Vie de Saint Antoine

IL EST ASSAILLI PAR LES DÉMONS

Comme ses amis qui venaient le voir ne pouvaient entrer, ils passaient dehors souvent plusieurs jours et plusieurs nuits ; ils entendaient à l’intérieur du château le bruit d’une foule qui s’agitait, des voix qui poussaient des gémissements lamentables et qui criaient : « Sors de chez nous ; que viens-tu faire dans ce désert ? Tu ne supporteras pas nos attaques. » Les gens qui étaient dehors s’imaginèrent d’abord que c’étaient des hommes qui luttaient contre lui et qu’ils avaient pénétré dans la forteresse au moyen d’échelles. À la fin, ayant mis l’œil à une petite fente, comme ils ne virent personne, ils comprirent que c’étaient des démons qui faisaient ce tumulte, et, tout effrayés, ils appelèrent Antoine. Celui-ci, qui ne faisait aucune attention aux démons, écouta les hommes qui lui parlaient. Il s’approcha de la porte et les engagea à s’en aller sans rien craindre, ajoutant que les démons emploient ces épouvantails contre les gens qui ont peur. « Pour vous, dit-il, faites le signe de la croix, » et lui-même resta dans le château sans éprouver aucun mal de la part des démons et sans être fatigué de ses luttes, car le secours des visions célestes et la faiblesse de ses ennemis apportaient à ses douleurs un grand soulagement et augmentaient son courage. Ses amis, en effet, qui approchaient souvent de sa demeure, le croyant mort, l’entendaient psalmodier ces paroles : « Que Dieu se lève et que ses ennemis soient dispersés ; que ceux qui le haïssent fuient devant sa face ; comme la fumée se dissipe, qu’ils se dissipent eux-mêmes ; comme la cire fond à l’approche du feu, qu’ainsi les méchants périssent devant l’Éternel. (Ps. LXII, 12.) » Et encore : « Toutes les nations m’enveloppaient ; au nom du Seigneur, je les ai exterminées ; elles m’entouraient, elles me serraient de près ; au nom du Seigneur, je les ai anéanties. (Ps. CXVII, 12-13.) »

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