Nous avons déjà montré comment l’œuvre de la rédemption s’est poursuivie durant les deux premières des trois périodes, dans lesquelles nous avons divisé tout l’espace de temps compris entre la chute et la fin du monde. Nous en venons maintenant à la troisième et dernière période, commençant avec la résurrection de Christ. Je montrerai : que le temps compris entre le terme de l’humiliation de Christ et la fin du monde est entièrement consacré à réaliser le grand résultat ou le succès de la rédemption chrétienne.
Je n’entends pas dire qu’avant cette période la rédemption n’ait porté aucun fruit, déjà même dès le commencement des générations humaines. Mais tout ce succès avait un caractère préparatoire, ce n’était qu’une anticipation, comme ces quelques fruits qu’on cueille avant le moment de la récolte. Avant la venue de Christ, il n’y eut que juste le degré de succès que Dieu jugea nécessaire pour la préparer. Ce n’est qu’après que le rachat a été fait qu’on peut voir le succès et les effets de la rédemption, de même que le jour est le moment le plus convenable pour jouir de la lumière du soleil après qu’il est levé, quoique avant nous puissions en avoir quelques reflets renvoyés par la lune et les étoiles. Le succès de l’œuvre de la rédemption, même pendant tout le temps que Christ resta sur la terre, fut très peu de chose en comparaison de ce qui eut lieu plus tard.
Mais après que Christ eut terminé cette œuvre, la plus grande et la plus difficile qu’il y eut jamais, le temps vint pour en obtenir les glorieux effets. Ayant passé par toute la série de souffrances et d’humiliations, il ne doit plus souffrir. Mais le moment est maintenant venu d’obtenir la joie promise. Après avoir mis « son âme en oblation pour le péché » le temps arrive de « voir sa postérité » ayant « une portion avec les grands » et « divisant les dépouilles avec les forts. » Une des choses que Christ se proposa pendant son humiliation, ce fut de préparer ce qui était nécessaire pour le renversement du royaume de Satan ; et maintenant le temps de l’effectuer est arrivé, comme Christ le déclara peu avant sa résurrection. « Maintenant est venu le jugement de ce monde, maintenant le Prince de ce monde sera jeté dehors (Jean 12.31). » Un autre de ses desseins était de réunir toutes choses en Christ. Le temps de le faire est aussi venu maintenant. « Et moi, quand je serai élevé de la terre, je tirerai tous les hommes à moi (Jean 12.32). » Ce qui était conforme à la prophétie que Jacob avait faite de Christ, que : « Quand le Scilo viendrait, à Lui serait l’assemblée du peuple (Genèse 49.10). » Un autre de ses desseins était le salut de son peuple. Maintenant que ses souffrances sont terminées, que son humiliation a été complète, le moment est aussi. venu pour l’effectuer : « Quoiqu’il fût le Fils de Dieu, il a pourtant appris l’obéissance par les choses qu’il a souffertes. — Et ayant été consacré, il a été l’auteur du salut éternel pour tous ceux qui lui obéissent (Hébreux 5.8-9). » Une autre chose qu’il avait en vue, c’était la glorification des personnes de la Trinité : « Père, l’heure est venue ; glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie (Jean 17.1). » Il se proposait aussi la gloire des fidèles : « Comme tu lui as donné pouvoir sur tous les hommes, afin qu’il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés (Jean 17.2). » Toutes les dispensations subséquentes de la providence de Dieu, jusqu’à la consommation de toutes choses, sont destinées à donner à Christ sa récompense, à réaliser le but qu’il se propose dans ses souffrances sur la terre, et la joie qu’il avait en perspective.
Avant de considérer en détail rien de ce qui a été fait dans cette période, je ferai remarquer en peu de mots comment l’Écriture représente ces temps-là.
Cette période est le plus souvent appelée dans l’Ancien Testament : les derniers jours. Il est souvent question, dans les prophéties de l’Ancien Testament, de choses qui auront lieu dans les derniers temps, et quelquefois dans les derniers jours, ce qui se rapporte évidemment à la période de l’Évangile. Ce temps est désigné par les mots : les derniers temps, ou les derniers jours, parce que c’est là la dernière période de la série des dispensations providentielles de Dieu sur la terre, la dernière période de la grande œuvre de la rédemption. C’est en quelque sorte le résumé des œuvres de la Providence, les dernières dispensations de l’alliance de grâce sur la terre.
La période entière est quelquefois appelée, dans les Écritures, la consommation des siècles : « Or, toutes ces choses leur arrivaient en exemple, et elles sont écrites pour notre instruction, comme étant ceux auxquels les derniers temps sont parvenus (1 Corinthiens 10.11). » Et l’Apôtre, par cette expression, les derniers temps, embrasse l’ensemble des jours de l’Évangile, depuis la naissance de Christ jusqu’au jour du jugement : « Mais maintenant, en la consommation des siècles, il a paru une seule fois pour l’abolition du péché, par le sacrifice de soi-même (Hébreux 9.20). » Toute cette période peut être appelée la consommation des siècles ; car tout ce temps-là est consacré à amener les choses à leur but et à leur terme. Précédemment toutes ces choses étaient dans un état préparatoire ; présentement elles sont en train de prendre une forme définitive. L’ancien ordre de choses essentiellement terrestre s’approche de sa fin et disparaît peu à peu, et un état de choses spirituel s’établit de plus en plus. Ainsi l’ancienne condition de l’Église, qu’on peut appeler sa condition terrestre, dans laquelle elle était soumise aux ordonnances charnelles et aux rudiments du monde, a pris fin. La république des Israélites a été abolie par la destruction de, leur ville et de leur pays. Ensuite l’ancien empire païen du temps de Constantin a aussi disparu. Il ne reste plus qu’à voir la fin du royaume visible de Satan dans le monde, à la chute de l’Antéchrist ; et la vocation des Juifs. Après cela aura lieu la destruction de ce monde, et le jour du jugement. Les cieux et la terre commencèrent à trembler, pour se dissoudre, suivant Aggée, dès avant la venue de Christ, afin que « les choses qui sont immuables » demeurent (Hébreux 12.27), c’est-à-dire, afin que ces choses qui doivent périr périssent, et qu’il ne reste que celles qui doivent durer éternellement.
Les ordonnances charnelles du culte juif furent les premières à disparaître, pour faire place au culte spirituel qui doit durer pendant toute l’éternité. « Jésus lui dit : Femme, crois-moi ; l’heure vient que vous n’adorerez plus le Père ni sur cette montagne, ni à Jérusalem. — Mais l’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car aussi le Père en demande de tels qui l’adorent (Jean 4.21,23). » C’est un de ces cas dans lesquels le monde temporaire cesse et le monde éternel commence. Le temple extérieur et la ville de Jérusalem prirent fin, pour céder la place à la ville et au temple spirituel qui doivent durer éternellement. Nous avons un autre exemple de l’abolition de ces choses, condamnées à la vanité, afin que celles qui sont immuables demeurent dans la destruction de l’ancien empire païen, pour céder la place à l’empire de Christ, qui doit durer éternellement. Après cela, à la chute de l’Antéchrist, le royaume visible de Satan sur la terre cédera la place au royaume éternel de Christ. « Afin que le règne et la domination, et la grandeur des royaumes, qui sont sous tous les cieux, soit donnée au peuple des saints du Souverain. Son royaume est un royaume éternel, et tous les empires lui seront assujettis et lui obéiront (Daniel 7.27). » C’est encore un autre exemple de la dissolution du monde temporaire et du commencement du monde éternel. Et finalement, le monde corruptible se dissoudra, pour préparer l’habitation de l’Église dans un autre lieu de séjour qui durera éternellement.
C’est peut-être parce que le monde vient à sa fin ainsi pas à pas et graduellement, que l’Apôtre emploie cette expression : non pas la fin du temps est venue jusqu’à nous, mais la fin des temps, comme si la fin du temps avait lieu à plusieurs époques différentes. La dispensation évangélique est une époque de conclusion ; elle est consacrée à achever des choses qui jusqu’alors avaient été en préparation, et à en abolir d’autres qui avaient existé auparavant. Elle est consacrée, en quelque sorte, à tout résumer, à faire produire aux choses les résultats qu’on en attendait et à assurer ainsi leur accomplissement. C’est dans cette période que tous les anciens types seront réalisés, et que les prédictions de tous les prophètes, depuis le commencement du monde, auront leur accomplissement.
L’état de choses produit par les événements de cette période est appelé les nouveaux cieux et la nouvelle terre. « Car voici, je m’en vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre ; et on ne se souviendra plus des choses précédentes, et elles ne reviendront plus au cœur. Mais plutôt vous vous réjouirez et vous vous égaierez à toujours en ce que je vais créer ; car voici, je vais créer Jérusalem pour n’être que joie, et son peuple pour n’être qu’allégresse (Ésaïe 65.17-18). » Et Ésaïe 66.22 : « Car, comme les nouveaux cieux et la nouvelle terre que je vais faire, seront établis devant moi, dit l’Éternel, ainsi sera établie votre postérité et votre nom. » D’un côté, le précédent état de choses ou l’ancien monde disparaît peu à peu durant cette période ; d’un autre, le nouvel ordre de choses ou le nouveau monde, qui est spirituel, commence et s’établit. En conséquence de chacune de ces dissolutions successives de l’ancien ordre de choses, il y a le commencement d’un nouvel état de choses éternel. De sorte que ce qui accompagna la destruction de la Jérusalem selon la lettre, contribua à l’établissement de celle selon l’esprit. Il en fut de même à l’égard de la destruction de l’ancien empire païen et de toutes les autres anciennes institutions ; le monde lui-même sera aussi détruit à son tour, et l’Église habitera dans les cieux, qui seront sa nouvelle demeure. Alors tout ce qui est entendu par les nouveaux cieux et la nouvelle terre aura aussi son accomplissement.
Dieu, en créant le monde, se proposa de préparer pour son Fils (car il l’a établi héritier du monde) un royaume éternel. A mesure que le royaume de Christ est établi dans le monde, celui-ci prend fin, et les choses éternelles le remplacent ; tous les grands changements et les révolutions du monde produisent leurs résultats définitifs, et tout en vient à sa dernière période ; les eaux du grand fleuve de la Providence, qui a tant de branches diverses et forme tant de contours, se déversent dans l’Océan, vers lequel elles ont tendu dès le commencement de leur course, et entrent dans leur repos ; à mesure que le royaume de Christ est établi dans le monde les choses prennent leur forme définitive, et la fin de ce monde changeant arrive ; les premiers cieux et la première terre prennent fin, les nouveaux cieux et la nouvelle terre qui sont éternels prennent leur place. Ceci me conduit à observer :
Que l’état de choses auquel aboutissent les événements de cette période est souvent désigné par ces mots : le royaume des cieux, ou le royaume de Dieu. Il est très souvent question dans le Nouveau Testament du royaume des cieux. Jean-Baptiste prêcha que le royaume des cieux était proche ; Christ et ses disciples firent de même après lui, faisant allusion à quelque chose que les Juifs, dans ces jours-là, attendaient et qu’ils appelaient de ce nom. Il semble que le nom aussi bien que ces espérances ont eu leur origine dans les prophéties de Daniel, à l’occasion des songes de Nébucadnetzar. « Et au temps de ces rois, le Dieu des cieux suscitera un royaume (Daniel 2.44 ; 7.13-14). »
Or, le royaume des cieux n’est autre que cet état de choses dans l’Église et dans le monde résultant du succès de la rédemption chrétienne pendant cette période. Antérieurement il s’était établi de grands royaumes, comme celui de Babylone, celui des Perses, la monarchie des Grecs et celle des Romains. Mais Christ vint pour établir le dernier de tous, qui n’est pas terrestre, mais céleste. « Mon royaume n’est pas de ce monde (Jean 18.36). » C’est là le royaume dont Christ parle. « C’est pourquoi je vous confie le royaume comme mon Père me l’a confié (Luc 22.29). » Ce royaume commença bientôt après la résurrection de Christ, et s’établit successivement depuis lors, et il ira s’établissant jusqu’à la fin du monde. Quelquefois par le royaume des cieux on entend, non seulement cette économie spirituelle de l’Église qui commença bientôt après la résurrection de Christ, mais aussi cet état de choses parfait qui doit suivre la chute de l’Antéchrist ; parfois même cet état glorieux dans lequel l’Église sera introduite au jour du jugement. « Voici donc ce que je dis, mes frères, c’est que la chair et le sang ne peuvent point hériter le royaume de Dieu (1 Corinthiens 15.50). » A ce sujet, je ferai remarquer plusieurs choses en détail, afin qu’on puisse mieux comprendre ce que l’Écriture dit touchant cette période.
1° L’établissement du royaume de Christ s’opère surtout au moyen des quatre grands événements successifs dont chacun est désigné dans l’histoire, comme la venue de Christ dans son royaume. Le premier est l’apparition de Christ dans les dispensations admirables de sa providence du temps des apôtres, pour établir son royaume et renverser ses ennemis, qui aboutit à la destruction de Jérusalem. Ce fait est appelé la venue de Christ dans son royaume. « En vérité, je vous dis qu’il y a quelques-uns de ceux qui sont ici présents, qui ne mourront point, jusqu’à ce qu’ils aient vu le Fils de l’homme venir en son règne (Matthieu 16.28). » Le second eut lieu du temps de Constantin, par la destruction de l’Empire romain. Cet événement désigné comme la venue de Christ, est comparé à sa venue pour le jugement (Matth., ch. 24). Le troisième aura lieu à la destruction de l’Antéchrist, qui est représenté comme la venue de Christ en son royaume (Apocalypse 6.13-17). Le quatrième est sa venue pour le jugement dernier ; c’est là l’événement que l’Écriture a surtout en vue quand elle parle de la venue de Christ en son royaume (Dan., ch. 7).
2° Chacune des trois périodes est une vive image, ou type du quatrième et dernier événement, la venue de Christ pour le jugement dernier ; comme aussi précédemment les principales dispensations de la Providence avaient été des types de sa première venue. De même que la dernière venue de Christ pour le jugement est suivie de la résurrection des morts, ainsi aussi chacun de ces avènements antérieurs est accompagné d’une résurrection spirituelle. Cette venue de Christ, qui aboutit à la destruction de Jérusalem, fut précédée d’une résurrection spirituelle des âmes par la vocation des Gentils au moyen de la prédication de l’Évangile. La venue de Christ, du temps de Constantin, fut accompagnée de la résurrection spirituelle de la plus grande partie du monde connu, qui fut converti du paganisme à l’Église visible. La venue de Christ à la destruction de l’Antéchrist sera suivie d’une résurrection spirituelle de l’Église, qui aura été comme morte du temps de l’Antéchrist. C’est là ce qui est appelé la première résurrection (Apocalypse 20.5).
Il y a plus. De même qu’au jugement dernier Christ se manifestera d’une manière glorieuse en venant dans la gloire de son Père, ainsi aussi dans les trois venues antérieures il se manifeste d’une manière éclatante en envoyant des jugements contre ses ennemis et en favorisant son Église. De même que le dernier avènement de Christ sera accompagné par un rassemblement des élus de tous les coins des cieux, ainsi aussi les précédents ont été suivis d’un rassemblement spirituel. Ce rassemblement des élus sera accompli par les anges avec un grand son de trompette, comme aussi chacun des précédents s’est effectué au bruit de la trompette qu’ont fait retentir les ministres de l’Évangile. La dernière apparition de Christ sera précédée d’une époque de décadence et d’impiété ; il en a été ou il en sera de même à l’occasion de chacune des trois autres. Chacune d’elles est précédée par un temps de grande opposition contre l’Église ; à l’occasion de la première elle vint des Juifs ; à la seconde venue, du temps de Constantin, de la part des païens ; avant la troisième, de l’Antéchrist ; et avant la quatrième, de Gog et Magog, comme cela est annoncé dans l’Apocalypse.
A l’occasion de chacune de ces venues de Christ, Dieu accorde une délivrance glorieuse à son Église. La première, qui aboutit à la destruction de Jérusalem, eut pour effet d’établir l’Église sous l’économie évangélique. La seconde, du temps de Constantin, fut suivie de la délivrance de la persécution, de la protection de l’autorité civile et de son triomphe sur les persécuteurs païens. La troisième, qui aura lieu à la chute de l’Antéchrist, sera suivie de cet état de liberté, de paix et de joie, dont il est si souvent question dans la partie prophétique des saintes Écritures ; alors la vérité régnera sans partage. La quatrième sera suivie de l’introduction de l’Église dans la gloire parfaite des cieux.
Chacune de ces venues de Christ est suivie d’une terrible destruction des méchants et des ennemis de l’Église. A la première, nous avons la destruction des Juifs persécuteurs qui fut terrible ; à la seconde, de redoutables jugements tombent sur les païens également persécuteurs ; la troisième verra la terrible destruction de l’Antéchrist, le plus cruel et le plus furieux des ennemis de l’Église ; à la quatrième, nous aurons la manifestation de la colère et de la vengeance de Dieu contre les impies. En outre, dans chacune de ces venues de Christ, les premiers cieux et la première terre prennent fin pour céder la place aux nouveaux cieux et à la nouvelle terre : les choses éternelles succèdent aux temporaires.
3° J’observerai que chacune de ces grandes dispensations, qui sont représentées comme la venue de Christ dans son royaume, ne sont qu’autant de pas faits vers l’accomplissement de ce seul et grand événement qui a été prédit. « Je regardais encore dans les visions de la nuit, et voici, comme le Fils de l’homme, qui venait avec les nuées des cieux ; et il vint jusqu’à l’ancien des jours, et se tint devant lui. — Et il lui donna la seigneurie, et l’honneur, et le règne ; et tous les peuples, les nations et les langues le serviront ; sa domination est une domination éternelle qui ne passera point, et son règne ne sera point dissipé (Daniel 7.13-14). » C’est là ce que les Juifs attendaient, et qu’ils appelaient la venue du royaume des cieux, ce que Jean-Baptiste et Christ avaient en vue lorsqu’ils disaient : « Le royaume des cieux est proche. » Ce grand événement s’accomplit graduellement.
4° Quand Christ vint au moyen de la prédication des apôtres pour établir son royaume dans le monde, dispensation qui se termina à la destruction de Jérusalem, cet événement s’accomplit d’une manière glorieuse ; quand l’empire païen fut détruit du temps de Constantin, il y eut un pas de plus de fait ; quand l’Antéchrist sera détruit, il y aura encore un degré supérieur d’accomplissement ; mais quand la fin du monde sera venue, il sera parvenu à son plus parfait accomplissement. Et parce que ces quatre grands événements ne sont que l’image les uns des autres, et que les trois premiers ne sont que le type du quatrième, et vu qu’ils ne sont que diverses phases dans l’accomplissement d’une seule et même chose, il arrive quelquefois que dans les prophéties de Daniel, il en est parlé comme s’il ne s’agissait que d’un seul, et dans le vingt-quatrième chapitre de Matthieu, nous trouvons certaines choses qui s’appliquent mieux à l’un d’entre eux, et d’autres à un autre.
De sorte que, de même qu’il paraît qu’il y a diverses phases dans l’accomplissement du royaume de Christ, ainsi dans chacune d’elles l’événement fait un pas de plus vers son accomplissement que dans les précédentes. Du temps de Constantin, il y eut un pas de plus de fait vers l’accomplissement du royaume de Christ qu’à la destruction de Jérusalem. A la chute de l’Antéchrist, il y aura un progrès encore plus marqué que du temps de Constantin, et il en sera de même plus tard. De sorte que le royaume de Christ va graduellement s’étendant et s’augmentant, par ces divers degrés d’accomplissement, depuis la résurrection de Christ jusqu’à la fin du monde.
5° Les grands événements providentiels de Dieu, compris entre ces quatre événements, sont destinés à préparer le royaume et la gloire de Christ dans le grand événement qui suit. Ces dispensations de la Providence envers l’Église et le monde, avant la destruction du temple païen, du temps de Constantin, semblaient avoir eu toutes pour but de préparer la gloire de Christ et le bonheur de l’Église dans cet événement. De même les grandes dispensations providentielles, qui suivent jusqu’à la destruction de l’Antéchrist et le commencement de l’époque glorieuse qui doit suivre, semblent toutes préparer la voie pour la gloire de Christ, qui doit apparaître plus éclatante dans cet événement ; et les dispensations suivantes, jusqu’à la fin du monde, semblent concourir à la manifestation de la plus grande gloire de Christ, à la consommation de toutes choses. C’est pour cela que j’ai cru nécessaire de faire ces observations générales au sujet de cette dernière période, avant d’en venir aux dispensations providentielles spéciales qui concourent au développement de l’œuvre de la rédemption pendant cette période.
Avant d’aller plus loin, je répondrai en quelques mots à cette question : Pourquoi l’établissement du royaume de Christ après son humiliation a-t-il eu lieu si graduellement, puisque Dieu aurait pu l’établir tout d’un coup ? Bien qu’il y eût de la présomption à vouloir découvrir toutes les raisons par lesquelles Dieu peut s’être décidé, il est hors de doute qu’on peut remarquer beaucoup de sagesse dans sa manière de faire et surtout dans ces deux choses.
1° De cette manière, la sagesse de Dieu est rendue plus visible, et les créatures peuvent mieux la remarquer. Si la chose avait été faite tout d’un coup ou en très peu de temps, on n’aurait pas eu la même facilité de remarquer les diverses mesures prises par la sagesse divine, comme quand l’œuvre s’accomplit graduellement et qu’on peut remarquer les produits de sa sagesse les uns après les autres. Dieu a déterminé, dans sa sagesse, de réaliser son grand plan par une longue suite d’événements surprenants, afin qu’on voie l’éclat de sa sagesse dans la suite entière des événements, aussi bien que dans les diverses manifestations successives. Si toute la gloire qui était dans cet événement avait paru tout d’un coup, cela aurait été trop pour nous ; nous n’aurions pas pu en supporter la vue.
2° Le triomphe sur Satan est rendu plus glorieux. Dieu aurait pu facilement, par un acte de sa toute-puissance, écraser Satan en une fois. Mais, comme tout le temps nécessaire lui a été donné pour déployer sa ruse, afin d’arrêter le succès de l’œuvre de Christ, il n’est pas vaincu seulement par surprise, mais il a ample occasion d’avoir maintes fois recours à ses ruses pour fortifier sa cause, et cela pendant plusieurs siècles. Ainsi, Dieu le détruit et le confond en établissant peu à peu le royaume de Christ, malgré ses machinations les plus subtiles et toute sa résistance ; et, à chaque pas, l’œuvre avance toujours plus, jusqu’à ce qu’à la fin le royaume est définitivement établi, et Satan est vaincu complètement et pour l’éternité. J’en viens maintenant à remarquer les faits particuliers qui, depuis la fin de l’humiliation de Christ jusqu’à la fin du monde, ont concouru ou doivent concourir au succès de la rédemption chrétienne.
De même que l’incarnation de Christ était nécessaire pour qu’il pût accomplir le rachat, ainsi sa résurrection et son ascension étaient nécessaires pour assurer le succès de ce rachat.
1° Sa résurrection. Pour que Christ pût recueillir les fruits de son rachat, il était indispensable qu’il ressuscitât d’entre les morts ; car Dieu le Père avait confié toute l’œuvre de la rédemption à son Fils, non seulement pour l’accomplir en sa qualité de sacrificateur, mais aussi en qualité de Roi ; et afin qu’il fît tout cela comme Dieu-Homme. Dieu le Père ne pouvait en rien manifester sa miséricorde aux hommes déchus, si ce n’est par l’intermédiaire d’un Médiateur. Mais, pour que Dieu pût assurer le succès du rachat qu’il avait accompli comme Dieu-Homme, il était nécessaire qu’il ressuscitât d’entre les morts. Aussi Christ, après avoir par sa mort terminé le rachat, ressuscita des morts pour en recueillir les fruits.
Dieu le Père lui avait confié ces choses afin que, comme Seigneur de tout, il pût tout faire concourir à son but. « Car c’est pour cela que Christ est mort, qu’il est ressuscité et qu’il a repris une nouvelle vie, afin qu’il domine tant sur les morts que sur les vivants (Romains 14.9). »
Au fait, la résurrection de Christ, ainsi que son ascension, fait déjà partie du succès de l’œuvre qu’il avait accomplie par ses souffrances et son humiliation ; car, bien que, à proprement parler, Christ n’ait point acquis la rédemption pour lui-même, toutefois il acquit la vie éternelle et la gloire pour lui-même, comme une récompense de ce qu’il avait fait et souffert. « Il s’est abaissé lui-même et a été obéissant jusqu’à la mort, à la mort même de la croix ; c’est pourquoi aussi Dieu l’a souverainement élevé (Philippiens 2.8-9). » On peut d’autant plus la considérer comme un fruit du succès du rachat accompli par Christ, qu’il ne ressuscita pas seulement en sa qualité privée, mais comme la tête de son Église, si bien que les fidèles ressuscitèrent, en quelque sorte, tous avec Lui. Christ fut justifié dans sa résurrection : Dieu, en le ressuscitant, l’a déchargé de ses fonctions, comme ayant fait assez et souffert suffisamment pour les péchés de tout son peuple. « Lequel a été livré pour nos offenses et qui est ressuscité pour notre justification (Romains 4.25). » Et Dieu le mit en possession de la vie éternelle, comme chef de l’Église et comme une garantie que les siens le suivraient ; car, lorsque Christ ressuscita d’entre les morts, la vie éternelle commença en Lui. Sa vie, antérieurement à sa mort, était mortelle, temporaire ; mais, après sa résurrection, elle devint éternelle. « Sachant que Christ ressuscité des morts ne meurt plus, et que la mort n’a plus d’empire sur Lui (Romains 6.9). — Et je vis ; mais j’ai été mort, et voici, je suis vivant aux siècles des siècles. Amen (Apocalypse 1.18). » Mais il n’entra en possession de cette vie éternelle que comme tête de tout le corps, de sorte que l’Église entière ressuscita en quelque sorte avec Lui. Et dorénavant, Lui qui a tant souffert ne doit plus souffrir, mais il est entré dans la gloire éternelle.
La résurrection de Christ est le fait le plus réjouissant, parce que Christ, après cela, se reposa de l’œuvre grande et difficile du rachat, et reçut de Dieu le témoignage qu’elle était achevée. La mort de Christ fut le fait le plus grand et le plus surprenant ; mais il a quelque chose de profondément douloureux. Au contraire, par la résurrection de Christ, la douleur est changée en joie. Le Chef de l’Église, par ce grand événement, entre en possession de la vie éternelle, et l’Église entière est en quelque sorte régénérée pour avoir une espérance vive (1 Pierre 1.3). » Les cris et les larmes avaient continué pendant une nuit, mais maintenant la joie vient au matin. Le jour est venu où il va régner comme le Chef de l’Église, et l’Église entière règne avec Lui. Ce jour méritait d’être célébré avec la plus grande joie possible. « C’est ici la journée que l’Éternel a faite ; égayons-nous et réjouissons-nous en elle. » Aussi ce jour a été mis à part parmi tous les autres, pour être, jusqu’à la fin du monde, sanctifié toutes les semaines comme un jour de repos et de joie, afin que l’Église se repose et se réjouisse avec son Chef. Si, d’un côté, le troisième chapitre de la Genèse est le plus triste des chapitres de la Bible, d’un autre côté, ceux dans lesquels les évangélistes donnent un écrit de la résurrection de Christ, peuvent être considérés comme les plus réjouissants. Ils donnent le récit de l’achèvement du rachat de la rédemption et du commencement de la gloire du Chef de l’Église, comme le sceau et la garantie de la gloire éternelle de tous ses membres.
Il faut observer ensuite que les jours de l’Évangile commencent proprement avec la résurrection de Christ. Jusqu’à la résurrection de Christ d’entre les morts, la dispensation de l’Ancien Testament dure encore ; mais elle cesse alors, car toutes les choses préfigurées par les ordonnances typiques de cette dispensation ont eu leur accomplissement. Alors proprement disparaît la nuit de l’Ancien Testament. La sortie joyeuse et glorieuse de Christ du tombeau fut comme le lever du soleil après une longue nuit de ténèbres, apparaissant pour éclairer et réjouir le monde. Alors commence cette joyeuse, cette glorieuse dispensation dont les prophètes ont tant parlé. Maintenant le soleil de l’Évangile s’est levé glorieux, et « la santé sera dans ses rayons » afin que ceux qui craindront le nom de l’Éternel progressent et acquièrent de l’embonpoint comme de jeunes bœufs que l’on engraisse.
2° L’ascension de Christ. Je comprendrai aussi dans ce fait son établissement à la droite de Dieu. Car Christ monta aux cieux pour s’asseoir à la droite de Dieu dans la gloire. Le libérateur d’un peuple, son roi, afin d’être en état de pouvoir le délivrer, est d’abord établi sur son trône. Il nous est dit que Christ fut élevé pour assurer le succès de sa Rédemption. « Et Dieu l’a élevé par sa puissance pour être Prince et Sauveur, afin de donner à Israël la repentance et la rémission des péchés (Actes 5.31). »
L’ascension de Christ fut en quelque sorte son couronnement solennel : le Père le plaça sur le trône et l’investit de la gloire du royaume qu’il s’était acquis, afin qu’il pût retirer tous les fruits de sa rédemption en conquérant tous ses ennemis : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie mis tes ennemis pour le marchepied de tes pieds (Psaumes 110.1). » Christ entra dans les cieux pour recueillir les fruits de son rachat, comme le souverain sacrificateur des anciens temps qui, après avoir offert des sacrifices, entrait dans le Saint des saints avec du sang, pour obtenir les effets du sacrifice qu’il avait présenté (Hébreux 9.12). Il entra dans les cieux afin d’intercéder pour son peuple, et de faire valoir le sacrifice qu’il avait offert dans le but d’en recueillir les fruits (Hébreux 7.25). Et lorsqu’il monta au ciel Dieu l’établit sur le trône d’une manière visible comme roi de l’univers. Il plaça alors les anges sous son commandement, et lui soumit les cieux et la terre, pour qu’il les gouvernât dans l’intérêt de ceux pour qui il était mort (Éphésiens 1.20-22). Dans son ascension, comme dans sa résurrection, il agit comme tête de tout le corps et en qualité de précurseur de l’Église entière ; les hommes montèrent en quelque sorte dans les cieux avec Lui, de sorte que nous sommes élevés et assis ensemble dans les lieux célestes en Christ (Éphésiens 2.6).
Le jour de l’ascension de Christ fut sans doute un jour de réjouissance et de gloire dans les cieux. Et la gloire et le bonheur des cieux furent certainement augmentés, quand ils reçurent, comme leur Roi, Christ, Dieu-Homme. De sorte que les deux portions de l’Église, celle qui est dans les cieux et celle qui est sur la terre, ont vu des jours plus glorieux depuis l’humiliation de Christ que précédemment. Cela suffira pour ce qui concerne les choses par lesquelles Christ fut mis en état de recueillir les fruits de l’œuvre de la rédemption.
Je considérerai maintenant les dispensations de la Providence qui établirent les moyens de succès pour, cette œuvre après la résurrection de Christ.
Ceci à la vérité eut lieu graduellement, mais le commencement date de la résurrection de Christ, qui renferme les motifs de cette abolition. Car la dispensation juive ne pouvait convenir pour le monde entier ou pour une Église dispersée dans toutes les parties du monde. Il aurait été impossible à des hommes vivant dans toutes les parties du monde d’aller à Jérusalem trois fois l’an, comme cela était prescrit dans cette constitution. Quand Dieu donc se proposa d’étendre son Église, comme ce fut le cas après la résurrection de Christ, il était nécessaire que cette dispensation fût abolie. Si elle avait continué elle aurait été un grand obstacle pour l’agrandissement de l’Église. De plus leur loi cérémonielle, par suite de sa sévérité et des particularités de quelques-uns de ses rites, était une muraille de séparation entre les Juifs et les Gentils, et elle aurait empêché ces derniers de se conformer à la vraie religion. Cette muraille fut donc renversée pour favoriser le progrès de l’Évangile (Éphésiens 2.14-15).
Ensuite, dans l’ordre du temps, l’institution du sabbat chrétien. Car, s’il ne s’établit que graduellement dans l’Église chrétienne, cependant les choses qui servirent à révéler l’intention et la volonté de Dieu commencèrent le jour de la résurrection de Christ, par son apparition à ses disciples (Jean 20.19). Et cette institution fut dans la suite confirmée par la circonstance qu’il apparût de temps à autre dans ce jour plutôt que dans aucun autre (Jean 20.26) ; par l’envoi du Saint-Esprit ce jour-là (Actes 2.1) ; et ensuite en ordonnant que le culte public des chrétiens se célébrât ce jour-là, ce qu’on peut conclure d’Actes 20.7 ; 1 Corinthiens 16.1-2 ; Apocalypse 1.10. C’est ainsi que le jour de la semaine dans lequel Christ ressuscita des morts, a été mis à part comme un jour de réjouissance pour toute l’Église jusqu’à la fin du monde, et comme le jour dans lequel on doit célébrer le culte public Et c’est là un des grands et des principaux moyens de succès pour l’Évangile dans le monde.
Ensuite Christ institua le ministère évangélique, en envoyant ses apôtres pour enseigner et pour baptiser toutes les nations. « Allez donc, et enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ; — et les enseignant de garder tout que je vous ai commandé. Et, voici, je suis toujours avec vous jusqu’à la fin du monde. Amen (Matthieu 28.19-20). » Cet ordre de Christ à ses apôtres renferme trois choses :
1° L’institution de la fonction du ministère évangélique. Car cet ordre que Dieu donna à ses apôtres, pour ce qu’il a d’essentiel, s’adresse à tous les ministres ; et en vertu de cet ordre les apôtres furent ministres ou Anciens de l’Église.
2° Quelque chose de particulier dans cet ordre : d’aller d’une nation à l’autre prêchant l’Évangile dans tout le monde. Les apôtres avaient quelque chose au-dessus de ce qui était impliqué dans leur caractère ordinaire de ministres : ils avaient un pouvoir extraordinaire pour enseigner et gouverner toutes les Églises, non seulement celles qui existaient alors, mais toutes celles qui existeraient jusqu’à la fin du monde par leur ministère C’est ainsi que les apôtres, tout en restant subordonnés à Christ, furent établis comme les fondements de l’Église chrétienne (Ephés.2.20 ; Apocalypse 21.14).
3° Nous trouvons là l’institution du baptême chrétien. Cette cérémonie commença, il est vrai, d’exister avant cette époque. Jean-Baptiste et Christ ont baptisé. Mais dans cette circonstance le baptême est établi comme une institution devant durer dans l’Église chrétienne jusqu’à la fin du monde. La cérémonie de la sainte cène avait été instituée immédiatement avant la crucifixion de Christ.
Ensuite les apôtres et d’autres avec eux reçurent le don extraordinaire et miraculeux du Saint-Esprit, comme le don des langues, celui de guérison, de prophétie, etc. A cet égard-là, le saint Esprit de Dieu fut abondamment répandu, de sorte que, non seulement les ministres, mais beaucoup de chrétiens dans le monde entier, vieux et jeunes, en furent rendus participants. Il ne vint pas exclusivement sur les dignitaires, ni sur les personnes les plus honorables, mais sur les serviteurs et sur les servantes, conformément à la prophétie de Joël 2.28-29 ; que l’apôtre Pierre déclare être accomplie dans cette dispensation (Actes 2.11).
Quelle admirable dispensation ! sous l’Ancien Testament il n’y eut que peu de personnes qui reçurent cet honneur. Moïse, il est vrai, désirait que tout le peuple de Dieu fût prophète (Nombres 11.29), tandis que Josué trouvait que c’était déjà trop que Eldad et Médad prophétisassent. Mais maintenant le souhait de Moïse est accompli. Et cela dura longtemps ainsi, jusqu’à la fin de l’âge apostolique, ou du premier siècle après la naissance de Christ, qui est appelé pour cette raison l’âge des miracles.
Cela contribua puissamment au succès de l’Évangile et à l’établissement de l’Église chrétienne, non seulement dans ce temps-là, mais dans tous les âges jusqu’à la fin du monde. Car le christianisme ayant une fois été établi par le moyen des miracles dans une si grande portion du monde connu, il fut ensuite plus facile de le conserver par tradition. Et ces dons extraordinaires de l’Esprit mirent les apôtres en état d’écrire le Nouveau Testament pour être la règle infaillible et perpétuelle de la foi et de la pratique dans l’Église. Et ces miracles mentionnés dans ces écrits sont pour tous les âges une preuve permanente de la vérité du christianisme.
Ensuite la révélation pleine et entière de ces grandes doctrines qui n’avaient été révélées qu’obscurément sous l’Ancien Testament. La doctrine de la satisfaction et de la justification par Christ, son ascension dans la gloire, les moyens de salut, étaient, sous l’Ancien Testament, dans une grande mesure, cachés sous le voile des types, des ombres et de révélations encore plus obscures ; car Moïse plaçait un voile sur sa face pour cacher son éclat. Mais maintenant le voile du temple est déchiré du haut en bas. Christ, l’antitype de Moïse, paraît dans tout son éclat ; sa face n’est point recouverte d’un voile (2 Corinthiens 3.12-13,18). Ces grands mystères, qui dans une certaine mesure étaient toujours restés secrets depuis la fondation du monde, sont aujourd’hui clairement révélés. « Or, à celui qui est puissant pour vous affermir selon mon Évangile, et selon la prédication de Jésus-Christ, conformément à la révélation du mystère qui a été caché dans les temps passés, mais qui est maintenant manifesté (Éphésiens 3.3-5 ; Romains 16.25). » « Savoir, le mystère qui avait été caché dans tous les siècles et dans tous les âges, mais qui est maintenant manifesté à ses saints (Colossiens 1.26). »
Ainsi le soleil de justice, après son lever, commença à briller avec éclat, et ne fut plus obscurément réfléchi comme précédemment. Christ, avant sa mort, révéla plusieurs choses plus clairement que cela n’avait eu lieu sous l’Ancien Testament ; mais les grands mystères de la rédemption par Christ, la résurrection par sa mort et la justification en vertu de sa justice ne furent pas révélées si clairement avant la résurrection de Christ. Il donna pour raison qu’il ne voulait pas mettre du vin nouveau dans de vieux vaisseaux, et la chose ne fut révélée que graduellement, même après sa résurrection. Il est très probable que Christ les instruisit personnellement dans des entretiens particuliers après sa résurrection et avant son ascension ; car nous lisons qu’il resta avec eux pendant quarante jours, leur parlant de choses concernant le royaume des cieux (Actes 1.3) ; et qu’ « il leur ouvrit l’esprit, afin qu’ils comprissent les Écritures (Luc 24.45). » Mais la complète révélation de ces choses eut lieu principalement après l’envoi du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte, conformément à la promesse de Christ : « J’ai à vous dire encore plusieurs choses, mais elles sont encore au-dessus de votre portée. Mais quand celui-là, savoir, l’Esprit de vérité, sera venu, il vous conduira en toute vérité (Jean 16.12-13). » C’est surtout l’apôtre saint Paul qui nous a donné cette révélation des mystères de l’Évangile ; par ses écrits, un enfant peut en apprendre plus sur les doctrines de l’Évangile, à divers égards, que n’en ont jamais connu les plus grands prophètes dans l’obscurité de l’Ancien Testament.
C’est ainsi que nous voyons comment la lumière de l’Évangile, qui commença à poindre immédiatement après la chute et alla en croissant pendant toutes les époques de l’Ancien Testament, est parvenue maintenant à sa plus grande splendeur, comme l’éclat du soleil qui brille dans toute sa gloire.
J’observerai encore l’institution de la charge de diacre dans l’Église chrétienne (dont nous avons le récit dans le sixième chapitre des Actes), pour pourvoir aux besoins temporels des membres de l’Église, et pour exercer la charité, cette grande vertu chrétienne.
Tout cela commença par sa conversion sur le chemin de Damas, et ce fut un des plus grands moyens d’assurer le succès qui suivit, car il y contribua, plus que tous les autres ensemble, par ses travaux, sa prédication et ses écrits ; il travailla plus qu’eux tous. Comme il était l’apôtre des Gentils, ce fut surtout par le moyen de son ministère que les Gentils furent appelés, et que l’Évangile se répandit dans le monde. C’est à lui surtout que notre nation et celles d’Europe sont redevables de la connaissance de l’Évangile ; et le Saint-Esprit se servit de lui, plus que de tous les autres apôtres, pour révéler les grandes vérités de l’Évangile par ses écrits, à l’usage de l’Église dans tous les âges.
L’institution des conciles ecclésiastiques pour décider les controverses et régler les affaires de l’Église, ainsi que cela est raconté (Actes 15.9).
Il fut tout écrit après la résurrection de Christ par les apôtres eux-mêmes, excepté les évangiles de Marc et de Luc, et le livre des Actes. On suppose que celui qui écrivit l’évangile de Marc était le fils de cette Marie chez qui on était réuni en prières en faveur de Pierre, lorsque, délivré de la prison par un ange, il vint et frappa à la porte. « Il vint à la maison de Marie, mère de Jean, surnommé Marc, où plusieurs étaient assemblés et faisaient des prières (Actes 12.12). » Il était le compagnon de voyage des apôtres Barnabas et Paul (Actes 15.37). Il était fils de la sœur de Barnabas, et il semble avoir été pendant quelque temps le compagnon de l’apôtre Paul. « Aristarque, qui est prisonnier avec moi, vous salue aussi, et Marc, qui est le cousin de Barnabas, touchant lequel vous avez reçu un ordre, s’il vient à vous, recevez-le (Colossiens 4.10). » L’Apôtre semble avoir fait grand cas de lui, comme on le voit par ces passages : « Barnabas aussi et Saul, après avoir achevé leur commission, s’en retournèrent de Jérusalem, ayant aussi pris avec eux Jean, qui était surnommé Marc (Actes 12.25). » « Et quand ils furent à Salamis, ils annoncèrent la Parole de Dieu dans les synagogues des Juifs ; et ils avaient aussi Jean pour leur aider (Actes 13.5). » « Luc est seul avec moi. Prends Marc, et amène-le avec toi ; car il m’est fort utile pour le ministère (2 Timothée 4.11). »
Celui qui a écrit l’évangile de Luc et le livre des Actes, fut un grand compagnon de voyage de l’apôtre Paul. Il est dit qu’il était avec lui dans le dernier endroit mentionné dans le livre ; il parle de lui-même comme accompagnant Paul dans ses voyages, aussi emploie-t-il la première personne du pluriel. Nous allâmes à tel endroit, nous mîmes à la voile, etc L’apôtre Paul l’aimait beaucoup ; il est le médecin bien-aimé dont il est question (Colossiens 4.14). L’Apôtre compte Marc et Luc au nombre de ses compagnons de voyage. « Marc aussi, et Aristarque, et Demas, et Luc, mes compagnons d’œuvre (Philémon 1.24). »
Les livres, du Nouveau Testament sont historiques, dogmatiques ou prophétiques. Les livres historiques sont les écrits des quatre Evangélistes, qui nous donnent l’histoire de Christ, de la rédemption accomplie par Lui, de sa résurrection et de son ascension. Les Actes des Apôtres qui nous donnent un récit des grands événements qui concoururent au premier établissement et à la propagation de l’Église chrétienne. Les livres dogmatiques sont les Epîtres, la plupart écrites par l’apôtre Paul. Nous avons un livre prophétique, qui est placé à la fin de l’histoire de la Bible, et qui nous donne un récit des grands événements qui doivent concourir au développement de l’œuvre de la rédemption jusqu’à la fin du monde.
On croit que tous ces livres ont été écrits avant la destruction de Jérusalem, excepté ceux de l’apôtre saint Jean qui vécut plus longtemps que tous les autres apôtres, et qui écrivit, à ce qu’on croit, après cet événement. Ce fut à ce disciple bien-aimé que Christ révéla les choses admirables qui devaient avoir lieu dans son Église jusqu’à la fin du monde ; il mit la dernière main au canon des Écritures et scella le tout. De sorte que maintenant ce canon, règle grande et permanente de la foi de l’Église qui commença à être écrite du temps de Moïse est complété et arrêté, et une malédiction est prononcée contre celui qui y ajouterait ou qui en retrancherait quelque chose. Et ainsi tous les moyens de grâce ont été déterminés dans le siècle apostolique ou avant la mort de l’apôtre Jean, et ils resteront les mêmes jusqu’au jour du jugement. Tout ceci a rapport aux choses qui ont servi à l’établissement des moyens de grâce dans l’Église chrétienne.
Depuis la résurrection de Christ jusqu’à la chute de l’Antéchrist, nous trouvons une époque de tribulation pour Sion. Pendant cette période il y a toujours eu quelque portion de l’Église persécutée, et, pendant une grande partie du temps, cela a été vrai de l’Église entière ou du moins de l’ensemble du peuple de Dieu. Pendant les trois premiers siècles après Christ, l’Église fut généralement dans une grande affliction ; elle eut à souffrir les mauvais traitements et les reproches de la part des Juifs d’abord et ensuite de la part des païens. Après quoi, dès le commencement du règne de Constantin, l’Église pour quelque temps jouit du repos et de la prospérité : cela est figuré dans l’Apocalypse, ch. 7, par les anges qui retiennent les quatre vents pour un peu de temps. Mais peu après l’Église eut à souffrir persécution de la part des Ariens. Après cela, l’Antéchrist s’éleva, l’Église fut chassée dans le désert ; elle fut dans l’obscurité, le mépris et la souffrance pendant longtemps jusqu’à la réformation de Luther et des autres réformateurs. Et depuis la Réformation les persécutions de l’Église ont dépassé tout ce qu’on avait vu précédemment. Et, bien que quelques portions de l’Église de Dieu aient eu quelquefois du repos, néanmoins, jusqu’à aujourd’hui, en général, la vraie Église est subjuguée par ses ennemis, et quelques-unes de ses parties souffrent de cruelles persécutions, et il faut s’attendre qu’il en soit toujours ainsi jusqu’à la chute de l’Antéchrist. Alors viendra le jour marqué dans lequel l’Église doit prospérer sur la terre, le temps arrêté dans lequel Dieu favorisera Sion, le jour dans lequel les saints ne seront plus assujettis aux méchants, mais dans lequel ils régneront comme cela est dit (Apocalypse 5.10). « Afin que le règne et la domination, et la grandeur des royaumes, qui sont sous tous les cieux, soit donnée au peuple des saints du Souverain (Daniel 7.27). »
Dans l’histoire on représente cette époque des souffrances de l’Église comme un temps de travail (Jean 16.20-21 ; Apocalypse 12.1-2), dans lequel elle s’efforce d’obtenir cette gloire et cette prospérité qui doivent suivre la chute de l’Antéchrist, et alors elle mettra au monde son enfant. C’est là une longue période de trouble et d’affliction, bien qu’elle soit courte en comparaison de la prospérité éternelle qui lui est réservée. C’est pourquoi, pendant ces afflictions elle s’écrie : « Jusques à quand, Seigneur, qui es saint et véritable, ne juges-tu point, et ne venges-tu point notre sang de ceux qui habitent sur la terre (Apocalypse 6.10). » Et il est dit : « Et il leur fut donné à chacun des robes blanches, et il leur fut dit qu’ils se reposassent encore un peu de temps, jusqu’à ce que le nombre de leurs compagnons de service, et de leurs frères qui doivent être mis à mort comme eux, soit complet (Apocalypse 6.11). » « Quand est-ce que sera la fin de ces merveilles (Daniel 12.6) ? »
Il est à remarquer que pendant ces souffrances de l’Église, le gouvernement romain a été le principal instrument de ces persécutions. C’est pourquoi, dans le Nouveau Testament, Rome est appelée Babylone, parce que de même qu’anciennement Jérusalem eut surtout à souffrir de la part de Babylone, ainsi l’Église chrétienne, la Jérusalem spirituelle, pendant son long temps d’épreuve, a eu surtout à souffrir de la part de Rome. Avant l’Église de Constantin, l’Église chrétienne eut à souffrir de la Rome païenne ; depuis elle a eu surtout à souffrir de la part de la Rome papale. Et de même qu’anciennement la captivité des Juifs cessa à la destruction de Babylone, ainsi la persécution de l’Église chrétienne cessera avec la destruction de l’Église de Rome.