Apprenez maintenant, comme par surcroît, quel est le principe de votre erreur. Les prophètes ont décrit sous de doubles images le double avènement de Jésus-Christ. Le premier devait se manifester au milieu des abaissements de toute nature. « Il sera conduit à la mort comme une brebis ; il sera muet comme l’agneau sous la main de celui qui le tond. Son aspect est méprisable. Il se lèvera en la présence de Dieu comme un arbrisseau, comme un rejeton qui sort d’une terre aride. Il n’a ni éclat, ni beauté. Nous l’avons vu ; il était méconnaissable, méprisé, le dernier des hommes, homme de douleurs, familiarisé avec la misère ; son visage était obscurci par les opprobres et les ignominies. Son Père l’a établi comme une pierre de chute et de scandale. Il l’a placé pour un peu de temps au-dessous des anges. – Pour moi, dit-il, je suis un ver de terre et non pas un homme. Je suis le rebut des mortels et le jouet de la populace. »
Ces marques d’ignominie appartiennent à son premier avènement, tandis que la grandeur et la majesté caractérisent le second. Alors il ne sera plus la pierre de chute et de scandale, il deviendra la principale pierre de l’édifice, « la pierre angulaire, réprouvée autrefois, » et placée sur le couronnement du temple, « ou bien cette pierre qui, en se détachant de la montagne, dans le prophète Daniel, frappe et brise » la grandeur éphémère des empires de ce monde. Ecoutons encore le même prophète sur ce second avènement ! « Et voici comme le Fils de l’homme qui venait sur les nuées du ciel. Et il s’avança jusqu’à l’Ancien des jours, et il fut en sa présence, et ceux qui le servaient l’avaient conduit jusqu’à son trône. Et il lui donna la puissance, l’honneur et le royaume. Toutes les nations, toutes les langues, toutes les tribus lui seront soumises. Sa puissance est une puissance éternelle qui ne sera pas transférée, et son royaume n’aura point de déclin. » Alors son visage resplendira. Sa beauté impérissable ne connaîtra point de rivale parmi les enfants des hommes. Car il est dit : « Vous surpassez en éclat les plus beaux des enfants des hommes. La grâce est répandue sur vos lèvres, parce que le Seigneur vous a béni pour l’éternité. Levez-vous donc, armez-vous de votre glaive, ô le plus vaillant des Rois ! Revêtez-vous de votre beauté et de votre splendeur ! Voilà que votre Père, après vous avoir abaissé un moment au-dessous des anges, vous couronne d’honneur et de majesté. Il vous donne l’empire sur les œuvres de ses mains. Alors ils connaîtront celui qu’ils ont percé, et les tribus pleureront amèrement sur lui en se frappant la poitrine. » Pourquoi ces pleurs et ces lamentations ? Parce qu’ils n’ont pas su le reconnaître dans les humiliations de sa vie humaine. « C’est un homme, s’écrie Jérémie ; qui le connaîtra ? – C’est un Dieu, répond Isaïe ; qui racontera son éternelle génération ? » Ainsi encore, Zacharie nous retrace dans la personne de Jésus, et jusque dans le mystère de ce nom auguste, le double avènement de Jésus-Christ, véritable et suprême pontife du Père. En premier lieu, il est revêtu de haillons, qu’est-ce à dire ? d’une chair passible et mortelle, lorsqu’il lutte contre le démon qui le lente après son baptême, et souffle la trahison au cœur de Judas. En second lieu, il est dépouillé de ses premières humiliations, qui sont comme des vêtements immondes, pour revêtir la robe éclatante et la tiare pure, c’est-à-dire la gloire et la majesté du second avènement.
Qu’il s’agisse du fils de Josédech, vous ne pourriez le soutenir, puisque celui-ci, au lieu d’avoir jamais revêtu des habits impurs, fut toujours orné de la robe et de la dignité sacerdotale qu’il ne perdit jamais. Oui, c’est bien là ce Jésus-Christ, pontife suprême de Dieu le Père, qui s’est fait victime pour nous à travers tous les abaissements, et qui, revêtu de la robe éclatante après sa résurrection, a été nommé le pontife éternel de Dieu le Père.
Parlerai-je des deux boucs offerts par la loi mosaïque dans le jeûne public ? Ne représentent-ils pas aussi le double aspect du Christ ? Oui, je retrouve sous le symbole de ces deux animaux, semblables l’un à l’autre, ce même Seigneur qui doit redescendre sous la forme qu’il avait ici-bas, afin de se faire reconnaître de ceux qui l’ont outragé. L’un des deux boucs, environné d’écarlate, chargé de malédictions, couvert d’ignominies, insulté, frappé, maltraité par tout le peuple, était chassé hors de la ville et envoyé à la mort, portant ainsi les caractères manifestes de la passion de notre Seigneur, qui, après avoir été revêtu d’écarlate, après avoir subi les opprobres et les malédictions de tous, fut crucifié hors de la ville. L’autre, au contraire, sacrifié pour les péchés, et ne servant de nourriture qu’aux prêtres du temple, me retrace le dernier des jours où, purifiés de toute souillure, les pontifes du temple spirituel, c’est-à-dire de l’Église, jouiront des grâces les plus intimes et les plus excellentes, tandis que les autres jeûneront loin des sources du salut. Plus de doutes ! le premier avènement devait s’accomplir au milieu des abaissements et des outrages ; les figures qui l’annonçaient étaient obscures. Le second, au contraire, est éclatant de lumière et digne d’un Dieu. Aussi, les Juifs n’eurent-ils qu’à lever les yeux pour reconnaître cette seconde apparition à l’éclat et à la dignité dont elle brille, tandis que les voiles et les infirmités de la première, indignes de la Divinité, assurément, durent tromper leurs regards. Aussi, affirment-ils, de nos jours encore, que leur Christ n’est pas venu, parce qu’ils ne l’ont pas vu paraître dans sa majesté, ne sachant pas qu’il devait se montrer d’abord dans les abaissements et l’humiliation.
Il suffit d’avoir ainsi rapidement parcouru ce qui concerne le Christ, en témoignage qu’il est venu tel qu’il était annoncé, pour que nous comprenions d’après cette merveilleuse concordance des divines Ecritures, que les événements annoncés par la prédiction comme devant s’accomplir après Jésus-Christ, se sont accomplis conformément aux dispositions divines. En effet, si celui, après lequel ces événements devaient s’accomplir, n’était pas venu, jamais ceux qui étaient annoncés pour sa venue n’auraient eu leur consommation. Lors donc que vous voyez toutes les nations sortir du gouffre de l’erreur humaine pour marcher à Dieu le créateur et à son Christ, vous n’osez pas nier que cette merveille ait été prédite.
Si vous l’osiez, je vous opposerais sur-le-champ, comme je l’ai déjà fait, cette promesse du Père : « Tu es mon fils ; je t’ai engendré aujourd’hui ; demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage, et pour empire les extrémités de la terre. » Que cette prédiction s’adresse à Salomon, fils de David, plutôt qu’à Jésus-Christ, fils de Dieu, vous ne pourriez pas davantage le soutenir. L’empire de la terre n’a point été promis au fils de David. Salomon ne régna jamais que dans la Judée. Il n’en va point de même du Fils de Dieu : il a éclairé tout l’univers des rayons de son Evangile. « Son trône est éternel, » disent les livres saints. L’éternité convient-elle au Fils de Dieu ou à Salomon, roi d’un jour et qui ne régna que sur Israël ? En effet, les nations qui ne connaissaient pas Jésus-Christ, l’invoquent aujourd’hui ; les peuples marchent vers Jésus-Christ qu’ils ignoraient autrefois ! Tu ne peux en appeler à l’avenir, quand tu vois l’événement se réaliser sous tes yeux. Nie donc que ces événements aient été prédits, quoiqu’ils soient manifestes pour tous ; ou qu’ils aient été accomplis, quoique nous les lisions dans les Ecritures : ou bien si tu ne peux nier ni l’un ni l’autre, il faut bien qu’ils se soient accomplis dans la personne de celui que désignaient les prophéties.