Propos sur le temps

L’ENTHOUSIASME

Tout ce que vous faites, faites-le de toute votre âme.

Colossiens 3.23

Un industriel avisé déclarait : « Entre deux candidats pareillement doués, je choisis le plus enthousiaste, car je sais qu’il ira plus loin que l’autre. » Il avait raison. Les gens efficaces se font très vite remarquer. Ils vont de l’avant avec fougue et apportent à leur entreprise une ardeur soutenue. Le constructeur d’automobiles Chrysler affirmait que le vrai secret de la réussite, c’est au premier chef l’enthousiasme. Ce que ne contestait pas l’évangéliste Moody : « L’enthousiasme effraie bon nombre de gens. Un chrétien se montre-t-il ardent ? Zèle sans connaissance, explique-t-on. Quant à moi, je préfère l’enthousiasme même sans connaissance, à un grand savoir dénué de chaleur. Je connais des hommes pétris de connaissances, mais qui n’ont pas la moindre étincelle dans l’âme. Je ne peux comprendre un chrétien qui réalise sa position « en Christ » sans que son cœur brûle d’un bout de l’année à l’autre. Si vous vous lancez dans le commerce et n’y mettez pas votre cœur, attendez-vous à un échec. Dans l’œuvre du Seigneur, il faut des hommes livrés corps et âme à leur Dieu. » Excellent critère. On serait bien inspiré de s’y référer lorsqu’il s’agit de désigner des responsables, dans l’église en particulier.

Enthousiasme vient d’un mot grec (enthousiasmos, formé de en et de théos). Étymologiquement il signifie : qui a un Dieu en soi. Or, puisque l’enfant de Dieu est habité par l’Esprit Saint (il est le Temple de Dieu, 1 Corintiens 3.16), ne devrait-il pas être le plus enthousiaste des hommes ?

Surtout, ne confondons pas enthousiasme et optimisme. Ces termes ne sont synonymes qu’en apparence. Pour mieux les distinguer, considérez leurs contraires. Optimisme a pour antonyme : pessimisme, alors qu’enthousiasme a pour contraires : indifférence, apathie, détachement.

L’optimiste n’est pas un lutteur. La vie lui apparaît tellement rose qu’il n’éprouve pas le besoin d’intervenir. Puisque tout finira bien, pourquoi s’en mêler ? Plutôt gai de nature, il occulte ou minimise les difficultés, imagine volontiers le succès et l’attend passivement. Apercevant un gros nuage à l’horizon, il préfère croire qu’il ne pleuvra pas. « Il vaut mieux, dit le philosophe Alain, voir le nuage plus noir et prendre un parapluie. » « Les vrais optimistes », constate Duhamel, « n’écrivent pas : ils mangent ; ils jouissent… » Autrement dit, ils se laissent vivre.

L’enthousiaste diffère de l’optimiste (1). Il entre dans l’action et s’y donne à fond, même s’il est en droit de se montrer pessimiste. Lucide et réaliste, il voit les difficultés et les empoigne à bras le corps, avec passion, tout à la joie de les surmonter. Il n’imagine pas le succès : il croit fermement qu’il y parviendra. Au lieu de l’attendre passivement, il met tout en œuvre pour l’atteindre coûte que coûte. Et cette fougue qui l’anime stimule chez lui des forces créatrices qui favorisent la réussite.

(1) L’enthousiasme ne serait-il pas une affaire de race, un trait de caractère propre aux habitants du Nouveau Monde par exemple, gens que l’on traite volontiers de grands enfants, fonceurs certes, mais un tantinet naïfs. Ce jugement, après tout, est moins un reproche qu’un compliment, puisque le Christ nous enjoint de devenir comme de petits enfants (Matthieu 18.3). Reconnaissons que ces derniers sont plus portés à l’enthousiasme que les adultes.

Le mot enthousiasme est-il employé dans la Bible par les auteurs sacrés ? Non, pas une seule fois. Mais bien que ce terme soit absent de l’Écriture, on le devine dans certaines expressions, comme par exemple : « de tout son cœur », « tout entier à… », « faire de bon cœur », « courir »…

— Servez l’Éternel avec joie (Psaumes 100.2).

— L’Éternel parcourt du regard toute la terre, pour que s’affermissent ceux dont le cœur est tout entier à lui (2 Chroniques 16.9).

— Je ne fais aucun cas de ma vie… pourvu que j’accomplisse avec joie ma course (Actes 20.24).

— Qui vient à tomber, que je ne brûle… (2 Corinthiens 11.29).

— L’amour du Christ nous étreint… (2 Corinthiens 5.14).

— Tout ce que vous faites, faites-le de toute votre âme (Colossiens 3.23).

Applique-toi et sois tout entier à cette tâche (1 Timothée 4.15).

Etc…

Mais alors, qu’est-ce qui peut détruire en nous ce punch dont nous devrions déborder ? Les raisons ne manquent pas.

a) Une santé précaire. On affirme qu’il faut posséder une mine resplendissante et un bon estomac pour avoir de l’allant. Ce n’est pas totalement faux. Le physique n’est pas sans incidence sur nos états d’âme et notre comportement. D’où la nécessité de veiller sur notre corps pour le maintenir, si possible, en bonne forme (par un repos suffisant, une nourriture équilibrée et un rythme de vie raisonnable).

Mais la santé n’est pas tout. Il est des personnes d’apparence chétive qui ne baissent pas les bras pour autant. Moribonde, Edith Piaf tenait la scène tous les soirs avec un brio rarement égalé. Sa volonté de triompher, semble-t-il, ne fut jamais entamée. Malgré sa douloureuse écharde, l’apôtre Paul conserva jusqu’au bout sa fougue des premiers jours, puisant sa force dans la faiblesse même (2 Corinthiens 12.9-10).

L’enthousiasme est comparable à un puissant levier qui permet de soulever davantage de poids avec moins de forces. Un citron à la peau ridée et de piètre apparence peut fournir un jus abondant. Or, c’est le jus qui compte, non l’enveloppe. Il est encourageant de le savoir.

b) Les sentiments de culpabilité entretenus et exacerbés neutralisent l’enthousiasme. Se mépriser ou revenir sans cesse sur des fautes réellement abandonnées est un péché d’incrédulité. Il faut le dénoncer. Puisque Dieu ne se souvient plus de nos iniquités (Hébreux 8.12 ; 10.17), pourquoi les lui rappeler ? Ne soyons-pas de ces chrétiens brouettes qui « promènent » devant eux défaites et transgressions. Déclarons tout péché confessé purifié par le sang de la Croix (1 Jean 1.9). Une fois pour toutes. Se culpabiliser à plaisir, c’est en définitive céder à la pitié de soi sans s’humilier vraiment. Au lieu de contempler nos balayures, levons les yeux vers le Christ sauveur. C’est sur sa Personne seule que doivent s’attarder nos regards. Jamais sur nous-mêmes. Et puisque nos gémissements ne changent rien à rien, supputons nos privilèges et nous découvrirons combien nous sommes comblés. Que notre cerveau soit purgé de toute pensée négative, morose, démoralisante. Tout ce qui vient de Dieu est sujet de joie et de reconnaissance ; il suffit d’avoir des yeux pour voir. C’est pourquoi je veux le bénir sans cesse. Pour chaque fleur et chaque oiseau qui file dans le ciel. Pour mon foyer et mes enfants. Merci pour le Christ rédempteur, pour son intercession fidèle. Merci pour la Bible et la famille chrétienne. Et merci encore pour mes yeux qui voient et mes oreilles qui entendent. Je ne lésinerai pas sur la louange : elle stimule l’enthousiasme et me donne du cœur à l’ouvrage.

c) Les complexes, la crainte des hommes, étouffent l’enthousiasme. Qui se sous-estime ou redoute l’opinion des autres se montre timoré et hésitant, en tout cas peu réalisateur. Ici, je pense à l’exclamation d’un prédicateur lancée au beau milieu de son exposé : « Gloire à Dieu. Je suis une créature merveilleuse ! » Il ne se croyait pas un adonis, mais il reprenait à son compte la parole du psalmiste (Psaumes 139.14). C’est tellement plus tonique et propre à nourrir notre ardeur ! Donc, guerre aux complexes et nous serons plus efficaces.

d) La poursuite du merveilleux. Les croyants toujours en quête d’extraordinaire, les sentimentaux… sont enthousiastes par à-coups. Comme des baudruches, ils peuvent être gonflés à bloc ou complètement à plat. C’est une erreur de s’attarder sur des émotions, de donner du poids à ce qu’on ressent ou ne ressent pas, de jauger sa vie spirituelle en fonction de ses états d’âme. Les sentiments fluctuent, il faut le savoir. La vie chrétienne n’est pas faite que d’extases, d’expériences sublimes. Elle est plus prosaïque que céleste. Voulez-vous connaître une vie stable et dynamique ? Marchez résolument par la foi et non par la joie, même en dépit des impressions les plus contraires.

e) La fatigue peut servir d’alibi pour renoncer à agir. Trop de gens se laissent émouvoir par les premiers signes de lassitude, Il y a des sonnettes d’alarme mal réglées et la fatigue peut en être une. Ne vous est-il jamais arrivé de vous sentir quasiment épuisé après une longue marche au moment même où vous songiez à reprendre la route pour rentrer à la maison ? Or, surprise ! Au lieu d’empirer, la fatigue paraît se dissiper comme par enchantement. Des forces insoupçonnées qui sommeillaient en vous ont été mises en jeu dès les premiers pas. Si bien que vous avez l’impression d’avoir capté une nouvelle source d’énergie. En vérité, nous n’utilisons qu’une faible partie de nos possibilités physiques et intellectuelles. L’être humain vit généralement au-dessous de ses limites. Chaque fois qu’il s’apitoie sur lui-même, l’homme perd l’occasion d’accomplir toute sa mission. Ce n’est pas tellement le fardeau qui nous accable, mais la façon dont nous le portons.

f) La pitié de soi détruit l’enthousiasme. Certains automobilistes en quête de parking finissent par stopper justement devant un panneau d’interdiction de stationner. Ainsi font nombre de chrétiens. Ils paraissent ignorer qu’il est absolument défendu de parquer… devant leurs petits problèmes ou leurs mini-contrariétés. Ils en font une montagne et leur marche en est entravée. L’apôtre Paul n’était pas de ceux-là. Il avait appris à saisir par le bon bout les événements pénibles auxquels il était confronté. Lisez l’épître aux Philippiens : bien qu’injustement incarcéré, il se réjouissait d’apprendre que les frères avaient, à cause de ses chaînes, plus de hardiesse pour annoncer sans crainte la Parole de Dieu (1.12-14). Des chrétiens prêchaient-ils contre lui avec l’intention de le discréditer auprès des autres ? Il ne s’en formalisait pas, et savait faire la différence entre le message et le messager. La cause de Jésus-Christ n’était pas en péril puisque le message était bon. Alors il pouvait se réjouir malgré tout : De toute manière… Christ est annoncé ; je m’en réjouis et je m’en réjouirai encore (v. 18). Cet homme exceptionnel n’avait guère le temps de s’apitoyer sur lui-même. Il parcourut plus de kilomètres, ” gagna plus de païens, fonda plus d’églises et subit plus de persécutions que beaucoup de missionnaires. Il pouvait résumer sa vie dans cette déclaration enthousiaste : Frères… je fais une chose : oubliant ce qui est en arrière et tendant vers ce qui est en avant, je cours vers le but pour obtenir le prix de la vocation céleste de Dieu en Christ-Jésus (Philippiens 3.13-14).

g) Enfin, le péché toléré fait barrage à l’enthousiasme. Preuve en est l’expérience de David (Psaumes 32). Ployant sous ses fautes qu’il tente en vain d’oublier, rongé par le remords, le roi d’Israël se traîne, abattu et sans vigueur… jusqu’à ce qu’il consente à avouer ses transgressions (v. 3-5). Alors, dans la joie du pardon, il reprend goût à la vie et s’écrie : Heureux celui dont la transgression est enlevée, dont le péché est pardonné ! (v. 1). Garder une bonne conscience devant Dieu n’a pas de prix. C’est vrai, il a du punch, celui qui se sait approuvé d’en haut ! Il ne peut composer avec l’apathie ou le laisser-aller.

Que dire en conclusion sinon que l’enthousiasme est un don de Dieu accordé à qui le veut et le demande avec détermination et foi. C’est pourquoi :

  1. Persuadez-vous que Dieu vous a donné d’importantes réserves d’énergie et d’endurance jusque-là inexploitées.
  2. Balayez résolument toute pensée morose ou morbide en la confessant au Seigneur qui « purifie de tout péché ». L’enthousiasme ne peut fleurir dans un climat de tristesse et de découragement. Renoncez à la haine, à la jalousie, au mensonge… Bref, au péché.
  3. Abandonnez-vous à Jésus qui est la source de l’enthousiasme : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d’eau vive couleront de son sein… (Jean 7.37-38). Puisqu’il m’est ordonné d’agir avec joie et empressement, sans murmure, de tout mon cœur, je viens à la source pour être rendu capable de vivre ces choses. A la gloire de Dieu.

QUESTIONS

  1. Êtes-vous un enthousiaste ? Un timoré ou un craintif ? Si vous avez peu d’allant, dites-le au Seigneur. Il peut vous communiquer ce punch qui vous fait défaut. Pourvu que vous le vouliez vraiment.
  2. Revenez-vous sans cesse sur des fautes déjà confessées ? Alors relisez et méditez Hébreux 8.12 ; 10.17 ; Esaïe 44.22 ; puis demandez pardon à Dieu pour votre incrédulité. Croyez à la valeur du sang qui purifie de tout péché.

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