Fondé sur le Roc

Chapitre 11

Expériences personnelles de la fin de mon stage à Glasgow

Cette deuxième session de 1905-1906 fut très importante. Une volée d’élèves aînés étaient partis. C’était à nous, maintenant les aînés, de nous efforcer de conduire les élèves plus jeunes dans la voie de la bénédiction qui nous avait été donnée…

Peu de temps après le commencement de la session, il me fut accordé un privilège bien spécial. Une Eglise cherchait quelqu’un à qui puisse être confiée la responsabilité d’une œuvre d’évangélisation dans les bas-fonds. Ce district de Partick où se trouvaient de grands chantiers de constructions navales était surpeuplé, et en partie d’Irlandais catholiques. Les rues étaient étroites, elles abondaient en cafés, en habitations malsaines, vrais repaires de péché. On me remit donc la charge de cette Mission et du travail qui en dépendait : réunions et visites. C’est ainsi qu’à côté de mes études, tout mon temps fut pris. Je me fis aider par mon ami Mitchell et par d’autres camarades, car j’étais libre d’organiser les choses comme je l’entendais : les réunions de prière, les réunions d’enfants, celles pour mères, l’évangélisation et les réunions en plein air.

Nous nous attachâmes rapidement à cette population, et rapidement aussi l’Esprit de vie se fit sentir dans la Mission. Nous étions bénis dans notre travail, les âmes se convertissaient, les chrétiens s’affermissaient. Le district finit par nous connaître et nous fûmes admis par cette population plutôt hostile et méfiante. La misère était profonde et le péché faisait de grands ravages. Pour remédier à cette immense détresse, il était évident qu’il fallait l’immense amour de Dieu, et rien de moins ! Je m’efforçais de maintenir dans ce milieu si différent et difficile l’esprit de réveil accordé l’année précédente à l’Ecole Biblique. Nous organisâmes des cortèges dans le district, les membres de la Mission y étaient convoqués d’office. Chacun devait être prêt à rendre son témoignage, et ce n’était pas peu de chose pour tous ces gens que de parler devant leurs voisins et leurs connaissances, d’autant plus que beaucoup venaient d’être relevés d’une vie de boisson et de péché.

Nous étions appuyés par une famille de sept enfants dont le père et la mère, M. et Mme Buchan, étaient des gens de prière. La mère connaissait la valeur de l’intercession. Toute la famille se convertit ; quelques-uns des enfants devinrent missionnaires ; d’autres furent tués lors de la guerre de 1914-1918.

Toute l’expérience acquise dans ce travail abondant et varié me fut d’une grande utilité plus tard. J’y appris la souplesse, la faculté d’adaptation aux circonstances, et surtout j’appris à connaître le cœur de l’homme et son immense besoin de la grâce de Dieu. J’appris à ne désespérer d’aucun cas, à croire que l’Evangile de Christ est la puissance de Dieu pour tous ceux qui croient ; car Il n’éteint pas le lumignon qui fume, Il ne brise pas le roseau froissé.

Dans un tel travail, on touche du doigt la puissance de la Parole divine dans l’âme humaine. On a la démonstration du fait que le monde n’est pas attiré à l’Evangile par des soirées récréatives ou théâtrales, par les divertissements qu’imaginent les œuvres ou les Eglises qui confessent ainsi leur faillite, et qui ne remplissent plus leur mission apostolique. Les âmes n’ont pas besoin d’être intéressées ou distraites, elles ont besoin d’être sauvées. Il leur faut du pain, non des pierres. Dieu a donné à Son Eglise un seul message, celui de Sa Parole divine. Il lui a donné une seule puissance, celle de Son Saint-Esprit qui rend témoignage de la Croix de Jésus-Christ. Pourquoi vouloir autre chose ? Vouloir autre chose, c’est être infidèle à Celui qui nous a rachetés.

Pendant tout le temps où je m’occupai de cette Mission, tout divertissement en fut banni. A mon départ, je fus heureux de savoir que mon successeur était un jeune homme qui ne voulait savoir autre chose que Jésus-Christ et Lui crucifié.

C’est ainsi que dans cette activité, le Père céleste donna continuité à la grâce reçue lors de la première session. Il en fut de même de la plupart des autres élèves. L’œuvre du Saint-Esprit continuait dans nos cœurs en s’approfondissant. Les manifestations extérieures diminuaient, mais l’eau vive pénétrait dans le sol de nos vies. Vivre de manifestations ou d’expériences devient à la longue malsain et dangereux, car alors immanquablement les facultés psychiques se développent au détriment de la vie de l’esprit. Alors le chrétien, sans qu’il s’en doute, s’ouvre aux esprits séducteurs qui savent si bien se dissimuler dans les choses les plus saintes. Mais le travail pratique dans ces terribles bas-fonds et l’étude continue de la Parole nous sauvegardèrent de toute déviation. Les « signes » qui nous furent accordés furent de remarquables exaucements de prière ; les « miracles » furent la transformation des vies, des épaves converties en chrétiens vivants qui rendaient témoignage. Telles sont en effet « les plus grandes œuvres » que Jésus-Christ a promises à ceux qui croiraient en Lui.


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C’est à la fin de cette seconde session que se placent trois expériences spirituelles qui devaient avoir de grandes conséquences dans ma vie. A deux reprises dans la tranquillité de ma chambre et une fois dans la prière avec un de Ses serviteurs, le Seigneur me souligna tels passages de Sa Parole qui précisèrent d’une façon remarquable la vocation qu’Il me destinait.

Un soir, à genoux dans ma chambre, je lisais le texte de l’Evangile selon Jean, chapitre 14.16-18 : « Je prierai Mon Père, qui vous donnera un autre Consolateur, afin qu’Il demeure éternellement avec vous, savoir, l’Esprit de vérité que le monde ne peut recevoir, parce qu’il ne Le voit point et ne Le connaît point ; mais vous Le connaissez, parce qu’Il demeure en vous et qu’Il sera en vous. Je ne vous laisserai point orphelins, Je viendrai à vous ». Je fus arrêté par ces mots : « Vous Le connaissez parce qu’Il demeure avec vous et qu’Il sera en vous… Je ne vous laisserai pas orphelins, Je viendrai à vous ». Sans aucune autre manifestation que la conviction que le Seigneur me parlait par Sa Parole, je fus conscient de la présence même du Saint-Esprit. Je connaissais déjà la doctrine de la personnalité du Saint-Esprit ; j’avais déjà fait l’expérience de Sa puissance ; mais ce soir-là, Il Se fit connaître à moi, Lui, le Saint-Esprit, d’une façon si précise que je ne pourrai jamais l’oublier.

Je compris dès ce moment que la présence, le revêtement et la communion de Dieu le Saint-Esprit devaient être, dans l’esprit du croyant, une réalité tout aussi certaine que ne le fut aux disciples la présence et la communion de Jésus-Christ, pendant les jours de Sa chair. C’est de nouveau par la foi que je saisis cette bénédiction, sans aucun signe ; car vouloir autre chose, c’est neutraliser la foi, c’est faire appel à un élément spirituel ou psychique plein de dangers.

A notre conversion, nous sommes engendrés par le Saint-Esprit ; dès lors, nous sommes scellés par Lui jusqu’au jour de la rédemption ; mais à mesure que le chrétien croît dans Sa grâce et dans Sa connaissance, il apprend à connaître les choses profondes de Dieu. Il apprend à connaître qui est Celui qui l’habite, il comprend son propre besoin du revêtement de puissance pour le service — le tout étant un fruit de l’œuvre de Christ à la Croix.

Une grande espérance remplit mon cœur ce soir-là. Je savais que tout le long du chemin inconnu qui s’ouvrait devant moi, Il ne me laisserait pas orphelin, Il ne me laisserait jamais seul. D’avance Il savait toutes les luttes, les difficultés que rencontrerait l’accomplissement de Son plan et de Sa volonté pour ma vie… « Vous Le connaissez… Il sera en vous » me suffisait. En effet, Il m’a pleinement suffi au travers de tout.


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Peu de temps après, j’étais de nouveau seul dans ma chambre, le soir, à genoux, lisant ma Bible. Les grandes vagues de l’Esprit de Dieu avaient passé sur ma vie, me préparant aux profondes impressions reçues au contact des âmes perdues dans les bas-fonds. Les ambitions spirituelles et le zèle de l’Evangile connus déjà à Edimbourg avaient trouvé leur but, leur pierre de touche, le moyen de s’exprimer. L’amour des âmes devenait toujours plus grand en moi et ne se limitait pas au district dont j’étais responsable. Je savais bien que le besoin de l’Evangile qui existait dans ce district se multipliait à l’infini ailleurs. Je savais « que le monde entier gît dans le malin ». Les limites, Dieu les avait enlevées ; en nous accordant la grâce du réveil, Il avait élargi nos cœurs ; Il nous avait donné de goûter déjà quelque chose de la puissance de Son Esprit à l’œuvre dans le monde.

Ce soir donc, avant de me coucher, je fus arrêté par les versets 14 et 15 de Genèse 13. « Et l’Eternel dit à Abraham (après que Lot se fut séparé d’avec lui) : lève maintenant les yeux, et regarde du lieu où tu es, vers le septentrion, le midi, l’orient et l’occident ; car Je te donnerai, et à ta postérité pour jamais, tout le pays que tu vois. »

Dans la tranquillité la plus absolue, avec un sentiment spécial de paix divine, je relus ces paroles. Je ne voyais plus Glasgow, ni mon district aimé de Partick, ni même mon pays, mais je fis une expérience presque impossible à décrire dans sa simplicité et sa précision. La voix de la Parole de Dieu me disait : « Lève maintenant tes yeux vers le septentrion et le midi, vers l’orient et l’occident ». Par Sa grâce, je le fis en esprit et je sus que Son Esprit me faisait embrasser le monde entier, me faisait voir les extrémités de la terre et donnait comme limite à mon service pour Dieu le nord, le sud, l’est et l’ouest. Je sus dès ce moment-là que Sa Parole me disait : « Tout ce que tu vois, Je te le donnerai, et à ta postérité, pour jamais. »

Cette expérience était si réelle et le calme qui l’accompagnait si grand, qu’immédiatement je rendis grâces à Dieu pour ce don qu’Il me faisait, et pour cette promesse que ma postérité spirituelle recevrait la même vocation. Dès ce moment, je sus aussi que je ne resterais pas en Ecosse, bien que je m’attachais de plus en plus à ce champ de travail. Ce soir-là fut créée en moi une conviction que les années ont approfondie et que les luttes ont affermie. Il arrive un moment où Dieu ouvre l’esprit de celui qui Le suit aux besoins du monde qu’Il a tellement aimé, où Il lui fait voir ces multitudes qui sont sans Dieu et sans espérance, où Il met devant ses yeux cette vision qui n’a d’autres limites que « le nord, le sud, l’est et l’ouest », « les extrémités de la terre », « toute créature humaine »… Et c’est inspiré par cette expérience que, quelques mois plus tard, j’arrivai en Suisse.

Mais « Ses pensées ne sont pas nos pensées, et nos voies ne sont pas Ses voies ; car autant les cieux sont élevés par-dessus la terre, autant Ses voies sont élevées par-dessus nos voies, et Ses pensées par-dessus nos pensées ». La même volonté divine qui avait précisé Sa vocation pour ma vie n’a pas permis ensuite à l’œuvre de l’Action Biblique de se replier sur elle-même, et de connaître d’autres limites que celles que le Seigneur avait fixées. « Comme l’aigle, pour exciter ses petits à voler, étend ses ailes, voltige sur eux, les reçoit et les porte sur Ses ailes, l’Eternel seul m’a conduit. » J’avais pensé aux Indes, mais Dieu en avait jugé autrement. Il ne voulait pas qu’une seule vie partit pour les Indes, mais plusieurs, comme résultat de l’expérience de ce soir-là. Combien il est bon d’être dans les mains d’un tel Maître, d’être conduit dans Son plan qu’Il communique peu à peu !

Mais avant que l’œuvre ne pût connaître son extension missionnaire, il fallait qu’elle reçût des fondements de saine doctrine. C’est ce qui conduisit à la lutte contre le modernisme en Suisse romande, lutte qui réveilla tout ce qui n’était ni franc ni loyal, comme nous l’avons vu. Mais ni les hommes, ni celui qui les inspirait ne purent arrêter et endiguer le mouvement. Le Seigneur avait donné cette promesse au moment précis où se dessinait le réveil en Suisse : « J’ai ouvert devant toi une porte que personne ne peut fermer. »

Aujourd’hui, la grande carte murale de la salle des cours de l’Ecole Biblique de Genève est là pour prouver la fidélité de Dieu. Mais j’affirme avec conviction que cette diffusion de la Parole divine parmi les non-atteints aurait pu être beaucoup plus grande si, au lieu de s’y opposer, de la critiquer ou de l’imiter, les chrétiens s’étaient ouverts à cette même vision, du même lieu, aux mêmes conditions… le lieu de l’autel où cette vision fut accordée à Abraham (Genèse 13.4, 14). Toutefois ce n’est pas trop tard ; le Seigneur n’est pas encore revenu, et l’œuvre qu’Il a donnée existe pour le monde, pour toute l’Eglise et particulièrement pour toute la jeunesse. « Pour nous, nous sommes vos serviteurs. » La parole de Genèse 13.14, 15 que le Seigneur me donna il y a trente-six ans, Il la donne encore aujourd’hui à Son œuvre, et elle nous inspirera et nous conduira jusqu’aux portes du ciel.

C’est donc en plein réveil du Saint-Esprit que furent posées les bases de l’Action Biblique, et chacune de ses branches a puisé sa sève dans les racines et le sol fertile de cette plénitude de vie que Dieu donna à Glasgow. L’arbre n’a pas été planté à la hâte ; ses racines sont saines, son fruit est bon. Dieu seul a la gloire de tout le fruit qu’il a porté malgré les intempéries et tout ce que l’ennemi de Dieu et des âmes a tenté pour le détruire. Même la guerre n’a pu endiguer la force de sa vitalité et l’épanouissement de sa vocation.

C’est ainsi qu’au cours de ces dernières années, Dieu a confié à l’Action Biblique la grande et solennelle responsabilité de l’édition des Saintes Ecritures pour les pays en guerre et dans lesquels sévissait la famine de la Parole de Dieu. Par ce moyen, le travail mondial des Maisons de la Bible s’est affirmé et développé. Et tout cela n’est qu’un commencement : « Si tu crois… tu verras de plus grandes choses », ainsi que tous Ses enfants qui L’aiment en sincérité et en vérité.


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Juste avant de quitter Glasgow, je fis une troisième expérience spirituelle précise. Bien qu’élevé dans la foi saine et stricte de l’Eglise presbytérienne, ce dont je reste toujours reconnaissant, je devins conscient, au cours de mon étude de la Parole, de la volonté du Seigneur à mon égard au sujet du baptême par immersion. Trois difficultés se dressaient sur mon chemin ; toutes trois furent écartées.

Je désirais premièrement avoir l’approbation de mes parents. Ils me laissèrent libre, et ma mère m’assura de ses prières.

J’avais un ami, pasteur d’une Eglise baptiste où j’allais souvent. Il consentit volontiers à me baptiser sans que je fusse inscrit dans le registre de son Eglise, ce qui résolvait la deuxième difficulté. La parole de l’apôtre Paul : « Quoique je sois libre à l’égard de tous, je me suis assujetti à tous, afin de gagner plus de personnes » (1 Corinthiens 7.19), me traçait la ligne à suivre.

La troisième difficulté concernait l’engagement pris avec mon ami, le Rev. MacCheyne Paterson, qui appartenait à l’Eglise nationale. Maintenant que la question du baptême se posait pour moi, je devais en toute droiture en avertir le Comité. Je ne voyais pas comment la chose pourrait s’arranger, car je savais que je ne pourrais pas, sur le champ missionnaire, faire abstraction de ma conviction concernant le baptême des enfants et des adultes. Mais la session allait se terminer, et il fallait se décider. J’écrivis une lettre au Comité et, comme il fallait s’y attendre, la réponse m’apprit que le plan de départ pour les Indes était sérieusement compromis. Cependant je sentais que je devais avant toute chose obéir à ce que Dieu me demandait et laisser mes plans entre Ses mains, de même que les soucis du lendemain.

C’est un dimanche soir, le 17 juin 1906, que mon baptême eut lieu dans l’église remplie. Le soir précédent, le pasteur qui m’avait convoqué dans son bureau pour prier avec moi m’avait dit : « Mon frère, j’ai demandé au Seigneur de me donner pour vous un message de Sa Parole, un message qui soit Sa bénédiction pour votre baptême et votre vie, et voici ce qu’Il m’a donné : « Toi donc, ceins tes reins, et te lève, et dis-leur toutes les choses que Je te commanderai ; ne crains point de paraître devant eux, de peur que Je ne te mette en pièces en leur présence. Car voici, Je t’ai établi aujourd’hui comme une ville fortifiée, comme une colonne de fer, et comme une muraille d’airain, contre tout ce pays, savoir, contre les rois de Juda, contre les principaux du pays, contre ses sacrificateurs, et contre le peuple du pays. Et ils combattront contre toi ; mais ils ne seront pas plus forts que toi, car Je suis avec toi, dit l’Eternel, pour te délivrer » (Jérémie 1.17-19).

Quand Dieu parle, Il sait en vue de quoi Il le fait. Quand Il donne des promesses, Il sait pour quelles situations et circonstances Il les donne. Mais quand Il agit ainsi, il incombe à Ses enfants de mettre en toute simplicité leur confiance en ce qu’Il dit et d’y conformer leur vie. Ainsi naît la foi qui remue les montagnes, qui demeure ferme, comme voyant ce qui est invisible. Telle est « la loi de la foi » qui régit toute vie chrétienne, mais — il est important de s’en souvenir — qui doit être mise à l’épreuve.

Je ne savais pas alors qu’au moment où le chemin deviendrait de plus en plus étroit, que l’opprobre et l’opposition se feraient sentir, des amis même le quitteraient pour suivre un chemin plus large et populaire. Je ne savais pas ce que peuvent faire les intrigues et jusqu’où la déloyauté peut se développer en pleine Eglise professante. Je ne connaissais pas alors la douleur intime que provoque l’abandon de compagnons de service en qui l’on avait mis sa confiance. Je ne savais pas non plus que c’est dans la solitude que le Seigneur révèle des sentiers de communion avec Lui-même, et que c’est par l’opprobre et l’ignominie qu’on goûte la joie céleste de Celui qui S’est assis à la droite du Trône de Dieu (Hébreux 12.1-3). Je ne savais pas non plus que ceux qui, consciemment ou inconsciemment, se livrent à Satan pour s’opposer à l’œuvre de Dieu servent involontairement de marchepied permettant au chrétien d’aller plus loin et de monter plus haut, selon le Psaume 110.

Ce que je savais alors, c’est que c’était avec conviction que mon ami me disait avoir reçu du Seigneur ce message pour moi. Plus tard, quand sonna l’heure de la lutte, cette parole revécut en moi comme si on me l’avait donnée le jour même. Dieu l’avait plantée dans mon cœur comme une semence qui devait germer en temps voulu. Fort de cette promesse, je pus continuer ma route et le combat sans que des doutes et des hésitations ne me vinssent à l’esprit. Je savais que cette parole m’avait été donnée comme celles d’Actes 1.8 et de Genèse 13.14, 15. Ce n’était pas sans raison que je l’avais reçue au moment de mon baptême, acte par lequel le croyant s’identifie à Christ dans Sa mort et Sa résurrection.

Ce soir-là, Dieu avait en vue la lutte qui devrait être livrée pour « la foi une fois délivrée aux saints ». Et quand, en Suisse romande, il fallut qu’une voix désintéressée s’élevât contre l’apostasie qui se cachait sous le mot « évangélique », la trompette a sonné et le son n’en a pas été confus. Le but fut atteint. Les années qui ont suivi ont justifié le témoignage et l’heure à laquelle il devait être rendu. Une heureuse réaction positive s’ensuivit une vingtaine d’années plus tard. Dieu pose Ses fondements et prend d’avance Ses mesures. Il est le Premier et le Dernier. Ses œuvres Lui sont connues de toute éternité. Il les prépare afin que Ses enfants s’y laissent conduire.

Cette parole de Jérémie, qui me fut donnée dans ces circonstances, fut un des textes de vocation de l’Action Biblique auquel toute l’œuvre eut le privilège et la responsabilité de demeurer fidèle.

Oui, le Seigneur connaît l’avenir. Il sait à quoi Il destine ceux qu’Il appelle. Il sait ce que Sa grâce peut faire d’eux, car tout est par grâce. N’a-t-Il pas dit à Ses disciples : « Je vous ai dit ces choses, afin que, quand le temps sera venu, vous vous souveniez que Je vous les ai dites » ? (Jean 16.4.) Equipé par Sa Parole, fondé sur le roc de Ses promesses, le chrétien est prêt à tenir ferme au moment de l’opposition, sans fléchissement ni hésitation.


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Le dernier jour de la session, les élèves rendirent témoignage, disant où ils iraient travailler, dans quel pays ou quel ministère ils étaient engagés. Je fus à peu près le seul à ne pouvoir dire ce que j’allais faire. Bien des pensées et des désirs avaient été éveillés dans mon cœur par toutes les expériences que j’avais faites. Mais je ne me sentais pas libre d’en parler avant d’avoir vu ma tante qui m’avait invité et m’attendait pour les vacances. Je pus cependant affirmer que, partant sans savoir comment je serais conduit, j’étais certain de la présence divine et de l’accomplissement des promesses qu’il avait données pendant notre temps à Glasgow. Et j’appuyai mon témoignage par le texte suivant : « C’est par la foi qu’Abraham, étant appelé, obéit, pour venir au pays qu’il devait recevoir en héritage ; et il partit, ne sachant où il allait » (Hébreux 11.8).

En regardant en arrière, en réfléchissant à ces deux ans d’expérience du réveil faisant suite à celles d’Edimbourg, je ne puis que remercier Dieu de Sa merveilleuse bonté et de Sa fidélité. Chaque expérience avait en vue l’avenir, tout était tracé d’avance en vue de l’œuvre à laquelle Il me préparait. Il a donné alors la semence qui a ensuite germé, « premièrement l’herbe, ensuite l’épi, puis le grain tout formé dans l’épi », comme dans la parabole de l’Evangile selon Marc (4.28). Dieu appelle, en effet, « les choses qui ne sont pas comme si elles étaient ».

Je n’avais que vingt ans quand Dieu m’accorda le privilège de faire toutes ces expériences à Glasgow, qu’Il confirma ensuite par les promesses et les directions si précieuses de Sa Parole qui contenaient en germe tout ce qui devait suivre. C’est pourquoi je me sens pressé de dire à tout jeune homme, toute jeune fille : Confiez-vous en un tel Maître, Il en est digne ! Donnez-Lui votre vie, ne marchandez pas ! Ne parlez pas de sacrifice, car tout vrai sacrifice pour Lui est toujours un bénéfice !

Mon départ pour Genève, en août 1906, fut le premier pas vers la réalisation du plan que le Seigneur avait formé. Pour moi, ce fut une nouvelle occasion de Le mettre à l’épreuve, car j’ignorais tout de la façon dont Il allait accomplir Ses promesses. Aujourd’hui, je puis dire : « Il n’est pas tombé un seul mot de toutes les bonnes paroles que l’Eternel, votre Dieu, a dites de vous. Tout ce qu’Il a promis est arrivé ; il n’en est pas tombé un seul mot » (Josué 23.14).

En effet, « La pluie est tombée, les torrents ont débordé, les vents ont soufflé et sont venus fondre sur cette maison ; elle n’est point tombée, car elle était fondée sur le roc » (Matthieu 7.24, 25).

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