« Que ton argent périsse avec toi puisque tu as cru que le don de Dieu, s’acquérait à prix d’argent ! »
(Actes 8.20)
Le Nouveau Testament raconte qu’un sorcier païen, nommé Simon, offrit de l’argent aux apôtres, en leur disant : « Vendez-moi le pouvoir de conférer, comme vous, le Saint-Esprit par l’imposition des mains. » Pierre, indigné s’écria : « Que ton argent périsse, et toi-même avec lui ! » En souvenir de cet incident dramatique, l’église du moyen âge appela « simonie » le crime des ecclésiastiques romains qui achetaient leurs dignités et leurs prébendes. L’histoire honore, en Grégoire VII, l’un des plus implacables adversaires de ce trafic impie.
En l’année 910, aux environs de Mâcon, le duc d’Aquitaine, Guillaume le Pieux, avait fondé le monastère de Cluny ; initiative expliquée en ces termes : « Si je ne puis mépriser moi-même toutes les choses de la terre, je puis soutenir ceux qui méprisent le monde, ceux que je crois justes aux yeux de Dieu ; je recevrai donc une récompense de jute. »
L’ordre de Cluny, soustrait à toute autre suprématie que celle du pape, se proposait de réformer les mœurs et la discipline du clergé, en particulier du clergé « régulier », celui qui vit dans les couvents. En ce qui regarde le clergé « séculier », celui qui vit dans le monde, comment transformer l’épiscopat, tant que les évêques seraient les obligés des suzerains laïques, distributeurs des riches prébendes ecclésiastiques ? Et encore, comment restaurer la suprématie pontificale, aussi longtemps que l’élévation au Saint-Siège resterait â la merci des barons romains et des empereurs allemands ?
A la fin du XIe siècle, ces problèmes obsédaient un moine de Cluny, nommé Hildebrand, fils d’un charpentier italien. Il mûrissait des pensées qu’il rédigea plus tard sous la forme suivante : « Un pontife romain, s’il est ordonné selon les règles, devient indubitablement saint. Il y a dans le monde un nom unique, celui du pape. Il est le seul homme dont tous les peuples doivent baiser les pieds. Il ne peut être jugé par personne. Il a le droit de déposer les empereurs. L’Eglise romaine ne s’est jamais trompée et ne se trompera jamais. »
Ces prétentions énormes étaient soutenues par l’homme, extraordinaire, dont ses amis déclaraient qu’il fallait épeler le nom : « Hell-brand, Pure flamme », tandis que ses ennemis voulaient qu’on l’écrivit : « Hoell-brand, Tison d’enfer ».
Dans son enfance, à Rome, il avait observé l’infâme pontificat de Benoît IX, pape voleur, débauché ; homicide ; il s’était juré de mettre fin à cet état de choses. Pour atteindre plus sûrement ce but, il entra à l’abbaye de Cluny. Là, il se prépara, dans l’ombre, à réformer l’Eglise en agissant directement sur la papauté. Agé de vingt-neuf ans, il accompagna son abbé a Besançon, pour rencontrer un nouveau pape, Léon IX, qui se rendait en Italie. Le pontife demanda au jeune moine de se joindre à lui, pour le voyage. Hildebrand répondit : « Eh quoi ! vous allez vous emparer de l’Eglise romaine, sans mandat ecclésiastique, par la seule faveur laïque et royale ! » Troublé par ces remontrances, le pape, une fois à Rome, se présenta dans l’église de Saint-Pierre. en habit de pèlerin et pieds nus, pour solliciter le consentement du clergé et du peuple à son élévation.
Donc, nous voyons déjà s’affirmer la prodigieuse influence personnelle d’Hildebrand. A la mort de Léon IX, il désigna, lui-même à l’empereur un nouveau pape allemand, Victor Il. Celui-ci, reconnaissant ne manqua point d’utiliser les services d’un homme aussi dévoué à la papauté ; il l’envoya dans un concile, en France, comme légat du pape. Là, Hildebrand, avec intrépidité, accusa un archevêque d’avoir acheté, à prix d’argent, les honneurs ecclésiastiques ; il le convainquit, ainsi, du crime de « simonie » ; et la puissante de sa parole fut telle, que plusieurs prélats, s’avouant coupables du même péché, se démirent de leurs fonctions.
Quand Victor II mourut, Hildebrand, pour affranchir la papauté de la domination allemande, fit nommer un abbé lorrain, Etienne IX, partisan des doctrines de Cluny. Mais il mourut au bout de huit mois, en voyage, après avoir fait jurer au clergé qu’on attendrait le retour d’Hildebrand, alors en Allemagne, pour nommer un nouveau pape. Ce vœu fut respecté ; si bien que l’animateur caché de l’établissement romain fit nommer Nicolas II, et dirigea sa conduite, comme il avait dirigé son élection. Hildebrand à mesure qu’il affermissait, en secret, sa propre autorité, travaillait plus ouvertement à l’exécution d’un programme depuis longtemps médité. Par exemple, afin d’enlever à l’empereur le droit de nommer les papes, un concile décida que, le pontife serait dorénavant choisi de préférence parmi les Italiens et désigné par les cardinaux. Pareille décision créa une grande effervescence en Allemagne.
Sur ces entrefaites, Nicolas II mourut. Hildebrand, jamais pris au dépourvu, fit nommer Alexandre II. Les papes avaient beau mourir comme des mouches, en ses parages, nul ne l’accusait d’avoir le mauvais œil, tant il imposait la confiance et le respect. L’empereur d’Allemagne, Henri IV, vexé de perdre ses prérogatives pour les élections au Saint-Siège, désigna lui-même, un autre pape. Celui-ci, excommunié par Alexandre II, dut renoncer à ses ambitions. Cette fois, la vérité devint éclatante : le maître du romanisme était, décidément, Hildebrand ! Devenu chancelier de l’Eglise, il écrivait des lettres au loin, il envoyait des ambassadeurs ; les évêques et les princes lui adressaient des messages. Il reçut l’hommage suivant : « Je vénère le pape au nom du rite ; mais toi, je t’adore, prosterné. »
Quand Alexandre mourut (c’était le onzième pape qu’Hildebrand voyait passer de vie à trépas), un événement extraordinaire - mais non imprévu - se produisit durant les obsèques. Brusquement, des voix tumultueuses acclamèrent le chancelier de l’Eglise, et le saluèrent souverain pontife. Immédiatement conscient de sa force, persuadé que sa destinée se réalisait enfin, Hildebrand se coiffa d’une mitre ornée de deux cercles d’or, avec la double inscription : Couronne royale, donnée de Dieu. Couronne impériale, donnée de la main de saint Pierre. Une fois en possession du pouvoir, il rédigea des lettres pour expliquer cette élection précipitée : « Ils s’élancèrent sur moi comme des insensés ; et je pouvais dire après le prophète : La tempête m’a submergé ; j’ai crié avec effort, ma gorge est devenue rauque. »
Il montait sur le trône pontifical à l’âge de soixante ans. Déjà fameux sous le nom d’Hildebrand, le sexagénaire trouva moyen de se rendre doublement illustre, sous le nom de Grégoire VII ; car la personne de ce grand pape domine l’histoire du catholicisme romain.
Le procès-verbal de son élection au pontificat s’exprime ainsi : « L’an 1073 de l’Incarnation, le 22 avril, nous, cardinaux de l’Eglise romaine, avons élu, pour pasteur et souverain pontife, l’homme religieux instruit dans les sciences divines et humaines, amateur fervent de l’équité et de la justice, fort dans l’adversité, sage dans la prospérité, orné de bonnes mœurs, pudique, modeste, sobre, chaste, hospitalier, sachant gouverner sa maison, élevé et instruit dès l’enfance dans le sein de la mère Eglise, – l’archidiacre Hildebrand, que nous voulons être et être dit, dès aujourd’hui, et à toujours, Grégoire, pape et apostolique. – Vous plait-il ? – Il nous plait. – Le voulez-vous ? – Nous le voulons. – Le louez-vous ? – Nous le louons. »
Malgré ce concours d’approbations ferventes et d’adulations sincères, Grégoire VII affirmait que cette élection le remplissait d’inquiétude, d’amertume et de douleur. Depuis bien des années, sans doute, c’est lui qui tenait le gouvernail dans la « barque de saint Pierre ». Il connaissait le port vers lequel il aspirait à la conduire ; il discernait, mieux que personne, les passes difficiles à franchir avant de toucher le but ! Il fallait, d’abord, moraliser le clergé. Puis délivrer l’Eglise de la sujétion aux princes. Enfin, soumettre à une règle spirituelle un monde brutal où la violence évinçait le Droit. Sur ce point spécial, son programme était, en quelque sorte, celui de la Société des Nations ; celle-ci emploie un vocabulaire différent ; elle ne fait pas officiellement appel à l’inspiration religieuse ; mais son idéal est conforme à celui qui s’exprime dans l’oraison dominicale : « Ta volonté soit faite sur la terre ! »
En dépit de ses craintes, Grégoire obéit à la volonté d’En-haut, manifestée dans son élection. Il se mit à l’œuvre avec une volonté de fer et une superbe vaillance. Ici-bas, le pouvoir échoit trop souvent à des personnages indignes de l’exercer, car ils manquent d’autorité morale. Ils ont le pouvoir sans l’autorité.
D’autre part, celle-ci rayonne parfois en des êtres d’élite, à qui manquent, hélas ! les moyens pratiques d’agir et le droit de commander ; ils ont l’autorité sans le pouvoir. En Grégoire VII, les deux grandeurs combinées jaillirent, comme la flamme du chalumeau oxydrique, en un seul jet brûlant, capable de fondre le métal d’un coffre-fort.
Le pape notifia son élévation à divers chefs d’Etat, même au roi de Danemark, et convia plusieurs princes à venir délibérer avec lui sur la situation de la chrétienté ; il envoya des légats en Lombardie, en Sardaigne, en Espagne, en Bohème, en Allemagne ; il convoqua un concile à Rome ; il écrivit à l’empereur de Constantinople, pour travailler à la réconciliation de l’Eglise grecque et de l’Eglise romaine. Il manda aux peuples de Lombardie : « De ce lieu, où j’ai été placé, il me faut, que je le veuille ou non, annoncer à toutes les nations la vérité et la justice, et obéir au Seigneur qui a dit : Crie sans fin, sans repos ; dis aux hommes tous leurs crimes, si tu laisses un seul méchant dans son iniquité, c’est à toi que je demanderai compte de son âme. »
Il méditait même de relever l’Eglise dans l’Afrique du Nord, et d’y rendre à la religion du Christ son ancien empire détruit par Mahomet. Il rêvait d’une expédition guerrière pour secourir Constantinople, menacée par les infidèles ; de là, les chevaliers « chrétiens » se seraient dirigés sur Jérusalem. C’est l’idée inspiratrice des croisades. En attendant, il intervenait dans le gouvernement des Etats et lançait un violent réquisitoire contre le roi de France, Philippe Ier, l’accusant de « simonie », et déclarant qu’il était moins un roi qu’un tyran.
Toutefois, le zèle papal souleva en Allemagne une résistance passionnée. L’empereur de Germanie, Henri IV, aspirait à continuer Charlemagne. Les prescriptions
ou les interdictions du pontife, dans le domaine ecclésiastique, apparurent à l’empereur comme une intrusion attentatoire à ses prérogatives ; foula aux pieds les règles édictées par le pape. Celui-ci n’était pas homme à reculer. Il invita le monarque à comparaître devant un concile, en février 1076, sous peine d’être excommunié. Furieux, Henri IV convoqua un synode, et fit déclarer par l’assemblée que le pape était déchu du pontificat. Il qualifiait le Saint-Père de « loup dévorant ». Grégoire VII répliqua d’une manière foudroyante. Il excommunia l’empereur. Nous avons peine, aujourd’hui, à nous représenter le poids d’une pareille condamnation pour celui qu’elle écrasait.
Le pape estima que l’excommunication religieuse n’était pas une peine suffisante ; ou plutôt, il voulut en déduire les extrêmes conséquences dans le domaine politique, au nom du raisonnement suivant : Est-ce que tous les chrétiens d’Allemagne, en recevant le baptême, n’étaient point tombés sous la juridiction spirituelle du pape ? Et celui-ci pouvait-il tolérer, sans dommage pour leurs âmes, qu’ils obéissent à un excommunié, à un damné ? Le devoir du souverain Pasteur, vicaire de Jésus-Christ ici-bas, était donc d’avertir le peuple allemand que l’empereur Henri IV avait perdu le droit de commander à ses prétendus sujets.
L’énormité d’une pareille prétention méritait quelques précautions oratoires, dans l’exposé de l’attitude adoptée par Grégoire VII. Celui-ci jugea prudent de s’abriter derrière le pêcheur du lac de Génézareth, promu, par l’enseignement conventionnel des papes, à la dignité de premier pontife de l’Eglise romaine. Grégoire s’exprima donc en ces termes : « Bienheureux Pierre Prince des apôtres, écoutez votre serviteur que vous avez jusqu’à ce jour, délivré des mains des injustes, qui me haïssent parce que je suis fidèle. Vous m’êtes témoin, ainsi que la Mère de Dieu et Paul, que c’est malgré moi que l’Eglise romaine m’a mis à son gouvernail ; c’est donc par votre grâce que le peuple chrétien me doit une spéciale obéissance, et par votre grâce que Dieu m’a donné le pouvoir sur la terre de lier et délier dans les cieux. Dans cette foi, et pour l’honneur et la défense de votre Eglise, – Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, – j’enlève au roi Henri le gouvernement de tout le Royaume d’Allemagne et de l’Italie ; je délie tous les chrétiens des serments qu’ils lui ont fait ou lui feront et j’interdis que personne le serve comme roi. »
Que duel dramatique s’annonce ! Qui cédera, l’héritier de César ou le successeur de l’Apôtre ? Le premier, armé du glaive, symbolisait l’âge de fer. Le second, dressant la croix, était censé représenter l’ère de l’Evangile.
Les esprits se partagèrent sur la légitimité de l’acte audacieux du pape. En coupant les liens de fidélité qui unissaient les sujets à leur suzerain, est-ce qu’il n’ébranlait pas l’ordre social ? Est-ce qu’il ne devenait pas un fauteur d’anarchie ? Le pape estima opportun de se disculper. Il le fit en aggravant délibérément son cas. Il ne se borna plus à foudroyer un roi ; c’est la royauté elle-même qu’il pulvérisa de sarcasmes incendiaires : « Qui a inventé le pouvoir des rois ? L’orgueil humain. Qui a établi le pouvoir des évêques ? La pitié divine. Nul n’ignore que les rois ont fondé leur empire sur l’oubli de Dieu, la rapine, la perfidie, l’homicide, et tous les crimes, - et ils osent prétendre régner sur les hommes, sur leurs égaux ! L’épiscopat est à la royauté ce que l’or est au plomb. »
Implacable et superbe ironie. Le prêtre, ici, retrouve les accents du prophète. On croit entendre Samuel, essayant d’empêcher l’élection d’un roi en Israël : « Il prendra vos fils et vos filles, vos serviteurs et vos servantes, la meilleure partie de vos champs, la dîme du produit de vos vignes, et vous serez des esclaves. » (1 Samuel 8.10-17). — Thème repris par le fabuliste : Les grenouilles demandant un roi.La magnifique intrépidité de Grégoire VII frappa les imaginations. L’empereur, en lui résistant, avait mal évalué le prestige moral de la papauté, redressée par l’inlassable effort d’un Hildebrand. Plusieurs princes d’Allemagne furent troublés par l’initiative pontificale ; d’autres étaient hostiles au monarque ; bref, réunis dans une Diète, ils décidèrent qu’on élirait un nouvel empereur, si Henri IV n’obtenait pas l’absolution papale ; on lui accordait, pour cela, un délai d’une année, à dater de son excommunication.
Furieux, mais surtout inquiet, l’empereur finit par se résigner à l’inévitable. Vers la Noël de l’an 1076, il décida de tenter auprès du pape une démarche amèrement humiliante. Il quitta l’Allemagne à la dérobée, pour gagner l’Italie par le col du Grand-Saint-Bernard. C’était l’ancienne voie romaine de Milan à Mayence ; le chemin qu’avait suivi lui-même Hildebrand, trente années plus tôt, quand il avait conduit le pape Léon IX de Besançon à Rome.
Mais, cette fois, le voyage fut moins facile. Le roi quitta Vevey vers le 1er janvier, par un froid noir. On souffrait d’un hiver atrocement dur ; le Rhin était gelé depuis le mois de novembre, et il le resta jusqu’au mois de mars. Vous devinez ce que fut la rude escalade à travers la montagne, où sifflait un vent glacial. Maintes fois, la petite caravane, qui se traînait le long des rocs, sous le ciel hostile, eut la tentation de rebrousser chemin ; mais il ne fallait pas songer à s’arrêter, car la date fixée par la Diète allemande, pour la déchéance éventuelle de l’empereur, approchait inexorablement.
Devant les pèlerins transis, les guides poussaient ou tiraient des bœufs, pour frayer un sentier à travers la neige. Dans ce paysage polaire, Henri était en souci constant pour sa femme et pour son fils qui accompagnaient l’empereur en disgrâce. Il veillait sur ces êtres précieux, avec l’espoir qu’une fois parvenus au terme de la montée, il pourrait leur donner les soins nécessaires ; il les voyait déjà devant un grand feu de bois dans le couvent ou dans l’hospice qui recevaient les voyageurs au sommet du col. Hélas ! quelle déception ! Les maisons étaient bien là, auprès d’un lac gelé ; mais personne pour accueillir les chemineaux. Cependant, ceux-ci, grelottants, y passèrent la nuit.
Quand il fallut repartir, les difficultés redoublèrent. Comment descendre l’autre versant de la montagne ? C’était un mur de glace. Les chevaux glissaient, tombaient, refusaient d’avancer. On en fit dévaler avec des cordes. On en lia sur des planches qui servirent de traîneaux ; plusieurs bêtes furent blessées à mort. Les hommes rampèrent. On plaça les femmes sur des peaux de bœufs, dans lesquelles on enfonça des crampons de fer pour les tirer. Au prix d’incroyables efforts, on parvint dans la plaine italienne.
A Turin, l’empereur ne pu rester inaperçu ; des évêques excommuniés pour sa cause l’acclamèrent. Il garda une attitude embarrassée, car il arrivait non en vainqueur, mais en suppliant.
Quant à Grégoire VII, les pieds au chaud, il se tenait dans la forteresse de Canossa, entourée d’une triple enceinte, au sommet d’un roc. Il savourait en silence le triomphe qui se préparait pour la papauté. On lui signalait les mouvements de l’empereur pénitent. D’ailleurs, il avait reçu la plus agréable des visites, annonciatrice de l’événement espéré avec ardeur ; des prélats et des laïques excommuniés, qui s’étaient abstenus de voyager avec Henri, trop compromettant, avaient demandé audience au pontife ; celui-ci leur avait accordé l’emprisonnement ! Après cette salutaire expérience, en cellule, au pain et à l’eau, le pape leur avait accordé l’absolution ; mais ils avaient dû promettre qu’ils ne rentreraient pas en relation avec leur prétendu suzerain.
L’empereur de son côté, essayant de préparer les voies, s’était fait précéder auprès de Grégoire par divers messagers ; ainsi Jacob, avant sa rencontre avec Esaü... Enfin, voici le monarque en personne à Canossa ! Il obtint une entrevue avec la princesse Mathilde, sa cousine qui promit d’intercéder en sa faveur auprès du pape. Cette femme, comtesse de Toscane, vénérait dans le pape un père spirituel ; elle avait placé à sa disposition des biens immenses ; en lui léguant ses possessions territoriales, elle facilita la constitution d’un Etat papal. Dans le château de Canossa, le pontife était son hôte. Elle se trouvait donc très qualifiée pour lui transmettre les vœux de l’impérial excommunié. Grégoire VII répondit : « Qu’il nous remette la couronne. et se déclare indigne du trône. »
Refusant de plier sous une pareille intransigeance, l’empereur fit tenter de nouvelles démarches, pour fléchir le pontife. En réponse aux instances dont on l’assiégeait, Grégoire déclara qu’il daignait recevoir l’excommunié, mais seulement « à la pénitence », - autrement dit, dans l’attitude imposée aux pénitents, pieds nus, vêtu de la chemise de laine.
Henri arriva sous les murs, avec d’autres excommuniés ; ils franchirent ensemble la première porte. Mais on l’admit, seul, dans la seconde enceinte. Il attendit. Les minutes passèrent ; les heures se succédèrent ; la matinée se termina ; la lumière pâle d’une après-midi de janvier s’estompa ; le soleil disparut, et le pape ne s’était point montré. L’empereur, les pieds dans la neige, bleuis de froid, était resté debout, sans nourriture, frissonnant, affamé. Le lendemain, même station du pénitent ; le pontife demeurait invisible ; peut-être observait-il, à la dérobée, sa victime. La troisième journée ramena la même torture, encore plus morale que physique. L’excommunié, à bout de force nerveuse, versa des larmes. Désespéré, il se retira, entra dans une chapelle, implora encore la princesse Mathilde. Celle-ci se joignit à l’entourage du pape pour fléchir le vieillard. Grégoire énuméra les rigides clauses du pardon : ne conserver aucune marque de la dignité royale, se faire juger par une Diète, jurer obéissance au pape.
Enfin le 25 janvier, quatrième jour de la pénitence, le pontife autorisa le roi à se présenter devant lui. L’excommunié pleurait. Il se jeta contre le sol, les bras en croix, implorant la pitié du pape ; celui-ci ne put, lui-même, retenir ses larmes devant ce jeune monarque, âgé de vingt-sept ans, ainsi prosterné à ses pieds.
Ensuite, on procéda solennellement à l’absolution. Grégoire, en grand costume, s’assit devant la principale église de Canossa. Henri, le torse nu, suivi d’évêques et de seigneurs dépouillés comme lui jusqu’à la ceinture, déclara : « Très saint Père ! je prie votre Sainteté de me délier des liens de l’anathème. » Grégoire prit une baguette et en toucha plusieurs fois le dos du pénitent, en récitant le psaume : « Aie pitié de moi, selon ta grande miséricorde ! » Puis, ôtant sa mitre, il ajouta : « Seigneur, ayez pitié de nous ! O Dieu ! sauvez votre malheureux serviteur, lié des chaînes de l’excommunication. » Il ceignit de nouveau la mitre et conclut : « Par l’autorité du Dieu tout-puissant et des bienheureux apôtres Pierre et Paul, je te délie des liens de l’anathème. »
Prenant alors le roi par la main, il le conduisit dans le sanctuaire et déclara : « Je le ramène dans le sein de la chrétienté. » Puis, il lui donna le baiser d’amour et chanta la grand’messe. Au moment de la communion, il lui présenta l’hostie en disant : « Que Dieu me frappe de mort, si je suis coupable des crimes dont tu m’as accusé ! », et il en mangea la moitié. Ensuite, il tendit l’autre moitié à Henri, avec ces mots : « Fais de même, si tu as la conscience tranquille. » L’empereur, troublé, refusa de tenter l’épreuve ; car, expliquait-il, elle restera vaine pour mes ennemis, sans le témoignage des grands qui me sont restés fidèles.
Grégoire n’insista point. Il avait trouvé moyen d’excommunier, pratiquement, son adversaire, au moment même où il lui accordait, théoriquement, l’absolution. Il acheva la cérémonie, tandis que l’empereur, consterné, n’osait regarder l’autel.
Après cet office dramatique, le pape et l’empereur prirent ensemble un frugal repas, et ils se séparèrent. Henri brûlait de se venger. Le pontife était-il plus sincère ? Il déclarait aux ennemis d’Henri, mécontents de l’absolution : « Ne soyez pas inquiets. Je vous le renvoie plus accusable qu’il n’était. » Puis il écrivit en Allemagne pour étaler publiquement les humiliations cachées du roi, pour le dégrader aux yeux de ses sujets, et favoriser les mouvements qui tendaient à le renverser. Voici en quels termes il s’exprima : « Grégoire, évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, à tous les archevêques, évêques, ducs, comtes, et aux grands du royaume teutonique.- En la ville de Canossa, le roi se tint pendant trois jours devant la porte du château, dépouillé de tout l’attirail de la royauté, déchaussé et vêtu de la chemise de laine, implorant sans cesse, avec beaucoup de larmes, l’aide et les consolations de la pitié apostolique, jusqu’à ce que tous les présents, émus de pitié et de miséricorde, eussent intercédé pour lui, avec beaucoup de prières et de larmes ; tous admirant la dureté insolite de notre cœur ; quelques-uns s’écriant que ce n’est pas là une sévérité apostolique, mais la cruauté d’un impitoyable tyran. » La lettre se terminait par des phrases ambiguës, où l’absolution semblait diluée : « Nous n’avons rien fait pour le roi, sinon de lui dire qu’il espérât en nous pour les choses dans lesquelles nous pourrons l’aider, sans exposer notre âme et la sienne. » De fait, en interdisant à Henri de reprendre la couronne, ou bien il obligeait le monarque à rester avili, ou bien il le plaçait à nouveau sous l’excommunication.
Exalté par une telle victoire, le pape redoubla d’audace et de sévérité en Europe. Vainement, lui opposait-on le privilège ou l’usage ; il s’écriait : « Dieu n’a pas dit : Je suis la coutume ! Il a dit : Je suis la vérité ! »
Henri, de son côté, résolu à rétablir sa position, refusa d’être soumis au jugement d’une Diète, et reprit l’appareil royal. Les princes hostiles à sa personne, lui opposèrent un anti-roi, le duc de Souabe, Rodolphe. De sanglantes batailles désolèrent l’Allemagne.
En face des deux partis, le pape se réservait. Enfin, il se déclara en faveur de Rodolphe, il lui envoya une couronne ; puis il déclara Henri déchu du trône. Pour la première déposition de l’empereur, le pontife n’avait cherché que l’appui du seul saint Pierre ; pour la seconde, il appela aussi à son aide saint Paul. Il les invoqua l’un et l’autre : « Faites que le monde entier sache que vous pouvez ôter et donner à chacun, selon ses mérites, les duchés, les royaumes, les empires. »
Cette nouvelle déposition du monarque ne provoqua plus la stupeur de l’aristocratie allemande ; elle provoqua sa révolte. De même que les classes possédantes, aujourd’hui, combattent le programme socialiste, parce que son application ébranlerait le régime actuel de la propriété, de même les détenteurs du pouvoir, seigneurs et princes, redoutèrent, les interventions du pape contre les autorités établies. Celles-ci se jugèrent menacées. Leur concours appuya l’empereur, lorsqu’il décida, en 1080, de déposer à nouveau le pontife : « Henri, roi par la volonté de Dieu, à Hildebrand, non pape, mais faux moine, ravageur d’églises et nécromancien … Moi, Henri par la grâce de Dieu, je te crie avec tous nos évêques : Descends ! Descends ! » Comme antipape, il élut l’archevêque Guibert, ardent ennemi de Grégoire. Cette fois, l’ancien pénitent de Canossa était résolu à ne rien ménager, pour abattre l’orgueilleux vieillard du Vatican. Débarrassé de son rival Rodolphe, qui avait péri dans une bataille, il dirigea une expédition guerrière contre Rome ; son farouche espoir était de mettre la main sur Grégoire VII : « Dent pour dent ! »
Le pontife, réfugié au château Saint-Ange, tint bon durant quatre années, malgré la dévastation systématique des campagnes par l’armée assiégeante. Des deux côtés, on se combattait, non seulement par des échanges de coups, mais par des distributions d’argent, et par la ruse. Henri fit savoir aux Romains qu’il était prêt à reconnaître Grégoire comme pape, et à recevoir de lui la couronne royale. Le peuple, fatigué des souffrances de la guerre, envoya une députation à Grégoire, le suppliant avec larmes, de prendre en pitié une ville à moitié ruinée. Mais le pape resta inflexible. Il ne voulait pas consentir à désavouer, par un moment de défaillance, l’œuvre de toute sa vie. Cependant, comme on redoublait d’instances, il résolut de justifier son attitude en prouvant qu’il pouvait s’appuyer, non seulement sur le droit, mais sur la force.
Dès 1059, un traité en règle avait « scellé l’alliance de la papauté romaine et de ces splendides pillards, qui faisaient trembler toute l’Italie : les Normands ». Il est vrai que Grégoire avait eu l’occasion d’excommunier leur-chef, Robert Guiscard ; mais le péril de l’Eglise obligeait le pontife à oublier ce détail. Il entra donc en pourparlers avec le bandit ; et, afin de lui laisser le temps, d’arriver avec trente mille soudards, on prépara la convocation d’une assemblée ecclésiastique, destinée à prononcer le jugement final sur la querelle entre le pape et l’empereur. Ce concile réunit si peu de prélats, qu’il ne put moralement statuer sur l’état pitoyable de l’Eglise ; mais Grégoire y défendit les droits de la papauté avec une telle sincérité, une telle véhémence, qu’il arracha des larmes à tous ses auditeurs. Il profita de l’occasion pour excommunier à nouveau l’empereur, qui avait mis en prison plusieurs délégués en route vers le concile : c’étaient les évêques favorables au pape. Les autres avaient négligé de se déplacer, car ils savaient Grégoire décidé à imposer dans l’assemblée, ses propres vues.
Peu après cette réunion, le pape découvrit que les Romains avaient secrètement juré à Henri, où bien de lui faire obtenir de Grégoire la couronne impériale, ou bien d’élire un autre pontife. Ceux qui révélèrent cette promesse au pape lui expliquèrent la chose en ces termes : « Nous n’avons pas promis que tu oindrais solennellement l’empereur, mais que tu lui donnerais la couronne. » Cette remarque fut un trait de lumière pour le pape ; il y découvrit le moyen de sortir d’embarras sans obliger les Romains à violer un serment. « Si Henri, expliqua-t-il, vient à résipiscence, je lui donnerai la couronne avec ma bénédiction ; sinon, je la ferai descendre au bout d’un fil, par une fenêtre du château Saint-Ange, et je la lui donnerai ainsi avec ma malédiction.
Ceux qui avaient juré, s’empressèrent de transmettre à Henri les termes de l’alternative, qu’il rejeta ; aussitôt, les Romains se déclarèrent déliés de leur promesse. Ils y furent, d’ailleurs, encouragés par trente mille pièces d’or que distribua le pape, et qui affermirent les sympathies populaires pour le successeur de saint Pierre. Mais Henri continuait à presser la ville et à ravager les environs ; de plus, les caisses pontificales étaient vides ; les Romains finirent par ouvrir les portes à l’empereur. Il convoqua une assemblée d’évêques et invita Grégoire à venir se justifier ; on attendit vainement, trois jours, que le pontife donnât signe de vie, puis on rétablit l’antipape Guibert sous le nom de Clément III.
Brusquement, le bruit se répandit que les Normands marchaient sur Rome ; un message de Grégoire à leur chef avait, enfin, déclenché une intervention redoutable. L’empereur jugea prudent de s’éloigner au plus vite. La horde pillarde se jeta, vers le soir, sur la malheureuse ville, aux cris de « Guiscard ! Guiscard ! » Nuit infernale. Aux Normands s’étaient joints des Sarrasins ; avec des hurlements de bêtes sauvages, ils pillèrent, incendièrent, massacrèrent ; on coupait le doigt aux jeunes filles pour s’emparer de leurs bagues ; les flammes consumèrent des palais et des églises, détruisant de riches trésors.
Guiscard délivra le pape, enfermé au château Saint-Ange, et tomba aux pieds du pontife qui lui donna sa bénédiction. Le cruel chef de bande écrasa par le terrorisme la cité infortunée ; beaucoup de Romains, accusés d’avoir trahi Gégoire, furent maltraités, tués, ou conduit en esclavage. Avec la fièvre du désespoir, la population ressaisit les armes ; tentative réprimée avec atrocité.
Quand les Normands, saoûls de butin, s’éloignèrent, le pape les imita ; car la voix publique le rendait responsable d’une catastrophe inouïe. On connaissait, d’ailleurs, son inflexible dureté au service d’un idéal sublime. Par exemple, il avait « pris soin de récompenser le farouche abbé Trasmond, qui punit trois moines coupables en leur crevant les yeux ». C’est ainsi que le pape appuyait le rétablissement de la discipline morale dans l’Eglise. Avec un pareil tempérament, pourquoi aurait-il hésité à sacrifier les habitants de Rome pour sauver l’avenir de la papauté ?
Grégoire se réfugia dans la ville de Salerne. Tant d’émotions avaient affaibli le vieillard septuagénaire, ses forces déclinèrent vite. Sentant sa fin prochaine, il fit mander quelques amis, évêques et cardinaux. Quand ils furent auprès de son lit de mourant, il dit : « Très chers frères, je ne prétends glorifier aucun de mes actes ; mais il est certain que j’ai toujours aimé la justice et haï l’iniquité. » (Hébreux 1-9). Puis les yeux au ciel, il étendit les mains et déclara : « C’est là que je monte ; et je vous recommande à la grâce de Dieu. »
(1) A. Dufourcq. L’avenir du Christianisme. Volume VI, page 27.
Il ajouta qu’il levait toutes les excommunications prononcées par lui, excepté celles qui concernaient Henri IV, Clément III, et leurs adhérents, – c’est-à-dire tous ses adversaires. Pourquoi cette attitude ? Parce qu’il refusa de se déjuger au moment suprême. « Dieu n’est pas homme pour mentir, ni fils de l’homme pour se repentir », s’écriait l’auteur sacré. Or, Grégoire VII se considérait, ici-bas, comme le représentant du Tout-Puissant. La sincérité du pape, et sa logique, ne peuvent être mises en question. Ce qu’il faut déplorer, voire maudire, c’est la thèse inouïe qui entraîna, fatalement, toutes les conséquences qu’elle renferme. Nul ne conteste à Grégoire VII l’héroïque ambition d’avoir voulu réformer l’Eglise ; il la souhaitait pure et libre, deux conditions indispensables pour qu’elle accomplit, sur la terre, une mission mondiale. Sous l’ombre de la mort, il résuma son testament spirituel en ces termes : « Au nom du Dieu omnipotent, ne regardez personne comme un Pontife romain, s’il n’a été choisi selon les règles ecclésiastiques ! »
La faiblesse du moribond augmentait. Il dit à ceux qui l’entouraient : « Promettez que Henri et Guibert ne seront jamais accueillis dans l’Eglise, aussi longtemps qu’ils n’auront pas renoncé à des titres usurpés, pour se soumettre sans condition au Siège apostolique. » Pour sceller cette promesse, chacun de ceux qui étaient présents serra la main au pape. Bientôt, il éprouva de la difficulté à s’exprimer. Mais il trouva moyen de dire : « J’ai aimé la justice et haï l’iniquité ; voilà pourquoi je meurs en exil. » Telles furent les dernières paroles du grand combattant.
Un évêque éleva la voix : « Comment peux-tu dire, Seigneur, que tu meurs en exil, puisque, vicaire du Christ et des apôtres, tu as reçu toutes les nations en héritage ? Ton domaine, c’est l’univers. »
Dans le parfum de cette apothéose, Grégoire expira, le 25 mai 1085, âge de soixante et douze ans. Malgré les apparences, il avait remporté la victoire ; car onze années plus tard, le cadavre d’Henri IV, mort à Liège, fut exhumé par ordre d’un légat du pape ; et, pendant cinq années, les restes du pénitent de Canossa attendirent, dans un lieu non consacré, qu’il plût au pontife Pascal II d’en autoriser la sépulture en terre chrétienne.
L’historien protestant Guizot a porté le jugement suivant sur Grégoire VII : « Il était un réformateur par la voie du despotisme, comme Charlemagne et Pierre le Grand. Il a voulu réformer l’Eglise, et, par l’Eglise, la société civile, y introduire plus de moralité, plus de justice, plus de règle ; il a voulu le faire par le Saint-Siège, et à son profit, soumettre le monde civil à l’Eglise, et l’Eglise à la papauté, dans un esprit de réforme et de progrès, non dans un esprit stationnaire et rétrograde. » Soit ! Rendons hommage aux intentions. Mais il faut constater que le « vicaire de Jésus-Christ », pour établir ici-bas le Royaume de Dieu, a choisi, précisément, les méthodes rejetées par Jésus-Christ lui-même ! Le disciple, sur ce point, fut infidèle au Maitre.
Réservons la part des circonstances, et de ces courants cachés, dont la perfide puissance entraine les plus purs, malgré eux ; parfois même, à leur insu. Il reste que le Messie, au désert, lors de sa Tentation écarta la couronne et la tiare ; il choisit la Croix.
Un ecclésiastique du huitième siècle raconte que sept évêques, et plusieurs moines, étaient en route pour conférer avec, Augustin, le fondateur de l’Eglise de Cantorbéry. Chemin faisant, ils consultèrent un anachorète, pour savoir s’ils devaient accepter la volonté de celui qu’ils allaient rencontrer. L’ermite répondit : « Si c’est un homme de Dieu. Suivez-le, - Mais à quoi le reconnaître ? - Jésus a dit : « Apprenez de moi, car je suis doux et humble de cœur. » Si Augustin se lève de son siège pour vous accueillir, c’est l’esprit du Christ qui l’anime : mais s’il vous méprise et reste assis, orgueilleusement, il n’est pas fils de l’Evangile. »
Grégoire VII fut un géant de la foi, un colosse d’énergie obstinée. Néanmoins, malgré sa canonisation par l’Eglise romaine reconnaissante, nos lèvres se refusent à dire : « Saint Grégoire VII ». La vraie sainteté, au sens évangélique, ne fleurit que dans l’atmosphère des Béatitudes.