« Ne méprisez-pas les prophéties, mais examinez toutes choses, retenez ce qui est bon. »
Je reçois une lettre que je crois bon de citer en la modifiant légèrement ; elle me paraît avoir sa place dans cet ouvrage et la réponse que je donne plus loin sera, je l’espère, utile à certains de nos lecteurs :
… Je vous expose ici un cas troublant. Une sœur de mon Église, lors d’un culte, a déclaré publiquement de la part de Dieu qu’elle avait reçu la promesse que tel malade serait guéri de son cancer quoique le mal fût en constante progression depuis plusieurs semaines. Informé de cela, le malade accueillit cette parole d’espérance avec foi et une grande joie. Lui et toute sa famille, notamment la fille aînée, s’accrochèrent à cette promesse et la reçurent vraiment comme venant de Dieu. Hélas ! Le mal ne fit qu’empirer et l’intervention chirurgicale rendue nécessaire se solda par un échec ; finalement, le malade décéda peu après. Il est vrai que celui-ci resta confiant et serein jusqu’à la fin, mais la famille, très affectée par ce départ, semble actuellement s’être éloignée du Seigneur, ne sachant trop que (ou qui) croire. Tout cela me rend perplexe, aussi aimerais-je avoir votre avis là-dessus.
Devant ce cas douloureux, nous sommes tentés d’incriminer la sœur qui a prophétisé la guérison et surtout de lui appliquer brutalement la parole de Deutéronome 18.22, ce qui serait un manque de charité : « Quand ce que dira le prophète n’aura pas lieu et n’arrivera pas, ce sera une parole que l’Éternel n’a pas dite. C’est par audace que le prophète l’aura dite : n’aie pas peur de lui. » C’est aux anciens de l’Église d’avertir avec affection cette personne, en lui recommandant de montrer à l’avenir plus de réserve et de prudence si elle ne veut pas être un sujet de trouble pour certains. Sans doute cette sœur, au cœur sensible et généreux, prise de pitié pour le malade, a-t-elle confondu souhait personnel et pensée de Dieu. Mais ce n’est pas sur ce point qu’il faut s’attarder.
Un exemple biblique nous instruira, quoiqu’il ne concerne pas la maladie ou la guérison.
Paul est en route pour Jérusalem (lire Actes 20-21). De passage à Tyr, il séjourne une semaine au milieu d’amis chrétiens lesquels, « poussés par l’Esprit », disent au vaillant évangéliste « de ne pas monter à Jérusalem » (Actes 21.4). Arrivé à Césarée, l’apôtre se rend à la maison de Philippes où il rencontre quatre jeunes filles qui prophétisent elles aussi (21.9) ainsi qu’un prophète de renom, Agabus (Actes 11.28 et 21.10-11) ; ce dernier annonce, par une action symbolique, que les juifs livreront l’apôtre aux païens s’il se rend à Jérusalem. Même ses propres compagnons de route – dont Luc – cherchent à le dissuader de poursuivre ce voyage. Ni les larmes, ni les paroles pourtant inspirées de ses amis ne le font fléchir un instant : « C’est lié par l’Esprit qu’il part pour Jérusalem » (Actes 20.22). L’apôtre tient bon. « Et comme il ne se laissait pas persuader, note le rédacteur des Actes, nous n’avons pas insisté et nous avons dit : Que la volonté du Seigneur se fasse ! » (Actes 21.14).
Mais alors, l’Esprit-Saint donnerait-il des directives contradictoires, voire opposées ? Certainement pas ! Elles sont différentes parce que les situations des uns et des autres sont différentes. L’entourage, on le comprend, veut épargner à un serviteur qui lui est cher, les tribulations les plus graves. C’est donc l’amour qui anime ses amis et il ne peut en être autrement s’ils sont “poussés par le Saint-Esprit”. Paul, qui ne fait aucun cas de sa personne, voit les choses sous un autre angle, car son unique souci est l’œuvre de Dieu qu’il doit poursuivre en dépit des dangers qui le menacent. Les frères ont d’ailleurs bien compris sa position, aussi se soumettent-ils sans insister (v. 14).
L’étrange récit du chapitre 13 du premier livre des Rois confirmera ce qui précède : Un homme de Dieu, envoyé « pour crier contre l’autel » dressé à Béthel, reçut de l’Éternel des ordres précis concernant son séjour dans cette cité (v. 16-17). Sur le chemin du retour, il fut rattrapé par un vieux prophète qui lui dit : « Moi aussi, je suis prophète comme toi ; et un ange m’a parlé de la part de l’Éternel, et m’a dit : Ramène-le avec toi dans ta maison, et qu’il mange du pain et boive de l’eau. Il lui mentait… » (v. 18). L’homme de Dieu, hélas ! se laissa convaincre, et en obéissant au faux prophète, il transgressa les ordres reçus d’en-haut et connut alors une fin tragique : « il fut rencontré dans le chemin (du retour) par un lion qui le tua » (v. 24).
Que conclure de ces faits ? Que ce ne sont pas les frères ou les sœurs, fussent-ils les plus spirituels et authentiquement inspirés par le Saint-Esprit, qui doivent dicter notre ligne de conduite. Les écouter et les prendre au sérieux est une chose, exécuter ce qu’ils disent comme parole de Dieu “pour nous”, en est une autre. Beaucoup de gens savent ce que nous devrions faire et certains n’hésitent pas “à nous faire marcher” en disant avec beaucoup d’assurance : « Dieu m’a dit que vous devez… » Prudence, prudence, qu’il s’agisse de guérison ou non ! Trop de personnes crédules se sont laissées influencer et ont été entraînées par ce biais dans le mariage, dans le ministère, dans des voies qui ne leur convenaient pas, et les résultats n’ont pas toujours confirmé que le message reçu venait du Seigneur. Écoutons l’Écriture (voir le texte cité en exergue, 1 Thessaloniciens 5.20) qui nous conseille d’examiner les propos de ceux qui affirment parler de la part de Dieu, pour en retenir ce qui paraît nous concerner. Mais en règle générale, nous ne devrions agir que selon les directives reçues personnellement d’en-haut, et cela en toute liberté et en toute conviction.
Une question se pose ici : Comment peut-on savoir si une promesse de guérison reçue par tel membre de l’Église est authentique ? Et jusqu’à quel point peut-on se fier à ses paroles ? Je pense qu’il est bon de considérer, sans esprit de jugement, la personne déclarant être porteuse d’un message du Seigneur. Est-elle humble, paisible, respectueuse de la liberté d’autrui ? Montre-t-elle un réel intérêt pour ceux qui souffrent ? Au contraire, a-t-elle beaucoup d’assurance lorsqu’elle parle ? Promet-elle souvent la guérison autour d’elle ? Dans le passé, ses prédictions se sont-elles réalisées ? Son don est-il reconnu dans l’assemblée ? Vit-elle en harmonie avec les anciens et les membres de l’Église ? Qu’en est-il de sa propre famille ? etc.
Toutefois, si l’on ne veut pas courir le risque de juger celui qui déclare avoir reçu un message pour nous, il est préférable de se placer tout simplement devant Dieu pour chercher à discerner sa volonté ; et si je suis hésitant ou troublé, je me confierai à un ancien expérimenté dont les conseils me seront précieux. Quoiqu’il en soit, je ne mettrai pas en veilleuse le bon sens que Dieu m’a donné.
Questions :