On a fait d’autres tentatives pour se débarrasser de l’élément miraculeux dans l’Écriture. On a parlé de miracles relatifs, qui n’auraient été miraculeux que pour ceux en faveur desquels ils étaient accomplis, et ne constituaient qu’une simple anticipation sur les découvertes faites plus tard dans le règne de la nature ; l’Auteur de ces prodiges ne faisait que mettre en œuvre des puissances inconnues alors, puissances mystérieuses cachées dans la natureb.
b – Hase : « Ils (les miracles) font sans aucun doute partie du système général de la nature, lequel nous devons par conséquent étudier en profondeur, mais ils se situaient bien au-dessus du savoir et du pouvoir des hommes de ce temps. » (Leben Jesus)
Schleiermacher fait effort pour ne pas paraître nier les miracles, mais il n’y parvient pas. Christ, dit-il, ne possédait pas seulement une connaissance plus approfondie de la nature, mais il se trouvait avec elle dans un rapport particulièrement intime ; il pouvait évoquer, de ce sanctuaire, des puissances que nul autre n’a connues et qui cependant existaient. Tous ces faits, qui semblaient exceptionnels, étaient cachés dans l’univers ; ils sont apparus au commandement du Fils de Dieu, afin qu’il fût glorifié par eux. — Cette théorie est une tentative de conciliation entre la révélation et la science, ce qui est le but de tous les écrits de Schleiermacher ; mais il est impossible d’accepter une pareille conciliation, qui ne peut se faire qu’aux dépends du miracle. C’est bien à tort qu’on a voulu s’autoriser d’Augustin pour soutenir cette théorie. Il est vrai que, lorsque Augustin raisonne avec les païens, il leur demande pourquoi ils refusent de croire aux miracles de l’Écriture, tandis qu’ils admettent beaucoup de choses qui ne peuvent s’expliquer par aucune loi. Mais il n’entre pas dans sa pensée de rabaisser le surnaturel au niveau de phénomènes naturels autrefois inconnus, mais qui peuvent s’expliquer. Il voit plutôt dans certains phénomènes des interventions directes de la puissance divine, car ils ne peuvent s’expliquer par aucune loi ; ainsi, il les élève au rang de miracles. La nature est, pour lui, la manifestation de la volonté de Dieu ; Dieu, dit-il, ne peut se contredire lui-même ; il n’y a pas en lui de conflits de volontéc.
c – Augustin sait parfaitement faire la différence entre les vrais miracles et les miracles selon Schleiermacher : « Pour toucher un mot, en effet, des miracles attribués par les historiens aux dieux des Gentils, en quoi je n’entends point parler des accidents monstrueux qui se produisent de loin en loin par des causes cachées, comprises dans les plans de la Providence, tels, par exemple, que la naissance d’animaux difformes, ou quelque changement inusité sur la face du ciel et de la terre, capable de surprendre ou même de nuire, je n’entends point, dis-je, parler de ce genre d’événements dont les démons fallacieux prétendent que leur culte préserve le monde, mais d’autres événements qui paraissent en effet devoir être attribués à leur action et à leur puissance. » (De Civ. Dei, X. 16)