Nos enfants

PÈRE, N’IRRITEZ PAS VOS ENFANTS

Et vous, pères, n’irritez pas vos enfants mais élevez-les en les corrigeant et en les instruisant selon le Seigneur.

Éphésiens 6.4

Un jeune homme me parle de son père avec une ombre d’amertume. Bon chrétien semble-t-il, mais pieux, légaliste et des plus stricts, ce papa exigeait beaucoup des siens. Son souci majeur était de les préserver du mal en veillant sur leurs fréquentations et leurs loisirs afin qu’ils ne s’égarent pas. Si d’aventure l’un d’eux mendiait la permission d’aller voir un film de qualité – demande exceptionnelle – la réponse tombait, catégorique :

— Non ! C’est mondain et vous n’y apprendrez rien de bon. Ce que vous verrez sur l’écran salira et vos yeux et votre esprit.

De telles interdictions eussent été sans suite grave si l’un des fils – justement celui qui me rapportait le fait – n’avait aperçu, un dimanche après-midi, son – oui, son père – sortant d’une salle obscure, ce lieu réputé par lui malsain et diabolique. On devine la réaction du jeune homme :

— Ce jour-là, mon père a perdu ma confiance. J’étais furieux contre lui … Je ne puis effacer de ma mémoire ce souvenir lamentable …

Il est si facile de choquer ses enfants, de les aigrir pour la vie. Certains, parvenus à l’âge adulte, conservent « une dent contre papa » qui dans le passé, s’est montré injuste, excessif et surtout inconséquent. D’autres, exaspérés par une éducation impitoyable et sans cœur, à la longue se sont découragés. Devenus parents à leur tour, ils ont cru devoir par réaction, laisser « la bride sur le cou » à leurs enfants ce qui est une autre façon de les décevoir. La peur d’irriter n’autorise pas, ici, le manque de fermeté. L’Écriture nous rappelle qu’il est possible de corriger l’enfant sans pour autant l’irriter.

Hélas, un père bien intentionné peut éprouver les siens au point de les pousser à la révolte. Comment cela ?

1. D’abord, en exigeant trop de ses enfants. Nous voudrions tous que nos « chéris » soient des anges, des modèles de sagesse à la gloire de Dieu, mais ce louable désir a son revers. Il nous rend sévères à l’excès et nous incite à nous donner en exemple : « Quand j’étais petit, MOI JE … » Nous oublions si aisément l’injonction biblique : « Il peut être INDULGENT parce qu’il est lui-même sujet à la faiblesse » (Hébreux 5.2). L’indulgence est une vertu chrétienne exigée de ceux qui ont charge d’âme (1 Timothée 3.3). Si je me connais bien – après tout je suis de la même nature que le coupable – je rechercherai et acquerrai très vite cette qualité, trop peu commune chez les croyants évangéliques. Il faut savoir fermer les yeux sur des écarts sans importance et juger les autres en pécheurs que nous sommes. Qui se croit obligé de sanctionner la moindre faute décourage et irrite, inévitablement.

On raconte qu’un père corse, peu satisfait des résultats scolaires de son garçon, pensa le stimuler en lui donnant Napoléon comme modèle :

— Quand il avait ton âge, lui dit-il sur un ton bourru, notre héros avait déjà décroché d’importants diplômes …

— Papa, rétorqua le fiston non sans malice, Napoléon, quand il avait ton âge à toi … il était empereur.

Restons humbles devant les nôtres et nous gagnerons en autorité. En tous cas, ils nous prendront plus au sérieux.

2. Puis, en châtiant celui qui ignore la portée de son geste. En effet, un enfant peut, innocemment, gambader sur la pelouse sans savoir qu’il est interdit d’y marcher. Le punir pour cela serait une injustice qui l’irriterait à coup sûr. D’où le devoir, pour les parents, d’éclairer l’enfant plutôt que de le gourmander, de l’enseigner d’abord afin qu’il discerne le vrai du faux et le bien du mal. C’est conforme à l’Écriture, laquelle précise : « Corrigez-les en les INSTRUISANT selon le Seigneur (Éphésiens 6.4). Et ailleurs : « INSTRUIS l’enfant selon la voie qu’il doit suivre … » (Proverbes 22.6).

Bien évidemment, si le « petit », une fois averti, pèche consciemment – donc délibérément – il encourra une juste punition et le châtiment ne pourra le heurter profondément. Il s’étonnerait même de voir ses parents passer l’éponge sur le mal qu’ils ont pris la peine de dénoncer.

3. Un père irritera certainement les siens s’il manie le bâton en vociférant, sous l’empire de la colère. L’exaspération ne produit jamais rien de bon. Elle incite à la démesure, donc à l’injustice : « La colère de l’homme n’accomplit pas la justice de Dieu » (Jacques 1.20) … Lequel est, par excellence, « lent à la colère » (Psaumes 103.8).

Une remarque : Je crie d’autant plus fort que la faute de l’enfant me touche de plus près. S’il vient de rayer MA voiture flambant neuve, de tacher la tapisserie que JE viens de poser, de lancer le ballon dans le journal que JE tiens ouvert devant MOI, je risque d’éclater et de frapper. Non, je veux rester maître de moi et calme devant le coupable. Suis-je nerveux de nature, enclin à la vivacité, du genre soupe-au-lait ? Ai-je la main trop leste ? Alors je le dirai à Celui qui m’accordera Sa patience.

Si votre fils a gravement fauté, dites-lui : « Tout à l’heure, nous règlerons la chose, seul à seul ». Ainsi, vous lui donnerez le temps de réfléchir sur son inconduite. Cependant, ne le laissez pas trop longtemps dans une inutile anxiété.

4. Qui châtie à tort et à travers ne manque pas d’irriter l’enfant qu’on prétend corriger, surtout si la punition est disproportionnée à la faute commise. Certains parents, pour des vétilles, « expédient » le gosse au lit sans souper, le privent de dessert ou lui refusent une sortie très attendue. Même l’enfant difficile a besoin de joies. Ne l’accablez ni de reproches, ni de privations, ni de châtiments ; vous lui apparaîtriez sous les traits du père fouettard. Ce serait dommage ! Votre fils est-il particulièrement rebelle ? Consacrez-lui beaucoup de temps. Parlez-lui avec affection sans le submerger de sermons ou de paroles pieuses. Cherchez la moindre raison de le féliciter. Accordez-lui de vrais plaisirs, avant même qu’il ne les réclame. Et s’il mérite la correction, qu’elle soit infligée comme ultime recours, toujours à contre-cœur. L’enfant difficile peut devenir encore plus difficile par vos excès, simplement par bravade comme pour vous prouver que les châtiments dont vous abusez ne l’atteignent plus.

5. J’irriterai sûrement mon enfant si je ne lui propose que des renoncements, des « il n’est pas permis », « tu ne dois pas », « ce n’est pas pour toi » … Si vous décidez de le priver de cinéma, faites-lui plaisir en lui offrant, par exemple, un album de timbres, un illustré, le poste à transistors qu’il convoite depuis longtemps. Ne lui faites pas croire que la vie chrétienne n’est faite que de « soustractions », donc sans joies.

Que les vrais intérêts de l’enfant et son épanouissement soient votre préoccupation de tous les instants, soucieux que vous êtes de préparer et de former un adulte heureux. Soyez attentifs à ses réactions sans les minimiser ni les dramatiser pour autant. Si elles vous inquiètent et se renouvellent, devant Dieu et avec votre conjoint, cherchez à discerner la suite à donner à de telles réactions : faut-il se montrer plus ferme ou plus conciliant ? Changer totalement d’attitude ? Les enfants sont tellement différents qu’on ne peut, à l’avance, décider d’une ligne de conduite précise. Laissez le Saint-Esprit et l’Écriture vous la tracer. Autrement dit, soyez des parents obéissants … au Seigneur (1).

(1) (1) D’autres motifs d’irritation sont mentionnés dans le chapitre suivant. « Les châtiments corporels ».

LES PARENTS S’INTERROGENT

  1. Avez-vous été et à plusieurs reprises, alertés par certaines réactions de l’un des vôtres que vous cherchiez à corriger ? Ces réactions se renouvellent-elles ? Les retrouvez- vous chez ses frères et sœurs ? Font-ils chorus pour dénoncer ce qu’ils appellent une injustice ? Qu’en pense votre conjoint ?
  2. Discernez-vous en quoi vous pouvez vous tromper ? Vous êtes-vous ouverts de ces problèmes à des amis chrétiens qui ont fait leurs preuves en matière d’éducation ? Avez-vous commis l’une des erreurs signalées plus haut ? Si c’est le cas, comment pensez-vous y remédier pour la joie de tous ?
  3. Bénissez « Celui qui répare les brèches », et demandez-lui sagesse et amour pour conduire ceux qu’il vous a confiés.

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