Lenormant caractérise à peu près de la même manière que G. Rawlinson les couleurs sacrées des sept planètes chez les Chaldéens : blanc (Vénus), noir (Saturne), pourpre (Jupiter), bleu (Mercure), vermillon (Mars), argent (Lune), or (Soleil). (Manuel d’hist. anc. de l’Orient)
On sait que dans l’antiquité les métaux étaient aussi distribués entre les sept planètes. « Une citation empruntée par Olympiodore à Proclus (Ad Timaeum), et un passage du Scoliaste de Pindare, dit A. de Humboldt, établissent d’une manière incontestable que la coutume de consacrer certains métaux aux planètes faisait déjà partie du système de représentations symboliques en usage au cinquième siècle chez les néoplatoniciens d’Alexandrie. Il dit aussi : « Les signes planétaires sont devenus peu à peu des signes des métaux, et, pour quelques-uns, les noms mêmes se sont confondus. Ainsi le nom de Mercure désigne le vif-argent… Dans la précieuse collection des manuscrits grecs de la Bibliothèque de Paris, on trouve sur l’art cabalistique du grand œuvre deux manuscrits, dont l’un renferme les noms des métaux consacrés aux planètes, sans l’emploi des signes ; l’autre, sorte de dictionnaire de chimie, qui, d’après le caractère de l’écriture, peut-être rapporté au xve siècle, présente les noms des métaux réunis à un petit nombre de signes planétaires… Dans le manuscrit N° 2250 le vif-argent est consacré à Mercure et l’argent à la Lune, tandis que dans le N° 2329, le vif-argent est consacré à la Lune et l’étain à Jupiter ; Olympiodore assignait ce dernier métal à Mercure, tant il y avait peu de fixité dans ces relations mystiques des astres avec les propriétés des métaux.
Récemment Ant. de Saporta, dans un article de la Revue des Deux-Mondes (août 1886, p. 902) sur les corps simples de la chimie, disait à propos de neuf corps simples « connus de temps immémorial » : « Il est à peine nécessaire d’expliquer que nous voulons parler du charbon et du soufre, ainsi que des sept métaux de l’antiquité et du moyen âge, chacun de ceux-ci étant assigné à une planète ou à un jour de la semaine. Le soleil était accolé à l’or, et la lune, à l’argent. Le vif-argent lui-même a fini par perdre son nom primitif pour adopter celui de la planète Mercure. Saturne, contemplé à l’œil nu, brille, paraît-il, d’une lueur plombée ; donc à Saturne le plomb. Pour Mars, dieu de la guerre, il fallait le fer, et, du reste, la nuance rougeâtre de la planète rappelle un peu celle du métal en fusion. A Vénus, honorée dans l’île de Chypre, où le cuivre abonde, on dédia le cuivre. Il va sans dire que nous ne prétendons nullement affirmer que le choix des alchimistes n’ait pas été purement arbitraire, d’autant plus que nous avouons ne pas comprendre pourquoi l’étain est échu en partage à Jupiter. Chacun sait, ne fût-ce que pour avoir lu les étiquettes des fioles de pharmacie, que ces anciennes dénominations, premiers termes de nomenclature bégayés par la science naissante, sont encore fréquemment usitées, après avoir été seules employées. Sel de Saturne, vitriol de Mars, cristaux de Vénus sont des expressions pour le moins aussi connues que celles plus scientifiques d’acétate de plomb, de sulfate de fer, d’acétate de cuivre. »
Un passage de Celse conservé par Origène, nous paraît n’avoir pas été suffisamment remarqué et offrir une des explications païennes les plus anciennes soit de l’attribution de certains métaux aux sept planètes, soit des motifs des diverses attributions. Parlant des mystères de Mithra, il rattache le plomb à Saturne, l’étain à Vénus, l’airain à Jupiter, le fer à Mercure, un certain métal composite (κεραστοῦ νομίσματος) à Mars, l’argent à la Lune, l’or au Soleil ; et, pour expliquer les cinq premières de ces attributions, il parle successivement de la lenteur du cours de Saturne, de la splendeur et de la mollesse de l’étain, de la solidité de l’airain, de la célébrité du fer et de son utilité pour toute sorte de travaux, de l’humeur inégale et capricieuse de Mars. — L’ouvrage de Celse, d’après Keim et Aubé, aurait paru en 178.
Le pasteur Cérésole, dans ses Légendes des Alpes vaudoises (Lausanne 1885), fournit une curieuse preuve de la longue durée, même chez des populations chrétiennes, de l’attribution des jours de la semaine à certains métaux. Après avoir indiqué une étrange recette pour découvrir « le secret d’une chose, » recette d’après laquelle il faut faire usage du mercure le mercredi, et observé que « chaque jour de la semaine avait autrefois un métal qui lui était spécialement consacré, » il ajoute : « Voici ce que je trouve à ce sujet dans un manuscrit de 1791 (Ormont-dessus) : L’or est consacré au soleil, pour le dimanche ; l’argent est consacré à la lune, pour le lundi ; le fer, à Mars pour le mardi ; le vif-argent, à Mercure, pour le mercredi ; l’étain, à Jupiter, pour le jeudi ; le cuivre ou l’airain, à Vénus, pour le vendredi ; le plomb, à Saturne, pour le samedi. »