avertissement à Aaron : Tu ne boiras ni vin, ni boisson enivrante, toi et tes fils… lorsque vous entrerez dans la tente d’assignation… afin que vous puissiez distinguer ce qui est saint de ce qui est profane 80.

80 Lévitique 10.8-10.

20. Comment prévenir une rechute possible des démoniaques délivrés ?

La réponse à cette question est l’occasion de rappeler des vérités importantes.

a) Délivrer ou délier ceux qui refuseraient consciemment et ouvertement de devenir disciples du Christ, ce serait, en un certain sens, travailler en vain. Dans le dialogue avec les patients, il faut s’assurer de leur conversion, soit aussi de leur repentance et de leur foi. Il faut les inviter à donner au Seigneur et à sa Parole l’importance qu’ils donnaient jusqu’ici à leur idées, à leurs sentiments, à leurs points de vue. La négligence sur ce point pourrait, devant Dieu, rendre le praticien responsable d’une délivrance sans lendemain.

b) La même exigence est à observer dans le cas d’une délivrance d’un enfant. La responsabilité des parents est accrue du fait même de l’intervention du Christ dans leur foyer. Combien d’entre eux auraient à reconnaître, puis à confesser, que les agissements de l’Ennemi chez leurs enfants tiennent d’abord à leur ouverture à son action, ou encore à leur ignorance lorsqu’ils ont eu recours à des guérisseurs, à des devins, à toutes sortes de pratiques occultes. Et il ne faut pas oublier non plus que l’origine de certaines manifestations démoniaques est à chercher dans l’hérédité…

c) Faut-il le redire ? Hors le recours volontaire à son action (dans l’occultisme par exemple ou par une invocation consciente à Satan), le démon n’entre pas parce qu’on a péché. Il entre pour nous pousser à mal faire, nous aliéner, nous corrompre, nous détruire, nous séparer des autres, nous détourner de Dieu. Il est donc important de s’enquérir de ce qu’il adviendra de ceux qui ont recours à notre ministère de délivrance. Car les libérer puis les abandonner seuls face à l’Adversaire c’est, de manière insensée, leur faire courir des risques. Certes, le Christ a été leur Libérateur et leur Sauveur. Il peut rester leur Seigneur et leur donner l’assurance que nul ne les arrachera de sa main 81.

81 Esaïe 43.13 ; Jean 10.28.

Mais justement s’ils sont en sa main, il les conduira à l’obéissance à sa Parole. Le salut fait de nous des chrétiens ‘‘ajoutés” à une église locale et inséparables d’elle 82. La délivrance aussi !

82 Actes 2.47.

d) En conséquence, il est hautement désirable que ce qui se passe neuf fois sur dix aujourd’hui cesse et surtout ne s’institue pas. En effet, s’il faut se réjouir que ce ministère de délivrance soit, à l’heure actuelle, exercé par tel serviteur ou servante, il faut déplorer les conditions dans lesquelles ils le font. Si l’on ose user de cette comparaison : Jésus ne travaillait pas à leur manière. Et pourtant c’était Jésus. Quand lui guérissait les malades ou chassait les démons, il était accompagné d’au moins deux ou trois disciples, plus souvent encore des douze. Avec eux tous, il pratiquait la délivrance en public, c’est-à-dire là où les foules se rassemblaient pour l’entendre.

Si l’on voulait transposer cela dans la réalité d’aujourd’hui, c’est en équipes d’évangélisation, c’est en églises de maison, c’est en équipes de pasteurs et d’anciens, de pasteurs et fidèles, c’est avec l’église locale équipée de tous les dons, que ce ministère aurait à s’exercer. Et en conséquence, c’est dans les églises de maison, c’est dans l’église locale enfin constituée selon la Parole du Seigneur que les personnes libérées pourraient, sans dangers, passer leur convalescence, s’affermir et devenir co-équipiers dans le ministère de délivrance.

♦ ♦ ♦

Ce ne sont pas là des paroles en l’air. Si ce livre n’avait pas, à mon propre étonnement et contrairement à mon désir, déjà pris des proportions que je n’avais pas imaginées, sur ce dernier point précis et capital j’écrirais encore des pages et des pages. Elles traduiraient ma souffrance d’avoir trop souvent mené ce combat en solitaire et ma prière à Dieu pour que nos églises deviennent — je n’ai pas peur de l’équivoque — des maisons d’amour où les malades guérissent, où les délivrés se rétablissent, où les bien-portants se forment au combat.

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