Ἰγνάτιος, ὁ καὶ Θεοφόρος, ἐκκλησίᾳ θεοῦ πατρὸς καὶ τοῦ ἠγαπημένου Ἰησοῦ χριστοῦ, ἠλεημένῃ ἐν παντὶ χαρίσματι, πεπληρωμένῃ ἐν πίστει καὶ ἀγάπῃ, ἀνυστερήτῳ οὔσῃ παντὸς χαρίσματος, θεοπρεπεστάτῃ καὶ ἁγιοφόρῳ, τῇ οὔσῃ ἐν Σμύρνῃ τῆς Ἀσίας, ἐν ἀμώμῳ πνεύματι καὶ λόγῳ θεοῦ πλεῖστα χαίρειν.
Ignace, appelé aussi Théophore, à l’église de Dieu le Père et de notre bien-aimé Jésus-Christ, comblée de toutes les grâces par la miséricorde divine, remplie de foi et de charité, riche de tous les dons, vénérable, chargée des trésors divins, (à l’église) de Smyrne en Asie : mille fois salut dans un esprit irréprochable et dans la parole de Dieu.
ἁγιοφόρῳ — Ce mot est susceptible d’une double interprétation : 1° féconde en sainteté, c’est-à-dire produisant beaucoup d’hommes saints (Pearson) ; ou bien 2° portant les choses saintes (comme on les porte dans une procession). Ces choses saintes, ici, seraient les grâces de Dieu et les vertus chrétiennes. — Ce second sens paraît préférable, si on se reporte à Éph.9.2, où nous trouvons ce mot déjà employé dans le sens de portant les objets sacrés (Lightfoot, Funk).
ἐν ἀμώμῳ πνεύματι καὶ λόγῳ θεοῦ — Ici πνεῦμα ne doit pas s’entendre du Saint-Esprit, ni λόγος θεοῦ du Verbe de Dieu considéré comme personne ; le sens est celui-ci : Je vous souhaite de trouver toutes sortes de joies (χαίρειν) dans la pureté de vos cœurs (ἐν ἀμώμῳ πνεύματι) et dans la parole de Dieu (ἐν λόγῳ θεοῦ)
1.1 Δοξάζω Ἰησοῦν Χριστὸν τὸν θεὸν τὸν οὕτως ὑμᾶς σοφίσαντα · ἐνόησα γὰρ ὑμᾶς κατηρτισμένους ἐν ἀκινήτῳ πίστει, ὥσπερ καθηλωμένους ἐν τῷ σταυρῷ τοῦ κυρίου Ἰησοῦ χριστοῦ σαρκί τε καὶ πνεύματι καὶ ἡδρασμένους ἐν ἀγάπῃ ἐν τῷ αἵματι χριστοῦ, πεπληροφορημένους εἰς τὸν κύριον ἡμῶν, ἀληθῶς ὄντα ἐκ γένους Δαυεὶδ κατὰ σάρκα, υἱὸν θεοῦ κατὰ θέλημα καὶ δύναμιν θεοῦ, γεγεννημένον ἀληθῶς ἐκ παρθένου, βεβαπτισμένον ὑπὸ Ἰωάννου, ἵνα πληρωθῇ πᾶσα δικαιοσύνη ὑπ᾿ αὐτοῦ ·
Je rends gloire à Jésus-Christ notre Dieu de vous avoir inspiré une telle sagesse : j’ai pu constater en effet que vous êtes unis dans une foi inébranlable, cloués, pour ainsi dire, corps et âmes, à la croix du Seigneur Jésus-Christ et affermis dans la charité par le sang du Christ. Vous avez, je le sais, la ferme conviction que notre Seigneur est bien réellement « descendant de David selon la chair, » fils de Dieu par la volonté et la puissance divines, qu’il est véritablement né d’une vierge, qu’il a reçu le baptême des mains de Jean « pour accomplir toute justice ; »
1.2 ἀληθῶς ἐπὶ Ποντίου Πιλάτου καὶ Ἡρώδου τετράρχου καθηλωμένον ὑπέρ ἡμῶν ἐν σαρκί, ἀφ᾿ οὗ καρποῦ ἡμεῖς ἀπό τοῦ θεομακαρίστου αὐτοῦ πάθους, ἵνα ἄρῃ σύσσημον εἰς τοὺς αἰῶνας διὰ τῆς ἀναστάσεως εἰς τοὺς ἁγίους καὶ πιστοὺς αὐτοῦ, εἴτε ἐν Ἰουδαίοις εἴτε ἐν ἔθνεσιν, ἐν ἑνὶ σώματι τῆς ἐκκλησίας αὐτοῦ.
qu’il a été réellement percé de clous pour nous en sa chair sous Ponce-Pilate et Hérode le tétrarque : c’est au fruit de sa croix, à sa sainte et divine passion, que nous devons la vie. C’est ainsi que, par sa résurrection, « il a levé son étendard » sur les siècles pour grouper ses saints et ses fidèles, tant du sein du judaïsme que de celui de la gentilité, en un seul et même corps, qui est son église.
1.1 ἀφ᾽ οὗ καρποῦ — La croix est souvent comparée à l’arbre de vie (cf. Trall.11.2).
2.1 Ταῦτα γὰρ πάντα ἔπαθεν δι᾿ ἡμᾶς, ἵνα σωθῶμεν · καὶ ἀληθῶς ἔπαθεν, ὡς καὶ ἀληθῶς ἀνέστησεν ἑαυτόν, οὐχ ὥσπερ ἄπιστοί τινες λέγουσιν, τὸ δοκεῖν αὐτὸν πεπονθέναι, αὐτοὶ τὸ δοκεῖν ὄντες · καὶ καθὼς φρονοῦσιν, καὶ συμβήσεται αὐτοῖς, οὖσιν ἀσωμάτοις καὶ δαιμονικοῖς.
C’est pour nous, en effet, c’est pour notre salut qu’il a enduré toutes ces souffrances : et c’est réellement qu’il a souffert, comme c’est réellement qu’il s’est ressuscité lui-même, et sa passion n’a pas été une simple apparence, comme le prétendent certains incrédules, qui ne sont eux-mêmes qu’une apparence, et dont la destinée sera d’être, conformément à leurs opinions, sans corps et semblables aux démons.
3.1 Ἐγὼ γὰρ καὶ μετὰ τὴν ἀνάστασιν ἐν σαρκὶ αὐτὸν οἶδα καὶ πιστεύω ὄντα.
Pour moi, je sais et je crois que, même après sa résurrection, Jésus-Christ avait un corps.
3.2 καὶ ὅτε πρὸς τοὺς περὶ Πέτρον ἦλθεν, ἔφη αὐτοῖς · Λάβετε, ψηλαφήσατέ με καὶ ἴδετε, ὅτι οὐκ εἰμὶ δαιμόνιον ἀσώματον. καὶ εὐθὺς αὐτοῦ ἥψαντο καὶ ἐπίστευσαν, κραθέντες τῇ σαρκὶ αὐτοῦ καὶ τῷ πνεύματι. διὰ τοῦτο καὶ θανάτου κατεφρόνησαν, ηὑρέθησαν δὲ ὑπὲρ θάνατον.
Quand il s’approcha de Pierre et de ses compagnons, que leur dit-il ? « Touchez-moi, palpez-moi, et voyez que je ne suis pas un esprit sans corps. » Aussitôt ils le touchèrent, et au contact intime de sa chair et de son esprit, ils crurent : de là leur mépris de la mort et leur victoire sur elle.
3.3 μετὰ δὲ τὴν ἀνάστασιν συνέφαγεν αὐτοῖς καὶ συνέπιεν ὡς σαρκικός, καίπερ πνευματικῶς ἡνωμένος τῷ πατρί.
Après sa résurrection. Jésus mangea et but avec ses disciples comme un être corporel, bien que spirituellement uni au Père.
3.2 Λάβετε, ψηλαφήσατέ με καὶ ἴδετε — Allusion évidente au fait rapporté par Luc 24.39 — Quant aux paroles : οὐκ εἰμὶ δαιμόνιον ἀσώματον, on les lisait dans le Κήρυγμα Πέτρου, et aussi, paraît-il, dans l’évangile selon les Hébreux. Mais il n’est pas certain qu’Ignace ait copié ces paroles dans un livre ; il les tient peut-être simplement de la tradition.
4.1 Ταῦτα δὲ παραινῶ ὑμῖν, ἀγαπητοί, εἰδὼς ὅτι καὶ ὑμεῖς οὕτως ἔχετε. προφυλάσσω δὲ ὑμᾶς ἀπὸ τῶν θηρίων τῶν ἀνθρωπομόρφων, οὓς οὐ μόνον δεῖ ὑμᾶς μὴ παραδέχεσθαι, ἀλλ᾿ εἰ δυνατὸν μηδὲ συναντᾶν, μόνον δὲ προσεύχεσθε ὑπὲρ αὐτῶν, ἐὰν πως μετανοήσωσιν, ὅπερ δύσκολον, τούτου δὲ ἔχει ἐξουσίαν Ἰησοῦς Χριστός, τὸ ἀληθινὸν ἡμῶν ζῆν.
Je vous adresse ces conseils, mes bien-aimés, mais je sais que ce sont là aussi vos sentiments. Mon but est de vous mettre en garde contre les bêtes féroces à figure humaine, que non seulement vous ne devez pas accueillir, mais dont vous devez même, si c’est possible, éviter la rencontre, vous contentant de prier pour leur conversion, chose d’ailleurs bien difficile, mais possible pourtant à Jésus-Christ, notre véritable vie.
4.2 Εἰ γὰρ τὸ δοκεῖν ταῦτα ἐπράχθη ὑπὸ τοῦ κυρίου ἡμῶν, κἀγὼ τὸ δοκεῖν δέδεμαι. τί δὲ καὶ ἑαυτὸν ἔκδοτον δέδωκα τῷ θανάτῳ, πρὸς πῦρ, πρὸς μάχαιραν, πρὸς θηρία ; ἀλλ᾿ ἐγγὺς μαχαίρας ἐγγὺς θεοῦ, μεταξὺ θηρίων μεταξὺ θεοῦ · μόνον ἐν τῷ ὀνόματι Ἰησοῦ χριστοῦ εἰς τὸ συμπαθεῖν αὐτῷ πάντα ὑπομένω, αὐτοῦ με ἐνδυναμοῦντος τοῦ τελείου ἀνθρώπου.
Si c’est seulement en apparence que notre Seigneur a fait ces (différentes actions), ce n’est aussi qu’en apparence que je suis chargé de fers. Alors, pourquoi me suis-je voué à la mort, par le feu, le glaive, les bêtes ? Mais être près du glaive, c’est être près de Dieu ; être au milieu des bêtes, c’est être avec Dieu, pourvu qu’on souffre tout cela pour le nom de Jésus-Christ. C’est pour m’associer à sa passion que j’endure tout, et c’est lui qui m’en donne la force, lui qui s’est fait complètement homme.
5.1 Ὅν τινες ἀγνοοῦντες ἀρνοῦνται, μᾶλλον δὲ ἠρνήθησαν ὑπ᾿ αὐτοῦ, ὄντες συνήγοροι τοῦ θανάτου μᾶλλον ἢ τῆς ἀληθείας · οὓς οὐκ ἔπεισαν αἱ προφητεῖαι οὐδὲ ὁ νόμος Μωύσεως, ἀλλ᾿ οὐδὲ μέχρι νῦν τὸ εὐαγγέλιον, οὐδὲ τὰ ἡμέτερα τῶν κατ᾿ ἄνδρα παθήματα.
Il y en a qui, par ignorance, le renient, ou plutôt c’est lui qui les a reniés : avocats de la mort plutôt que de la vérité, que n’ont convaincus ni les prophéties, ni la loi de Moïse, ni même, jusqu’à présent, l’évangile, ni les souffrances endurées par chacun de nous.
5.2 καὶ γὰρ περὶ ἡμῶν τὸ αὐτὸ φρονοῦσιν. τί γάρ με ὠφελεῖ τις, εἰ ἐμὲ ἐπαινεῖ, τὸν δὲ κύριόν μου βλασφημεῖ, μὴ ὁμολογῶν αὐτὸν σαρκοφόρον ; ὁ δὲ τοῦτο λέγων τελείως αὐτὸν ἀπήρνηται, ὢν νεκροφόρος.
Car ils pensent sur nous comme sur Jésus-Christ. Qu’ai-je besoin des louanges de celui qui blasphème mon Seigneur, en niant qu’il ait pris chair ? Ne pas professer cette vérité, c’est renier complètement Jésus-Christ, c’est être soi-même un croque-mort.
5.3 τὰ δὲ ὀνόματα αὐτῶν, ὄντα ἄπιστα, οὐκ ἔδοξέν μοι ἐγγράψαι. ἀλλὰ μηδὲ γένοιτό μοι αὐτῶν μνημονεύειν, μέχρις οὗ μετανοήσωσιν εἰς τὸ πάθος, ὅ ἐστιν ἡμῶν ἀνάστασις.
Les noms de ces hommes sont des noms d’infidèles : je ne veux pas les écrire. Puisse même leur souvenir ne jamais se présenter à mon esprit, tant que la pénitence ne les aura pas ramenés à la foi en la passion, qui est notre résurrection !
5.2 τὸ αὐτὸ φρονοῦσιν — Les docètes, dit Ignace, réduisent tout à une simple apparence, aussi bien nos souffrances que celles de Jésus-Christ. νεκροφόρος, croque-mort. — Le docète est un croque-mort en ce sens que son propre corps n’est qu’un cadavre qu’il conduit au tombeau. — Ignace veut-il dire simplement par là que les docètes sont morts à la vie spirituelle, et faut-il il rapprocher cette expression de Philad.6.1 : οὗτοι ἐμοὶ στῆλαί εἰσιν καὶ τάφοι νεκρῶν ; de 1 Timothée 5.6 : ζῶσα τέθνηκεν ; de Apocalypse 3.1 : ζῇς, καὶ νεκρὸς εἶ ? Ou bien, à côté du sens moral, n’y a-t-il pas aussi une allusion doctrinale ? Cette dernière hypothèse paraît plus vraisemblable : en niant la résurrection du Christ, les docètes nient par là-même leur propre immortalité ; voilà comment leurs corps ne sont que des cadavres qu’ils traînent au tombeau.
6.1 Μηδεὶς πλανάσθω · καὶ τὰ ἐπουράνια καὶ ἡ δόξα τῶν ἀγγέλων καὶ οἱ ἄρχοντες ὁρατοί τε καὶ ἀόρατοι, ἐὰν μὴ πιστεύσωσιν εἰς τὸ αἷμα χριστοῦ, κἀκείνοις κρίσις ἐστίν · ὁ χωρῶν χωρείτω. τόπος μηδένα φυσιούτω ·
Que personne ne s’y trompe : les habitants même du ciel, les anges avec toute leur gloire, les princes visibles et invisibles, s’ils ne croient au sang du Christ, n’échapperont pas au jugement. « Qui peut comprendre, comprenne. » Que personne ne s’enorgueillisse de son rang : car c’est la foi et la charité qui sont tout ; il n’y a rien au-dessus.
6.2 Καταμάθετε δὲ τοὺς ἑτεροδοξοῦντας εἰς τὴν χάριν Ἰησοῦ χριστοῦ τὴν εἰς ἡμᾶς ἐλθοῦσαν, πῶς ἐναντίοι εἰσὶν τῇ γνώμῃ τοῦ θεοῦ. περὶ ἀγάπης οὐ μέλει αὐτοῖς, οὐ περὶ χήρας, οὐ περὶ ὀρφανοῦ, οὐ περὶ θλιβομένου, οὐ περὶ δεδεμένου ἢ λελυμένου, οὐ περὶ πεινῶντος ἢ διψῶντος.
Apprenez à connaître ces hommes qui professent l’erreur sur la grâce de Jésus-Christ venue vers nous : combien leur conduite est opposée à l’esprit de Dieu ! Ils n’ont aucun souci de la charité, ni de la veuve, ni de l’orphelin, ni de l’opprimé, ni du prisonnier ou du libéré, ni de celui qui a faim ou soif.
6.1 ἡ δόξα τῶν ἀγγέλων, c-à-d les anges mêmes, malgré toute leur gloire, n’échapperont pas au jugement.
7.1 Εὐχαριστίας καὶ προσευχῆς ἀπέχονται, διὰ τὸ μὴ ὁμολογεῖν τὴν εὐχαριστίαν σάρκα εἶναι τοῦ σωτῆρος ἡμῶν Ἰησοῦ χριστοῦ τὴν ὑπὲρ τῶν ἁμαρτιῶν ἡμῶν παθοῦσαν, ἣν τῇ χρηστότητι ὁ πατὴρ ἤγειρεν. Οἱ οὖν ἀντιλέγοντες τῇ δωρεᾷ τοῦ θεοῦ συζητοῦντες ἀποθνήσκουσιν · συνέφερεν δὲ αὐτοῖς ἀγαπᾶν, ἵνα καὶ ἀναστῶσιν.
Ils s’abstiennent de l’Eucharistie et de la prière, parce qu’ils ne veulent pas reconnaître, dans l’Eucharistie, la chair de Jésus-Christ notre Sauveur, cette chair qui a souffert pour nos péchés, et que le Père, dans sa bonté, a ressuscitée. C’est ainsi que ceux qui nient le don de Dieu trouvent la mort dans leurs contestations. Ils feraient bien mieux de pratiquer la charité, pour avoir part à la résurrection.
7.2 πρέπον ἐστὶν ἀπέχεσθαι τῶν τοιούτων καὶ μήτε κατ᾿ ἰδίαν περὶ αὐτῶν λαλεῖν μήτε κοινῇ, προσέχειν δὲ τοῖς προφήταις, ἐξαιρέτως δὲ τῷ εὐαγγελίῳ, ἐν ᾧ τὸ πάθος ἡμῖν δεδήλωται καὶ ἡ ἀνάστασις τετελείωται. τοὺς δὲ μερισμοὺς φεύγετε ὡς ἀρχὴν κακῶν.
Évitez donc ces gens-là, et ne parlez d’eux ni en particulier, ni en public ; attachez-vous aux prophètes, et surtout à l’évangile, dans lequel la passion nous est montrée et la résurrection accomplie. Fuyez aussi les divisions, comme la source de tous les maux.
7.1 ἀπέχονται — On verra plus bas (8.1), que ces hérétiques ne s’abstenaient pas absolument de toute Eucharistie, mais seulement de celle de l’Église, et qu’ils la célébraient à part. Or Ignace refuse toute validité à cette Eucharistie célébrée sans la participation de l’évêque ou de son délégué.
8.1 Πάντες τῷ ἐπισκόπῳ ἀκολουθεῖτε, ὡς Ἰησοῦς Χριστὸς τῷ πατρί, καὶ τῷ πρεσβυτερἰῳ ὡς τοῖς ἀποστόλοις. τοὺς δὲ διακόνους ἐντρέπεσθε ὡς θεοῦ ἐντολήν. μηδεὶς χωρὶς τοῦ ἐπισκόπου τι πρασσέτω τῶν ἀνηκόντων εἰς τὴν ἐκκλησίαν. ἐκείνη βεβαία εὐχαριστία ἡγείσθω, ἡ ὑπὸ ἐπίσκοπον οὖσα ἢ ᾧ ἄν αὐτὸς ἐπιτρέψῃ.
Suivez tous l’évêque comme Jésus-Christ suivait son Père, et le presbytérium comme les apôtres ; quant aux diacres, vénérez-les comme la loi de Dieu. Ne faites jamais rien, sans l’évêque, de ce qui concerne l’église. Ne regardez comme valide que l’Eucharistie célébrée sous la présidence de l’évêque ou de son délégué.
8.2 ὅπου ἄν φανῇ ὁ ἐπίσκοπος, ἐκεῖ τὸ πλῆθος ἤτω, ὥσπερ ὅπου ἄν ᾖ Ἰησοῦς Χριστός, ἐκεῖ ἡ καθολικὴ ἐκκλησία. οὐκ ἐξόν ἐστιν χωρὶς τοῦ ἐπισκόπου οὔτε βαπτίζειν οὔτε ἀγάπην ποιεῖν · ἀλλ᾿ ὃ ἄν ἐκεῖνος δοκιμάσῃ, τοῦτο καὶ τῷ θεῷ εὐάρεστον, ἵνα ἀσφαλὲς ᾖ καὶ βέβαιον πᾶν ὃ πράσσετε.
Partout où paraît l’évêque, que là aussi soit la communauté, de même que partout où est le Christ Jésus, là est l’église universelle. Il n’est permis ni de baptiser, ni de célébrer l’agape en dehors de l’évêque ; mais tout ce qu’il approuve est également agréé de Dieu : de cette façon, tout ce qui se fera (dans l’église) sera sûr et valide.
8.1 καθολικὴ, universelle. C’est ici le plus ancien exemple de ce mot appliqué à l’Église. — καθολικὴ ἐκκλησία a deux significations différentes : église universelle, par opposition aux églises particulières ; c’est ici le sens ; ou encore église catholique, orthodoxe, par opposition aux sectes hérétiques ou schismatiques. Dans cette seconde acception, καθολικὴ ἐκκλησία se rencontre pour la première fois 16.2, du Martyre de saint Polycarpe.
ἀγάπην ποιεῖν — Le baptême et l’agape sont ici considérés comme les deux principales fonctions de l’évêque. Le fait même de rapprocher l’agape du baptême donne à ce mot une signification eucharistique. Si, à l’époque d’Ignace, l’agape existait en tant que repas rituel, il semble que l’eucharisitie n’en était pas encore séparée, au moins dans les églises qu’il connaissait.
9.1 Εὔλογόν ἐστιν λοιπὸν ἀνανῆψαι ἡμᾶς, ὡς ἔτι καιρὸν ἔχομεν εἰς θεὸν μετανοεῖν. καλῶς ἔχει, θεὸν καὶ ἐπίσκοπον εἰδέναι. ὁ τιμῶν ἐπίσκοπον ὑπὸ θεοῦ τετίμηται · ὁ λάθρα ἐπισκόπου τι πράσσων τῷ διαβόλῳ λατρεύει.
La raison nous dit de recouvrer enfin notre bon sens, et, tandis qu’il en est temps encore, de revenir à Dieu par le repentir. Une excellente maxime, c’est d’avoir toujours en vue Dieu et l’évêque. Celui qui honore l’évêque est honoré de Dieu ; agir à l’insu de l’évêque, c’est servir le diable.
9.2 Πάντα οὖν ὑμῖν ἐν χάριτι περισσευέτω · ἄξιοι γάρ ἐστε. κατὰ πάντα με ἀνεπαύσατε, καὶ ὑμᾶς Ἰησοῦς Χριστός. ἀπόντα με καὶ πάροντα ἠγαπήσατε. ἀμοιβὴ ὑμῖν ὁ θεός, δι᾿ ὃν πάντα ὑπομένοντες αὐτοῦ τεύξεσθε.
Puisse la grâce vous combler de tous les biens : car vous en êtes dignes. Vous m’avez prodigué toutes sortes de consolations : que Jésus-Christ vous le rende ! De loin comme de près, vous m’avez témoigné votre charité. Je prie Dieu de vous en récompenser : c’est en supportant pour lui toutes vos tribulations que vous arriverez à le posséder.
10.1 Φίλωνα καὶ Ῥαῖον Ἀγαθόπουν, οἳ ἐπηκολούθησάν μοι εἰς λόγον θεοῦ, καλῶς ἐποιήσατε ὑποδεξάμενοι ὡς διακόνους θεοῦ · οἳ καὶ εὐχαριστοῦσιν τῷ κυρίῳ ὑπὲρ ὑμῶν, ὅτι αὐτοὺς ἀνεπαύσατε κατὰ πάντα τρόπον. οὐδὲν ὑμῖν οὐ μὴ ἀπολεῖται.
Philon et Rhéus Agathopus, qui m’ont suivi pour l’amour de Dieu, ont été accueillis chez vous comme des ministres du Christ Dieu : vous avez fait là une belle action. Eux aussi rendent grâces au Seigneur des consolations de toute sorte dont vous les avez comblés. Rien de tout cela ne sera perdu pour vous.
10.2 ἀντίψυχον ὑμῶν τὸ πνεῦμά μου καὶ τὰ δεσμά μου, ἃ οὐχ ὑπερηφανήσατε οὐδὲ ἐπῃσχύνθητε. οὐδὲ ὑμᾶς ἐπαισχυνθήσεται ἡ τελεία ἐλπίς, Ἰησοῦς Χριστός.
J’offre à Dieu pour vous ma vie et mes fers, (ces fers) que vous n’avez pas méprisés, dont vous n’avez pas rougi : Jésus-Christ, la fidélité même, ne rougira pas non plus de vous.
10.2 ἀντίψυχον ὑμῶν τὸ πνεῦμά μου καὶ τὰ δεσμά μου, mot à mot : mon esprit et mes liens sont votre rançon.
11.1 Ἡ προσευχὴ ὑμῶν ἀπῆλθεν ἐπὶ τὴν ἐκκλησίαν τὴν ἐν Ἀντιοχείᾳ τῆς Συρίας, ὅθεν δεδεμένος θεοπρεπεστάτοις δεσμοῖς πάντας ἀσπάζομαι, οὐκ ὢν ἄξιος ἐκεῖθεν εἶναι, ἔσχατος αὐτῶν ὢν · κατὰ θέλημα δὲ κατηξιώθην, οὐκ ἐκ συνειδότος ἀλλ᾿ ἐκ χάριτος θεοῦ · ἣν εὔχομαι τελείαν μοι δοθῆναι, ἵνα ἐν τῇ προσευχῇ ὑμῶν θεοῦ ἐπιτύχω.
Vos prières se sont envolées vers l’église d’Antioche en Syrie : venu de là, chargé de ces fers précieux devant Dieu, je salue tous (les frères) ; je ne suis pas digne de faire partie de cette église, moi, le dernier de ses membres ; c’est à la volonté de Dieu que j’ai dû cet honneur, non à mes mérites, mais à sa grâce : puissé-je, avec l’aide de vos prières, la recevoir dans toute sa plénitude, pour arriver enfin à Dieu !
11.2 ἵνα οὖν ὑμῶν τέλειον γένηται τὸ ἔργον καὶ ἐπὶ γῆς καὶ ἐν οὐρανῷ, πρέπει εἰς τιμὴν θεοῦ χειροτονῆσαι τὴν ἐκκλησίαν ὑμῶν θεοπρεσβεύτην, εἰς τὸ γενόμενον ἐν Συρίᾳ συγχαρῆναι αὐτοῖς, ὅτι εἰρηνεύουσιν καὶ ἀπέλαβον τὸ ἴδιον μέγεθος καὶ ἀπεκατεστάθη αὐτοῖς τὸ ἴδιον σωματεῖον.
Pour parfaire votre œuvre sur la terre et au ciel, votre église ferait bien d’élire, pour la gloire de Dieu, un saint ambassadeur et de l’envoyer jusqu’en Syrie féliciter les chrétiens (d’Antioche) d’avoir retrouvé la paix, recouvré leur ancienne grandeur, et vu se rétablir le corps (de leur église).
11.3 ἐφάνη μοι οὖν θεοῦ ἄξιον πρᾶγμα, πέμψαι τινὰ τῶν ὑμετέρων μετ᾿ ἐπιστολῆς, ἵνα συνδοξάσῃ τὴν κατὰ θεὸν αὐτοῖς γενομένην εὐδίαν, καὶ ὅτι λιμένος ἤδη ἐτύγχανον τῇ προσευχῇ ὑμῶν. τέλειοι ὄντες τέλεια καὶ φρονεῖτε. θέλουσιν γὰρ ὑμῖν εὖ πράσσειν θεὸς ἕτοιμος εἰς τὸ παρέχειν.
Ce serait, il me semble, une excellente œuvre d’envoyer quelqu’un des vôtres, avec une lettre, pour célébrer avec eux le calme que Dieu leur a rendu et l’heureuse arrivée au port que vos prières leur ont obtenue. Vous êtes parfaits : proposez-vous donc aussi des œuvres parfaites ; car, si vous désirez faire le bien, Dieu est prêt à vous seconder.
11.1 οὐκ ἐκ συνειδότος, peut avoir deux sens : 1° non d’après ma conscience, c-à-d non que j’ai conscience d’avoir mérité cet honneur (Funk) ; 2° non par ma coopération, et pour ainsi dire, ma complicité, non par mes mérites, c-à-d je n’y suis pour rien, je dois tout à la grâce seule (Lightfoot).
12.1 Ἀσπάζεται ὑμᾶς ἡ ἀγάπη τῶν ἀδελφῶν τῶν ἐν Τρωάδι, ὅθεν καὶ γράφω ὑμῖν διὰ Βούρρου, ὃν ἀπεστείλατε μετ᾿ ἐμοῦ ἅμα Ἐφεσίοις, τοῖς ἀδελφοῖς ὑμῶν, ὃς κατὰ πάντα με ἀνέπαυσεν. καὶ ὄφελον πάντες αὐτὸν ἐμιμοῦντο, ὄντα ἐξεμπλάριον θεοῦ διακονίας. ἀμείψεται αὐτὸν ἡ χάρις κατὰ πάντα.
Les frères qui sont à Troas vous envoient leur affectueux salut. C’est de cette ville que je vous écris par la main de Burrhus que, de concert avec les Ephésiens, vos frères, vous avez chargé de m’escorter. Il m’a procuré toutes sortes de consolations. Il serait à souhaiter que tous l’imitassent : car il est le modèle des serviteurs de Dieu. La grâce divine le récompensera de toutes manières.
12.2 ἀσπάζομαι τὸν ἀξιόθεον ἐπίσκοπον καὶ θεοπρεπὲς πρεσβυτέριον καὶ τοὺς συνδούλους μου διακόνους καὶ τοὺς κατ᾿ ἄνδρα καὶ κοινῇ πάντας ἐν ὀνόματι Ἰησοῦ χριστοῦ καὶ τῇ σαρκὶ αὐτοῦ καὶ τῷ αἵματι, πάθει τε καὶ ἀναστάσει σαρκικῇ τε καὶ πνευματικῇ, ἐν ἑνότητι θεοῦ καὶ ὑμῶν. χάρις ὑμῖν, ἔλεος, εἰρήνη, ὑπομονὴ διὰ παντός.
Je salue votre saint évêque, votre vénérable presbytérium, et les diacres, mes collaborateurs ; (je vous salue) chacun en particulier et tous en général, au nom de Jésus-Christ, au nom de sa chair et de son sang, de sa passion et de sa résurrection tant corporelle que spirituelle, au nom de votre unité en Dieu. A vous pour toujours grâce, miséricorde, paix, patience !
12.2 ἐν ἑνότητι θεοῦ καὶ ὑμῶν — Cette unité a Dieu pour principe et les Smyrniotes pour sujet ; ces mots signifient donc l’unité ou l’union des Smyrniotes entre eux conformément à la volonté de Dieu. — De même que par les mots τῇ σαρκὶ αὐτοῦ καὶ τῷ αἵματι Ignace vient de faire allusion aux doctrines des docètes sur l’incarnation, de même il fait ici allusion à leur esprit de schisme.
13.1 Ἀσπάζομαι τοὺς οἴκους τῶν ἀδελφῶν μου σὺν γυναιξὶ καὶ τέκνοις καὶ τὰς παρθένους τὰς λεγομένας χήρας. ἔρρωσθέ μοι ἐν δυνάμει πατρός. ἀσπάζεται ὑμᾶς Φίλων σὺν ἐμοὶ ὤν.
Je salue les familles de mes frères, avec leurs femmes et leurs enfants, ainsi que les vierges appelées veuves. Soyez forts par la vertu de l’Esprit ! Philon, mon compagnon, vous salue.
13.2 ἀσπάζομαι τὸν οἶκον Ταουΐας, ἣν εὔχομαι ἑδρᾶσθαι πίστει καὶ ἀγάπῃ σαρκικῇ τε καὶ πνευματικῇ. ἀσπάζομαι Ἄλκην, τὸ ποθητόν μοι ὄνομα, καὶ Δάφνον τὸν ἀσύγκριτον καὶ Εὔτεκνον καὶ πάντας κατ᾿ ὄνομα. ἔρρωσθε ἐν χάριτι θεοῦ.
Je salue la maison de Tavie ; je fais des vœux pour l’affermissement de celle-ci dans la foi et dans la charité corporelle et spirituelle. Je salue Alcé, dont le nom m’est bien cher, ainsi que l’incomparable Daphnus, Eutecnus, et vous tous, chacun en particulier. Salut en la grâce de Dieu !
13.1 τὰς παρθένους — Quelles sont ces vierges appelées veuves ? Cotelier suppose que ce sont les diaconesses. Mais cette hypothèse est inadmissible, les diaconesses elles veuves étaient deux ordres tout à fait distincts. — Pour Lightfoot, il ne s’agit ici que de veuves ; mais ces veuves, par la pureté de leur vie, méritaient le nom de vierges. — Comme le fait remarquer Funk, si telle avait été la pensée d’Ignace, il aurait interverti l’ordre des termes et dit : les veuves appelées vierges. En réalité, c’est bien de vierges qu’Ignace veut parler et de vierges qui sont appelées des veuves : il s’agit sans doute de vierges, d’un âge avancé, qui avaient été admises dans l’ordre des veuves.
13.2 Ἄλκην — Cette Alcé est sans doute la même que celle dont il est question dans le Martyre de Polycarpe, 17.2.