Il n’est pas extrêmement riche. L’auteur n’entre pas dans le développement de ses idées ; il ne s’étend point, de sorte que l’on n’a guère à relever que des énoncés rapides.
1) Dès le début, l’auteur s’exprime fortement sur les sentiments qu’il faut avoir de Jésus-Christ comme de Dieu, comme du Juge des vivants et des morts. La précision théologique des termes sur la divinité a fait goûter l’homélie et l’a fait citer par les écrivains monophysites du ve siècle. Avec la divinité, c’est aussi la préexistence du Christ (9.5) qui est affirmée sans ambages par l’opposition de l’esprit, πνεῦμα, à la chair ou σάρξ.
2) L’Écriture sainte (ἡ γραφή, 14.2) est invoquée comme une autorité hors de contestation. L’expression d’Écriture est d’ailleurs remplacée par des expressions équivalentes : parole de Dieu, parole du Seigneur (13.4 ; 8.5 ; 9.11 ; 13.2). Est ainsi qualifiée d’Écriture non seulement telle citation de l’Ancien Testament (14.2 : un texte de Genèse 1.27), mais telle citation du Nouveau (8.5 ; 13.4).
L’opposition du Nouveau Testament à l’Ancien est soulignée en même temps qu’une autorité semblable est revendiquée pour lui par l’expression ἑτέρα γραφή, qui introduit une citation prise de l’un des synoptiques (2.4).
Les livres de l’Ancien Testament sont qualifiés de « livres » simplement — τά βιβλία — comme livres par excellence (ch. 14). L’auteur cependant semble viser ici surtout les recueils de l’Ancien Testament, tandis qu’ailleurs telle autre partie est appelée ὁ προφητικὸς λόγος (11.2).
Quant à « l’autre Écriture » qui représente le Nouveau Testament, elle embrasse « l’évangile » formellement désigné comme livre sacré (8.5) et les écrits des « apôtres » οἱ ἀπόστολοι (14.2). Quels livres sont inclus dans l’évangile ? Sans aucun doute les synoptiques dont il fait des citations, mais probablement aussi l’évangile apocryphe des Égyptiens dont on a lieu de croire qu’il a fait usage (cf. 12.2). Par écrits des apôtres, l’homéliste entend sans doute les évangiles ; peut-être aussi les lettres de saint Paul dont il engage mainte expression dans la trame du discours, mais sans annoncer expressément une citation d’Écriture : ἃ ἡτοίμασεν ὁ κύριος 1 Corinthiens 2.9 dans 14.5 et plus complètement dans 11.7 ; τὸ αὐτὸ φρονοῦντες Romains 12.16 dans 17.3 ; ἐκκλησία ζῶσα σῶμά ἐστιν χριστοῦ Ephésiens 1.22-23 dans 14.2. C’est pareillement qu’une maxime de la l’épître de Pierre (1 Pierre 4.8) sur la charité, est engagée dans le discours (16.4) sans que rien la signale.
L’emploi des écrits apocryphes, notamment d’un évangile apocryphe comme texte d’Écriture, met une profonde différence entre l’homéliste de la IIa Clementis et saint Irénée, ou l’auteur du fragment de Muratori, ou Clément d’Alexandrie dont le canon des quatre évangiles canoniques est arrêté.
3) La « résurrection de la chair » demeure, comme au temps de saint Paul, un des points souvent mis en discussion de la doctrine chrétienne. Sans la traiter ex professo l’auteur y revient avec une insistance significative. Les uns la nient puisqu’il en affirme si hautement la réalité (9.1 ; 14.5) d’autres ont une tendance à considérer comme indifférents les actes commis « dans la chair », soit les péchés de la chair, soit la dénégation de la foi en présence des tourments pendant les persécutions. En tout cas l’auteur insiste sur la nécessité de garder pure la chair et immaculé le sceau du baptême (8.4,6), afin d’aller à Dieu avec cette chair dans laquelle nous avons été appelés (9.4), afin que notre chair ait part à l’incorruptibilité (14.5). Il rappelle à plusieurs reprises que c’est la volonté de Dieu qui doit être accomplie, non en apparence seulement et de bouche, mais de fait, en réalité (5.1,6 ; 7.5-6 ; ch. 4 et 10).
4) A cette insistance de l’homéliste, on peut présumer que le gnosticisme travaille l’esprit de ses auditeurs, du moins que ses mouvements avant-coureurs se font remarquer. L’homéliste ne tombe pas dans les exagérations des encratites ; mais à rencontre d’Hermas il tend plutôt à la sévérité Quant à la morale des sexes (12.5). Cependant on ne peut affirmer qu’il prétende ici donner une règle absolue plutôt qu’un conseil de perfection.
Si le gnosticisme avait été très développé au temps où l’homélie fut composée, on retrouverait probablement dans sa polémique la trace d’un système particulier distinct, soit de Basilide, soit de Valentin ; mais il est impossible d’y signaler autre chose que des traits généraux appartenant à tout le courant gnostique. L’auteur trace une théorie de l’Église spirituelle, éternelle (14.2), manifestée dans la chair des chrétiens, qu’il n’eût sans doute pas émise, si Valentin avait déjà fait de l’Église éternelle un éon de son ciel ou plérôme gnostique.