Propos sur le temps

LE JOUR DU REPOS

Souviens-toi du jour du sabbat pour le sanctifier.

Exode 20.8

Au soir de sa vie, un croyant qui avait fidèlement observé le jour du repos affirmait qu’on accomplissait plus de besogne en six jours de travail, suivis d’une journée de halte, qu’en sept jours d’une activité ininterrompue. C’est certainement vrai, et le témoignage suivant vient appuyer cette assertion. Au siècle dernier, un pionnier américain des États du sud s’engagea à la tête d’une caravane dans des régions désertiques en direction de la côte ouest (ceci se passait bien avant la construction de la ligne de chemin de fer reliant l’Atlantique au Pacifique). « Au matin du premier dimanche de ce long voyage, raconte-t-il, je laissais paître les chevaux tandis que le personnel se détendait et qu’en famille nous nous consacrions à la louange et à la lecture de la Bible. Or, une partie de la caravane décida de poursuivre la route, afin d’arriver plus vite au but. Ils décampèrent sans nous ce dimanche matin, non sans avoir ironisé sur notre façon d’agir. Je ne pus les rejoindre que le jeudi de la semaine suivante, c’est-à-dire dix jours plus tard seulement. Et parce que notre caravane fit halte trois jours après (donc le troisième dimanche), les autres reprirent sur nous l’avantage, mais pour peu de temps. Déjà le mardi nous les avions rattrapés. Dès lors, nous eûmes toujours de l’avance sur eux, l’écart se creusant au fil des jours. Nous arrivâmes au terme de notre voyage deux semaines avant eux. Notre personnel, ainsi que les montures, étaient en excellent état physique, tandis que nos compagnons de départ avaient perdu des chevaux en cours de route, la plupart des hommes étant littéralement exténués après avoir parcouru 4 à 5000 km dans des conditions difficiles. »

C’était folie de vouloir couvrir une telle distance sans se ménager un temps suffisant de repos ! Ce témoignage, certainement authentique, prouve, si c’était nécessaire, que Dieu est sage et plein de sollicitude à l’égard de ses créatures. Il honore qui l’honore, lui, sa Parole et… son jour. L’homme est déraisonnable qui brûle « la chandelle par les deux bouts ». Se reposer est un devoir élémentaire, dont l’importance est tant de fois soulignée dans l’Écriture. Notre corps n’est-il pas à Dieu qui l’habite par l’Esprit Saint (1 Corinthiens 3.16-17) ? Raison suffisante pour en prendre soin. (Le lecteur ne s’étonnera pas de voir ce chapitre inséré dans la deuxième partie de notre livre, intitulée « Le temps perdu ». Nous avons cru devoir le placer ici, parce que certains chrétiens prétendent – à tort, naturellement – que se livrer au repos, c’est gaspiller son temps. Le récit qui précède est la réponse à ce langage erroné).

Le repos occupe une grande place dans la Bible. En plus du sabbat, Israël était appelé à faire relâche lors des fêtes annuelles. Elles étaient nombreuses et duraient parfois huit jours, comme la fête de Pâque ou celle des Tabernacles (Lévitique 23.5-8, 34-36). En tout, 69 jours (sabbats et jours fériés) étaient mis à part afin que l’homme (riche ou pauvre) se repose et pense à son Dieu. En outre une année sur sept, ainsi que la cinquatième année (dite du jubilé) devaient être consacrées au repos. Ainsi, un homme de cinquante ans qui observait strictement la Loi de Dieu pouvait, outre les 69 jours de congés annuels, passer huit années complètes de sa vie à jouir sereinement des bienfaits de l’Éternel (lire Lévitique 25.21). Signalons que lors de la fête des Tabernacles, le peuple passait sous des tentes une semaine de plein air dans la banlieue de Jérusalem. Du camping avant la lettre. Notre génération n’a rien inventé : la législation mosaïque était bien en avance sur la nôtre. Nous sommes loin de la vie d’esclavage que s’imposent les humains à cause de leur âpreté au gain, de leur insatiabilité ou simple- ment de leur manque de confiance en la Providence. L’homme n’est ni une machine, ni une bête de somme. Le repos lui est vraiment indispensable, car je ne suis vraiment fort et maître de moi-même que dans un corps détendu et bien portant.

Jésus connaissait la valeur du repos, lui qui a ordonné à ses disciples de le suivre à l’écart pour se reposer un peu (Marc 6.31). Ces hommes, envoyés deux par deux en mission en Galilée, étaient revenus pleins d’enthousiasme, émerveillés d’avoir pu opérer des miracles en son nom. Ils étaient prêts à repartir, mais telle n’était pas la pensée du Maître. L’immensité des besoins, les délivrances opérées ne les autorisaient pas à se jeter sans attendre dans une nouvelle action. Une halte bienfaisante s’imposait, Le surmenage n’est bon pour personne et la fatigue accumulée rend l’homme plus vulnérable. Satan le sait. Pressés par la foule, et n’ayant pas même le temps de manger, les disciples avaient un sérieux besoin de calme. Leur équilibre psychique et leur santé spirituelle l’exigeaient. Et puis, le repos dans la compagnie du Seigneur rend fort quand le découragement ou l’orgueil spirituel nous guettent.

Le repos n’est jamais une perte de temps s’il est vécu en étroite communion avec le Christ. C’est justement à l’écart dans un lieu désert que les douze voient arriver, venant de tous côtés, des gens avides d’entendre et de recevoir. Et c’est dans ce même lieu qu’il sera accordé aux disciples de nourrir la multitude (v. 41-42). D’abord recevoir pour être en mesure de donner aux autres ; c’est un principe toujours valable.

Un jour sur sept. L’importance du repos hebdomadaire ne peut échapper à celui qui se nourrit de la Parole. Si le Créateur a jugé bon d’instituer le sabbat (1), c’est qu’il estime ce repos nécessaire à l’homme. L’Éternel ne s’est-il pas reposé le septième jour de toute son œuvre (Genèse 2.2) ? Avez-vous noté avec quelle insistance l’Ancien Testament ordonne et rappelle l’observation du sabbat ? C’est le quatrième commandement, le plus détaillé, gravé sur la pierre du doigt de Dieu. De lourdes menaces pèsent sur quiconque transgresse ce commandement. Un Israélite a été lapidé pour avoir ramassé un peu de bois ce jour-là (Nombres 15.32-36 ; lire Néhémie 13.15-22).

(1) Les croyants de la Nouvelle Alliance ne sont pas tenus d’observer à la lettre le sabbat. Selon l’apôtre, il n’était que « l’ombre des choses à venir, mais la réalité est celle du Christ » (Colossiens 2.17). Comme d’aucuns le croient, ce n’est pas le dimanche qui correspond au sabbat, mais « aujourd’hui » (selon Hébreux 4.7), Parlant du repos du sabbat, l’auteur de l’épître déclare : « Dieu fixe de nouveau un jour : Aujourd’hui »… autrement dit, chaque moment de ma vie est un temps de repos dans le Seigneur (le repos des œuvres, par la foi). Naturellement, pour la commodité et pour favoriser le rassemblement des chrétiens, il a été mis à part le jour qui commémore celui de la résurrection. C’est pourquoi, en toute liberté, certains distinguent entre les jours (les observateurs du sabbat ou du dimanche) alors que d’autres les estiment tous égaux. « Que chacun soit pleinement convaincu dans sa propre pensée » (Romains 14.5-6). Le repos hebdomadaire était prescrit aussi bien pour les bêtes que pour les gens (Exode 23.12).

Dieu a institué le sabbat pour l’homme (Marc 2.27), c’est-à-dire pour son bien physique, psychique et spirituel. pourvu qu’il l’observe comme Dieu l’entend, c’est-à-dire telle une fête en son honneur et célébrée avec joie et détente dans le foyer et l’église. Cette halte, bénéfique pour chacun, ne sera pas du temps perdu. Aussi, gardons-nous de faire chorus avec ceux, qui proclament : « Je me reposerai au ciel. »

Ah ! Si nous respections le jour du repos comme les juifs en Israël respectent le sabbat, nos nerfs seraient un peu moins tendus ! Pensez au calme extérieur, impressionnant, qui nous saisirait si, du coucher du soleil au lendemain soir, tout au long du dimanche, on n’entendait plus aucun bruit de motos, d’autos, de trains, d’avions ou de télévision. Quel bienfait ce serait pour nos cerveaux fatigués, nos oreilles abasourdies et nos yeux qui ont parfois tant de peine à se fermer pour entrer dans un sommeil réparateur !

Le repos de la nuit. Le Seigneur a créé la nuit pour que l’homme limite son activité, car il est vital de se livrer au repos. L’énergie perdue au cours d’une journée de travail doit être récupérée si l’on veut être fort. C’est un devoir de chrétien. Ajoutons que les soirées tardives sont l’implacable ennemi du recueillement. Si vous croyez pouvoir causer avec vos amis jusqu’à deux ou trois heures du matin avec l’intention de vous lever tôt et en bonne forme pour un véritable face-à-face avec Dieu, vous vous trompez. C’est une impossibilité physique. Priez donc la veille pour un lever matinal et priez le matin pour un coucher raisonnable. Qui traîne le soir traînera certainement aussi le lendemain et perdra plus de temps qu’il ne croit. C’est pourquoi décidez de votre repos, avec sagesse.

Suis-je agité le soir et peu disposé à m’endormir ? Dans ce cas, il serait sage de m’en ouvrir au Seigneur. La veille de sa rencontre avec Farel, le jeune Calvin à genoux s’écria : « Que mon dormir soit à la gloire de Dieu ! » Le sommeil viendra d’autant plus vite et la nuit sera d’autant plus sereine que j’éviterai, dans l’heure qui précède, d’aborder des problèmes épineux avec mon conjoint. Je refuserai également d’écarquiller les yeux devant un drame noir à la télévision. Que les derniers moments de la journée soient paisibles, donnés au Seigneur et volontairement débarrassés des soucis. Les tracas de la journée, s’ils n’ont été évacués, nous réveillent aux heures où les choses prennent des proportions inquiétantes : la santé d’un bébé fragile, les fréquentations de l’aîné, ses rentrées tardives, les fins de mois difficiles, la voiture qu’il faut réparer. (copiez et apprenez par cœur 1 Pierre 5.7 : Déchargez-vous sur lui de tous vos soucis, car il prend soin de vous).

Et si décidément le sommeil ne vient pas, au lieu de compter des moutons, comptez plutôt sur le Berger. Imitez le psalmiste qui chantait : Je bénis l’Eternel, qui me conseille ; la nuit même mon cœur m’exhorte (Psaumes 16.7). L’acclamation aux lèvres, ma bouche te louera. Lorsque je me souviens de toi sur ma couche, je médite sur toi pendant les veilles de la nuit, car tu es mon secours et je crie de joie à l’ombre de tes ailes (Psaumes 63.6-8). Mon âme te désire pendant la nuit, déclarait de son côté le prophète (Esaïe 26.9). Les heures d’insomnie seront moins pénibles si elles servent à la louange ou à l’intercession. Autant d’occasions à saisir pour « racheter le temps ».

Les jours favorables. Dans l’épître aux Éphésiens, l’apôtre qualifie certains jours de mauvais (Éphésiens 6.13). Le contexte nous permet d’affirmer qu’il s’agit des jours où les puissances adverses se déchaînent pour entraîner le croyant dans la désobéissance. N’avez-vous pas connu ces heures de combat où vous avez peut-être cédé à la tentation ? Parler de mauvais jours, c’est admettre qu’il en existe de bons, de propices pour revêtir toutes les armes de Dieu, afin de pouvoir tenir ferme contre les manœuvres du diable (v. 11). Le soldat n’endosse pas l’armure protectrice sur le champ de bataille, lorsque le combat fait rage (c’est le mauvais jour) ; il se prépare avant que s’engage la lutte (avant l’assaut, c’est le moment favorable).

Pour se justifier, des chrétiens se plaignent :

— Je suis trop occupé et vraiment harassé après mes journées de travail, pour consacrer du temps à la prière et à l’étude de la Bible. Je m’endors dès que j’ouvre la Bible ou que je ferme les yeux pour parler au Seigneur…

C’est certainement vrai. Cependant, à de tels arguments il convient de répondre :

— Soit. Mais le dimanche ou les jours de congés (ce sont des jours favorables), que faites-vous ? Quel temps consacrez-vous à Dieu et à sa Parole ? Avez-vous le souci de vous ressourcer ? De vous préparer pour être fort au moment de la tentation ?

Dans notre monde tourbillonnant, il est impérieux de faire halte en cherchant à se détendre vraiment et avec bonne conscience. Toutefois, ce temps sera perdu si nos congés sont vécus sans but, dans la trépidation ou la mollesse, l’esprit absent. Se reposer, c’est substituer à son activité habituelle une autre activité, sans doute agréable parce qu’elle distrait et détend, surtout précieuse parce qu’elle rapproche de Dieu et des autres.

Que notre temps de repos soit à sa gloire !

QUESTIONS

  1. Que faites-vous de vos dimanches ? De vos jours de congé ? Avez-vous l’impression qu’ils ont été bien employés ?
  2. Quelle place tient la lecture de la Bible ou la louange durant ce temps de repos ? Êtes-vous prêts à changer une partie de votre programme pour vaquer à la prière ?
  3. Consacrez-vous du temps à votre Seigneur ? Aimez-vous sa présence ?

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