Mon Dieu, pourquoi toutes les joies d’ici-bas, même les plus légitimes et les plus douces, sont-elles impuissantes à remplir la capacité de mon âme ? pourquoi un vide profond, inexplicable, appelle-t-il sans cesse un objet que je ne trouve nulle part ? pourquoi, Seigneur, ne puis-je pas même nommer cet objet, et dire ce qui me manque ? Profond mystère de mon être ; énigme de mon existence ; pourquoi tout cela ne m’est-il pas clairement démontré, placé sous mes yeux, dans ma main, avec l’évidence de la réalité ? Il me semble que je serais si heureux de te voir face à face, d’entendre ta voix et de vivre sous ton regard. Mais non, tu ne l’as pas voulu, il faut que l’insuffisance du monde visible me pousse à la recherche du monde des esprits. Il faut que je soupire après des biens meilleurs et que, renonçant à la vue, je marche par la foi. Tu l’as voulu ainsi ; tu savais mieux que moi ce qui devait m’être bon, et je me soumets à ta mystérieuse et paternelle direction. Oui, je te cherche, et toutefois, je sens que ce n’est pas dans les ténèbres. Mieux je fixe les regards de mon esprit, mieux je t’aperçois. Quand j’écoute ma conscience, j’entends ta voix. Quand je contemple ton Fils, je vois ton image, et si j’accomplissais mieux ta volonté, je reconnaîtrais avec plus d’évidence que l’Évangile vient de toi. Oui, Seigneur, la lumière de la vérité apparaît d’autant plus éclatante à mes yeux que je marche plus près de ta sainteté. Ah ! si je voulais t’imiter comme Jésus ; si je pouvais vivre complètement en toi, sans doute, alors, je ne serais plus obsédé par le doute, je ne te fatiguerais plus de mes questions, et après avoir été conduit, par la sanctification, à la vérité, je serais conduit, par la vérité, au bonheur. Oui, Seigneur, je sens qu’il en est bien ainsi ; tu m’as permis d’en faire plus d’une fois l’expérience. Mais, hélas ! tout cela brille un instant dans la nuit de ma vie et disparaît ; ma sainteté est un éclair qui passe et que suit bientôt la foudre bruyante et prolongée de mes passions. Mon Dieu, aie pitié de moi ; arrache-moi à cette tempête ; transporte-moi sous un ciel serein, et donne-moi ta paix, ta joie sur la terre, comme j’en dois jouir pendant l’éternité.