Où irai-je loin de ton esprit, et où fuirai-je loin de ta face ? Si je monte aux cieux, tu y es ; si je me couche dans le sépulcre, t’y voilà ; si je prends les ailes de l’aube du jour, et que j’aille demeurer à l’extrémité de la mer, là même ta main me conduira et ta droite me saisira ; si je dis : Au moins les ténèbres me couvriront, la nuit même sera une lumière autour de moi. Même les ténèbres ne me cacheront point à toi, la nuit resplendira comme le jour, et les ténèbres comme la lumière.
Si j’avais un choix à faire dans le but que je me propose aujourd’hui, chrétiens, de prêcher avec efficace, ce serait de vous montrer la Divinité dans cette assemblée. Moïse eut un pareil avantage, aussi jamais homme ne parla avec un plus grand succès ; il ne donnait la loi au peuple qu’en la présence du législateur. Il pouvait dire : Cette loi que je vous donne est émanée de Dieu ; voilà son trône, voilà son éclair, voilà son tonnerre, aussi jamais peuple ne fut plus frappé de la voix d’un législateur. A peine Moïse eut-il ouvert la bouche, que, du moins pour ce moment, tous les cœurs se réunirent, et on n’entendit qu’une voix qui fit retentir tout Sinaï ; « Nous ferons tout ce que tu as dit Exode 19.8. »
Mais c’est en vain que nos discours sont puisés dans des sources sacrées, c’est en vain que nous vous disons : « Le Seigneur a parlé. » Vous ne voyez qu’un homme, vous n’entendez qu’une voix mortelle dans cette chaire, Dieu « a mis ses trésors dans des vases de terre 2 Corinthiens 4.7, et jugeant du prix du trésor par la faiblesse du vase, au lieu de supporter la faiblesse du vase à cause du prix du trésor, vous nous écoutez sans respect, et vous ne tirez ordinairement aucun fruit de ce ministère.
Mais si Dieu assistait dans cette assemblée, si nous vous le montrions au milieu de vous autorisant notre voix par son approbation et par sa présence ; et examinant les dispositions que vous allez apporter à l’ouïe de sa parole ; qui de vous, qui de vous résisterait à un motif si noble et si éminent ?
Chrétiens, cette idée n’est pas destituée de réalité. Dieu est partout, il est dans ce temple. Des voiles de chair et de sang vous empêchent de le voir, il faut les faire tomber ; il faut que vous ouvriez les yeux de l’esprit pour voir un « Dieu » qui « est Esprit. » Écoutez notre prophète, écoutez la magnifique description qu’il nous fait de l’immensité de Dieu et de sa toute-puissance : « Où irai-je loin de ton Esprit, et où fuirai-je loin de ta face ? Si je monte aux cieux, tu y es ; si je me couche dans le sépulcre, t’y voilà ; si je prends les ailes de l’aube du jour, et que j’aille demeurer à l’extrémité de la mer, là même ta main me conduira et ta droite me saisira ; si je dis : Au moins les ténèbres me couvriront, la nuit même sera une lumière tout autour de moi. Même les ténèbres ne me cacheront point à toi, la nuit resplendira comme le jour, et les ténèbres comme la lumière. »
Dans un texte moins riche et moins abondant, on pourrait faire quelques remarques sur ces termes « d’Esprit » et de « face. » Nous nous contentons d’indiquer l’idée que nous y attachons, et d’avertir que par « l’Esprit » et par la « face de Dieu » ; nous entendons Dieu lui-même. Je sais que quelques théologiens y trouvent de plus grands mystères, et qu’il y a des passages dans l’Écriture où ce mot de « face » pourrait s’entendre de la seconde personne de la très sainte Trinité, et où certainement par « l’Esprit » il faut entendre la troisième. Mais comme il y a des passages où ces termes ne sont point susceptibles de cette signification, il est indubitable que celui que nous expliquons est précisément de ce genre. En tout cas, si quelqu’un nous conteste notre commentaire, il faudra le laisser contester ; il n’est pas juste que la réfutation de quelque pensée particulière consume le temps destiné à l’édification de tout un peuple. Les autres expressions de notre texte : les « cieux, » le « sépulcre, » les « ailes de l’aube du jour, » façon de parler figurée, qui marque la rapidité avec laquelle la lumière se communique d’un bout du monde jusqu’à l’autre ; ces autres expressions, dis-je, n’ont pas besoin de commentaire. La « face » de Dieu, « l’Esprit » de Dieu, signifient donc ici l’essence divine, et cette accumulation d’idées : « Où irai-je loin de ta face ? Où fuirai-je loin de ton Esprit ? » signifie que Dieu est immense et qu’il est présent en tout lieu.
Mais en quoi consistent cette immensité et cette toute présence ? Si jamais question eut besoin qu’on la développe, c’est sans doute celle-ci ; non seulement parce qu’elle présente à l’esprit un sujet abstrait et qui ne tombe point sous les sens, mais aussi parce que plusieurs de ceux qui ont traité cette matière (pardonnez-nous un aveu qui ne vient point du désir d’attaquer qui que ce puisse être, mais uniquement de proposer la vérité), ont plus contribué à la confondre qu’à l’éclaircir. En général, on ne peut, sans être fort étranger à l’histoire des sciences, ne pas reconnaître que toutes les questions touchant la nature des esprits, comme toutes celles qui ont quelque rapport à la métaphysique, étaient peu entendues avant ce philosophe célèbrea, que Dieu semble avoir donné à la terre pour épurer la raison, comme il avait suscité quelque temps auparavant d’autres hommes pour épurer la religion.
a – Il s’agit de Descartes, que Saurin admirait. (ThéoTEX)
Quel amas d’idées confuses et mal digérées ne trouve-t-on pas chez les scolastiques sur l’immensité de Dieu ? L’un disait que Dieu est un point indivisible véritablement, mais un point qui a cette propriété particulière d’occuper tous les lieux de l’univers ; l’autre, que Dieu est le lieu de tous les êtres, et cette étendue immense où sa puissance les a placés ; l’un, que son essence est bien renfermée dans le ciel, mais que cependant elle est « réplétivement, » comme ils parlent, parmi tout ce qui existe : que sais-je ? les ténèbres les plus épaisses ont été employées pour faire voir cette lumière. Quelque éloignement que nous ayons pour le ton décisif, nous osons bien soutenir que ceux qui parlent ainsi de Dieu n’ont pas même d’idée de ce qu’ils avancent. Ne craignez pas que nous vous conduisions dans ces routes égarées, et que nous nous employions à exposer toutes ces pensées, pour travailler ensuite à les réfuter.
Nous nous contenterons pour vous donner quelque lumière sur l’immensité de Dieu, 1° d’éloigner les fausses idées qui semblent se présenter d’elles-mêmes à l’imagination ; et 2° d’assigner la véritable.
I. Écartez les fausses idées qui se présentent d’abord à l’imagination : comme si, quand il est dit que Dieu est dans un lieu, on voulait établir qu’il y est renfermé véritablement : comme si, lorsqu’il est dit que Dieu est dans tous les lieux, on voulait lui assigner une étendue réelle et proprement dite ; non, mes frères, et pour éloigner cette idée, deux réflexions suffisent.
1. Dieu est un esprit. 2. Un esprit ne saurait être dans un lieu, du moins selon la manière dont notre imagination se le présente.
1. Dieu est un esprit. Quel rapport trouveriez-vous entre la sagesse, la puissance, la miséricorde, et tous les autres attributs qui entrent dans la notion de la Divinité, et la nature du corps ? Subtilisez la matière, revêtez-la de toutes les formes différentes dont elle est susceptible ; élevez-la au plus haut degré où elle soit capable d’atteindre, faites-la vaste, immense, restreinte, bornée, rayonnante, obscure, opaque, transparente, il n’en résultera jamais que des figures et des mouvements, et jamais par toutes ces combinaisons, vous ne produirez un seul sentiment, ni une seule pensée semblable à celle du plus vil et du plus borné de tous les hommes. Que si la matière ne peut pas être le sujet d’une seule opération de l’âme d’un artisan, comment le serait-elle de ces attributs qui font l’essence de Dieu même ?
Mais peut-être que Dieu, étant spirituel dans une des parties de son être, est corporel dans quelque autre ; comme l’homme qui, ayant une âme spirituelle, est uni pourtant à une portion de matière ? Non. Car quelque admirables que soient dans l’homme cet assemblage du spirituel et du sensible, et ces lois qui unissent son âme avec son corps, rien ne marque mieux sa faiblesse et sa dépendance, et par conséquent rien ne peut moins convenir à l’essence divine. N’est-ce pas une marque de dépendance à une âme immortelle et intelligente d’être enveloppée dans un peu de chair et de boue, qui, selon ses différents, mouvements, décide de sa joie ou de sa douleur, de son bonheur ou de sa misère ? N’est-ce pas une marque de faiblesse à notre esprit de ne pouvoir agir que sur ce peu de matière à laquelle nous sommes unis, et de n’avoir aucune puissance sur les autres ? Qui croira que Dieu a de pareilles bornes ? Il n’a point de corps, il n’est uni à aucun : cependant il l’est à tous. Ce célèbre philosophe, dirai-je, ou athée, qui a dit que l’assemblage de tout ce qui existe constitue l’essence divine, et qui nous fait envisager les êtres corporels comme le corps de la Divinité, a débité une grande extravagance, s’il a voulu dire que l’essence divine consistait dans cet assemblage. Mais il y a un sens très juste, selon lequel on peut dire que l’univers entier est le corps de la Divinité. En effet, comme j’appelle mon corps cette portion de matière que je porte, que je remue, que je promène comme bon me semble ; aussi Dieu agit par sa volonté sur toutes les parties de l’univers : il obscurcit le soleil, il calme les vents, il commande à la mer. Mais, cette notion même exclut de Dieu toute corporalité et prouve que Dieu est un esprit. Que si Dieu semble quelquefois se représenter avec des pieds, avec des mains, avec des yeux ; dans ces portraits il a prétendu plutôt nous donner des emblèmes de ses attributs que des images proprement dites de quelques parties qu’il possède. Aussi, quand il se les attribue, il leur donne une si vaste étendue qu’on aperçoit facilement que ce n’est pas dans un sens grossier qu’il les faut entendre. S’il a des mains, ce sont des mains qui « pèsent au crochet les montagnes, et les coteaux à la balance Ésaïe 40.12, » et qui « mesurent dans leur creux les eaux profondes de la mer ; » s’il a des yeux, ce sont des yeux qui percent dans les lieux les plus reculés ; s’il a des pieds, ce sont des pieds qui s’appuient du ciel sur la terre, « car le ciel est son trône et la terre est le marchepied de ses pieds Ésaïe 66.1 ; » s’il a une voix, elle est « comme le bruit des grandes eaux, elle brise les cèdres du Liban et fait sauter le mont Scirjon comme un faon de licorne. »
Et cela me fait souvenir d’un beau passage de Platon ; il disait que les dieux, surtout celui qu’il appelait le premier bon et la beauté ineffable, ne pouvaient se comprendre que par le seul entendement et par la distraction des choses sensibles ; que pour contempler la Divinité, il faut s’élever au-dessus des idées terrestres ; que les yeux ne sauraient la voir, que les oreilles ne peuvent l’ouïr ; pensée que Julien l’Apostat, grand partisan de ce philosophe, exprime si noblement dans la satire contre les Césars. Ainsi tout concourt à l’établissement de notre premier principe, que Dieu est un esprit. Mais prouver que Dieu est un esprit, et prouver qu’il n’occupe point de lieu, du moins selon la manière dont notre imagination se le représente, selon nous c’est établir la même thèse.
Je sais combien il est malaisé de faire sentir cette conséquence, non seulement à ceux du peuple, qui n’ayant pas accoutumé de méditer sont plus excusables d’avoir des idées confuses, mais à ceux même qui, ayant cultivé les sciences, sont plus engagés à épurer leurs pensées. J’avoue même que quelque effort qu’on fasse pour s’élever au-dessus des sens et de la matière, on a de la peine à concevoir l’existence d’un esprit sans le placer par cela même dans un certain lieu. Cependant il me semble que quelque difficulté qu’il y ait dans le système de ceux qui soutiennent qu’un être immatériel ne peut pas être placé dans un lieu proprement ainsi nommé, il y a des difficultés plus grandes encore dans l’opinion opposée ; car ce qui est immatériel n’a point de parties ; ce qui n’a point de parties, n’a point de figure ; ce qui n’a point de figure, n’a point d’étendue ; ce qui n’a point d’étendue, ne peut avoir de situation dans un lieu proprement ainsi nommé. Car qu’est-ce qu’être dans un lieu, si ce n’est remplir un espace ? Qu’est-ce que remplir un espace, si ce n’est s’ajuster avec le corps dont on est environné ? Comment s’ajuster avec le corps dont on est environné, sans avoir des parties ? Et comment avoir des parties, sans être corporel ? Que si vous donnez à l’esprit une étendue proprement ainsi nommée, chaque pensée particulière de l’esprit sera une portion détachée de cette étendue, comme chaque partie du corps est une portion détachée du corps entier ; chaque opération de l’esprit sera une modification de cette étendue, comme chaque opération du corps est une modification du corps ; et en ce cas, il n’y aura pas d’absurdité à dire qu’une pensée est ronde, carrée, figurée, ce qui ne va à rien de moins qu’à confondre l’esprit avec la matière. Ainsi, l’idée de l’immensité de Dieu, telle que notre imagination se la forme, lorsqu’elle se représente l’essence de cet Être suprême comme remplissant des espaces infinis de la manière dont nous sommes logés dans nos maisons, est une idée fausse qui doit être soigneusement écartée.
Quelles notions devons-nous donc nous former de l’immensité de Dieu, et dans quel sens concevons-nous que l’Esprit infini est présent partout ? Mes frères, les bornes de nos connaissances sont si étroites, notre sphère est si resserrée, nous avons si peu d’idée des esprits, même de nos esprits propres, et à plus forte raison de celui qui donne l’être à tous les autres, qu’il n’y a aucun génie dans le monde, quelque relevé que vous le supposiez, qui après les plus grands efforts de méditation puisse vous dire : Voilà jusqu’où s’étendent les attributs de Dieu, voilà une idée complète de son immensité et de sa toute-présence. Cependant, à l’aide d’une saine raison, surtout avec le secours de la révélation, on peut vous donner, sinon des idées complètes, du moins des idées distinctes sur ce sujet. On peut, sinon vous indiquer tous les sens selon lesquels Dieu est immense, du moins vous en marquer quelques-uns. On peut, sinon vous montrer toute la vérité, du moins vous la découvrir en partie.
Concevons l’immensité de Dieu, non comme un attribut particulier, si j’ose ainsi dire, de la Divinité, comme la bonté, la sagesse, mais comme l’étendue ou l’infinité de plusieurs autres. L’immensité de Dieu est cette propriété universelle qui fait que Dieu se communique à tout, qu’il se répand sur tout, qu’il est le grand mobile de tout ; ou, pour nous borner à quelques idées plus distinctes encore, l’Esprit infini est présent en tout lieu, 1° par une science sans bornes, 2° par une influence générale, 3° par une direction universelle. Dieu est partout, parce qu’il voit tout, parce qu’il influe sur tout, parce qu’il dirige tout ; c’est ce que nous devons prouver et établir. Mais si vous voulez juger avec équité, et de ce que vous avez entendu, et de ce que vous allez entendre, vous devez penser que ce sujet n’a aucun rapport ni avec vos plaisirs, ni avec votre politique, ni avec aucun de ces objets qui vous occupent, et qui remplissent votre âme tout entière ; si vous voulez nous suivre, il faut tendre votre méditation et comme sortir hors de vous-mêmes.
Première idée de l’immensité de Dieu, sa toute-science. Dieu est présent partout, parce qu’il voit tout : c’est la principale pensée du prophète. « Éternel, tu m’as sondé, tu m’as connu, tu sais quand je m’assieds et quand je me lève, tu découvres de loin ma pensée, tu m’environnes, soit que je marche soit que je m’arrête, et tu as une parfaite connaissance de toutes mes voies. Même avant que la parole soit sur ma langue, voici, ô Éternel, tu connais déjà tout ; tu me tiens serré par derrière et par devant ; ta science est trop merveilleuse pour moi, et si élevée que je n’y saurais atteindre Psaumes 139.1-6. » Après cela viennent les paroles de notre texte. « Où irai-je loin de ta face, etc. »
N’envisageons donc pas la Divinité, à l’exemple des scolastiques, comme un point fixe sur l’universalité des êtres : envisageons l’universalité des êtres comme un point, et la Divinité comme un œil immense qui voit tout ce qui se passe sur ce point et tout ce qui peut s’y passer, et qui, par l’intelligence qui l’anime, fait une combinaison exacte de tous les effets de la matière et de toutes les dispositions des esprits.
Dieu connaît tous les effets de la matière. Un ouvrier expert prend une portion de la matière conforme à l’ouvrage qu’il médite, en fait diverses roues, les agence les unes avec les autres, et voit par les règles de son art ce qui doit résulter de leur assemblage. Supposez un génie vaste, exact, qui sache aller de principe en principe et de conséquence en conséquence ; après avoir prévu ce qui doit résulter de deux roues qu’il aura jointes ensemble, il en ajoutera une troisième par son imagination, et il aura des vues aussi certaines sur cette troisième que sur la première et sur l’autre ; après en avoir imaginé une troisième, il en imagine une quatrième qu’il agencera avec les autres par son imagination ; après la quatrième, une cinquième ; et ainsi à l’infini. Un tel homme pourra démontrer mathématiquement, et d’une manière exacte et infaillible, ce qui devait résulter d’un ouvrage composé de toutes ces roues diverses. Supposez ensuite que cet ouvrier, ayant observé exactement l’effet que peut produire sur ces roues cette matière subtile, dans les tourbillons de laquelle nous sommes enveloppés, et qui, par son action et son mouvement continuel, use, frotte, consume tous les corps : cet ouvrier vous dira encore avec la même justesse quel temps chacune de ces roues doit durer, et dans quel temps tout l’ouvrage sera détruit. Donnez ensuite à cet ouvrier une vie et une industrie proportionnées à son imagination, donnez-lui les matériaux et les instruments qui se rapportent à ses idées, il fera un ouvrage vaste, immense, dont il pourra combiner avec exactitude tous les différents mouvements et prévoir tous les différents effets avec évidence. Il verra dans quel temps le mouvement sera communiqué de la première de ces roues à la seconde, dans quel temps de la seconde à la troisième, et ainsi du reste ; il prédira tous les mouvements différents et tous les effets qui doivent résulter de leurs combinaisons diverses.
Ce n’est là, mes frères, qu’une supposition, mais c’est une supposition qui nous conduit à ce qu’il y eut jamais de plus réel. Dieu est cet ouvrier, Dieu est ce génie vaste, exact, infini. Il tire du sein du néant une matière sans mouvement et sans forme, il donne à cette matière la forme et le mouvement, il fait un certain nombre de roues ou plutôt il en fait sans nombre, il les agence comme bon lui semble, il y répand ensuite un certain degré d’agitation dirigée par les lois de la sagesse : de là naît ce monde qui frappe nos yeux. Je conçois, par l’exemple que nous avons rapporté, que Dieu a vu par son intelligence ce qui doit résulter de l’arrangement de toutes ces roues qui entrent dans la composition de ce monde, et qu’il en a su faire des combinaisons exactes. Il a vu qu’une certaine quantité de mouvement, imprimée à une certaine portion de matière, devait produire de l’eau ; qu’une autre quantité de mouvement imprimée à une autre portion de matière devait produire du feu ; qu’une autre devait produire la terre, et ainsi du reste. Il a prévu avec la dernière précision ce qui devait résulter de cette eau, de ce feu, de cette terre, joints ensemble et agités par cette quantité de mouvement qu’il a imprimée. Par l’inspection des seules lois du mouvement, il a prévu les incendies, il a prévu les naufrages, il a prévu les tremblements de terre, il a prévu les vicissitudes du temps, il a prévu celles qui doivent mettre des bornes au temps lorsque « les cieux passeront avec le bruit d’une effroyable tempête, que les éléments embrasés seront dissous et que la terre sera entièrement brûlée avec tout ce qu’elle contient 2 Pierre 3.10. »
Mais si Dieu a pu combiner tout ce qui devait résulter des lois du mouvement imprimé à la matière, il a pu combiner ce qui devait résulter de ces matières, de cette liberté, de toutes ces facultés qui font l’essence des esprits ; et lorsqu’il a formé tous ces êtres spirituels, qui composent le monde intelligible, il a connu quelles seraient à jamais toutes leurs idées, tous leurs projets, toutes leurs délibérations.
Je sais bien qu’une conséquence particulière qui suit de cette doctrine a fait récrier quelques théologiens sur la thèse générale, et que sous le prétexte spécial de disculper la Divinité au sujet de l’entrée du péché dans le monde, ils ont soutenu que Dieu ne pouvait connaître à quoi se déterminerait un agent libre ; car s’il avait prévu l’abus que l’homme devait faire de sa liberté en se déterminant au crime, son amour pour la justice l’aurait engagé à le prévenir. Mais raisonner de cette manière, c’est, en voulant résoudre une difficulté, laisser la difficulté dans toute sa force.
On se fonde sur ce principe, qu’un Dieu qui est infiniment juste et infiniment puissant doit déployer, s’il est permis d’ainsi dire, toute l’infinité de ces attributs pour empêcher l’injustice. Mais ce principe est d’une fausseté palpable : témoin cette même permission du péché que l’on nous objecte. Vous ne voulez pas reconnaître que Dieu a prévu que l’homme tomberait dans le péché, reconnaissez du moins qu’il a prévu que l’homme y pourrait tomber, et qu’en formant une créature libre il a connu que cette créature pouvait se tourner ou du côté de la vertu, ou du coté du vice ; reconnaissez du moins que Dieu pouvait créer l’homme avec tant de lumières et tant de secours, lui présenter sans cesse les motifs de la sainteté avec tant de force, et lui faire voir si vivement quelles seraient les suites funestes de sa rébellion, accompagner de tant d’attraits son obéissance et de tant de dégoûts la seule pensée de la soustraction à ses ordres, tellement éloigner de lui toutes les tentations du crime, que jamais il ne serait devenu criminel. Cependant il l’a créé d’une autre manière ; par conséquent il est faux, même dans votre système, que Dieu ait fait tout ce qu’il pouvait pour empêcher l’entrée du péché dans le monde, par conséquent il est faux qu’un être qui aime parfaitement la justice doive déployer toute l’étendue de ses attributs pour prévenir le péché et pour établir la vertu ; par conséquent le principe sur lequel vous vous fondez, en niant cette combinaison que Dieu peut faire des disposition des esprits, est un principe insoutenable ; et résoudre la difficulté de cette manière, c’est la laisser dans toute sa force.
Que si vous consultez la révélation, vous verrez que Dieu s’y attribue une connaissance universelle des esprits. Il dit « qu’il les connaît, qu’il les sonde, qu’il les pèseb ; » il prévoit, il prédit les afflictions qu’endurera la postérité d’Abraham en Canaan, l’endurcissement de Pharaon, l’incrédulité des Juifs, la foi des Gentils, le retranchement du « Christ, » la venue du « conducteur, » c’est-à-dire de Vespasien et de Tite, qui détruiraient la ville et la sainte cité ; et par conséquent nous sommes fondés à soutenir que Dieu connaît toutes les pensées des esprits et tous les sentiments du cœur, comme nous l’étions à avancer qu’il voit tous les mouvements de la matière.
b – Jérémie 17.10 ; Apocalypse 2.23 ; Genèse 15.13 ; Exode 3.17 ; Daniel 9.25-26.
Peut-être voudriez-vous, mes frères, qu’on portât plus loin la spéculation ; peut-être voudriez-vous qu’on vous débrouillât les difficultés immenses dont ce sujet est susceptible ; peut-être souhaiteriez-vous qu’on vous fit comprendre, d’une manière plus claire et plus distincte, comment il est possible que des objets immenses soient toujours présents à cette intelligence suprême : mais quelle bouche mortelle pourrait exprimer des vérités si sublimes, et quel génie pourrait les concevoir ! C’est sur cela précisément que nous devons nous récrier avec le prophète : « Ta science est trop merveilleuse pour moi, elle est si élevée que je n’y saurais atteindre. » En général, nous concevons que la sphère des connaissances divines n’est arrêtée par aucun de ces obstacles qui bornent l’esprit de l’homme.
L’esprit de l’homme est uni à une portion de matière, il ne peut faire aucune opération sans que le cerveau s’agite, sans que les esprits s’échauffent, sans que les sens prêtent leur concours. Mais le cerveau se lasse, mais les esprits se dissipent, mais les sens s’épuisent, et la moindre altération dans le corps arrête le génie le plus pénétrant et le plus actif. Mais Dieu, comme nous l’avons représenté, pense, réfléchit, médite sans cerveau, sans esprits, sans secours des sens ; ne participant point à leur nature, il ne participe point à leur altération, et puise ainsi l’intelligence immédiatement du trésor même de l’intelligence.
L’esprit de l’homme doit son existence à un être supérieur, à une cause étrangère qui ne lui donne que les idées que bon lui semble, et à qui il a plu de lui cacher des mystères sans nombre. Mais Dieu, Dieu non seulement ne doit pas son existence à une cause étrangère, mais tout ce qui existe lui doit son être. Ses idées ont été les modèles de tout ce qui est, et il n’a qu’à se contempler lui-même pour tout connaître parfaitement.
L’esprit de l’homme est naturellement un être fini, il ne peut envisager qu’un cercle d’objets dans un instant ; le grand nombre d’idées le confond, pour vouloir trop voir il ne voit rien ; il faut qu’il contemple successivement ce qu’il ne peut contempler dans un moment unique. Mais Dieu a un esprit infini, il peut d’un seul regard voir l’univers entier : c’est la première idée de l’immensité de Dieu. Comme je suis censé être dans cet auditoire, parce que je vois les objets qui y sont, parce que je suis témoin de ce qui s’y passe : Dieu est partout, parce qu’il voit tout, parce que les voiles les plus impénétrables, parce que les ténèbres les plus épaisses, parce que les distances immenses ne sauraient rien soustraire à sa connaissance. Volez dans le plus haut des airs, fuyez dans les campagnes les plus reculées, enveloppez-vous dans l’obscurité la plus noire : partout, partout, vous serez sous ses regards. « Où irai-je loin de ton Esprit ? Où fuirai-je loin de ta face ? etc. »
Mais la science de Dieu n’est pas une science nue, mais sa présence n’est pas une présence oisive ; c’est une science efficace, c’est une présence accompagnée d’action et de mouvement. Nous avons dit, en second lieu, que Dieu est partout, parce qu’il influe surtout, autant que cela s’accorde avec ses perfections ; remarquez cette restriction, car comme nous traitons le sujet le plus fertile en controverses, et que dans un discours d’une heure, il n’est pas possible de répondre à toutes les objections, nous mettrons ainsi une barrière universelle à toutes vos difficultés. Nous entendons une influence qui s’accorde avec les perfections divines, et si de nos propositions générales vous tiriez quelque conséquence qui choquât ses perfections, concluez de cela même que vous les avez étendues au delà de leurs justes bornes. Nous disons donc que Dieu concourt à toutes choses, autant que cela s’accorde avec ses perfections.
Quand des êtres nouveaux paraissent, il y est ; il influe sur leur production, il donne à « tous la vie, le mouvement et l’être Actes 17.28. Toi seul, ô Éternel, tu as fait les cieux des cieux, et toute leur armée et tout ce qui y est, les mers et toutes les choses qui y sont ; tu vivifies toutes choses, et l’armée des cieux se prosterne devant toi Néhémie 9.6. Éternel, je te célébrerai de ce que j’ai été fait d’une étrange et admirable manière ; tes œuvres sont merveilleuses, et mon âme le connaît bien. L’agencement de mes os ne t’a point été caché, lorsque j’ai été formé dans un lieu secret et tissu dans les lieux bas de la terre. Tes yeux m’ont vu lorsque j’étais comme un peloton, et toutes ces choses s’écrivaient dans ton livre lorsqu’elles se formaient, même lorsqu’il n’y en avait encore aucune Psaumes 139.14. Tes mains ont pris la peine de me façonner, elles ont arrangé toutes les parties de mon corps ; tu m’as revêtu de peau et de chair, tu m’as composé d’os et de nerfs Psaumes 36.6. »
Quand les êtres se conservent, il y est ; il influe sur leur conservation. « Éternel, ta gratuité atteint jusques aux cieux, et ta fidélité jusques aux nues Psaumes 36.6 ; tu conserves les hommes et les bêtes ; quand tu ouvres ta main, elles sont rassasiées de biens ; caches-tu ta face, elles sont troublées ; retires-tu leur souffle, elles défaillent et retournent en leur poudre : mais si tu renvoies ton esprit, elles sont créées de nouveau Psaumes 104.28. »
Quand le monde est bouleversé, il y est. Il influe sur les guerres, sur les pestes, sur la famine, sur toutes ces vicissitudes qui bouleversent le monde. Si nous ne recueillons pas les productions de la nature, c’est lui qui « a rendu la terre une terre d’airain, et les cieux des cieux de fer Lévitique 26.19. » Si la paix succède à la guerre, ou si la guerre succède à la paix, c’est lui qui fait l’une et l’autre ; quand « des lions cruels ravagent les colonies de Cutha 2 Rois 17.25, » c’est lui qui les a envoyés. Quand les vents déchaînés renversent ces digues immenses que votre industrie leur oppose, et quand un feu dévorant réduit vos maisons en cendre, c’est lui qui « fait des vents ses anges, et des flammes de feu ses ministres Hébreux 1.7. »
Quand tout succède selon nos vœux, il y est ; il influe sur la prospérité. « Si l’Éternel ne bâtit la maison, ceux qui bâtissent travaillent en vain ; si l’Éternel ne garde la ville, celui qui la garde veille en vain. C’est en vain que vous vous levez de grand matin, que vous vous couchez tard, et que vous mangez le pain de douleur : certainement c’est Dieu qui donne le repos à celui qu’il aime Psaumes 127.1. »
Quand notre esprit est éclairé, il y est ; il influe sur nos lumières, car c’est « par sa lumière que nous sommes éclairés ; c’est lui qui est la lumière du monde Psaumes 36.10 ; Jean 9.15. »
Quand notre cœur se range à ses devoirs, il y est ; il influe sur nos vertus, c’est lui « qui produit en nous et la volonté et l’exécution selon son bon plaisir Philippiens 2.3 ; » c’est lui qui nous « fait la grâce non seulement de croire, mais encore de souffrir Philippiens 1.29 ; » c’est lui qui « donne la sagesse à tous libéralement, et qui ne la refuse à aucun de ceux qui la lui demandent Jacques 1.5. »
Quand d’épaisses ténèbres nous couvrent, il y est ; il influe sur les ténèbres, « il donne efficace à l’erreur, en sorte que nous croyons au mensonge. Va, engraisse le cœur de ce peuple, et rends ses oreilles pesantes, bouche ses yeux, en sorte qu’il ne voie pas de ses yeux, et qu’il n’entende pas de ses oreilles 2 Thessaloniciens 2.11 ; Ésaïe 6.11. »
Quand nous violons la justice, il y est ; il influe sur les péchés, même sur les plus grands des péchés. Témoin Pharaon, de qui il « endurcit le cœur ; » témoin Scimhi à qui Dieu avait dit : « Maudis David Exode 4.21 ; 2 Samuel 16.10 ; » témoin ce que dit Esaïe : « Que l’Éternel a versé un esprit d’étourdissement au milieu de toute l’Egypte Ésaïe 19.14. »
Quand ces hommes qui sont des dieux sur la terre projettent et délibèrent, il y est ; il influe sur la politique. C’est lui qui « tient le cœur des rois en sa main, et le fléchit comme le cours des eaux Proverbes 21.1 ; » c’est lui qui « donne les rois dans son indignation, et qui les ôte dans sa colère Osée 13.11 ; » c’est lui qui « fait d’Assur la verge de sa colère. Hérode et Pilate ne font rien que ce qu’il a lui-même auparavant résolu dans ses conseils Ésaïe 10.5. »
Quand nous vivons, quand nous mourons, il y est ; il influe sur la vie et sur la mort. « Les jours de l’homme sont déterminés, le nombre de ses mois est entre tes mains, tu lui as prescrit ses limites, il ne les passera point Job 14.5. La délivrance de la mort vient de l’Éternel Psaumes 68.20 ; il fait descendre au sépulcre, il en fait remonter 1 Samuel 2.6. »
Il influe sur les plus petits événements comme sur les plus considérables. Son action n’étant pas lassée par le soin des grandes choses, il peut s’occuper des plus petites sans préjudicier aux autres, « compter les cheveux de notre tête, » ne pas même laisser « tomber en terre un passereau sans sa volonté Matthieu 10.30. »
Mais quand il se communique à tout, quand il agit ainsi sur tout, quand il se répand ainsi en tout, il a des vues, il rapporte tout à ses vues, il fait tout servir à ses conseils, et c’est la troisième idée que nous attachons à son immensité et à sa toute-présence. Dieu est présent partout, parce qu’il dirige tout.
Tire-t-il des êtres du sein du néant ; c’est pour manifester ses attributs, c’est pour avoir des sujets sur lesquels il répande ses grâces, c’est pour sortir hors de lui-même, et pour faire entonner à l’univers un concert qui publie la gloire et l’existence du Créateur. « Car les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil, quand on considère ses ouvrages Romains 1.20. Les cieux racontent la gloire du Dieu fort, et l’étendue donne à connaître l’ouvrage de ses mains : un jour parle à un autre jour, et une nuit enseigne une autre nuit ; il n’y a point en eux de langage, toutefois leur voix est entendue Psaumes 19.1-2. »
Conserve-t-il les créatures ; c’est pour les ramener à ses desseins ; desseins dont aucun homme mortel ne peut comprendre la profondeur, mais desseins que nous connaîtrons un jour, et dont nous admirerons la sagesse en la connaissant, comme nous l’adorons aujourd’hui même que nous ne la connaissons pas.
Envoie-t-il les pestes, les guerres, les famines ; c’est pour faire sentir sa justice à ceux qui ont abusé de ses bontés, c’est pour venger ses lois violées, la religion méprisée, l’Église abandonnée dans l’oubli.
Nous accorde-t-il des prospérités ; c’est pour nous attirer par des « cordages d’amour Osée 11.4, » c’est pour se faire connaître à nous par cette charité qui fait son essence ; c’est pour nous rendre imitateurs de celui qui ne « se laisse jamais sans témoignage de ce qu’il est, en faisant du bien Actes 14.17. » Nous donne-t-il des lumières : c’est pour nous découvrir les pièges qui nous environnent, les misères qui nous menacent, le lieu d’où nous sommes venus, le genre de vie que nous devons suivre, le but où nous devons, tendre.
Nous communique-t-il des vertus ; c’est pour nous animer dans notre carrière ; c’est pour nous faire sentir qu’il y a un bras puissant qui nous tire de l’abîme où notre corruption naturelle nous avait mis ; c’est afin que nous travaillions nous-mêmes à notre salut « avec crainte et tremblement, car c’est lui qui produit en nous et la volonté et l’exécution selon son bon plaisir Philippiens 2.12, 15. »
Nous envoie-t-il des ténèbres ; c’est pour nous faire respecter cette vérité à laquelle nous avons résisté.
Nous abandonne-t-il à nos vices ; c’est pour nous punir de quelque autre vice que nous avons commis d’une manière libre, volontaire, en sorte que si nous le savons bien comprendre, jamais son amour pour la vertu ne paraît dans un plus grand jour, que lorsqu’il abandonne les hommes au vice de cette manière.
Suscite-t-il des rois ; c’est toujours pour leur imposer le devoir d’administrer la justice, de protéger la veuve et l’orphelin, de maintenir l’ordre et la religion ; mais souvent pour permettre qu’ils violent la justice, qu’ils foulent le peuple, qu’ils soient les fléaux de sa colère ; mais souvent pour nous enseigner le peu de cas qu’il fait des grandeurs humaines, puisqu’il les confie quelquefois à des hommes indignes, à des hommes que la volupté entraîne, que l’ambition domine, que leur propre éclat éblouit, à des hommes qui se jouent de l’ordre, qui vendent leur conscience, qui trafiquent de foi et de religion, qui sacrifient l’âme de leurs enfants aux passions infâmes dont ils sont dominés eux-mêmes.
Prolonge-t-il notre vie ; c’est parce qu’il « nous attend, » c’est parce qu’il ouvre en notre faveur des « trésors de patience » et de « long support par lesquels il nous convie à la repentance 2 Pierre 3.15 ; Romains 2.14. » Nous appelle-t-il à mourir ; c’est pour ouvrir ces livres éternels où nos actions sont enregistrées ; c’est pour recueillir nos âmes dans son sein, pour les lier « dans le faisceau de la vie 1 Samuel 25.29, » pour les mêler avec ces rachetés innombrables de « toute nation, de tout peuple, de toute langue Apocalypse 7.9. »
Telles sont les idées de l’immensité de Dieu : c’est ainsi que Dieu voit tout, qu’il anime tout, qu’il agit sur tout ; c’est dans ce sens qu’il fait entendre ces voix magnifiques de l’Écriture : « Serait-il vrai que Dieu habitât dans cette maison ? Voilà, même les cieux, les cieux des cieux ne sauraient le contenir 1 Rois 8.27. Ainsi a dit l’Éternel, quelle maison me bâtiriez-vous Ésaïe 66.1 ? Ne remplis-je pas moi le ciel et la terre ? Ne suis-je Dieu que de près ? Ne suis-je pas aussi Dieu de loin ? Quelqu’un se pourra t-il cacher dans quelque lieu obscur où je ne le voie point Jérémie 23.24 ? C’est ce qu’ont entrevu les païens, lorsqu’ils ont dit que la Divinité était un cercle dont le centre est partout, dont la circonférence n’est nulle part ; que toutes choses sont pleines de Jupiter ; qu’il remplit tous ses ouvrages ; que dans quelque lieu qu’on le fuie, on est toujours sous ses yeux : c’est ce qu’ont voulu dire les sectateurs de Mahomet, lorsqu’ils ont avancé que là où il y a deux personnes Dieu y fait la troisième ; que là où il y en a trois, il y fait le quatrième. C’est surtout la pensée de notre prophète dans tout ce cantique dont nous expliquons une partie. « Éternel, tu m’as sondé et tu m’as connu. Tu sais quand je m’assieds et quand je me lève, tu découvres de loin ma pensée, tu m’environnes, soit que je marche soit que je m’arrête, et tu as une parfaite connaissance de toutes mes voies ; même avant que la parole soit sur ma langue, voici, ô Éternel, tu sais déjà tout ; tu me tiens serré par derrière et par devant, tu as mis sur moi ta main. Ta science est trop merveilleuse pour moi, elle est si élevée que je n’y saurais atteindre. Où irai-je loin de ton esprit ? Où fuirai-je loin de ta face ? Si je monte aux cieux, tu y es ; si je me couche au sépulcre, t’y voilà. Si je prends les ailes de l’aube du jour et que j’aille demeurer à l’extrémité de la mer, là même ta main me conduira, et ta droite m’y saisira ; si je dis : au moins les ténèbres me couvriront, la nuit même sera une lumière tout autour de moi ; même les ténèbres ne me cacheront point à toi, et la nuit resplendira comme le jour, les ténèbres comme la lumière (Psaumes 139). »
Mais peut-être durant le cours de cette méditation avez-vous murmuré de ce que nous vous offrions un objet dont toutes les lumières de l’univers ne peuvent vous donner que des idées imparfaites. Suspendez votre jugement, vous allez voir à quoi ces lumières, tout incomplètes qu’elles sont, doivent nous conduire ; vous allez voir quelles salutaires conséquences suivent des efforts, même des impuissants efforts que nous faisons pour connaître ainsi la grandeur et la toute-présence de Dieu : nous entrons dans la conclusion, dans le grand but de ce discours.
Notre première réflexion roule sur les difficultés mêmes que nous trouvons à nous fixer sur des sujets tels que celui que vous venez d’entendre. Vous l’avez éprouvé sans doute, si vous avez fait quelque effort pour nous suivre ; on se lasse, on s’égare, quand on veut sortir, s’il faut ainsi dire, de la matière. Notre esprit ne trouve presque rien de réel, là où il ne trouve rien de sensible ; comme si toute l’essence des êtres était corporelle, il ne sait où se prendre lorsqu’il ne voit point de corps pour se soutenir, et il a besoin du secours de l’imagination pour se représenter même les choses qui ne sont point susceptibles d’images. Et cependant, ce qu’il y a de plus grand et de plus noble dans la nature des êtres, ce sont les esprits ; et cependant les plus sublimes créatures, ces anges qui sont « continuellement devant Dieu, » ces séraphins qui « couvrent leur face Ésaïe 6.2 » en sa présence, ces chérubins qui sont les ministres de ses volontés, ces « dix mille milliers qui le servent Daniel 7.10 ; et cependant, ce qu’il y a de plus glorieux dans l’homme, ce qui l’élève au-dessus des animaux, cette âme faite à l’image de Dieu même ; et cependant l’être des êtres, la beauté souveraine, tous ces êtres sont spirituels, abstraits, dégagés des sens et de la matière : il y a plus, ce qui nous plaît et nous enchante dans les corps, cela même vient d’un sujet abstrait, spirituel, dégagé du corps ; sans votre âme, les aliments n’ont plus de goût, les fleurs n’ont plus d’odeur, la terre n’a plus d’émail, le feu n’a plus de chaleur, les étoiles n’ont plus d’éclat, le soleil n’a plus de lumière ; la matière, par elle-même, est brute, grossière, destituée de toutes les qualités dont notre imagination la revêt, mais qui sont propres à notre âme. Que devons-nous conclure de cette réflexion ? Mes frères, avez-vous quelque idée de votre noblesse, de votre grandeur primitive ? Avez-vous encore quelque sentiment sortable à des êtres formés à l’image du Créateur ? Vous devez, faibles comme vous êtes, bornés en quelque façon à la matière, vous devez déplorer votre misère, vous devez gémir de cette nécessité qui confond en quelque sorte cette âme avec un peu de poussière ; vous devez soupirer après cet état bienheureux, où l’âme rapide, libre, dégagée, méditera sur des objets dignes d’elle. C’est là le premier devoir que nous voulions vous prescrire.
La seconde réflexion roule sur la majesté de notre religion. Sans doute celle-là doit être censée la plus véritable religion, qui nous donne de plus grandes idées de Dieu : qu’on juge de notre religion d’après cette règle. Où voyons-nous les attributs de l’Être suprême mis dans un plus grand jour ? Qu’y a-t-il de plus noble que cette idée de Dieu ? Que peut-on concevoir de plus sublime qu’un être à qui rien n’échappe, devant qui toutes choses « sont nues et découvertes Hébreux 4.13, » et qui, d’une seule vue, se forme l’idée de tous les êtres présents, passés, à venir, existants, possibles, qui applique dans un même temps sa pensée avec une égale facilité aux corps, aux esprits, aux dimensions du temps et de la matière ? Que peut-on concevoir de plus noble qu’un Être qui se prête à tout, qui se répand sur tout, qui influe sur tout, qui donne la vie et le mouvement à tout ? Que peut-on concevoir de plus noble qu’un Être qui dirige la conduite de tout l’univers, qui fait tout concourir à ses desseins, qui fait rapporter également à l’ordre les vertus des bons, les vices des méchants, les louanges des bienheureux, les blasphèmes des victimes que sa vengeance s’immole dans les enfers ? Quand nous trouvons dans quelque philosophe païen, à travers mille pensées fausses, à travers mille imaginations creuses, quelques-uns de ces traits dont nos livres sont parsemés, nous sommes près de crier au miracle ; nous transmettons ces lambeaux de divinité, si j’ose ainsi dire, à la postérité la plus reculée ; et ces idées, toutes tronquées, toutes souillées qu’elles sont, fondent à ceux qui les ont eues une réputation immortelle. Sur ce principe, quel respect, quelle vénération, quelle déférence devons-nous avoir pour ces patriarches, pour ces prophètes, pour ces évangélistes, pour ces apôtres, qui ont parlé de Dieu d’une manière si sublime ! Mais ne vous étonnez pas de leur supériorité sur ces grands génies ; s’ils n’avaient eu comme les autres que la raison humaine pour guide, comme eux ils se seraient égarés : s’ils ont parlé si bien de Dieu, c’est qu’ils avaient reçu cet « esprit » qui « sonde même ce qu’il y a de plus profond en Dieu 1 Corinthiens 2.10 ; » c’est que « toute l’Écriture est divinement inspirée 2 Timothée 3.16 ; » c’est que « la prophétie n’a pas été apportée par la volonté humaine, mais les saints hommes de Dieu, étant poussés par le Saint-Esprit, ont parlé 2 Pierre 1.12. »
Faites une troisième réflexion. Cette grandeur de Dieu lève une des plus grandes pierres de scandale que les incrédules et les esprits forts trouvent dans la religion. Elle justifie tous ces mystères ténébreux que notre faible raison ne saurait comprendre. Nous ne voulons pas nous servir de cette réflexion pour donner carrière à l’imagination des hommes, et pour autoriser tout ce qui se présentera à nous sous l’idée du merveilleux : tout ce qui est incompréhensible n’est pas divin, et par cela seul qu’une idée nous passe, on ne doit pas nous engager à la recevoir ; mais quand une religion a d’ailleurs de bons garants de sa divinité, quand nous avons des arguments qu’une telle révélation vient du ciel, quand nous savons certainement que c’est Dieu qui a parlé, devons-nous être surpris si les idées de Dieu, qui viennent de si bon lieu, nous confondent et nous absorbent ? J’avoue que quand je consulte ma propre raison, je n’y saurais découvrir certains mystères de l’Évangile ; mais aussi quand je pense à la grandeur de Dieu, quand je veux porter mes regards sur ce vaste océan ; quand j’envisage cet immense tout, rien ne m’étonne, rien ne m’arrête, rien ne me paraît devoir être rejeté, quelque incompréhensible qu’il puisse être. Lorsqu’il s’agit de Dieu, je suis prêt à tout croire, à tout admettre, à tout recevoir, pourvu que je voie que c’est Dieu lui-même qui parle, ou qu’on me parle de sa part. Après cela je ne m’étonne plus qu’il y ait en Dieu une essence unique en trois personnes distinctes, un seul Dieu, et cependant un Père, un Fils, et un Saint-Esprit. Après cela je ne m’étonne plus que Dieu puisse prévoir tout, sans contraindre tout ; permettre le péché, sans forcer le pécheur ; destiner les êtres libres et intelligents à telle et telle fin, sans leur ôter pourtant leur intelligence et leur liberté. Après cela, je ne m’étonne plus que la justice de ce Dieu ait demandé une réparation proportionnée à sa grandeur, que sa bonté l’ait donnée cette réparation, et que Dieu ait puisé dans le sein de ses miséricordes un dessein, un mystère d’un Dieu incarné, mystère qui fait l’admiration des anges, l’aheurtement des esprits forts, l’écueil de la raison, la matière des louanges des bienheureux ; mystère qui est le « grand mystère 1 Timothée 3.16 » par excellence, mais dont la grandeur n’a rien qui nous le doive faire rejeter, puisque la religion nous le propose comme le grand effort des vertus du Dieu incompréhensible, et que c’est sur la foi du Dieu incompréhensible même qu’elle nous appelle à le croire. Il fallait, ou que la religion ne nous dit rien de Dieu, ou qu’elle nous en dît des choses au-dessus de notre portée, et que même, en ne nous montrant que le rivage de cet immense océan, elle nous fit découvrir une étendue où nos faibles yeux seraient absorbés : mais ce qui m’étonne, mais ce qui me passe, mais ce qui m’effraye, c’est de voir une petite créature, c’est de voir un petit homme, c’est de voir un petit rayon de lumière reluisant au milieu de quelques organes faibles, disputer de raison avec l’Être suprême, tenir tête à cette intelligence qui tient le timon du monde, contester lorsqu’elle parle, argumenter lorsqu’elle prononce, appeler de ses décisions, et rejeter même après son témoignage des dogmes qu’elle ne peut mettre au niveau de ses idées. Entre dans ton néant, créature mortelle ; quelle est la fureur qui t’anime, et comment prétends-tu que ce point, que cet atome qui fait ton essence, se mesure avec l’Être suprême, avec celui qui remplit le ciel et la terre, avec celui que « les cieux même, les cieux des cieux ne sauraient contenir ? Trouveras-tu le fond de Dieu en le sondant : trouveras-tu parfaitement le Tout-Puissant ? Ce sont les hauteurs des cieux, qu’y feras-tu ? Ce sont les profondeurs de l’abîme, qu’y connaîtras-tu ? Il étend l’aquilon sur le vide, il suspend la terre sur le néant, il resserre les eaux dans ses nuées : les colonnes des cieux s’ébranlent à sa menace. Et voilà ce ne sont que les bords de ses voies, combien est petite la portion que nous en connaissons ! qui pourra comprendre le bruit éclatant de sa puissance ? Ceins maintenant tes reins comme un vaillant homme, et je t’interrogerai, tu m’instruiras. Où étais-tu quand je fondais la terre ? dis-le-moi, si tu as de l’intelligence. Qui en a réglé les mesures ? Qui a appliqué le niveau sur elle ? Sur quoi ses bases sont-elles affermies ? Qui a posé la pierre angulaire pour la soutenir, alors que les étoiles du matin poussèrent ensemble des cris de joie et que les enfants de Dieu chantèrent en triomphe ? Quand je lui donnai la nuée pour couverture, et l’obscurité pour ses langes ? Quand j’établis sur elle mon ordonnance, et que je lui dis : Tu viendras jusque-là, tu ne passeras pas plus avant ? Que celui qui dispute avec Dieu réponde à ceci. O Dieu, ta science est trop merveilleuse pour moi, je ne saurais y atteindrec ! »
c – 1 Rois 8.27 ; Job 11.7 ; 24.7, 11, 14 ; 38.3 ; Psaumes 139.6.
Mais, mes frères, seraient-ce là toutes les conclusions que nous tirerions de ce texte ? Ne remporterions-nous de ce discours que des spéculations ? Ne ferions-nous que croire, qu’admirer et nous récrier ? Ah ! je vois sortir de cette idée de Dieu toutes les vertus que la religion nous prescrit ! Si telle est la grandeur du Dieu que j’adore, misérable ! quelle doit être ma pénitence ! Vermisseau que je suis, et que Dieu foule sous ses pieds, qu’il peut écraser et réduire en poudre par un seul acte de sa volonté, je me suis rebellé contre le grand Dieu, j’ai voulu « provoquer sa jalousie, » comme si j’étais « plus fort que lui 1 Corinthiens 10.22 ; » j’ai outragé cette majesté que les anges de Dieu adorent ; je l’ai attaquée avec audace et avec fureur sur son trône et dans son empire. Y a-t-il de trop cuisants remords pour réparer des péchés que la grandeur de l’offensé et la petitesse de l’offenseur doivent faire paraître si atroces ?
Si telle est la grandeur de Dieu, quelle doit être notre humilité ! Grands du monde, divinités mortelles qui vous enorgueillissiez devant Dieu, opposez-vous au Dieu immense. Voyez ces idées éternelles, cette science infinie, cette influence générale, cette direction universelle ; entrez dans cette mer immense de vertus et de perfections, qu’êtes-vous ? Un grain de poudre, un point, un atome, un rien. Si telle est la grandeur de Dieu, quelle doit être notre confiance ! « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous Romains 8.31 ! » Pauvre créature, battue dans le monde comme par autant de vents, par la faim, par la maladie, par le mépris, par la misère, par la nudité, par l’exil, ne crains point dans un vaisseau dont Dieu est lui-même le pilote.
Mais surtout, si telle est la grandeur de Dieu, si Dieu est partout, quelle doit être notre vigilance ! Et pour ramener ce discours à l’idée que nous avions en le commençant, quelle impression doit faire sur des âmes raisonnables cette pensée : Dieu me voit ! « Quand tu étais sous le figuier, » disait Jésus-Christ à Nathanaël, « je te voyais Jean 1.48. » On ne sait ce que vit Jésus-Christ sous ce figuier, et ce n’est pas ici le lieu de le rechercher ; mais sans doute il s’agit là de quelque mouvement dont Nathanaël était bien persuadé qu’aucun homme n’avait pu être le témoin. Aussi, dès que Jésus-Christ lui eut adressé ces paroles, il crut et lui dit : « Maître, tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » Mes frères, Dieu tient aujourd’hui à chacun de vous le même langage : « Quand tu étais sous le figuier, je te voyais. »
Hypocrite, lorsque revêtu d’un voile de religion, paré d’un extérieur pieux, tu cachais un cœur impie, et tu prétendais en imposer à Dieu et aux hommes, « je te voyais, je développais tous ces replis, j’éclaircissais toutes ces ténèbres, je perçais toutes ces profondeurs. Enfant du siècle, qui, avec une prudence véritablement infernale, sais donner une belle couleur aux objets les plus odieux, qui parais ne pas haïr ton prochain, parce que tu ne l’attaques pas à main levée ; ne pas fausser ton serment, parce que tu as l’art de l’éluder ; ne pas fouler la pupille, parce que tu sais lui imposer silence ; « je te voyais, » quand tu portais ces coups déguisés, quand tu recevais ces présents, quand tu accumulais ces richesses iniques qui crient contre toi.
Voluptueux, qui avais honte de produire tes excès à la lumière du soleil, « je te voyais, » lorsqu’avec le secours de ces barres, de ces verrous, de cette obscurité et de ces ténèbres, de ces précautions compliquées, tu te dérobais à la vue des hommes, tu violais « le temple du Saint-Esprit, » et tu en faisais « les membres d’une femme impure 1 Corinthiens 6.15. »
Mes frères, ces discours que l’on vous adresse pour l’ordinaire vous absorbent peut-être par leur nombre ; cet amas d’idées morales vous confond peut-être, au lieu de vous éclairer, et pour être engagés à trop de réflexions, vous n’entrez véritablement dans aucune. Voici une religion abrégée, voici une morale en trois mots ; allez dans vos maisons, portez partout cette réflexion : Dieu me voit, Dieu me voit ; à tous les pièges du démon, à toutes les tentations du siècle, à tous les appas de la cupidité, opposez-la cette réflexion : Dieu me voit. Si, revêtu d’une forme humaine, il était toujours sur vos pas, s’il vous suivait en tout lieu, s’il était toujours devant vous avec ce front majestueux, avec ces yeux étincelants, avec ces regards terribles ; pourriez-vous devant son auguste présence lâcher la bride à vos passions ? Mais vous venez de l’entendre, il est partout, ce front majestueux ; ils vous suivent partout, ces yeux étincelants ; ils vous considèrent partout, ces regards terribles. Surtout, que dans cette semaine de préparation à l’eucharistie, recueillis, rentrés dans vous-mêmes, occupés à fouiller dans cette conscience et à y découvrir tant de faiblesse, tant de corruption, tant de dureté, tant de sources impures fécondes en excès ; que cette idée nous frappe : Dieu me voit, Dieu me voit tel que je viens de me voir moi-même, impur, ingrat, rebelle ; qu’elle nous porte cette idée à la componction, aux larmes, aux regrets, à la conversion, à une communion sainte, fervente, couronnée de grâces et de vertus. Heureux si, après notre examen, nous avons un nouveau cœur, un cœur agréable à ces yeux qui le sondent et qui le pénètrent. Heureux si, après notre communion, après un nouvel examen, nous pouvions dire avec le prophète : « Éternel ! tu as sondé mon cœur, tu m’as examiné, tu n’as rien trouvé que d’agréable à tes yeux Psaumes 139.1. » Ainsi soit-il. A Dieu soient honneur et gloire à jamais. Amen.