Élisée fils de Saphat

16.
Une fleur spirituelle

Vous connaissez ces paroles de Hébreux 12.26 et suivantes : Prenez garde de mépriser celui qui vous parle… duquel la voix ébranla alors la terre, mais à l’égard du temps présent il a fait cette promesse, disant : J’ébranlerai encore une fois non seulement la terre, mais aussi le ciel. Or, ce mot, encore une fois, signifie l’abolition des choses muables comme ayant été faites de main, afin que celles qui sont immuables demeurent. C’est pourquoi saisissant le royaume qui ne peut être ébranlé, retenons la grâce par laquelle nous servions Dieu, en sorte que nous lui soyons agréables avec respect et avec crainte. C’est une mer profonde que nous ne pouvons entièrement sonder. Mais jetons-y notre filet et, s’il est possible, retirons-en quelques perles.

La prophétie d’Aggée que ces paroles citent s’applique à l’économie évangélique. Elle a commencé de s’accomplir depuis la fondation du royaume de Christ. En effet, quel ébranlement depuis lors dans l’histoire du monde ! Les édifices de superstition séculaires s’écroulent. La face entière des sociétés se transforme. Et cette transformation a continué et continuera avec toutes ses secousses jusqu’à la fin du monde ! Quel ébranlement, non seulement sur la terre, mais dans le ciel même par l’incarnation, par le sacrifice, par l’ascension de l’Homme Dieu !

Mais, dit l’apôtre, ce mot : encore une fois, signifie l’abolition des choses muables, comme ayant été faites de main, afin que celles qui sont immuables demeurent. Il y a donc des choses qui, par nature, sont destinées à périr et à faire place à celles qui doivent toujours durer. C’est ainsi que le culte lévitique, par sa nature même, appartenait aux choses passagères. Mais les Juifs, dans leur aveuglement, le confondaient avec ce qui est immuable, bien éloignés de croire qu’il fallait chercher l’idée de ce qui est permanent dans les tentes des patriarches, dans les demeures sans apparence d’un Zacharie ou d’un Siméon. La gloire de ce monde tout entière appartient aux choses muables. Quel spectacle nous présente l’histoire des peuples ? Notre esprit s’y promène à travers les empires détruits, les dynasties éteintes, les nations disparues, les systèmes religieux évanouis et les illustrations de tout genre tombées dans l’oubli. La poussière les couvre et leur lieu même ne les reconnaît plus. Partout et sur toutes choses nous trouvons écrit en caractères palpables : Les choses visibles ne sont que pour un temps. Tu peux lire cette inscription sur les fondements de la ville où tu habites, dans les constitutions et dans les lois de ton pays, dans ton doux cercle de famille, dans ta position sociale, dans les fonctions que tu remplis, sur ton front même, car tu appartiens aussi toi-même, en un certain sens, aux choses périssables. Chaque objet accomplit son but déterminé, puis vient pour lui un ébranlement auquel il ne résiste point. La terre elle-même sera consumée, et les cieux passeront avec un bruit de tempête et seront roulés comme un habit. N’est-ce donc pas une folie que de choisir son lot parmi les choses muables ?

Remontons, à travers les siècles, jusqu’à l’origine de ce qui a pris fin, nous rencontrons, dès le commencement, une chose que rien n’a pu détruire ni changer. Son éternel fondement apparut il y a dix-huit siècles dans une des moins illustres contrées de la terre. Depuis lors, elle s’est propagée à travers les nations. C’est un temple vivant qu’aucun Nébucadnetzar ne peut consumer. C’est une société de frères, parmi lesquels on voit comme un Fils de l’homme qu’ils entourent de leur amour et de leur espérance. Ils sont dans le monde, mais comme en passage seulement. Ai-je besoin de nommer l’Israël de Dieu ? Voilà la seule chose immuable, la seule indestructible. Les portes même de l’enfer ne pourront en triompher. Tout dans cet empire demeure : son roi, sa constitution et jusqu’au dernier de ses sujets. L’œil de la chair ne saurait toutefois le distinguer des choses muables dans le sein desquelles il prend naissance et se développe.

C’est pourquoi, saisissant le royaume qui ne peut être ébranlé, retenons la grâce, par laquelle nous servions Dieu, en sorte que nous lui soyons agréables avec respect et avec crainte. Ne faisons pas comme ceux qui ayant reçu la grâce, retombent aussitôt dans les œuvres, et font dépendre leur paix des degrés divers de leur propre sainteté. Car ils dégradent, autant qu’il est en eux, le royaume de Dieu, et le confondent avec ce qui est périssable. Non, la grâce est toujours grâce ; elle demeurera grâce aux siècles des siècles.

2 Rois 5.17

17 Naaman dit : Or je te prie, ne pourrait-on point donner de cette terre à ton serviteur la charge de deux mulets ? Car ton serviteur ne fera plus d’holocauste, ni de sacrifice à d’autres dieux, mais seulement à l’Eternel.

L’âme de Naaman se dévoile de plus en plus à nous. Les régénérés sont d’ordinaire semblables à des jardins qui laissent apercevoir à peine quelques unes de leurs richesses. Mais ici l’entrée nous est ouverte dans un de ces jardins de Dieu. Nous pouvons jouir de ses parfums, de ses frais ruisseaux, de ses riants ombrages. L’état intérieur de Naaman, — son énergique déclaration, — et sa naïve prière, sont les trois points dont nous nous occuperons aujourd’hui.

I

Vous avez déjà compris, à l’ouïe de la confession du Syrien, qu’il n’est pas de ceux que les traits de la grâce n’ont fait qu’effleurer sans les atteindre. Il appartient pour toujours au Saint d’Israël. Aussi ne craint-il pas de revêtir, au grand jour, la livrée de son nouveau maître. Quelle joie pour Élisée, de voir ce païen complètement renouvelé.

De nos jours, la décision est chose rare parmi les chrétiens. La plupart ne sont convertis qu’à demi. On ne sait où est leur patrie, dans le monde ou dans la Jérusalem céleste. On ne peut dire s’ils sont les serviteurs de la loi ou s’ils ont été affranchis par l’Evangile. Les réveils ne sont le plus souvent qu’un long exercice de patience. Des pèlerins se mettent en route, ils courent même vers la porte étroite ; mais tout à coup ils s’arrêtent, ils reculent lâchement. Plus tard, prenant un nouvel élan, ils s’écrient : « Je veux aller au Seigneur ! » mais ils ne suivent pas résolument la voie étroite. Toujours des promesses, mais jamais de décision ; toujours le geste de saisir le drapeau du Seigneur, mais jamais de joyeux accomplissements. Souvent en voyant poindre les bourgeons du printemps nous sommes prêts à les saluer par des chants de joie ; mais la gelée survient qui les surprend et leur tendre verdure noircit et meurt. Souvent une larme, une touchante confession, des vœux exprimés avec force, nous remplissent d’espérance ; mais ces fleurs sont stériles et ne produisent aucun fruit. D’autres fois ce sont de vives aspirations vers le Seigneur ; mais hélas ! elles sont semblables à ces brouillards d’été que nous voyons se traîner au matin le long des montagnes, qui voudraient s’élever, mais qui ne peuvent quitter le sol dont ils émanent et qui bientôt finissent par disparaître dans les gorges.

Ce qui explique la fermeté de la résolution de Naaman c’est qu’il n’a choisi le Seigneur qu’après avoir été choisi par Lui. Il y a une certaine manière de chercher le Seigneur qui ne procède que de l’individu lui-même. Des parents bien-aimés se sont convertis ; on voudrait en faire autant. Un ami intime est entré dans la voie du salut ; comment resterait-on en arrière ? On reconnaît le sérieux du temps présent et l’on voudrait bien posséder un Dieu de secours et de consolation. On voit que les saints du Seigneur ont de beaux privilèges et on veut les partager. On essaie d’entrer, d’une certaine manière, dans le royaume de Dieu, mais : « Je vous dis que plusieurs tâcheront d’entrer et ils ne le pourront. » On a beau prier, s’astreindre à des dévotions régulières, se fourrer dans le vêtement emprunté de la piété d’autrui, ce n’est que mômerie. On ne fait ainsi que des simulacres de chrétiens. C’est peine perdue que de vouloir saisir Christ avant d’être saisi par lui. Comme une plante ne se redresse point vers la lumière avant d’en avoir ressenti le magique attouchement, de même l’homme ne va à Christ qu’après avoir été miraculeusement incliné par le Sauveur lui-même. C’est à lui de commencer l’œuvre et non à toi. L’aiguille aimantée te révèle le mystère de la véritable conversion. Lorsque c’est Lui qui réveille, lorsque c’est Lui qui tire, alors la conversion devient aussi naturelle que toute autre œuvre divine, alors le dévouement devient un besoin irrésistible. C’est ce qui vient d’arriver à Naaman. C’est le Seigneur qui l’a converti et non sa volonté propre. Le Seigneur l’a pris à Lui, et, par cela même, le commandement de vivre au Seigneur n’est plus pour Lui une chaîne, mais une guirlande de fleurs et une brillante couronne. Rien ne peut plus le séparer du Seigneur. Semblable aux torrents qui se précipitent des montagnes et que rien ne peut empêcher d’aller se jeter à la mer, de même, porté sur les ailes de l’amour, il s’élance vers son Sauveur et il considère comme un honneur et non comme une peine de lui offrir en oblation de reconnaissance tout ce qu’il possède.

II

La fermeté de la conversion de Naaman se montre dans la détermination suivante : Ton serviteur, dit-il à Élisée, ne fera plus d’holocaustes ni de sacrifices à d’autres dieux, mais seulement à l’Eternel. — C’est le serment qu’il prête à ses nouveaux drapeaux, c’est la signature qu’il appose à son contrat avec le Dieu d’Israël. Il se nomme le serviteur d’Élisée. Une nouvelle règle lui a été donnée, pour mesurer la grandeur. Que les gens de sa suite le comprennent ou non, peu lui importe. Il leur répondrait, au besoin, comme David à Mical : Je me rendrai encore plus abject et je m’estimerai encore moins et je serai honoré dans mon abaissement même.

Ton serviteur, ne fera plus d’holocaustes ni de sacrifices à d’autres dieux, mais seulement à l’Eternel. Il ne le fera plus, sa résolution est prise. Cette volonté est un acte divin, immuable comme tout ce que Dieu produit. Il n’y manquera plus ; et lors même qu’il y manquerait et sacrifierait encore souvent aux idoles, ce ne serait plus lui qui le ferait. Son vrai moi n’y prendrait aucune part. La volonté nouvelle produite par Dieu est ce qui fait le chrétien : c’est pourquoi le chrétien ne pèche point et ne saurait pécher. En tout homme régénéré nous trouvons un chrétien et un non-chrétien dans une seule personne. C’est le phénomène le plus étrange qu’il y ait sous le ciel. Il a continuellement à combattre contre un autre ; et cet autre… c’est lui-même. Dans les assauts qu’il livre à cet ennemi intérieur, il peut se réjouir des blessures qu’il lui fait, bien que ces blessures, il les sente lui-même. Il le cloue à la croix, et c’est lui-même qui souffre sur cette croix, en même temps qu’il se réjouit de son triomphe.

Naaman veut. Sa volonté est une nécessité divine sous la forme de la liberté. Toute conversion porte ce caractère. « Ainsi donc, » me direz-vous, « les convertis ne seraient que des machines ?… » Mais, serait-ce donc un si grand malheur, demanderai-je avec un écrivain distingué, d’être une machine du Saint-Esprit ? L’homme naturel est-il libre ? il croit l’être, ce pauvre aveugle, et cependant de quels fers n’est-il pas chargé ? Il pèche, non pas par force, mais par nécessité ; tout comme le chrétien est saint par nécessité en même temps que volontairement. La liberté, dans l’acception vulgaire de ce mot, est un trésor perdu ; mais, puisque nous devons être soumis à quelque domination, ne vaut-il pas infiniment mieux être sous l’influence d’un pouvoir céleste que d’être vendus au prince des ténèbres ?

Ton serviteur veut, tel est le langage d’une âme que Dieu a saisie. Plusieurs d’entre nous en sont venus jusqu’à dire : « Je voudrais bien me consacrer au Seigneur ! Je me sens porté à le faire. Je le ferais volontiers. » Mais toutes ces velléités ne nous sauveront pas de l’enfer. Au lieu de dire timidement je voudrais, il faut dire avec énergie : je veux, je veux et ne rien ajouter de plus. Ma famille hoche la tête ; mais je veux appartenir au Seigneur Jésus-Christ. Mes amis cherchent à m’en dissuader, mais je le veux. Le monde me couvre de mépris ; il y aura de la rumeur. Mais qu’importe, je veux être au Seigneur ! dussé-je être foulé aux pieds dans les rues, je le veux ! — Arrière de moi, vaines idoles auxquelles je prodiguai l’encens et l’adoration ! vaines compagnies que j’ai trop longtemps fréquentées, frivolités que j’ai poursuivies ! J’ai juré à l’Eternel mon Dieu que je garderai son alliance ; je la garderai. — Il faut que nous en venions une fois à prononcer ce je veux, contre lequel viennent se briser, comme contre une colonne inébranlable, les flots pressés des objections et des résistances, ce je veux qui, semblable à une épée à deux tranchants, met en pièces tout ce qui s’oppose à Jésus-Christ ; ce je veux qui retentira parmi mes amis et tout autour de moi et qui mettra sou ferme sceau sur ma vie tout entière. Tant que nous n’en sommes pas venus 1à, notre foi est illusoire et notre christianisme n’est qu’un brillant mensonge. Le christianisme ne consiste pas à connaître, à contempler, à sentir ; sa marque distinctive c’est de vouloir. — Considérez attentivement ceci, mes frères, car une malheureuse confusion d’idées sur ce point pourrait vous devenir cruellement fatale. — Naaman ne veut plus sacrifier à ses dieux, mais au Seigneur. — Nous le félicitons de cette sainte résolution. Ah ! que n’est-il en notre pouvoir de la faire aussi entrer dans vos cœurs ! — Si jamais il fut un siècle qui méritât d’être appelé idolâtre, c’est bien le nôtre. Trois principales idoles entourent de leurs cercles magiques les esprits agités. La première, c’est la passion des jouissances. Sa brillante parure exerce le plus puissant prestige sur toutes les classes de la société. Des millions d’êtres humains lui sacrifient journellement jusqu’au dernier reste de sérieux, jusqu’au plus faible désir d’immortalité. Une jouissance nouvelle pour chaque moment de la vie, voilà tout ce que réclame leur grossier matérialisme. — La seconde idole est la liberté politique. C’est le millénium du présent siècle. Elle achève de faire oublier aux hommes la seule chose nécessaire, en leur persuadant que le bonheur de l’humanité est attaché à des transformations politiques que l’expérience de l’histoire a dès longtemps stigmatisées comme des puits sans eau et des citernes crevassées. — Enfin la troisième idole, c’est le génie, ce sont les facultés brillantes, mais non sanctifiées, de l’esprit humain. C’est la puissance créatrice de la pensée, lors même qu’elle n’est que l’instrument aveugle des puissances infernales. Panthéiste sans le savoir, ou même panthéiste avoué, on adore l’esprit de l’homme, la seule manifestation de la Divinité. Encore un peu de temps, et les abominations de cette période anti-chrétienne seront arrivées à leur comble. Puisse le Seigneur avoir compassion de nous, et dissiper le charme partout où il se fait sentir ; peut-être, hélas ! même au milieu de nous ! — Qu’Il préserve nos pas des pièges de Satan ! Que les paroles de Naaman soient notre devise préservatrice ! Oui, répétons avec lui : Je ne veux point sacrifier à d’autres dieux mais seulement à l’Eternel.

III

A sa joyeuse confession, Naaman ajoute une requête particulière. Après qu’Élisée a refusé son offrande, c’est lui qui sollicite un présent : Ne pourrait-on donner de cette terre à ton serviteur, la charge de deux mulets ? car ton serviteur ne fera plus d’holocaustes ni de sacrifices à d’autres dieux, mais seulement à l’Eternel. Cette demande du Syrien nous étonne, et nous porte peut-être à douter que ses sentiments soient ceux d’un fidèle vraiment éclairé. — Mais ne péchons pas nous-mêmes, par un jugement trop peu charitable, et ne concluons pas superficiellement d’après l’apparence. Naaman demande quelques sacs de la terre d’Israël, pour les emporter à Damas. Lui-même explique son but : aussitôt qu’il sera retourné dans sa patrie, tout signe de son ancien aveuglement doit être anéanti. Sous son toit, plus d’idoles, plus de symboles de ce paganisme qu’il rejette ; il faut au contraire qu’un autel y soit élevé au Dieu vivant. Il ne veut point tenir secret son changement spirituel ; chacun doit connaître le drapeau auquel il a juré de demeurer fidèle. Cet autel doit rappeler aux arrière-neveux de Naaman qu’il devint le serviteur du Dieu d’Israël, et que Jéhovah fut sa forteresse, son libérateur et sa sûre défense. Mais l’autel ne sera pas seulement un mémorial, il veut y sacrifier ouvertement au Seigneur, renouveler ainsi chaque jour la confession de son péché et l’expression de son ardente espérance. Élisée ne s’oppose pas à ce qu’il remplisse ainsi lui-même les fonctions de sacrificateur. Naaman, seul au milieu des païens, ne pouvait être assujetti aux lois du Lévitique. Ne nous étonnons point qu’il lui faille de la terre d’Israël pour son nouveau culte, ce n’est point un sentiment superstitieux qui le pousse. Qui ne reconnaîtrait là plutôt une manifestation des sentiments les plus délicats et les plus saints ? Qu’est-ce qu’une feuille d’un arbre de la montagne des Oliviers ? Il y a peu de temps qu’on nous en montra une et nous en fûmes émus ! Naaman savait bien que la terre des bords du Jourdain n’était point en elle-même supérieure à celle des environs de Damas ; mais c’était de la terre du pays que le Seigneur s’était choisi entre tous les autres, où ses pas s’étaient fait entendre, où la majesté divine avait resplendi plus souvent que nulle part ailleurs, — du pays surtout où l’heureux étranger avait trouvé la guérison et l’éternel salut. S’il lui paraissait doux de posséder un peu de cette terre au sein de sa patrie païenne, et de fouler la même terre que les serviteurs de Jéhovah, en sacrifiant et en priant avec eux, oserons-nous bien hausser les épaules avec une orgueilleuse compassion ? Laissons à l’âme humaine ses droits ! Nous portons notre trésor dans des vases d’argile et nous ne pouvons nous emparer en un instant de la spiritualité des anges. Elle ne nous est d’ailleurs point nécessaire. Nous sommes hommes, nous avons le droit de sentir comme des hommes.

Je vois en esprit cet heureux Syrien s’en aller avec sa charge, et je ne puis m’empêcher de voir dans ce spectacle le type le plus expressif et le plus réjouissant. Naaman veut prier sur la terre israélite ! Nous aussi nous devons bâtir nos autels sur cette même terre, nos autels spirituels sur cette terre spirituelle ! C’est sur la terre païenne qu’il va porter des prémices de salut et de renouvellement. Son autel va s’élever dans une maison où l’on ne voyait naguère que les abominations des idoles : Cet autel sera bien isolé à Damas, au milieu des temples païens. — C’est ainsi que l’autel du chrétien est souvent solitaire au milieu des abominations du monde. Mais n’importe, c’est une immense bénédiction ! L’encens des prières secrètes et des soupirs efficaces ne montera point vainement devant Dieu. Plût à Dieu qu’il y eût dans chacune de nos maisons un pareil autel, remarquable, comme celui de Naaman, par cette inscription : Ici est entré le salut ; un autel où ne cesserait de brûler un parfum de vie, et sur lequel on offrirait aussi résolument que Naaman tous les sacrifices que le Seigneur demande ! Que le Seigneur amène ainsi l’heureux moment où des milliers de voix répéteront parmi nous, cette belle déclaration du Syrien : Ton serviteur ne fera plus de sacrifices ni d’holocaustes à d’autres dieux, mais seulement à l’Eternel !

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