Nous avons donné une courte analyse de l’édit de Nantes. Nous croyons utile d’en donner ici le texte complet avec les brevets et les articles secrets, qui n’ont été publiés intégralement dans aucune histoire de France.
Henri, etc. Entre les grâces infinies qu’il a plu à Dieu nous départir, celle est bien des plus insignes et remarquables, de nous avoir donné la vertu et la force de ne céder aux effroyables troubles, confusions et désordres qui se trouvèrent à notre avènement à ce royaume, qui étoit divisé en tant de parts et factions, que la plus légitime en étoit quasi la moindre ; et de nous être néanmoins tellement roidis contre cette tourmente, que nous l’ayïons enfin surmontée, et touchions maintenant le port de salut et repos de cet État. De quoy à luy seul en soit la gloire tout entière, et à nous la gloire et l’obligation, qu’il se soit voulu servir de notre labeur pour faire ce bon œuvre, auquel il a été visible à tous, si nous avons porté ce qui étoit non seulement de notre devoir et pouvoir, mais quelque chose de plus, qui n’eût peut-être pas été en autre temps bien convenable à la dignité que nous tenons, que nous n’avons plus eu crainte d’y exposer, puisque nous y avons tant de fois et si librement exposé notre propre vie. Et en cette grande concurrence de si grands et périlleux affaires, ne se pouvans tous composer tout à la fois et en même temps, il nous a fallu tenir cet ordre, n’entreprendre premièrement ceux qui ne se pouvoient terminer que par la force, et plutôt remettre et suspendre pour quelque temps les autres qui se devoient et pouvoient traitter par la raison et par la justice. Comme les différens généraux d’entre nos bons sujets, et les maux particuliers des plus saines parties de l’État, que nous estimions pouvoir bien plus aisément guérir, après en avoir ôté la cause principale, qui étoit en la continuation de la guerre civile. En quoy nous étant (par la grâce de Dieu) bien et heureusement succédé, et les armes et hostilitez étans du tout cessées en tout le dedans du royaume, nous espérons qu’il succédera aussi bien aux autres affaires qui restent à y composer, et que par ce moyen nous parviendrons à l’établissement d’une bonne paix et tranquille repos, qui a toujours été le but de tous nos vœux et intentions, et le prix que nous désirons de tant de peines et travaux, ausquels nous avons passé ce cours de notre âge. Entre lesdits affaires, ausquels il a fallu donner patience, et l’un des principaux, ont été les plaintes que nous avons reçuës de plusieurs de nos provinces et villes catholiques, de ce que l’exercice de la religion catholique n’étoit pas universellement rétabli, comme il est porté par les édits cy-devant faits pour la pacification des troubles à l’occasion de la religion. Comme aussi les supplications et remontrances qui nous ont été faites par nos sujets de la religion prétendue réformée, tant sur l’inexécution de ce qui leur est accordé par lesdits édits, que sur ce qu’ils désireroient y être ajoûté, pour l’exercice de leurdite religion, la liberté de leurs consciences, et la sûreté de leurs personnes et fortunes : présumans avoir juste sujet d’en avoir de nouvelles et de plus grandes appréhensions, à cause de ces derniers troubles et mouvements, dont le principal prétexte et fondement a été sur leur ruine. A quoy, pour ne nous charger de trop d’affaires tout à la fois, et aussi que la fureur des armes ne compatît point à l’établissement des loix, pour bonnes qu’elles puissent être, nous avons toujours différé de tems en tems de pourvoir. Mais maintenant qu’il plaît à Dieu commencer à nous faire jouïr de quelque meilleur repos, nous avons estimé ne le pouvoir mieux employer, qu’à vaquer à ce qui peut concerner la gloire de son saint nom et service, et à pourvoir qu’il puisse être adoré et prié par tous nos sujets : et s’il ne luy a plu permettre que ce soit pour encores en une même forme de religion, que ce soit au moins d’une même intention, et avec telle règle, qu’il n’y ait point pour cela de trouble ou de tumulte entr’eux : et que nous et ce royaume puissions toujours mériter et conserver le titre glorieux de très chrétien, qui a été par tant de mérites et dès si long temps acquis : et par même moyen ôter la cause du mal et trouble qui peut avenir sur le fait de la religion, qui est toujours le plus glissant et pénétrant de tous les autres. Pour cette occasion, ayant reconnu cet affaire de très grande importance, et digne de très bonne considération, après avoir repris les cahiers des plaintes de nos sujets catholiques, ayant aussi permis à nosdits sujets de ladite religion prétenduë réformée, de s’assembler par députez pour dresser les leurs, et mettre ensemble toutes leursdites remontrances, et sur ce fait conféré avec eux par diverses fois, et revu les édits précédens, nous avons jugé nécessaire de donner maintenant sur le tout à tous nosdits sujets une loy générale, claire, nette et absoluë, par laquelle ils soient réglez sur tous les différens qui sont cy-devant sur ce survenus entr’eux, et y pourront encore survenir cy-après, et dont les uns et les autres ayent sujet de se contenter, selon que la qualité du tems le peut porter. N’étans pour notre regard entrez en cette délibération, que pour le seul zêle que nous avons au service de Dieu, et qu’il se puisse d’orénavant faire et rendre par tous nosdits sujets, et établir entr’eux une bonne et perdurable paix. Sur quoy nous implorons et attendons de sa divine bonté la même protection et faveur, qu’il a toujours visiblement départie à ce royaume, depuis sa naissance, et pendant tout ce long âge qu’il a atteint, et qu’elle face la grace à nosdits sujets de bien comprendre, qu’en l’observation de cette notre ordonnance consiste (après ce qui est de leur devoir envers Dieu et envers tous) le principal fondement de leur union, concorde, tranquilité et repos, et du rétablissement de tout cet État en sa première splendeur, opulence et force. Comme de notre part nous promettons de la faire exactement observer, sans souffrir qu’il y soit aucunement contrevenu. Pour ces causes, ayans avec l’avis des princes de notre sang, autres princes et officiers de la couronne, et autres grands et notables personnages de notre conseil d’État étans près de nous, bien et diligemment pesé et considéré tout cet affaire, avons, par cet édit perpétuel et irrévocable, dit, déclaré et ordonné, disons, déclarons et ordonnons :
I. — Premièrement, que la mémoire de toutes choses passées d’une part et d’autre, depuis le commencement du mois de mars 1585, jusques à notre avènement à la couronne, et durant les autres troubles précédens, et à l’occasion d’iceux, demeurera éteinte et assoupie, comme de chose non avenuë. Et ne sera loisible ni permis à nos procureurs-généraux, ni autres personnes quelconques, publiques ni privées, en quelque tems, ni pour quelque occasion que ce soit, en faire mention, procès ou poursuittes en aucunes cours ou juridictions que ce soit.
II. — Défendons à tous nos sujets, de quelque état et qualité qu’ils soient, d’en renouveler la mémoire, s’attaquer, ressentir, injurier, de provoquer l’un l’autre par reproche de ce qui s’est passé, pour quelque cause et prétexte que ce soit, en disputer, contester, quereller, ni s’outrager, ou s’offenser de fait ou de parole ; mais se contenir et vivre paisiblement ensemble comme frères, amis et concitoyens, sur peine aux contrevenans d’être punis comme infracteurs de paix et perturbateurs du repos public.
III. — Ordonnons que la religion catholique, apostolique et romaine, sera remise et rétablie en tous les lieux et endroits de cettuy notre royaume et païs de notre obéissance, où l’exercice d’icelle a été intermis, pour y être paisiblement et librement exercée, sans aucun trouble ou empêchement. Défendant très expressément à toutes personnes de quelque état, qualité ou condition qu’elles soient, sur les peines que dessus, de ne troubler, molester ni inquiéter les ecclésiastiques en la célébration du divin service, jouissance et perception des dîmes, fruits et revenus de leurs bénéfices, et tous autres droits et devoirs qui leur appartiennent : et que tous ceux qui durant les troubles se sont emparez des églises, maisons, biens et revenus appartenans ausdits ecclésiastiques, et qui les détiennent et occupent, leur en délaissent l’entière possession et paisible jouïssance, en tels droits, libertez et sûretez qu’ils avoient auparavant qu’ils en fussent dessaisis. Défendans aussi très expressément à ceux de ladite religion prétendue réformée, de faire prêches ni aucun exercice de ladite religion és églises, maisons et habitations desdits ecclésiastiques.
IV. — Sera au choix desdits ecclésiastiques d’acheter les maisons et bâtimens construits aux places profanes sur eux occupées durant les troubles, ou contraindre les possesseurs desdits bâtimens d’acheter le fond, le tout suivant l’estimation qui en sera faite par experts, dont les parties conviendront ; et à faute d’en convenir, leur en sera pourvu par les juges des lieux, sauf ausdits possesseurs leurs recours contre qui il appartiendra. Et où lesdits ecclésiastiques contraindroient les possesseurs d’acheter le fond, les deniers de l’estimation ne seront mis entre leurs mains, ains en demeureront lesdits possesseurs chargez, pour en faire profit à raison du denier vingt, jusqu’à ce qu’ils ayent été employez au profit de l’Église : ce qui se fera dans un an. Et où ledit tems passé, l’acquéreur ne voudroit plus continuer ladite rente, il en sera déchargé, en consignant les deniers entre les mains de personne solvable, avec l’autorité de la justice. Et pour les lieux sacrez, en sera donné avis par les commissaires qui seront ordonnez pour l’exécution du présent édit, pour sur ce y être par nous pourvu.
V. — Ne pourront toutefois les fonds et places occupées pour les réparations et fortifications des villes et lieux de notre royaume, et les matériaux y employez, être vendiquez ni répétez par les ecclésiastiques, ou autres personnes publiques ou privées, que lorsque lesdites réparations et fortifications seront démolies par nos ordonnances.
VI. — Et pour ne laisser aucune occasion de troubles et différens entre nos sujets, avons permis et permettons à ceux de ladite religion prétendüe réformée, vivre et demeurer par toutes les villes et lieux de cettuy notre royaume et païs de notre obéïssance, sans être enquis, vexez, molestez, ni astraints à faire chose pour le fait de la religion contre leur conscience, ne pour raison d’icelle être recherchez és maisons et lieux où ils voudront habiter, en se comportant au reste selon qu’il est contenu en notre présent édit.
VII. — Nous avons aussi permis à tous seigneurs, gentilshommes et autres personnes, tant regnicoles qu’autres, faisans profession de la religion prétenduë réformée, ayans en notre royaume et païs de notre obéïssance haute justice ou plein fief de haubert (comme en Normandie) soit en propriété ou usufruit, en tout ou par moitié, ou pour la troisième partie, avoir en telle de leurs maisons desdites hautes justices, ou fiefs susdits, qu’ils seront tenus nommer devant à nos baillifs et sénéchaux, chacun en son détroit, pour le principal domicile, l’exercice de ladite religion, tant qu’ils y seront résidens ; et en leur absence, leurs femmes, ou bien leur famille, ou partie d’icelle. Et encores que le droit de justice ou plein fief de haubert soit controversé, néanmoins l’exercice de ladite religion y pourra être fait, pourveu que les dessusdits soient en possession actuelle de ladite haute justice, encores que notre procureur-général soit partie. Nous leur permettons aussi avoir ledit exercice en leurs autres maisons de haute justice ou fiefs susdits de haubert, tant qu’ils y seront présens, et non autrement, le tout tant pour eux, leur famille, sujets, qu’autres qui y voudront aller.
VIII. — Es maisons des fiefs, où ceux de ladite religion n’auront ladite haute justice ou fief de haubert, ne pourront faire ledit exercice que pour leur famille tant seulement. N’entendons toutefois, s’il y survenoit d’autres personnes, jusques au nombre de trente, outre leur famille, soit à l’occasion des batêmes, visites de leurs amis, ou autrement, qu’ils en puissent être recherchez : moyennant aussi que lesdites maisons ne soient au dedans de villes, bourgs ou villages appartenans aux seigneurs hauts justiciers catholiques, autres que nous, esquels lesdits seigneurs catholiques ont leurs maisons. Auquel cas ceux de ladite religion ne pourront dans lesdites villes, bourgs ou villages, faire ledit exercice, si ce n’est par permission et congé desdits seigneurs hauts justiciers, et non autrement.
IX.> — Nous permettons aussi à ceux de ladite religion, faire et continuer l’exercice d’icelle en toutes les villes et lieux de notre obéïssance, où il étoit par eux établi et fait publiquement par plusieurs et diverses fois, en l’année mil cinq cens quatre-vingts seize, et en l’année mil cinq cens quatre-vingts dix-sept, jusques à la fin du mois d’août, nonobstant tous arrêts et jugemens à ce contraires.
X.— Pourra semblablement ledit exercice être établi et rétabli en toutes les villes et places où il a été établi, ou dû être par l’édit de pacification fait en l’année soixante et dix-sept, articles particuliers, et conférences de Nérac et Fleix, sans que ledit établissement puisse être empêché és lieux et places du domaine donnez par ledit édit, articles et conférences pour les lieux de bailliages, ou qui seront cy-après, encores qu’ils ayent été depuis aliénez à personnes catholiques, ou le seront à l’avenir. N’entendons toutefois que ledit exercice puisse être rétabli és lieux et places dudit domaine qui ont été cy-devant possédez par ceux de la religion prétenduë réformée, esquels il auroit été mis en considération de leurs personnes, ou à cause du privilège des fiefs, si lesdits fiefs se trouvent à présent possédez par personnes de ladite religion catholique, apostolique et romaine.
XI. — Davantage, en chacun des anciens bailliages, sénéchaussées et gouvernemens tenans lieu de bailliages, ressortissans nuëment et sans moyen és cours de parlement, nous ordonnons qu’és faubourgs d’une ville, outre celles qui leur ont été accordées par ledit édit, articles particuliers et conférences, et où il n’y auroit des villes, en un bourg ou village, l’exercice de ladite religion prétenduë réformée se pourra faire publiquement par tous ceux qui y voudront aller, encores qu’esdits bailliages, sénéchaussées et gouvernemens, y ait plusieurs lieux où ledit exercice soit à présent établi, fors et excepté pour ledit lieu de bailliage nouvellement accordé par le présent édit, les villes esquelles il y a archevêché et évêché, sans toutesfois que ceux de ladite religion prétenduë réformée soient pour cela privez de pouvoir demander, et nommer pour ledit lieu dudit exercice, les bourgs et villages proches desdites villes : excepté aussi les lieux et seigneuries appartenant aux ecclésiastiques, esquelles nous n’entendons que ledit second lieu de bailliage puisse être établi, les en ayans de grace spéciale exceptez et réservez. Voulons et entendons sous le nom d’anciens bailliages, parler de ceux qui étoient du tems du feu roy Henri notre très honoré seigneur et beaupère, tenus pour bailliages, sénéchaussées et gouvernemens ressortissans sans moyen en nosdites cours.
XII. — N’entendons par le présent édit déroger aux édits et accords cy-devant faits pour la réduction d’aucuns princes, seigneurs, gentilshommes, et villes catholiques en notre obéïssance, en ce qui concerne l’exercice de ladite religion ; lesquels édits et accords seront entretenus et observez pour ce regard, selon qu’il sera porté par les instructions des commissaires, qui seront ordonnez pour l’exécution du présent édit.
XIII. — Défendons très expressément à tous ceux de ladite religion, faire aucun exercice d’icelle, tant pour le ministère, réglement, discipline ou instruction publique d’enfants, et autres, en cettuy notre royaume et païs de notre obéïssance, en ce qui concerne la religion, fors qu’és lieux permis et octroyez par le présent édit.
XIV. — Comme aussi de faire aucun exercice de ladite religion, en notre cour et suite, ny pareillement en nos terres et païs qui sont delà les monts, ny aussi en notre ville de Paris, ni à cinq lieuës de ladite ville : toutefois ceux de ladite religion demeurans esdites terres et païs delà les monts, et en notredite ville, et cinq lieuës autour d’icelle, ne pourront être recherchez en leurs maisons, ni astraints à faire chose pour le regard de leur religion contre leur conscience, en se comportant au reste selon qu’il est contenu en notre présent édit.
XV. — Ne pourra aussi l’exercice public de ladite religion être fait aux armées, sinon aux quartiers des chefs qui en feront profession, autres toutefois que celuy où sera le logis de notre personne.
XVI. — Suivant l’article deuxième de la conférence de Nérac, permettons à ceux de ladite religion de pouvoir bâtir des lieux pour l’exercice d’icelle, aux villes et places où il leur est accordé ; et leur seront rendus ceux qu’ils ont cy-devant bâtis, ou le fond d’iceux, en l’état qu’il est à présent, même és lieux où ledit exercice ne leur est permis, sinon qu’ils eussent été convertis en autre nature d’édifices. Auquel cas, leur seront baillez par les possesseurs desdits édifices, des lieux et places de même prix et valeur qu’ils étoient avant qu’ils y eussent bâti, ou la juste estimation d’iceux, à dire d’experts : sauf ausdits propriétaires et possesseurs leur recours contre qui il appartiendra.
XVII.— Nous défendons à tous prêcheurs, lecteurs, et autres qui parlent en public, d’user d’aucunes paroles, discours, et propos tendans à exciter le peuple à sédition : ains leur avons enjoint et enjoignons de se contenir et comporter modestement, et de ne rien dire qui ne soit à l’instruction et édification des auditeurs, et à maintenir le repos et tranquilité par nous établie en notredit royaume, sur les peines portées par les précédens édits. Enjoignans très expressément à nos procureurs-généraux et leurs substituts, d’informer d’office, contre ceux qui y contreviendront, à peine d’en répondre en leurs propres et privez noms, et de privation de leurs offices.
XVIII. — Défendons aussi à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu’ils soient, d’enlever par force ou induction, contre le gré de leurs parens, les enfants de ladite religion, pour les faire bâtiser ou confirmer en l’Église catholique, apostolique et romaine : comme aussi mêmes défenses sont faites à ceux de ladite religion prétenduë réformée, le tout à peine d’être punis exemplairement.
XIX. — Ceux de ladite religion prétenduë réformée ne seront aucunement astraints, ni demeureront obligez pour raison des abjurations, promesses et sermens qu’ils ont cy-devant faits, ou cautions par eux baillées, concernans le fait de ladite religion, et n’en pourront être molestez ni travaillez en quelque sorte que ce soit.
XX. — Seront tenus aussi garder et observer les fètes indites en l’Église catholique, apostolique et romaine, et ne pourront és jours d’icelles besogner, vendre, ni étaller à boutiques ouvertes, ni pareillement les artisans travailler hors leurs boutiques, et en chambres et maisons fermées, esdits jours de fêtes, et autres jours défendus, en aucun métier, dont le bruit puisse être entendu au dehors des passans ou des voisins : dont la recherche néanmoins ne pourra être faite que par les officiers de la justice.
XXI. — Ne pourront les livres concernans ladite religion prétenduë réformée, être imprimez et vendus publiquement, qu’és villes et lieux où l’exercice public de ladite religion est permis. Et pour les autres livres qui seront imprimez és autres villes, seront vus et visitez, tant par nos officiers que théologiens, ainsi qu’il est porté par nos ordonnances. Défendons très expressément l’impression, publication et vente de tous livres, libelles et écrits diffamatoires, sur les peines contenuës en nos ordonnances enjoignans à tous nos juges et officiers d’y tenir la main.
XXII. — Ordonnons qu’il ne sera fait différence ne distinction, pour le regard de ladite religion, à recevoir les écoliers pour être instruits és universitez, collèges et écoles, et les malades et pauvres ès hôpitaux, maladreries et aumônes publiques.
XXIII. — Ceux de ladite religion prétenduë réformée seront tenus garder les loix de l’Église catholique, apostolique et romaine, reçues en cettuy notre royaume, pour le fait des mariages contractez et à contracter és degrez de consanguinité et affinité.
XXIV. — Pareillement ceux de ladite religion payeront les droits d’entrées, comme il est accoutumé, pour les charges et offices dont ils seront pourvus, sans être contraints assister à aucunes cérémonies contraires à leurdite religion : et étans appelez par serment, ne seront tenus d’en faire d’autre que de lever la main, jurer et promettre à Dieu qu’ils diront la vérité : ne seront aussi tenus de prendre dispense du serment par eux prêté en passant les contracts et obligations.
XXV. — Voulons et ordonnons que tous ceux de ladite religion prétenduë réformée, et autres qui ont suivi leur party, de quelque état, qualité et condition qu’ils soient, soient tenus et contraints par toutes voyes duës et raisonnables, et sous les peines contenuës aux édits sur ces faits, payer et acquitter les dîmes aux curez, et autres ecclésiastiques, et à tous autres à qui elles appartiennent, selon l’usage et coutume des lieux.
XXVI. — Les exhérédations ou privations, soit par dispositions d’entre vifs ou testamentaires, faites seulement en haine, ou pour cause de religion, n’auront lieu tant pour le passé que pour l’avenir entre nos sujets,
XXVII. — Afin de réünir d’autant mieux les volontez de nos sujets, comme est notre intention, et ôter toutes plaintes à l’avenir, déclarons tous ceux qui font ou feront profession de ladite religion prétenduë réformée, de tenir et exercer tous états, dignitez, offices et charges publiques quelconques, royales, seigneuriales, ou des villes de notredit royaume, païs, terres et seigneuries de notre obeïssance, nonobstant tous sermens à ce contraires, et d’être indifféremment admis et reçus en iceux, et se contenteront nos cours de parlemens et autres juges, d’informer et enquérir sur la vie, moeurs, religion et honnête conversation de ceux qui sont ou seront pourvus d’offices, tant d’une religion que d’autre, sans prendre d’eux autre serment, que de bien et fidèlement servir le roy en l’exercice de leurs charges, et garder les ordonnances, comme il a été observé de tous tems. Avenant aussi vacation desdits états, charges et offices, pour le regard de ceux qui seront en notre disposition, il y sera par nous pourvu indifféremment, et sans distinction de personnes capables, comme chose qui regarde l’union de nos sujets. Entendons aussi que ceux de ladite religion prétenduë réformée puissent être admis et reçus en tous conseils, délibérations, assemblées et fonctions qui dépendent des choses dessusdites ; sans que pour raison de ladite religion ils en puissent être rejettez, ou empêchez d’en jouïr.
XXVIII. — Ordonnons pour l’enterrement des morts de ceux de ladite religion, pour toutes les villes et lieux de ce royaume, qu’il leur sera pourvu promtement en chacun lieu par nos officiers et magistrats, et par les commissaires que nous députerons à l’exécution de notre présent édit, d’une place la plus commode que faire se pourra. Et les cimetières qu’ils avoient par cy-devant, et dont ils ont été privez à l’occasion des troubles, leur seront rendus, sinon qu’ils se trouvassent à présent occupez par édifices et bâtimens, de quelque qualité qu’ils soient, auquel cas leur en sera pourvu d’autres gratuitement.
XXIX. — Enjoignons très expressément à nosdits officiers de tenir la main à ce qu’ausdits enterremens il ne se commette aucun scandale : et seront tenus dans quinze jours après la requisition qui en sera faite, pourvoir à ceux de ladite religion de lieu commode pour lesdites sépultures, sans user de longueurs et remises, à peine de cinq cens écus, en leurs propres et privez noms. Sont aussi faites défenses, tant ausdits officiers, que tous autres, de rien exiger pour la conduite desdits corps morts, sur peine de concussion.
XXX. — Afin que la justice soit renduë et administrée à nos sujets, sans aucune suspicion, haine ou faveur, comme étant un des principaux moyens pour les maintenir en paix et concorde, avons ordonné et ordonnons, qu’en notre cour de parlement de Paris sera établie une chambre, composée d’un président et seize conseillers dudit parlement, laquelle sera appellée et intitulée la Chambre de l’édit, et connoîtra non seulement des causes et procès de ceux de ladite religion prétenduë réformée, qui seront dans l’étenduë de ladite cour ; mais aussi des ressorts de nos parlements de Normandie et Bretagne, selon la jurisdiction qui luy sera cy-après attribuée par ce présent édit, et ce jusques à tant qu’en chacun desdits parlemens, ait été établie une chambre pour rendre la justice sur les lieux. Ordonnons aussi que des quatre offices de conseillers en notredit parlement, restans de la dernière érection qui en a par nous été faite, en seront présentement pourvus et reçus audit parlement quatre de ceux de ladite religion prétenduë réformée, suffisans et capables, qui seront distribuez, à savoir le premier reçu en ladite Chambre de l’édit, et les autres trois, à mesure qu’ils seront reçus, en trois des chambres des enquêtes. En outre que des deux premiers offices de conseillers laiz de ladite cour qui viendront à vaquer par mort, en seront aussi pourvus deux de ladite religion prétenduë réformée ; et iceux reçus, distribuez aussi aux deux autres chambres des enquêtes.
XXXI. — Outre la chambre cy-devant établie à Castres, pour le ressort, de notre cour de parlement de Thoulouse, laquelle sera continuée en l’état qu’elle est, nous avons pour les mêmes considérations ordonné et ordonnons, qu’en chacune de nos cours de parlemens de Grenoble et Bourdeaux, sera pareillement établie une chambre composée de deux présidens, l’un catholique, et l’autre de la religion prétenduë réformée, et de douze conseillers, dont six seront catholiques, et les autres six de ladite religion ; lesquels présidens et conseillers catholiques, seront par nous pris et choisis des corps de nosdites cours. Et quant à ceux de ladite religion, sera faite création nouvelle d’un président et six conseillers pour le parlement de Bourdeaux, et d’un président et trois conseillers pour celuy de Grenoble, lesquels avec les trois conseillers de ladite religion, qui sont à présent audit parlement, seront employez en ladite Chambre de Dauphiné. Et seront créez lesdits offices de nouvelle création aux mêmes gages, honneurs, autoritez et prééminences que les autres desdites cours. Et sera ladite séance de ladite Chambre de Bourdeaux, audit Bourdeaux ou à Nérac, et celle de Dauphiné, à Grenoble.
XXXII. — Ladite Chambre de Dauphiné connoîtra des causes de ceux de la religion prétenduë réformée du ressort de notre parlement de Provence, sans qu’ils ayent besoin de prendre lettres d’évocation, ni autres provisions, qu’en notre chancellerie de Dauphiné : comme aussi ceux de ladite religion de Normandie et Bretagne, ne seront tenus prendre lettres d’évocation, ni autres provisions qu’en notre chancellerie de Paris.
XXXIII. — Nos sujets de la religion du parlement de Bourgogne auront le choix et option de plaider en la chambre ordonnée au parlement de Paris, ou en celle de Dauphiné. Et ne seront aussi tenus prendre lettres d’évocation, ni autres provisions qu’esdites chancelleries de Paris, ou Dauphiné, selon l’option qu’ils feront.
XXXIV. — Toutes lesdites chambres composées comme dit est, connoîtront et jugeront en souveraineté et dernier ressort, par arrêt, privativement à tous autres, des procès et différens mus et à mouvoir, esquels ceux de ladite religion prétenduë réformée seront parties principales, ou garans, en demandant ou défendant, en toutes matières, tant civiles que criminelles, soient lesdits procès par écrit, ou appellations verbales, et ce si bon semble ausdites parties, et l’une d’icelles le requiert avant contestation en cause, pour le regard des procès à mouvoir : excepté toutefois pour toutes matières bénéficiales, et les possessoires des dîmes non inféodez, les patronats ecclésiastiques, et les causes où il s’agira des droits et devoirs ou domaine de l’Église, qui seront toutes traittées et jugées és cours de parlement, sans que lesdites Chambres de l’édit en puissent connoître. Comme aussi nous voulons, que pour juger et décider les procès criminels qui interviendront entre lesdits ecclésiastiques et ceux de ladite religion prétenduë réformée, si l’ecclésiastique est défendeur, en ce cas la connoissance et jugement du procès criminel appartiendra à nos cours souveraines, privativement ausdites chambres ; et où l’ecclésiastique sera demandeur, et celuy de ladite religion défendeur, la connoissance et jugement du procès criminel appartiendra par appel et en dernier ressort ausdites chambres établies. Connoîtront aussi lesdites chambres en tems de vacations, des matières attribuées par les édits et ordonnances aux chambres établies en tems de vacation, chacune en son ressort.
XXXV. — Sera ladite Chambre de Grenoble dès à présent unie et incorporée au corps de ladite cour de parlement, et les présidens et conseillers de ladite religion prétenduë réformée, nommez présidens et conseillers de ladite cour, et tenus du rang et nombre d’iceux. Et à ces fins seront premièrement distribuez par les autres chambres, puis extraits et tirez d’icelles, pour être employez et servir en celle que nous ordonnons de nouveau : à la charge toutefois, qu’ils assisteront et auront voix et séance en toutes les délibérations qui se feront les chambres assemblées, et jouïront des mêmes gages, autoritez et prééminences que font les autres présidents et conseillers de ladite cour.
XXXVI. — Voulons et entendons que lesdites Chambres de Castres et Bourdeaux soient réunies et incorporées en iceux parlemens, en la même forme que les autres quand besoin sera, et que les causes qui nous ont mû d’en faire l’établissement cesseront, et n’auront plus de lieu entre nos sujets ; et, seront à ces fins les présidens et conseillers d’icelles, de ladite religion, nommez et tenus pour présidens et conseillers desdites cours.
XXXVII. — Seront aussi créez et érigez de nouveau en la Chambre ordonnée pour le parlement de Bourdeaux, deux substituts de nos procureur et avocat généraux, dont celuy du procureur sera catholique, et l’autre, de ladite religion, lesquels seront pourvus desdits offices, aux gages comptans.
XXXVIII. — Ne prendront tous lesdits substituts autre qualité que de substituts, et lors que les chambres ordonnées pour les parlemens de Thoulouse et Bourdeaux seront unies et incorporées ausdits parlemens, seront lesdits substituts pourvus d’offices de conseillers en iceux.
XXXIX. — Les expéditions de la chancellerie de Bourdeaux se feront en présence de deux conseillers d’icelle chambre, dont l’un sera catholique, et l’autre de ladite religion prétenduë réformée, en l’absence d’un des maîtres des requêtes de notre hôtel ; et l’un des notaires et secrétaires de ladite cour de parlement de Bourdeaux, fera résidence au lieu où ladite chambre sera établie, ou bien l’un des secrétaires ordinaires de la chancellerie, pour signer les expéditions de ladite chancellerie.
XL. — Voulons et ordonnons qu’en ladite Chambre de Bourdeaux, il y ait deux commis du greffier dudit parlement, l’un au civil, et l’autre au criminel, qui exerceront leurs charges par nos commissions, et seront appellez commis au greffe civil et criminel, et pourtant ne pourront être destituez ni révoquez par lesdits greffiers du parlement : toutefois seront tenus rendre l’émolument desdits greffes ausdits greffiers, lesquels commis seront salariez par lesdits greffiers selon qu’il sera avisé et arbitré par ladite chambre. Plus y sera ordonné des huissiers catholiques, qui seront pris en ladite cour, ou d’ailleurs, selon notre bon plaisir, outre lesquels en sera de nouveau érigé deux de ladite religion, et pourvus gratuitement : et seront tous lesdits huissiers réglez par ladite chambre, tant en l’exercice et departement de leurs charges, qu’és émolumens qu’ils devront prendre. Sera aussi expédiée commission d’un payeur des gages, et receveur des amendes de ladite chambre, pour en être pourvu tel qu’il nous plaira, si ladite chambre est établie ailleurs qu’en ladite ville ; et la commission cy-devant accordée au payeur des gages de la Chambre de Castres, sortira son plein et entier effet, et sera jointe à ladite charge la commission de la recepte des amendes de ladite chambre.
XLI. — Sera pourvu de bonnes et suffisantes assignations pour les gages des officiers des chambres ordonnées par cet édit.
XLII. — Les présidens, conseillers, et autres officiers catholiques desdites chambres, seront continuez le plus longuement que faire se pourra, et comme nous verrons être à faire pour notre service, et le bien de nos sujets : et en licenciant les uns, sera pourvu d’autres en leurs places avant leur partement, sans qu’ils puissent durant le tems de leur service se départir ni absenter desdites chambres, sans le congé d’icelles, qui sera jugé sur les causes de l’ordonnance.
XLIII. — Seront lesdites chambres établies dedans six mois, pendant lesquels (si tant l’établissement demeure à être fait) les procès mus et à mouvoir, où ceux de ladite religion seront parties, des ressorts de nos parlemens de Paris, Roüen, Dijon et Rennes, seront évoquez en la chambre établie présentement à Paris, en vertu de l’édit de l’an 1577, ou bien au grand conseil ; au choix et option de ceux de ladite religion, s’ils le requièrent : ceux qui seront du parlement de Bourdeaux, en la chambre établie à Castres, ou audit grand conseil, à leur choix : et ceux qui seront de Provence, au parlement de Grenoble. Et si lesdites chambres ne sont établies dans trois mois, après la présentation qui y aura été faite de notre présent édit, celuy de nos parlemens qui en aura fait refus, sera interdit de connoître et juger des causes de ceux de ladite religion.
XLIV. — Les procès non encores jugez, pendans esdites cours de parlemens et grand conseil, de la qualité susdite, seront renvoyez, en quelque état qu’ils soient, esdites chambres chacun en son ressort, si l’une des parties de ladite religion le requiert, dedans quatre mois après l’établissement d’icelles : et quant à ceux qui seront discontinuez, et ne sont en état de juger, lesdits de la religion seront tenus faire déclaration, à la première intimation et signification qui leur sera faite de la poursuitte ; et ledit tems passé, ne seront plus reçus à requérir lesdits renvois.
XLV. — Lesdites Chambres de Grenoble et Bourdeaux, comme aussi celle de Castres, garderont les formes et stile des parlemens, au ressort desquels elles seront établies, et jugeront en nombre égal d’une et d’autre religion, si les parties ne consentent au contraire.
XLVI. — Tous les juges ausquels l’adresse sera faite des exécutions des arrêts, commissions desdites chambres, et lettres obtenuës és chancelleries d’icelles, ensemble tous huissiers et sergens, seront tenus les mettre à exécution, et lesdits huissiers et sergens faire tous exploits par tout notre royaume, sans demander placet, visa ne pareatis, à peine de suspension de leurs états, et des dépens, dommages et intérêts des parties, dont la connoissance appartiendra ausdites parties.
XLVII. — Ne seront accordées aucunes évocations des causes, dont la connoissance est attribuée ausdites chambres, sinon és cas des ordonnances, dont le renvoy sera fait à la plus prochaine chambre établie suivant notre édit. Et les partages des procès desdites chambres seront jugez en la plus prochaine, observant la proportion et formes desdites chambres, dont les procès seront procédez : excepté pour la Chambre de l’édit à notre parlement de Paris, où les procès partis seront départis en la même chambre, par les juges qui seront par nous nommez par nos lettres particulières pour cet effet, si mieux les parties n’aiment attendre le renouvellement de ladite chambre. Et avenant qu’un même procès soit parti en toutes les chambres mi-parties, le partage sera renvoyé à ladite Chambre de Paris.
XLVIII. — Les récusations qui seront proposées contre les présidens et conseillers des chambres mi-parties, pourront être jugées au nombre de six, auquel nombre les parties seront tenuës de se restraindre : autrement sera passé outre, sans avoir égard ausdites récusations.
XLIX. — L’examen des présidens et conseillers nouvellement érigez esdites chambres mi-parties sera fait en notre privé conseil, ou par lesdites chambres, chacune en son détroit, quand elles seront en nombre suffisant : et néanmoins le serment accoutumé sera par eux prêté és cours où lesdites chambres seront établies, et à leur refus, en notre conseil privé : excepté ceux de la Chambre de Languedoc, lesquels prêteront le serment és mains de notre chancelier, ou en icelle chambre.
L. — Voulons et ordonnons que la réception de nos officiers de ladite religion, soit jugée esdites chambres mi-parties par la pluralité des voix, comme il est accoutumé és autres jugemens, sans qu’il soit besoin que les opinions surpassent des deux tiers, suivant l’ordonnance, à laquelle pour ce regard est dérogé.
LI. — Seront faites ausdites chambres mi-parties les propositions, délibérations et résolutions qui appartiendront au repos public, et pour l’état particulier et police des villes où icelles chambres seront.
LII. — L’article de la jurisdiction desdites chambres ordonnées par le présent édit, sera suivi et observé selon sa forme et teneur, mêmes en ce qui concerne l’exécution et inexécution, ou infraction de nos édits, quand ceux de ladite religion seront parties.
LIII. — Les officiers subalternes royaux ou autres, dont la réception appartient à nos cours de parlemens, s’ils sont de ladite religion prétendüe réformée, pourront être examinez et reçus esdites chambres : à savoir ceux des ressorts des parlemens de Paris, Normandie et Bretagne, en ladite Chambre de Paris ; ceux de Dauphiné et Provence, en la chambre de Grenoble ; ceux de Bourgogne, en ladite Chambre de Paris ou de Dauphiné, à leur choix ; ceux du ressort de Toulouse, en la Chambre de Castres ; et ceux du parlement de Bourdeaux, en la Chambre de Guyenne, sans qu’autres se puissent opposer à leurs réceptions et rendre parties, que nos procureurs-généraux et leurs substituts, et les pourvus esdits offices. Et néanmoins le serment accoutumé sera par eux prêté és cours de parlemens, lesquels ne pourront prendre aucune connoissance de leursdites réceptions ; et au refus desdits parlemens, lesdits officiers prêteront le serment esdites chambres ; après lequel ainsi prêté, seront tenus présenter par un huissier ou notaire l’acte de leurs réceptions aux greffiers desdites cours de parlemens, et en laisser copie collationnée ausdits greffiers : ausquels il est enjoint d’enregistrer lesdits actes à peine de tous dépens, dommages et intérêts des parties ; et où lesdits greffiers seront refusans de ce faire, suffira ausdits officiers de rapporter l’acte de ladite sommation, expédié par lesdits huissiers ou notaires, et icelle faire enregistrer au greffe de leursdites jurisdictions, pour y avoir recours quand besoin seroit, à peine de nullité de leurs procédures et jugemens. Et quant aux officiers, dont la réception n’a accoutumé d’être faite en nosdits parlemens, en cas que ceux à qui elle appartient fissent refus de procéder audit examen et réception, se retireront lesdits officiers par devers lesdites chambres, pour leur être pourvu comme il appartiendra.
LIV. — Les officiers de ladite religion prétenduë réformée, qui seront pourvus cy-après, pour servir dans les corps de nosdites cours de parlemens, grand conseil, chambres des comptes, cours des aides, bureaux des trésoriers généraux de France, et autres officiers des finances, seront examinez et reçus és lieux où ils ont accoutumé de l’être : et en cas de refus, ou deni de justice, leur sera pourvu en notre conseil privé.
LV. — Les réceptions de nos officiers faites en la chambre cy-devant établie à Castres, demeureront valables, nonobstant tous arrêts et ordonnances à ce contraires. Seront aussi valables les réceptions des juges, conseillers, élus, et autres officiers de ladite religion, faites en notre privé conseil, ou par commissaires par nous ordonnez pour le refus de nos cours de parlemens, des aides et chambres des comptes, tout ainsi que si elles étoient faites esdites cours et chambres, et par les autres juges à qui la réception appartient. Et seront leurs gages allouëz par les chambres des comptes, sans difficulté : et si aucuns ont été rayez, seront rétablis, sans qu’il soit besoin d’avoir aucune jussion que le présent édit, et sans que lesdits officiers soient tenus de faire apparoir d’autre réception, nonobstant tous arrêts donnez au contraire, lesquels demeureront nuls et de nul effet.
LVI. — En attendant qu’il y ait moyen de suvenir aux frais de justice desdites chambres sur les deniers des amendes, sera par nous pourvu d’assignation valable et suffisante pour fournir ausdits frais, sauf d’en répéter les deniers sur les biens des condamnez.
LVII. — Les présidens et conseillers de ladite religion prétenduë réformée, cy-devant reçus en notre cour de parlement du Dauphiné, et en la Chambre de l’édit incorporée en icelle, continuëront et auront leurs séances et ordres d’icelles ; savoir est les présidens, comme ils en ont jouï et jouïssent à présent, et les conseillers, suivant les arrêts et provisions qu’ils en ont obtenus en notre conseil privé.
LVIII. — Déclarons toutes sentences, jugemens, arrêts, procédures, saisies, ventes, et décrets faits et donnez contre ceux de ladite religion prétenduë réformée, tant vivans que morts, depuis le trépas du feu roi Henry deuxième, notre très honoré seigneur et beaupère, à l’occasion de ladite religion, tumultes et troubles depuis avenus, ensemble l’exécution d’iceux jugemens et décrets, dés à présent cassez, révoquez et annuliez, et iceux cassons, révoquons et annullons. Ordonnons qu’ils seront rayez et ôtez des registres des greffes des cours, tant souveraines qu’inférieures. Comme nous voulons aussi être ôtées et effacées toutes marques, vestiges et monumens desdites exécutions, livres et actes diffamatoires contre leurs personnes, mémoire et postérité : et que les places esquelles ont été faites pour cette occasion démolitions ou rasemens, soient renduës en tel état qu’elles sont aux propriétaires d’icelles, pour en jouïr et disposer à leur volonté. Et généralement avons cassé, révoqué et annullé toutes procédures et informations faites pour entreprises quelconques, prétendus crimes de lèze-majesté, et autres. Nonobstant lesquelles procédures, arrêts et jugemens contenant réunion, incorporation et confiscation, voulons que ceux de ladite religion, et autres qui ont suivi leur party, et leurs héritiers, rentrent en possession réelle et actuelle de tous et chacuns leurs biens.
LIX. — Toutes procédures faites, jugemens et arrêts donnez durant les troubles, contre ceux de ladite religion qui ont porté les armes, ou se sont retirez hors de notre royaume, ou dedans iceluy ès villes et païs par eux tenus, en quelque autre matière que de la religion et troubles, ensemble toute peremption d’instances, prescriptions tant légales, conventionnelles que coutumières, et saisies féodales échuës pendant lesdits troubles, ou par empêchemens légitimes provenus d’eux, et dont la connoissance demeurera à nos juges, seront estimées comme non faites, données ni avenuës. Et telles les avons déclarées et déclarons, et icelles mises et mettons à néant, sans que les parties s’en puissent aucunement aider : ains seront remises en l’état qu’elles étoient auparavant, nonobstant lesdits arrêts, et l’exécution d’iceux, et leur sera renduë la possession en laquelle ils étoient pour ce regard. Ce que dessus aura pareillement lieu, pour le regard des autres qui ont suivi le party de ceux de ladite religion, ou qui ont été absens de notre royaume pour le fait des troubles. Et pour les enfants mineurs de ceux de la qualité susdite, qui sont morts pendant les troubles, remettons les parties au même état qu’elles étoient auparavant, sans refondre les dépens, ni être tenus de consigner les amendes : n’entendans toutefois que les jugemens donnez par les juges présidiaux, ou autres juges inférieurs contre ceux de ladite religion, ou qui ont suivi leur party, demeurent nuls, s’ils ont été donnez par juges séans és villes par eux tenuës, et qui leur étoient de libre accès.
LX. — Les arrêts donnez en nos cours de parlement, és matiere dont la connoissance appartient aux chambres ordonnées par l’édit de l’an 1577, et articles de Nérac et Fleix esquelles cours les parties n’ont procédé volontairement, c’est-à-dire, ont allégué et proposé fins déclinatoires, ou qui ont été donnez par défaut ou forclusion, tant en matière civile que criminelle, nonobstant lesquelles fins lesdites parties ont été contraintes de passer outre, seront pareillement nuls et de nulle valeur étant pour le regard des arrêts donnez contre ceux de ladite religion qui ont procédé volontairement, et sans avoir proposé fins déclinatoires, iceux arrêts demeureront : et néanmoins sans préjudice de l’exécution d’iceux, se pourront, si bon leur semble, pourvoir par requête civile devant les chambres ordonnées par le présent édit, sans que le tems porté par les ordonnances ait couru à leur préjudice : et jusques à ce que lesdites chambres et chancelleries d’icelles soient établies, les appellations verbales, ou par écrit, interjettées par ceux de ladite religion devant les juges, greffiers ou commis, exécuteurs des arrêts et jugemens, auront pareil effet que si elles étoient relevées par lettres royaux.
LXI. — En toutes enquêtes qui se feront pour quelque cause que ce soit, és matières civiles, si l’enquêteur ou commissaire est catholique, seront les parties tenuës de convenir d’un ajoint, et où ils n’en conviendroient, en sera pris d’office par ledit enquêteur ou commissaire, un qui sera de ladite religion prétenduë réformée : et sera de même pratiqué, quand le commissaire ou enquêteur sera de ladite religion, pour l’ajoint qui sera catholique.
LXII. — Voulons et ordonnons que nos juges puissent connoître de la validité des testamens, ausquels ceux de ladite religion auront intérêt, s’ils le requièrent : et les appellations desdits jugemens pourront être relevez de ceux de ladite religion, nonobstant toutes coutumes à ce contraires, mêmes celles de Bretagne.
LXIII. — Pour obvier à tous différens qui pourroient survenir entre nos cours de parlemens et les chambres d’icelles cours ordonnées par notre présent édit, sera par nous fait un bon et ample réglement entre lesdites cours et chambres, et tel que ceux de ladite religion prétenduë réformée jouïront entièrement dudit édit ; lequel réglement, sera vérifié en nos cours de parlemens, et gardé et observé, sans avoir égard aux précédens.
LXIV. — Inhibons et défendons à toutes nos cours souveraines, et autres de ce royaume, de connoître et juger les procès civils et criminels de ceux de ladite religion, dont par notre édit est attribuée la connoissance ausdites chambres, pourveu que le renvoy en soit demandé, comme il est dit au XL article cy-dessus.
LXV. — Voulons aussi par manière de provision, et jusques à ce qu’on ayons autrement ordonné, qu’en tous procès mus ou à mouvoir, où ceux de ladite religion seront en qualité de demandeurs ou défendeurs parties principales on garans, és matières civiles, esquelles nos officiers et siéges présidiaux ont pouvoir de juger en dernier ressort, leur soit permis de requérir, que deux de la chambre où les procès se devront juger, s’abstiennent du jugement d’iceux ; lesquels sans expression de cause seront tenus s’en abstenir, nonobstant l’ordonnance, par laquelle les juges ne se peuvent tenir pour récusez sans cause : leur demeurant outre ce les récusations de droit contre les autres. Et és matières criminelles, esquelles aussi lesdits présidiaux et autres juges royaux subalternes jugent en dernier ressort, pourront les prévenus étans de ladite religion, requérir que trois desdits juges s’abstiennent du jugement de leurs procès, sans expression de cause. Et les prévôts des maréchaux de France, vibaillifs, visénéchaux, lieutenans de robbe court et autres officiers de semblable qualité, jugeront suivant les ordonnances et réglemens cy-devant donnez pour le regard des vagabons. Et quant aux domiciliez, chargez et prévenus de cas prévôtaux, s’ils sont de ladite religion, pourront requérir que trois desdits juges qui en peuvent connoître, s’abstiennent du jugement de leurs procès, et seront tenus s’en abstenir, sans aucune expression de cause, sauf si en la compagnie où lesdits procès se jugeront, se trouvoient jusques au nombre de deux en matière civile, et trois en matière criminelle, de ladite religion, auquel cas ne sera permis de récuser sans expression de cause : ce qui sera commun et réciproque aux catholiques en la forme que dessus, pour le regard desdites récusations de juges, où ceux de ladite religion prétenduë réformée seront en plus grand nombre. N’entendons toutefois que lesdits sièges présidiaux, prévôts des maréchaux, vibaillifs, visenéchaux, et autres qui jugent en dernier ressort, prennent en vertu de ce que dit est connoissance des troubles passez. Et quant aux crimes et excès avenus par autre occasion que du fait des troubles, depuis le commencement du mois de mars de l’année 1585, jusques à la fin de l’année 1597, en cas qu’ils en prennent connoissance, voulons qu’il y puisse avoir appel de leurs jugemens par devant les chambres ordonnées par le présent édit, comme il se pratiquera en semblable pour les catholiques complices, et où ceux de ladite religion prétendüe réformée seront parties.
LXVI. — Voulons aussi et ordonnons, que d’orénavant en toutes instructions, autres qu’information de procès criminels, és sénéchaussées de Thoulouse, Carcassonne, Rouergue, Loraguais, Beziers, Montpellier et Nîmes, le magistrat ou commissaire député pour ladite instruction, s’il est catholique, sera tenu prendre un ajoint qui soit de ladite religion prétenduë réformée, dont les parties conviendront, et où ils n’en pourroient convenir, en sera pris d’office un de ladite religion, par le susdit magistrat ou commissaire : comme en semblable, si ledit magistrat ou commissaire est de ladite religion, il sera tenu en la même forme dessusdite, prendre un ajoint catholique.
LXVII. — Quand il sera question de faire procès criminel par les prévôts des maréchaux, ou leurs lieutenans, à quelqu’un de ladite religion domicilié, qui soit chargé, et accusé d’un crime prévôtal, lesdits prévôts, ou leurs lieutenans, s’ils sont catholiques, seront tenus d’appeller à l’instruction desdits procès un ajoint de ladite religion : lequel ajoint assistera aussi au jugement de la compétence, et au jugement définitif dudit procès : laquelle compétence ne pourra être jugée qu’au plus prochain siége présidial, en assemblée, avec les principaux officiers dudit siège qui seront trouvez sur les lieux, à peine de nullité, sinon que les prévenus requissent que la compétence fût jugées desdites chambres ordonnées par le présent édit. Auquel cas pour le regard des domiciliez és provinces de Guyenne, Languedoc, Provence et Dauphiné, les substituts de nos procureurs-généraux esdites chambres, feront à la requête d’iceux domiciliez, apporter en icelles les charges et informations faites contre iceux, pour connoître et juger si les causes sont prévôtales ou non ; pour après selon la qualité des crimes être par icelles chambres renvoyez à l’ordinaire, ou jugez prévôtalement, ainsi qu’ils verront être à faire par raison, en observant le contenu en notre présent édit : et seront tenus les juges présidiaux, prévôts des maréchaux, vibaillifs, visénéchaux, et autres qui jugent en dernier ressort, de respectivement obéïr et satisfaire aux commandemens qui leur seront faits par lesdites chambres ; tout ainsi qu’ils ont accoutumé faire ausdits parlements, à peine de privation de leurs états.
LXVIII. — Les criées, affiches et subhastations des héritages dont on poursuit le décret, seront faites és lieux et heures accoutumés, si faire se peut, suivant nos ordonnances, ou bien és marchez publics, si au lieu où sont assis lesdits héritages y a marché ; et où il n’y en auroit point, seront faites au plus prochain marché du ressort du siége où l’adjudication se doit faire, et seront les affiches mises au poteau dudit marché, et à l’entrée de l’auditoire dudit lieu, et par ce moyen seront bonnes et valables lesdites criées, et passé outre à l’interposition du décret, sans s’arrêter aux nullitez qui pourroient être alléguées pour ce regard.
LXIX. — Tous titres, papiers, enseignemens, et documens qui ont été pris seront rendus et restituez de part et d’autre à ceux à qui ils appartiennent, encores que lesdits papiers, ou les châteaux et maisons esquels ils étoient gardez, ayent été pris et saisis, soit par spéciales commissions du feu roy dernier décédé, notre très honoré seigneur et beau-frère, ou notres, ou par les mandemens des gouverneurs et lieutenans généraux de nos provinces, ou de l’autorité des chefs de l’autre part, ou sous quelque autre prétexte que ce soit.
LXX. — Les enfans de ceux qui se sont retirez hors de notre royaume, depuis la mort du feu roy Henri deuxième, notre très honoré seigneur et beau père, pour cause de la religion et troubles, encores que lesdits enfans soient nez hors le royaume, seront tenus pour vrais François et regnicoles ; et tels les avons déclarez et déclarons, sans qu’il leur soit besoin prendre lettre de naturalité, ou autres provisions de nous que le présent édit : nonobstant toutes ordonnances à ce contraires, ausquelles nous avons dérogé et dérogeons, à la charge que lesdits enfans nez és païs étrangers, seront tenus, dans dix ans après la publication du présent édit, de venir demeurer dans ce royaume.
LXXI. — Ceux de ladite religion prétenduë réformée, et autres qui ont suivi leur party, lesquels auroient pris à ferme avant les troubles aucuns greffes, ou autre domaine, gabelle, imposition foraine, et autres droits à nous appartenans, dont ils n’ont pu jouir à cause d’iceux troubles, demeureront déchargez, comme nous les déchargeons de ce qu’ils n’auront reçu desdites finances, ou qu’ils auront sans fraude payé ailleurs qu’és receptes de nos finances, nonobstant toutes obligations sur ce par eux passées.
LXXII. — Toutes places, villes et provinces de notre royaume, païs, terres et seigneuries de notre obéïssance, useront et jouïront des mêmes priviléges, immunitez, libertez, franchises, foires, marchez, jurisdictions et sièges de justice, qu’elles faisaient auparavant les troubles, commencez au mois de mars mil cinq cens quatre-vingts et cinq, et autres précédens, nonobstant toutes lettres à ce contraires, et les translations d’aucuns desdits sièges : pourveu qu’elles ayent été faites seulement à l’occasion des troubles : lesquels sièges seront remis et rétablis és villes et lieux où ils étoient auparavant.
LXXIII. — S’il y a quelques prisonniers qui soient encores tenus par autorité de justice, ou autrement, mêmes és galères, à l’occasion des troubles ou de ladite religion, seront élargis et mis en pleine liberté.
LXXIV. — Ceux de ladite religion ne pourront cy-après être surchargez et foulez d’aucunes charges ordinaires, ou extraordinaires, plus que les catholiques, et selon la proportion de leurs biens et facultez ; et pourront les parties qui prétendront être surchargez, se pourvoir par devant les juges ausquels la connoissance en appartient : et seront tous nos sujets, tant de la religion catholique, que prétenduë réformée, indifféremment déchargez de toutes charges qui ont été imposées de part et d’autre, durant les troubles, sur ceux qui étoient de contraire party, et non consentans ; ensemble des debtes créées et non payées, frais faits sans le consentement d’iceux, sans toutefois pouvoir répéter les fruits qui auront été employez au payement desdites charges.
LXXV. — N’entendons aussi que ceux de ladite religion, et autres qui ont suivi leur party, ni les catholiques qui étoient demeurez és villes et lieux par eux occupées et détenuës, et qui leur ont contribué, soient poursuivis pour le payement des tailles, aides, octrois, crûe, taillon, utenciles, réparations, et autres impositions et subsides échus, et imposez durant les troubles avenus devant et jusques à notre avènement à la couronne, soit par les édits, mandemens des feu rois nos prédécesseurs, ou par l’avis et délibération des gouverneurs et états des provinces, cours de parlement et autres, dont nous les avons déchargez et déchargeons, en défendant aux trésoriers généraux de France et de nos finances, receveurs généraux et particuliers, leurs commis et entremetteurs, et autres intendans et commissaires de nosdites finances, les en rechercher, molester, ni inquiéter directement ou indirectement, en quelque sorte que ce soit.
LXXVI. — Demeureront tous chefs, seigneurs, chevaliers, gentilshommes, officiers, corps de villes et communautez, et tous les autres qui les ont aidez et secourus, leurs veuves, hoirs et successeurs, quittes et déchargez de tous deniers, qui ont été par eux et leurs ordonnances pris et levez, tant des deniers royaux, à quelque somme qu’ils se puissent monter, que des villes et communautez, et particuliers, des rentes, revenus, argenterie, ventes des biens meubles, ecclésiastiques et autres, bois de haute fûtaye, soit du domaine ou autres, amendes, butins, rançons, ou autre nature de deniers par eux pris, à l’occasion des troubles commencez au mois de mars mil cinq cens quatre-vingt-cinq, et autres troubles précédens jusques à notre avènement à la couronne : sans que ceux qui auront été par eux commis à la levée desdits deniers, ou qui les ont baillez ou fournis par leurs ordonnances, en puissent être aucunement recherchez à présent, ni pour l’avenir : et demeureront quittes, tant eux que leurs commis, de tout le maniment et administration desdits deniers, en rapportant pour toute décharge, dedans quatre mois après la publication du présent édit, faite en notre cour de parlement de Paris, acquits dûment expédiez des chefs de ceux de ladite religion, ou de ceux qui avoient été par eux commis à l’audition et clôture des comptes, ou des communautez des villes qui ont eu commandement et charge durant lesdits troubles. Demeureront pareillement quittes et déchargez de tous actes d’hostilité, levée et conduite de gens de guerre, fabrication et évaluation de monnoye, faite selon l’ordonnance desdits chefs, fonte et prise d’artillerie et munitions, confections de poudre et salpêtres, prises, fortifications, démantellemens et démolitions des villes, châteaux, bourgs et bourgades, entreprises sur icelles, brûlemens et démolitions d’églises et maisons, établissement de justices, jugemens et exécutions d’iceux, soit en matière civile ou criminelle, police et règlement fait entre eux, voyages et intelligences, négociations, traittez et contracts faits avec tous princes et communautez étrangères et introduction desdits étrangers ès villes et autres endroits de notre royaume, et généralement de tout ce qui a été fait, géré et négocié durant lesdits troubles, depuis la mort du feu roy Henri deuxième, notre très honoré seigneur et beau-frère, par ceux de ladite religion, et autres qui ont suivi leur party, encores qu’il dût être particulièrement exprimé et spécifié.
LXXVII. — Demeureront aussi déchargez ceux de ladite religion, de toutes assemblées générales et provinciales par eux faites et tenuës, tant à Mante, que depuis ailleurs jusques à présent ; ensemble des conseils par eux établis et ordonnez par les provinces, délibérations, ordonnances et règlemens faits ausdites assemblées et conseils, établissement et augmentation de garnisons, assemblées de gens de guerre, levée et prises de nos deniers, soit entre les mains des receveurs généraux ou particuliers, collecteurs des paroisses, ou autrement, en quelque façon que ce soit, arrêts de sel, continuation ou érection nouvelles de traites, péages, et receptes d’iceux, mêmes à Royan, et sur les rivières de Charante, Garonne, le Rône et Dordogne, armemens et combats par mer, et tous accidens et excès avenus pour faire payer lesdites traites, péages et autres deniers, fortifications des villes, châteaux et places, impositions de deniers et corvées, receptes d’iceux deniers, destitution de nos receveurs et fermiers, et autres officiers, établissement d’autres en leurs places, et de toutes unions, dépêches et négociations faites tant dedans que dehors le royaume : et généralement de tout ce qui a été fait, délibéré, écrit et ordonné par lesdites assemblées et conseils, sans que ceux qui ont donné leurs avis, signé, exécuté, fait signer et exécuter lesdites ordonnances, règlemens et délibérations, en puissent être recherchez, ni leurs veuves, héritiers et successeurs, ores ni à l’avenir, encores que les particularitez n’en soient icy amplement déclarées. Et sur le tout sera imposé silence perpétuel à nos procureurs-généraux et leurs substituts, et tous ceux qui pourroient y prétendre intérêt, en quelque façon et manière que ce soit, nonobstant tous arrêts, sentences, jugemens, informations, et procédures faites au contraire.
LXXVIII. — Approuvons en outre, validons et autorisons les comptes qui ont été ouïs, clos et examinez par les députez de ladite assemblée. Voulons qu’iceux, ensemble les acquits et pièces qui ont été renduës par les comptables, soient portées en notre chambre des comptes de Paris, trois mois après la publication du présent édit, et mises és mains de notre procureur-général, pour être délivrez au garde des livres et registres de notre chambre pour y avoir recours toutes fois et quantes que besoin sera, sans que lesdits comptes puissent être revus, ni les comptables tenus en aucune comparution, ne correction, sinon en cas d’obmission de recepte ou faux acquits ; imposant silence à notredit procureur-général pour le surplus que l’on voudroit dire être défectueux, et les formalitez n’avoir été bien gardées. Défendans aux gens de nos comptes, tant de Paris que des autres provinces où ils sont établis, d’en prendre aucune connoissance en quelque sorte ou manière que ce soit.
LXXIX. — Et pour le regard des comptes qui n’auront encore été rendus, voulons iceux être ouïs, clos et examinez par les commissaires, qui à ce seront par nous députez, lesquels sans difficulté passeront et allouëront toutes les parties payées par lesdits comptables, en vertu des ordonnances de ladite assemblée, ou autres ayans pouvoir.
LXXX. — Demeureront tous collecteurs, receveurs, fermiers, et tous autres, bien et dûment déchargez de toutes les sommes de deniers qu’ils ont payées ausdits commis de ladite assemblée, de quelque nature qu’ils soient, jusques au dernier jour de ce mois. Voulons le tout être passé et alloüé aux comptes qui s’en rendront en nos chambres des comptes purement et simplement, en vertu des quittances qui seront apportées ; et si aucunes étoient cy-après expédiées ou délivrées, elles demeureront nulles, et ceux qui les accepteront ou délivreront seront condamnez en l’amende de faux employ. Et où il y auroit quelques comptes déjà rendus sur lesquels seroient intervenuës aucunes radiations ou charges, pour ce regard avons icelles ôtées et levées, rétabli et rétablissons lesdites parties entièrement, en vertu de ces présentes, sans qu’il soit besoin pour tout ce que dessus de lettres particulières, ni autres choses que l’extrait du présent article.
LXXXI. — Les gouverneurs, capitaines, consuls et personnes commises au recouvrement des deniers, pour payer les garnisons des places tenuës par ceux de ladite religion, ausquels nos receveurs et collecteurs des paroisses auroient fourni par prêt sur leurs cédules et obligations, soit par contrainte ou pour obéir aux commandemens qui leur ont été faits par les trésoriers généraux, les deniers nécessaires pour l’entretenement desdites garnisons, jusques à la concurrence de ce qui étoit porté par l’état que nous avons fait expédier au commencement de l’an mil cinq cens nonante-six, et augmentation depuis nous accordée, seront tenus quittes et déchargez de ce qui a été payé pour l’effet susdit, encores que par lesdites cédules et obligations n’en soit faite expresse mention, lesquelles leur seront renduës comme nulles. Et pour y satisfaire, les trésoriers généraux en chacune généralité feront fournir par les receveurs particuliers de nos tailles leurs quittances ausdits collecteurs ; et par les receveurs généraux, leurs quittances aux receveurs particuliers : pour la décharge desquels receveurs généraux seront les sommes dont ils auront tenu compte, ainsi que dit est, dossées sur les mandements levez par le trésorier de l’épargne, sous les noms des trésoriers généraux de l’extraordinaire de nos guerres, pour le payement desdites garnisons. Et où lesdits mandemens ne monteront autant que porte notre dit état de l’année mil cinq cens nonante-six, et augmentation, ordonnons que pour y suppléer, seront expédiez nouveaux mandemens de ce qui s’en défaudroit pour la décharge de nos comptables, et restitution desdites promesses et obligations, en sorte qu’il n’en soit rien demandé à l’avenir à ceux qui les auront faites, et que toutes lettres de validations qui seront nécessaires pour la décharge des comptables, seront expédiées en vertu du présent article.
LXXXII. — Aussi ceux de ladite religion se départiront et désisteront dés à présent de toutes pratiques, négociations et intelligences, tant dedans que dehors notre royaume ; et lesdites assemblées et conseils établis dans les provinces se sépareront promtement, et seront toutes ligues et associations faites ou à faire, sous quelque prétexte que ce soit, au préjudice de notre présent édit, cassées et annullées, comme nous les cassons et annullons ; défendant très expressément à tous nos sujets de faire d’orénavant aucunes cottisations et levées de deniers sans notre permission, fortifications, enrollemens d’hommes, congrégations et assemblées, autres que celles qui leur sont permises par notre présent édit, et sans armes : ce que nous leur prohibons et défendons, sur peine d’être punis rigoureusement et comme contempteurs et infracteurs de nos mandemens et ordonnances.
LXXXIII. — Toutes prises qui ont été faites par mer durant les troubles, en vertu des congez et aveux donnez, et celles qui ont été faites par terre, sur ceux du contraire party, et qui ont été jugées par les juges et commissaires de l’amirauté, ou par les chefs de ceux de ladite religion, ou leur conseil, demeureront assoupies sous le bénéfice de notre présent édit, sans qu’il en puisse être fait aucune poursuite ; ni les capitaines et autres qui ont fait lesdites prises, leurs cautions, et lesdits juges, officiers, leurs veuves et héritiers, recherchez ni molestez en quelque sorte que ce soit, nonobstant tous arrêts de notre conseil privé, et des parlemens, et toutes lettres de marques et saisies pendantes et non jugées, dont nous voulons leur être faite pleine et entière main-levée.
LXXXIV. — Ne pourront semblablement être recherchez ceux de ladite religion, des oppositions et empêchemens qu’ils ont donnez par cy devant, mêmes depuis les troubles, à l’exécution des arrêts et jugemens donnez pour le rétablissement de la religion catholique, apostolique et romaine en divers lieux de ce royaume.
LXXXV. — Et quant à ce qui a été fait, ou pris durant les troubles hors la voye d’hostilité, ou par hostilité, contre les règlemens publics ou particuliers des chefs ou des communautez des provinces qui avoient commandement, en pourra être faite poursuite par la voye de justice,
LXXXVI. — D’autant néanmoins, que si ce qui a été fait contre les règlemens d’une part et d’autre, est indifféremment excepté et réservé de la générale abolition portée par notre présent édit, et est sujet à être recherché, il n’y a homme de guerre qui ne puisse être mis en peine, dont pourroit avenir renouvellement de troubles ; à cette cause, nous voulons et ordonnons, que seulement les cas exécrables demeureront exceptez de ladite abolition : comme ravissemens et forcemens de femmes et filles, brûlemens, meurtres, et voleries faites par prodition, et de guet à pens, hors les voyes d’hostilité, et pour exercer vengeances particulières, contre le devoir de la guerre, infractions de passeports et sauvegardes avec meurtres et pillages, sans commandement, pour le regard de ceux de ladite religion, et autres qui ont suivi le party des chefs qui ont eu autorité sur eux, fondées sur particulières occasions qui les ont mus à le commander et ordonner.
LXXXVII. — Ordonnons aussi que punition sera faite des crimes et délits commis entre personnes de même party, si ce n’est en actes commandez par les chefs d’une part et d’autre, selon la nécessité, loy et ordre de la guerre. Et quant aux levées et exactions de deniers, ports d’armes, et autres exploits de guerre faits d’autorité privée, et sans aveu, en sera faite poursuite par voye de justice.
LXXXVIII. — Es villes démantelées pendant les troubles, pourront les ruines et démantellemens d’icelles être par notre permission réédifiées et réparées par les habitans, à leurs frais et dépens, et les provisions ottroyées cy-devant pour ce regard, tiendront et auront lieu.
LXXXIX. — Ordonnons, voulons et nous plaît, que tous les seigneurs, chevaliers, gentilshommes et autres, de quelque qualité et condition qu’ils soient de ladite religion prétenduë réformée, et autres qui ont suivi leur party, rentrent, et soient effectuellement conservez en la jouïssance de tous et chacuns leurs biens, droits, noms, raisons et actions, nonobstant les jugemens ensuivis durant lesdits troubles, et à raison d’iceux ; lesquels arrêts, saisies, jugemens, et tout ce qui s’en seroit ensuivi, nous avons à cette fin déclaré, et déclarons nuls, et de nul effet et valeur.
XC. — Les acquisitions que ceux de ladite religion prétenduë réformée, et autres qui ont suivi leur party, auront faites par autorité d’autres que des feu rois nos prédécesseurs, pour les immeubles appartenans à l’Église, n’auront aucun lieu ni effet : ains ordonnons, voulons et nous plaît, que les ecclésiastiques rentrent incontinent et sans délai, et soient conservez en la possession et jouïssance réelle et actuelle desdits biens ainsi aliénez, sans être tenus de rendre le prix desdites ventes ; et ce nonobstant lesdits contracts de vendition, lesquels à cet effet nous avons cassez et révoquez comme nuls : sans toutefois que lesdits acheteurs puissent avoir aucun recours contre les chefs par l’autorité desquels lesdits biens auront été vendus. Et néanmoins, pour le remboursement des deniers par eux véritablement et sans fraude déboursez, seront expédiées nos lettres patentes de permission à ceux de ladite religion, d’imposer et égaler sur eux les sommes à quoy se monteront lesdites ventes ; sans qu’iceux acquéreurs puissent prétendre aucune action pour leurs dommages et intérêts à faute de jouïssance, ains se contenteront du remboursement des deniers par eux fournis pour le prix desdites acquisitions ; précomptant sur iceluy prix les fruits par eux perçus, en cas que ladite vente se trouvât faite à vil et injuste prix.
XCI. — Et afin que tant nos justiciers, officiers, qu’autres nos sujets, soient clairement et avec toute certitude avertis de nos vouloir et intention ; et pour ôter toutes ambiguitez et doutes qui pourroient être faits au moyen des précédens édits, pour la diversité d’iceux, nous avons déclaré et déclarons tous autres précédens édits, articles secrets, lettres, déclarations, modifications, restrictions, interprétations, arrêts et registres, tant secrets qu’autres délibérations, cy-devant par nous ou les rois nos prédécesseurs faites en nos cours de parlemens ou ailleurs, concernant le fait de ladite religion, et des troubles avenus en notredit royaume, être de nul effet et valeur ; ausquels, et aux dérogatoires y contenuës, nous avons par cettuy notre édit dérogé et dérogeons, dès à présent, comme pour lors les cassons, révoquons et annullons : déclarans par exprès, que nous voulons que cettuy notre édit soit ferme et inviolable, gardé et observé, tant par nosdits justiciers, officiers, qu’autres sujets, sans s’arrêter ni avoir aucun égard à tout ce qui pourroit être contraire, ou dérogeant à iceluy.
XCII. — Et pour plus grande assûrance de l’entretenement et observation que nous désirons d’iceluy, nous voulons, ordonnons, et nous plaît, que tous les gouverneurs et lieutenans-généraux de nos provinces, baillifs, sénéchaux, et autres juges ordinaires des villes de notredit royaume, incontinent après la réception d’iceluy édit, jurent de le faire garder et observer chacun en leur détroit : comme aussi les maires, échevins, capitouls, consuls, et jurats des villes, annuels et perpétuels. Enjoignons aussi à nosdits baillifs, sénéchaux, ou leurs lieutenans, et autres juges, faire jurer aux principaux habitans desdites villes, tant d’une que d’autre religion, l’entretenement du présent édit, incontinent après la publication d’iceluy. Mettans tous ceux desdites villes en notre protection et sauvegarde, et les uns à la garde des autres, les chargeans respectivement et par actes publics, de répondre civilement des contraventions qui seront faites à notredit édit dans lesdites villes, par les habitans d’icelles, ou bien représenter et mettre és mains de justice lesdits contrevenans.
Mandons à nos amez et féaux les gens tenans nos cours de parlemens, chambres des comptes, et cours des aides, qu’incontinent après le présent édit reçu, ils ayent, toutes choses cessantes, et sur peine de nullité des actes qu’ils feroient autrement, à faire pareil serment que dessus, et iceluy notre édit faire publier et enregistrer en nosdites cours selon la forme et teneur d’iceluy, purement et simplement, sans user d’aucunes modifications, restrictions, déclarations, où registres secrets, ni attendre autre jussion, ni mandement de nous ; et à nos procureurs-généraux, en requérir et poursuivre incontinent et sans délai ladite publication.
Si donnons en mandement, etc Donné à Nantes au mois d’avril, l’an de grace mil cinq cens quatre-vingts dix-huit, et de nôtre règne le neuvième. Signé : Henri. Et au-dessous : Par le roi, étant dans son conseil, Forget.
Et séellé du grand scel de cire verte, sur lacs de soie rouge et verte. Lues, publiées et regîstrées, etc. et ce consentant le procureur général du Roi, en parlement à Paris le 25 février 1599. Signé : Voysin.
I. — L’article sixième dudit édit touchant la liberté de conscience, et permission à tous les sujets de sa Majesté de vivre et demeurer en ce royaume, et païs de son obéïssance, aura lieu et sera observé selon la forme et teneur : mêmes pour les ministres, pédagogues, et tous autres qui sont ou seront de ladite religion, soient regnicoles, ou autres, en se comportant au reste selon qu’il, est porté par ledit édit.
II. — Ne pourront être ceux de ladite religion contraints de contribuer aux réparations et constructions des églises, chapelles et presbytères, ni à l’achat des ornemens sacerdotaux, luminaires, fontes de cloches, pain béni, droits de confrairies, loüages de maisons pour la demeure des prêtres et religieux, et autres choses semblables, sinon qu’ils y fussent obligez par fondations, dotations, ou autres dispositions faites par eux, ou leurs auteurs et prédécesseurs.
III. — Ne seront aussi contraints tendre et parer le devant de leurs maisons aux jours de fêtes ordonnez pour ce faire : mais seulement souffrir qu’il soit tendu et paré par l’autorité des officiers des lieux, sans que ceux de ladite religion contribuent aucune chose pour ce regard.
IV. — Ne seront pareillement tenus ceux de ladite religion de recevoir exhortation, lorsqu’ils seront malades ou proches de la mort, soit par condamnation de justice ou autrement, d’autres que de la même religion ; et pourront être visitez et consolez de leurs ministres, sans y être troublez : et quant à ceux qui seront condamnez par justice, lesdits ministres les pourront pareillement visiter et consoler, sans faire prières en public, sinon és lieux où ledit exercice public leur est permis par ledit édit.
V. — Sera loisible à ceux de ladite religion, de faire l’exercice public d’icelle à Pimpoul ; et pour Dieppe, au faux-bourg du Paulet ; et seront lesdits lieux de Pimpoul et du Paulet ordonnez pour lieux de bailliages. Quant à Sancerre, sera ledit exercice continué, comme il est à présent, sauf à l’établir dans ladite ville, faisant apparoir par les habitans du consentement du seigneur du lieu, à quoy leur sera pourvu par les commissaires que sa Majesté députera pour l’exécution de l’édit. Sera aussi ledit exercice libre et public rétabli dans la ville de Montagnac en Languedoc.
VI. — Sur l’article faisant mention des bailliages, a été déclaré et accordé ce qui s’ensuit. Premièrement, pour l’établissement de l’exercice de ladite religion, és deux lieux accordez en chacun bailliage, sénéchaussée et gouvernement, ceux de ladite religion nommeront deux villes, és faux-bourgs desquelles ledit exercice sera établi par les commissaires que sa Majesté députera pour l’exécution de l’édit. Et où il ne seroit jugé à propos par eux, nommeront ceux de ladite religion deux ou trois bourgs, ou villages proches desdites villes, et pour chacunes d’icelles, dont lesdits commissaires en choisiront l’un. Et si par hostilité, contagion ou autre légitime empêchement, il ne peut être continué esdits lieux, leur en seront baillez d’autres pour le temps que durera ledit empêchement. Secondement, qu’au gouvernement de Picardie, ne sera pourvu que de deux villes, aux faux-bourgs desquelles ceux de ladite religion pourront avoir l’exercice d’icelle pour tous les bailliages, sénéchaussées et gouvernemens qui en dépendent : et où il ne seroit jugé à propos de l’établir esdites villes, leur seront baillez deux bourgs ou villages commodes. Tiercement, pour la grande étenduë de la sénéchaussée de Provence, et bailliage de Viennois, sa Majesté accorde en chacun desdits bailliages et sénéchaussées un troisième lieu, dont le choix et nomination se fera comme dessus, pour y établir l’exercice de ladite religion, outre les autres lieux où il est déjà établi.
VII. — Ce qui est accordé par ledit article pour l’exercice de ladite religion és bailliages, aura lieu pour les terres qui appartenoient à la feuë reine belle-mère de sa Majesté, et pour le bailliage de Beaujolois.
VIII. — Outre les deux lieux accordez pour l’exercice de ladite religion, par les articles particuliers de l’an 1577, és isles de Marennes et d’Oleron, leur en seront donnez deux autres, à la commodité desdits habitans : savoir un pour toutes les îles de Marennes, et un autre pour l’île d’Oleron.
IX. — Les provisions ottroyées par sa Majesté, pour l’exercice de ladite religion en la ville de Mets, sortiront leur entier effet.
X. — Sa majesté veut et entend que l’art. XXVII de son édit, touchant l’admission de ceux de ladite religion prétenduë réformée aux offices et dignitez, soit observé et entretenu selon sa forme et teneur, nonobstant les édits et accords cy-devant faits pour la réduction d’aucuns princes, seigneurs, gentilshommes et villes catholiques en son obéissance, lesquels n’auront lieu au préjudice de ceux de ladite religion, qu’en ce qui regarde l’exercice d’icelle. Et sera ledit exercice réglé selon et ainsi qu’il est porté par les articles qui s’ensuivent, suivant lesquels seront dressées les instructions des commissaires que sa Majesté députera pour l’exécution de son édit, selon qu’il est porté par iceluy.
XI. — Suivant l’édit fait par sa Majesté pour la réduction du sieur duc de Guise, l’exercice, de ladite religion prétenduë réformée ne pourra être fait ni établi dans les villes et faux-bourgs de Rheims, Rocroy, Saint-Disier, Guise, Joinville, Fîmes, et Moncornet és Ardennes.
XII. — Ne pourra aussi être fait és autres lieux, és environs desdites villes, et places défenduës par l’édit de l’an 1577.
XIII. — Et pour ôter toute ambiguïté qui pourroit naître sur le mot, és environs ; déclare sa Majesté avoir entendu parler des lieux qui sont dans la banlieuë desdites villes, esquels lieux l’exercice de ladite religion ne pourra être établi, sinon qu’il y fût permis par l’édit de 1577.
XIV. — Et d’autant que par iceluy ledit exercice étoit permis généralement és fiefs possédez par ceux de ladite religion, sans que ladite banlieuë en fût exceptée, déclare sadite Majesté que la même permission aura lieu, mêmes és fiefs qui seront dedans icelle tenus par ceux de ladite religion, ainsi qu’il est porté par son édit donné à Nantes.
XV. — Suivant aussi l’édit fait pour la réduction du sieur maréchal de la Châtre, en chacun des bailliages d’Orléans et Bourges, ne sera ordonné qu’un lieu de bailliage pour l’exercice de ladite religion, lequel néanmoins pourra être continué, és lieux où il leur est permis de le continuer par ledit édit de Nantes.
XVI. — La concession de prescher és fiefs, aura pareillement lieu dans lesdits bailliages, en la forme portée par ledit édit de Nantes.
XVII. — Sera pareillement observé l’édit fait pour la réduction du sieur maréchal de Bois Dauphin, et ne pourra ledit exercice être fait és villes, faux-bourgs et places amenées par luy au service de sa Majesté, et quant aux environs ou banlieuë d’icelles, y sera l’édit de 77 observé, mêmes és maisons de fiefs, ainsi qu’il est porté par l’édit de Nantes.
XVIII. — Ne se fera aucun exercice de ladite religion és villes, faux-bourgs, et château de Morlais, suivant l’édit fait sur la réduction de ladite ville, et sera l’édit de 77 observé au ressort d’icelle, mêmes pour les fiefs, selon l’édit de Nantes.
XIX. — En conséquence de l’édit pour la réduction de Quinpercorantin, ne sera fait aucun exercice de ladite religion en tout l’évêché de Cornouaille.
XX. — Suivant aussi l’édit fait pour la réduction de Beauvais, l’exercice de ladite religion ne pourra être fait en ladite ville de Beauvais, ni trois lieuës à la ronde. Pourra néanmoins être fait et établi au surplus de l’étenduë du bailliage, aux lieux permis par l’édit de 77, mêmes és maisons de fiefs, ainsi qu’il est porté par ledit édit de Nantes.
XXI. — Et d’autant que l’édit fait pour la réduction du feu sieur amiral de Villars n’est que provisionnel, et jusqu’à ce que le roy en eût autrement été ordonné, sa Majesté veut et entend que nonobstant iceluy, son édit de Nantes ait lieu pour les villes et ressorts amenez à son obéïssance par ledit sieur amiral, comme pour les autres lieux de son royaume.
XXII. — En suite de l’édit pour la réduction du sieur duc de Joyeuse, l’exercice de ladite religion ne pourra être fait en la ville de Thoulouse, faux-bourgs d’icelle, et quatre lieuës à la ronde, ni plus près que sont les villes de Villemur, Carmain et l’Isle en Jourdan.
XXIII. — Ne pourra aussi être remis és villes d’Alet, Fiac, Auriac, et Montesquiou, à la charge toutefois, que si ausdites villes aucuns de ladite religion faisoient instance d’avoir un lieu pour l’exercice d’icelle, leur sera par les commissaires que sa Majesté députera pour l’exécution de son édit, ou par les officiers des lieux, assigné pour chacune desdites villes lieu commode et de sûr accès, qui ne sera éloigné desdites villes de plus d’une lieuë.
XXIV. — Pourra ledit exercice être établi, selon et ainsi qu’il est porté par ledit édit de Nantes, au ressort de la cour du parlement de Thoulouse, excepté toutefois és bailliages, sénéchaussées et leurs ressorts dont le siége principal a été ramené à l’obéïssance du roy par ledit sieur duc de Joyeuse, auquel l’édit de 77 aura lieu : entend toutefois sadite Majesté, que ledit exercice puisse être continué és endroits desdits bailliages et sénéchaussées, où il étoit du temps de ladite réduction, et que la concession d’iceluy és maisons de fiefs, ait lieu dans iceux bailliages et sénéchaussées, selon qu’il est porté par ledit édit.
XXV. — L’édit fait pour la réduction de la ville de Dijon sera observé, et suivant iceluy n’y aura autre exercice de religion, que de la catholique, apostolique et romaine en ladite ville et faux-bourgs d’icelle, ny quatre lieuës à la ronde.
XXVI. — Sera pareillement observé l’édit fait pour la réduction du sieur duc de Mayenne, suivant lequel ne pourra l’exercice de ladite religion prétenduë réformée être fait és ville de Châlons, et deux lieuës és environs de Soissons, durant le tems de six ans à commencer au mois de janvier, an 1596 ; passé lequel tems y sera l’édit de Nantes observé, comme aux autres endroits de ce royaume.
XXVII. — Sera permis à ceux de ladite religion, de quelque qualité qu’ils soient, d’habiter, aller et venir librement en la ville de Lyon, et autres villes et places du gouvernement de Lyonnois, nonobstant toutes défenses faites au contraire par les syndics et échevins de ladite ville de Lyon, et confirmées par sa Majesté.
XXVIII. — Ne sera ordonné qu’un lieu de bailliage pour l’exercice de ladite religion en toute la sénéchaussée de Poitiers, outre ceux où il est à présent établi ; et quant aux fiefs sera suivi l’édit de Nantes. Sera aussi ledit exercice continué dans la ville de Chauvigny : et ne pourra ledit exercice être rétabli dans les villes d’Agen, et Périgueux, encores que par l’édit de 77 il y pût être.
XXIX. — N’y aura que deux lieux de bailliage pour l’exercice de ladite religion en tout le gouvernement de Picardie, comme il a été dit cy-dessus, et ne pourront lesdits lieux être donnez dans les ressorts des bailliages et gouvernemens réservez par les édits faits sur la réduction d’Amiens, Péronne et Abbeville. Pourra toutefois ledit exercice être fait és niaisons de fiefs, par tout le gouvernement de Picardie, selon et ainsi qu’il est porté par ledit édit de Nantes.
XXX. — Ne sera fait aucun exercice de ladite religion en la ville et faux-bourgs de Sens, et ne sera ordonné qu’un lieu de bailliage pour ledit exercice en tout le ressort du bailliage, sans préjudice toutefois de la permission accordée pour les maisons de fiefs, laquelle aura lieu selon l’édit de Nantes.
XXXI. — Ne pourra semblablement être fait ledit exercice en la ville et faux-bourgs de Nantes, et ne sera ordonné aucun lieu de bailliage pour ledit exercice à trois lieuës à la ronde de ladite ville : pourra toutefois être fait és maisons de fiefs, suivant iceluy de Nantes.
XXXII. — Veut et entend sadite Majesté, que sondit édit de Nantes soit observé dès à présent, en ce qui concerne l’exercice de ladite religion, és lieux où par les édits et accords faits pour la réduction d’aucuns princes, seigneurs, gentilshommes et villes catholiques, il étoit inhibé par provision tant seulement, et jusques à ce qu’autrement fût ordonné. Et quant à ceux où ladite prohibition est limitée à certain tems, passé ledit tems, elle n’aura plus de lieu.
XXXIII. — Sera baillé à ceux de ladite religion un lieu pour la ville, prevôté et vicomté de Paris, à cinq lieuës pour le plus de ladite ville, auquel ils pourront faire l’exercice public d’icelle.
XXXIV. — En tous les lieux où l’exercice de ladite religion se fera publiquement, on pourra assembler le peuple, même à son de cloches, et faire tous actes et fonctions appartenans tant à l’exercice de ladite religion, qu’au règlement de la discipline, comme tenir consistoires, colloques, et synodes provinciaux et nationaux par la permission de sa Majesté.
XXXV. — Les ministres, anciens et diacres de ladite religion, ne pourront être contraints de répondre en justice en qualité de témoins, pour les choses qui auront été révélées en leurs consistoires, lorsqu’il s’agit de censures, sinon que ce fût chose concernant la personne du roy ou la conservation de son État.
XXXVI. — Sera loisible à ceux de ladite religion qui demeurent és champs, d’aller à l’exercice d’icelles és villes et faux-bourgs, et autres lieux où il sera publiquement établi.
XXXVII. — Ne pourront ceux de ladite religion tenir écoles publiques, sinon és villes et lieux où l’exercice public d’icelle leur est permis : et les provisions qui leur ont été cy-devant accordées pour l’érection et entretenement des colléges, seront vérifiées où besoin sera, et sortiront leur plein et entier effet.
XXXVIII. — Sera loisible aux pères faisans profession de ladite religion, de pourvoir à leurs enfans de tels éducateurs que bon leur semblera, et en substituer un ou plusieurs par testament, codicile ou autre déclaration passée par devant notaires, ou écrite et signée de leurs mains, demeurans les loix reçuës en ce royaume, ordonnances et coutumes des lieux en leur force et vertu, pour les dations et provisions de tuteurs et curateurs.
XXXIX. — Pour le regard des mariages des prêtres et personnes religieuses qui ont été cy-devant contractez, sadite Majesté ne veut ni entend, pour plusieurs bonnes considérations, qu’ils en soient recherchez ni molestez : sera sur ce imposé silence à ses procureurs-généraux, et autres officiers d’icelle. Déclare néanmoins sadite Majesté, qu’elle entend que les enfans issus desdits mariages pourront succéder seulement és immeubles, acquêts et conquêts immeubles de leurs pères et mères, et au défaut desdits enfans, les parens plus proches et habiles à succéder : et les testamens, donations, et autres dispositions faites ou à faire par personnes de ladite qualité, desdits biens meubles acquêts et conquêts immeubles, sont déclarées bonnes et valables. Ne veut toutefois sadite Majesté que lesdits religieux et religieuses profés puissent venir à aucune succession directe ni collatérale ; ains seulement pourront prendre les biens qui leur ont été ou seront laissez par testament, donations, ou autres dispositions, excepté toutefois ceux desdites successions directes et collatérales : et quant à ceux qui auront fait profession avant l’âge porté par les ordonnances d’Orléans et Blois, sera suivie et observée en ce qui regarde lesdites successions, la teneur desdites ordonnances, chacune pour le tems qu’elles ont en lieu.
XL. — Sadite Majesté ne veut aussi que ceux de ladite religion, qui auront cy-devant contracté ou contracteront cy-après mariage au tiers et quart degré, en puissent être molestez, ni la validité desdits mariages révoquée en doute ; pareillement la succession ôtée ni querellée aux enfans nez ou à naître d’iceux : et quant aux mariages qui pourroient être jà contractez en second degré, ou du second au tiers entre ceux de ladite religion, se retirans devers sadite Majesté, ceux qui seront de ladite qualité, et auront contracté mariage en tel degré, leur seront baillées telles provisions qui leur seront nécessaires, afin qu’ils n’en soient recherchez ni molestez, ni la succession querelle ni débattuë à leurs enfans.
XLI. — Pour juger de la validité des mariages faits et contractez par ceux de ladite religion et décider s’ils sont licites, si celuy de ladite religion est défendeur, en ce cas le juge royal connoîtra du fait dudit mariage ; et où il seroit demandeur et le défendeur catholique, la connoissance en appartiendra à l’official et, juge ecclésiastique ; et si les deux parties sont de ladite religion, la connoissance appartiendra aux juges royaux : voulant sadite Majesté que pour le regard desdits mariages, et différens qui surviendront pour iceux, les juges ecclésiastiques et royaux, ensemble les chambres établies par son édit, en connoissent respectivement.
XLII. — Les donations et légats faits et à faire, soit par disposition de dernière volonté à cause de mort, où entre vifs, pour l’entretenement des ministres, docteurs, écoliers et pauvres de ladite religion prétenduë réformée, et autres causes pies, seront valables, et sortiront leur plein et entier effet, nonobstant tous jugemens, arrêts et autres choses à ce contraires, sans préjudice toutefois des droits de sa Majesté et d’autruy, en cas que lesdits légats et donations tombent en main morte : et pourront toutes actions et poursuites nécessaires pour la jouissance desdits légats, causes pies, et autres droits, tant en jugement que dehors, être faites par procureur sous le nom du corps et communauté de ceux de ladite religion qui aura intérêt et s’il se trouve qu’il ait cy-devant disposé desdites donations et légats, autrement qu’il n’est porté par ledit article, ne s’en pourra prétendre aucune restitution, que ce qui se trouvera en nature.
XLIII. — Permet sadite Majesté à ceux de ladite religion eux assembler par devant le juge royal, et par son autorité égaler et lever sur eux telle somme de deniers qu’il sera arbitré et nécessaire, pour être employez pour les frais de leurs synodes, et entretenement de ceux qui ont charges pour l’exercice de leurdite religion, dont on baillera l’état audit juge royal, pour iceluy garder : la copie duquel état sera envoyée par ledit juge royal de six en six mois, à sadite Majesté ou à son chancelier ; et seront les taxes et impositions desdits deniers exécutoires, nonobstant oppositions ou appellations quelconques.
XLIV. — Les ministres de ladite religion seront exemts des gardes et rondes, et logis de gens de guerre, et autres assiettes et cueillettes de tailles, ensemble des tutelles, curatelles et commissions pour la garde des biens saisis par autorité de justice.
XLV. — Pour les enterremens de ceux de ladite religion, faits par cy-devant aux cimetières desdits catholiques, en quelque lieu et ville que ce soit, n’entend sadite Majesté, qu’il en soit fait aucune recherche, innovation ou poursuitte, et sera enjoint à ses officiers d’y tenir la main. Pour le regard de la ville de Paris, outre les deux cimetières que ceux de ladite religion y ont présentement, à savoir celuy de la Trinité, et celuy de Saint Germain, leur sera baillé un troisième lieu commode pour lesdites sépultures aux faux-bourgs Saint Honoré ou Saint Denis.
XLVI. — Les présidens et conseillers catholiques qui serviront en la chambre ordonnée au parlement de Paris, seront choisis par sa Majesté sur le tableau des officiers du parlement.
XLVII. — Les conseillers de ladite religion prétenduë réformée qui serviront en ladite chambre, assisteront si bon leur semble és procès qui se vuideront par commissaires, et y auront voix délibérative, sans qu’ils ayent part aux deniers consignez, sinon lorsque par l’ordre et prérogative de leur réception ils y devront assister.
XLVIII. — Le plus ancien président des chambres mi-parties présidera en l’audience, et en son absence le second, et se fera la distribution des procés par les deux présidens et conjointement, ou alternativement, par mois ou par semaine.
XLIX. — Avenant vacation des offices dont ceux de ladite religion sont ou seront pourvus ausdites Chambres de l’édit, y sera pourvu de personnes capables, qui auront attestation du synode ou colloque dont ils seront, qu’ils sont de ladite religion et gens de bien.
L. — L’abolition accordée à ceux de ladite religion prétenduë réformée par le LXXIVe article dudit édit, aura lieu pour la prise de tous deniers royaux, soit par ruptures de coffres ou autrement, même pour le regard de ceux qui se levoient sur la rivière de Charante, ores qu’ils eussent été affectez et assignez à des particuliers.
LI. — L’article XLIX des articles secrets faits en l’année 1577, touchant la ville et archevêché d’Avignon et comté de Venise, ensemble le traité fait à Nîmes, seront observez, selon leur forme et teneur ; et ne seront aucunes lettres de marque, en vertu desdits articles et traitez, données que par lettres patentes du roy séellées de son grand seau. Pourront néanmoins ceux qui les voudront obtenir se pourvoir en vertu du présent article, et sans autre commission, par devant les juges royaux, lesquels informeront des contraventions, deni de justice, et iniquité des jugements proposée par ceux qui désireront obtenir lesdites lettres, et les envoyeront avec leur avis clos et scellé à sa Majesté, pour en être ordonné comme elle verra être à faire par raison.
LII. — Sa majesté accorde et veut que maître Nicolas Grimoult soit rétabli et maintenu au titre et possession des offices de lieutenant général civil ancien, et de lieutenant général criminel, au bailliage d’Alençon, nonobstant la résignation par luy faite à maître Jean Marguerit, réception d’iceluy, et la provision obtenuë par maître Guillaume Bernard de l’office de lieutenant général, civil et criminel au siége d’Exmes : et les arrêts donnez contre ledit Marguerit résignataire durant les troubles au conseil privé, és armées 1586, 1587 et 1588, par lesquels maître Nicolas Barbier est maintenu és droits et prérogatives de lieutenant général ancien audit bailliage, et ledit Bernard audit office de lieutenant à Exmes, lesquels sa Majesté a cassez, et tous autres à ce contraires. Et outre sadite Majesté, pour certaines bonnes considérations, a accordé et ordonné que ledit Grimoult remboursera dedans trois mois ledit Barbier de la finance qu’il a fournie aux parties casuelles pour l’office de lieutenant général, civil et criminel en la vicomté d’Alençon, et de cinquante écus pour les frais : commettant à cette fin le baillif du Perche, ou son lieutenant à Mortaigne. Et le remboursement fait, ou bien que ledit Barbier soit refusant ou dilayant de le recevoir, sadite Majesté a défendu audit Barbier, comme aussi audit Bernard, après la signification du présent article, de plus s’ingérer en l’exercice desdits offices, à peine de crime de faux, et envoye iceluy Grimoult en la jouïssance d’iceux offices, et droits y appartenans : et en ce faisant les procés qui étoient pendans au conseil privé de sa Majesté : entre lesdits Grimoult, Barbier et Bernard, demeureront terminez et assoupis, défendant sadite Majesté aux parlemens et tous autres d’en prendre connoissance, et ausdites parties d’en faire poursuitte. En outre sadite Majesté s’est chargée de rembourser ledit Bernard de mil écus fournis aux parties casuelles pour iceluy office, et de soixante écus pour le marc d’or et frais : ayant pour cet effet présentement ordonné bonne et suffisante assignation, le recouvrement de laquelle se fera à la diligence et frais dudit Grimoult.
LIII. — Sadite Majesté écrira à ses ambassadeurs de faire instance et poursuitte pour tous ses sujets, même pour ceux de ladite religion prétendüe réformée, à ce qu’ils ne soient recherchez en leurs consciences, ni sujets à l’inquisition, allans, venans, séjournans, négocians et trafiquans par tous les païs étrangers, alliez et confédérez de cette couronne, pourveu qu’ils n’offensent la police des païs où ils seront.
LIV. — Ne veut sa Majesté qu’il soit fait aucune recherche de la perception des impositions qui ont été levées à Royan, en vertu du contract fait avec le sieur de Candelay, et autres faits en continuation d’iceluy, validant et approuvant ledit contract pour le tems qu’il a en lieu en tout son contenu, jusqu’au dix-huitième jour de mai prochain.
LV. — Les excés avenus en la personne d’Armand Courtines dans la ville de Millaut en l’an 1587 et de Jean Reines et Pierre Seigneuret, ensemble les procédures faites contre eux par les consuls dudit Millaut, demeureront abolies et assoupies par le bénéfice de l’édit, sans qu’il soit loisible à leurs veuves et héritiers, ni aux procureurs-généraux de sa Majesté, leurs substituts ou autres personnes quelconques, d’en faire mention, recherche, ni poursuitte : nonobstant et sans avoir égard à l’arrêt donné en la Chambre de Castres le dixiéme jour de mars dernier, lequel demeurera nul et sans effet, ensemble toutes informations et procédures faites de part et d’autre.
LVI. — Toutes poursuittes, procédures, sentences, jugemens et arrêts, donnez tant contre le feu sieur de La Nouë, que contre le sieur Odet de La Nouë, son fils, depuis leurs détentions et prisons en Flandres, avenuës és mois de mai 1580 et de novembre 1584 et pendant leur continuelle occupation au fait des guerres et service de sa Majesté, demeureront cassez et annullez, et tout ce qui est ensuivi en conséquence d’iceux : et seront lesdits de La Nouë reçus en leurs défenses, et remis en tel état qu’ils étoient auparavant lesdits jugemens et arrêts ; sans qu’ils soient tenus refonder les dépens, ni consigner les amendes, si aucunes ils avoient encouru, ni qu’on puisse alléguer contre eux aucune peremption d’instance ou prescription pendant ledit tems.
Ne veut Sa Majesté qu’il soit fait aucune recherche de la perception des impositions qui ont été levées à Royan, en vertu du contrat fait avec le sieur de Candelay et autres faits en continuation d’iceux, validant et approuvant ledit contrat pour le temps qu’il a eu lieu en tout son contenu, jusqu’au dix-huitième jour de mai prochain.
Fait par le Roi étant en son Conseil, à Nantes, le deuxième jour de mai mille cinq cent quatre-vingt dix-huit. Signé : Henry. et plus bas Forget. Et séellé du grand seau de cire jaune.
Aujourd’hui troisième jour d’avril 1598, le roy étant à Nantes, voulant gratifier ses sujets de la religion prétenduë réformée, et leur aider à suvenir à plusieurs grandes dépenses qu’ils ont à supporter, a ordonné et ordonne qu’à l’avenir, à commencer du premier jour du présent mois, sera mis entre les mains de monsieur de Vierse, commis par sa Majesté à cet effet, par les trésoriers de son épargne, chacun en son année, des rescriptions pour la somme de quarante-cinq mille écus, pour employer à certains affaires secrets qui les concernent, que sa Majesté ne veut être spécifiez ni déclarez : laquelle somme de quarante-cinq mille écus sera assignée sur les recettes générales qui ensuivent : à savoir, Paris, six mille écus ; Rouën, six mille écus ; Caën, trois mille écus ; Orléans, quatre mille écus ; Tours, quatre mille écus ; Poitiers, huit mille écus ; Limoges, six mille écus ; Bordeaux, huit mille écus. Le tout revenant ensemble à ladite somme de quarante-cinq mille écus ; payable par les quatre quartiers de ladite année des premiers et plus clairs deniers desdites recettes générales ; sans qu’il en puisse être retranché ni reculé aucune chose pour les non-valeurs, ou autrement. De laquelle somme de quarante-cinq mille écus fera fournir acquit de comptant, qui sera mis és mains du thrésorier de sondit épargne pour luy servir d’acquit, en baillant lesdites rescriptions entières, pour ladite somme de 45000 écus, sur lesdites généralitez, au commencement de chaque année. Et où pour la commodité des susdits seront requis faire payer en recettes particulières établies, partie desdites assignations sera mandé aux thrésoriers généraux de France, et receveurs généraux desdites généralitez, de le faire, en déduction desdites rescriptions desdits thrésoriers de l’épargne ; lesquelles seront après délivrées par ledit sieur de Vierse, à ceux qui luy seront nommez par ceux de ladite religion au commencement de l’année, pour faire la recette et dépense des deniers qui devront être reçus en vertu d’icelles ; dont ils seront tenus rapporter audit sieur de Vierse à la fin de l’année un état au vray, avec les quittances des parties prenantes, pour informer sa Majesté de l’employ desdits deniers : sans que ledit sieur de Vierse, ni ceux qui seront mis par ceux de ladite religion, soient tenus d’en rendre compte en aucune chambre : dont et de tout ce qui en dépend sadite Majesté a commandé toutes lettres et dépêches nécessaires leur être expédiées, en vertu du présent brevet, qu’elle a fait signer de sa main, et contresigner par nous conseiller, en son conseil d’État, et secrétaire de ses commandemens. Signé, Henri. Et plus bas, De Neufville.
Aujourdhuy dernier jour d’avril 1598, le roy étant à Nantes, voulant donner tout le contentement qui luy est possible à ses sujets de la religion prétenduë réformée, sur les demandes et requêtes qui luy ont été faites de leur part, pour ce qu’ils ont estimé leur être nécessaire, tant pour la liberté de leurs consciences, que pour l’assûrance de leurs personnes, fortunes et biens. Et pour l’assûrance que sa Majesté a de leur fidélité, et sincère affection à son service, avec plusieurs autres considérations importantes au bien et au repos de cet État ; sadite Majesté outre ce qui est contenu en l’édit qu’elle a nouvellement résolu, et qui doit être publié pour le règlement de ce qui les concerne, leur a accordé et promis, que toutes les places, villes et châteaux qu’ils tenoient jusqu’à la fin du mois d’août dernier, esquelles y aura garnisons, par l’état qui en sera dressé et signé par sa Majesté, demeureront en leur garde sous l’autorité et obéissance de sadite Majesté par l’espace de huit ans, à compter du jour de la publication dudit édit, Et pour les autres qu’ils tiennent, où il n’y aura point de garnisons, n’y sera point altéré ni innové. N’entend toutesfois sadite Majesté, que les villes et châteaux de Vendôme et Pontorson soient compris au nombre desdites places laissées en garde à ceux de ladite religion. N’entend aussi comprendre audit nombre la ville, château et citadelle d’Aubenas, de laquelle elle veut disposer à sa volonté, sans que si c’est, entre les mains d’un de ladite religion, que cela fasse conséquence qu’elle soit après affectée à un autre de ladite religion, comme les autres villes qui leur sont accordées. Et quant à Chauvigny, elle sera renduë à l’évêque de Poitiers, seigneur dudit lieu, et les nouvelles fortifications faites en icelles rasées et démolies. Et pour l’entretenement des garnisons qui devront être entretenuës esdites villes, places et châteaux, leur a sadite Majesté accordé jusques à la somme de neuf-vingts mille écus, sans y comprendre celles de la province de Dauphiné, ausquelles sera pourvu d’ailleurs que de ladite somme de cent quatre-vingts mille écus par chacun an : leur promet et assûre en faire bailler les assignations bonnes et valables sur les plus clairs deniers, où seront établies lesdites garnisons. Et où elles n’y suffiroient, et qu’il n’y eut en icelles assez de fonds, leur sera parfourni le surplus sur les autres recettes plus prochaines, sans que les deniers puissent être divertis desdites recettes, que ladite somme n’ait été entièrement fournie et acquittée. Leur a en outre sadite Majesté promis et accordé, que lors qu’elle fera et arrêtera l’état desdites garnisons, elle appellera auprès d’elle aucuns de ceux de ladite religion, pour en prendre leur avis, et entendre sur ce leurs remontrances, pour après en ordonner ; ce qu’elle fera toujours le plus à leur contentement que faire se pourra. Et si pendant le tems desdites huit années, il y a occasion de faire quelque changement sur ledit état, soit que cela procède du changement qu’en fera sadite Majesté, ou que ce soit à leur requisition, elle en usera de même, qu’à le résoudre pour la première fois. Et quant aux garnisons de Dauphiné, sa Majesté, dressant état d’icelles, prendra sur ce l’avis du sieur de Lesdiguières. Et avenant vacation d’aucuns gouverneurs et capitaines desdites places, sadite Majesté leur promet aussi et accorde qu’elle n’en pourvoira aucun qui ne soit de ladite religion prétenduë réformée et qui n’ait attestation du colloque où il sera résident, qu’il soit de ladite religion, et homme de bien. Se contentera néanmoins, que celuy qui en devra être pourvu sur le brevet qui luy en aura été expédié, soit tenu auparavant que d’en obtenir la provision, de rapporter l’attestation du colloque d’où il sera, laquelle aussi ceux dudit colloque seront tenus de luy bailler promtement, sans le tenir en aucune longueur ; ou en cas de refus, feront entendre à sadite Majesté les causes d’iceluy. Et ce terme desdites huit années expiré, combien que sa Majesté, soit quitte de sa promesse pour le regard desdites villes, et eux obligez de les luy remettre : toutefois elle leur a encore accordé et promis, que si esdites villes elle continuë après ledit tems d’y tenir garnisons, ou y laisser un gouverneur pour commander, qu’elle n’en dépossédera point celuy qui s’en trouvera pourvu, pour y en mette un autre. Comme pareillement déclare que son intention est, tant pendant lesdites huit années, qu’après icelles, de gratifier ceux de ladite religion, et leur faire part des charges, gouvernemens et autres honneurs, qu’elle aura à distribuer, et départir indifféremment et sans aucune exception, selon la qualité et mérite des personnes, comme à ses autres sujets catholiques ; sans toutefois que les villes et places, qui leur pourront cy-après être commises pour y commander, autres que celles qu’ils ont à présent, puissent tirer à conséquence d’être cy-après particulièrement affectées à ceux de ladite religion. Outre ce sadite Majesté leur a accordé, que ceux qui ont été commis par ceux de ladite religion à la garde des magasins, munitions, poudres et canons d’icelles villes, et ceux qui leur seront laissez en garde, seront continuez esdites charges, en prenant commission du grand maître de l’artillerie, et commissaire général des vivres. Lesquelles lettres seront expédiées gratuitement, mettant entre leurs mains les états signez en bonne et due forme desdits magasins, munitions, poudres et canons ; sans que pour raison desdites commissions, ils puissent prétendre aucunes immunitez ou privilége. Seront néanmoins employez sur l’état qui sera fait desdites garnisons, pour être payez de leurs gages sur les sommes cy-dessus accordées par sa Majesté pour l’entretenement de leurs garnisons, sans que les autres finances de sa Majesté en soient aucunement chargées. Et d’autant que ceux de ladite religion ont supplié sa Majesté de leur vouloir faire entendre ce qu’il luy a plu d’ordonner pour l’exercice d’icelle en la ville de Metz, d’autant que cela n’est assez donné clairement à entendre, et compris en son édit et articles secrets, déclare sa Majesté, qu’elle a fait expédier lettres patentes, par lesquelles il est porté que le temple cy-devant bâti dans ladite ville par les habitans d’icelle leur sera rendu, pour en lever les matériaux, ou autrement en disposer, comme ils verront être à faire ; sans toutefois qu’il leur soit loisible d’y prêcher ni faire aucun exercice de ladite religion ; et néanmoins leur sera pourvu d’un lieu commode dans l’enclos de ladite ville, où ils pourront faire ledit exercice public, sans qu’il soit nécessaire de l’exprimer par son édit. Accorde aussi sa Majesté, que nonobstant la défense faite de l’exercice de ladite religion à la cour et suite d’icelle, les ducs, pairs de France, officiers de la couronne, marquis, comtes, gouverneurs et lieutenans généraux, maréchaux de camp, et capitaines des gardes de sadite Majesté, qui seront à sa suite, ne seront recherchez de ce qu’ils feront à leur logis, pourvu que ce soit en leur famille particulière tant seulement, à portes closes, et sans psalmodier à haute voix, ni rien faire qui puisse donner à connoître que ce soit exercice public de ladite religion ; et si sadite Majesté demeure plus de trois jours és villes et lieux où l’exercice est permis, pourra ledit exercice après ledit tems y être continué comme il étoit avant son arrivée. Déclare sa Majesté, qu’attendu l’état présent de ses affaires, elle n’a pu comprendre pour maintenant ses païs delà les monts, Bresse et Barcellonne, en la permission par elle accordée de l’exercice de ladite religion prétenduë réformée. Promet néanmoins sa Majesté, que lorsque lesdits païs seront en son obéïssance, elle traitera ses sujets d’iceux pour le regard de la religion, et autres points accordez par son édit, comme ses autres sujets, nonobstant ce qui est porté par ledit édit ; et cependant seront maintenus en l’état où ils sont à présent. Accorde sa Majesté, que ceux de ladite religion prétenduë réformée qui doivent être pourvus des offices de présidens et conseillers créez pour servir és chambres ordonnées de nouveau par son édit, seront pourvus desdits offices gratuitement, et sans finance pour la première fois, sur l’état qui sera présenté à sa Majesté par les députez de l’assemblée de Châtellerault : comme aussi les substituts des procureurs et avocats généraux érigez par le même édit en la Chambre de Bordeaux : et avenant incorporation de ladite Chambre de Bordeaux, et de celle de Thoulouse ausdits parlemens, lesdits substituts seront pourvus d’offices de conseillers en iceux aussi gratuïtement. Sa Majesté fera aussi pouvoir messire François Pitou de l’office de substitut du procureur général en la cour du parlement de Paris : et à ces fins sera faite érection de nouveau dudit office ; et après le décès dudit Pitou, en sera pourvu un de ladite religion prétenduë réformée. Et avenant vacation par mort de deux offices de maîtres des requêtes de l’hôtel du roy les premiers qui vaqueront, y sera pourvu par sa Majesté de personnes de ladite religion prétenduë réformée que sa Majesté verra être propres et capables pour le bien de son service, et pour le prix de la taxe des parties casuelles. Et cependant sera ordonné, qu’en chacun quartier il y ait deux maîtres des requêtes, qui seront chargez de rapporter les requêtes de ceux de ladite religion. Permet en outre sa Majesté aux députez de ladite religion assemblez en ladite ville de Châtellerault, de demeurer ensemble au nombre de dix en la ville de Saumur, pour la poursuite de l’exécution de son édit, jusqu’à ce que sondit édit soit vérifié en sa cour de parlement de Paris ; nonobstant, qu’il leur soit enjoint par ledit édit, de se séparer promtement : sans toutefois qu’ils puissent faire au nom de ladite assemblée aucunes nouvelles demandes, ni s’entremettre que de la solicitation de ladite exécution, députation, et acheminement des commissaires, qui seront pour ce ordonnez. Et de tout ce que dessus, leur a sa Majesté donné sa foy et parole par le présent brevet, qu’elle a voulu signer de sa propre main, et contre-signer par nous ses secrétaires d’État ; voulant iceluy brevet leur valoir, et avoir le même effet que si le contenu en iceluy étoit compris en un édit vérifié en ses cours de parlement : s’étans ceux de ladite religion contentez, pour s’accommoder à ce qui est de son service, et à l’état de ses affaires, de ne la presser pas de mettre cette ordonnance en autre forme plus authentique, prenant cette confiance en la parole et bonté de sa Majesté, qu’elle les en fera jouir entièrement. Ayant à cette fin commandé, que toutes les expéditions et dépêches qui seront nécessaires pour l’exécution de ce que dessus, leur en soient expédiées. Ainsi signé, Henry. Et plus bas, Forget.