« Jésus leur dit : Venez à l’écart dans un lieu désert. »
Il serait certainement utile et fort instructif de procéder chaque année à un sondage lors de l’assemblée générale de votre église. Ce jour-là, le pasteur ou l’ancien pourraient proposer à chacun des participants d’écrire avec exactitude sur un carré de papier le nombre de minutes consacrées à la prière et à la lecture de la Bible durant la journée précédente. L’anonymat serait exigé, ce qui favoriserait une déclaration honnête. Le fait de réfléchir sur le temps passé près de Dieu la veille, puis d’inscrire la durée de ce temps et enfin d’entendre annoncer du haut de la chaire les résultats de cette enquête, conduirait certainement un bon nombre de chrétiens à s’humilier pour avoir délaissé le Seigneur et sa Parole.
Qui aime vraiment consacre du temps, beaucoup de temps à l’être aimé. Qui affectionne peu les siens les oublie ou ne leur accorde que de brèves visites. Est-ce aimer le Seigneur de tout son cœur que de lui donner avec parcimonie quelques minutes dans la journée ? Notre indifférence l’attriste et prouve que nous attribuons bien peu de valeur à sa Personne. Aussi, le résultat est-il inévitable : vie chrétienne superficielle. Peu de progrès dans la sanctification. Pas de rayonnement et absence de vraie joie. Et, corollaire important, manque de zèle pour la propagation de l’Évangile, dépréoccupation du prochain, de son salut et de ses progrès dans la foi.
Considérez la vie de Jésus. Sans cesse poursuivi par une foule avide de l’entendre ou de le voir accomplir des miracles, harcelé par les douze toujours présents à ses côtés et qu’il s’appliquait cependant à enseigner avec patience, le Sauveur, qui ne perdait pas une seconde pour secourir toute détresse, trouvait cependant beaucoup de temps pour aller à l’écart, sur la montagne bien avant les premières lueurs du jour. « Pendant le jour, nous raconte Luc, Jésus enseignait dans le temple et il allait passer la nuit à la montagne des Oliviers. Et tout le peuple, dès le matin, se rendait vers lui dans le temple pour l’écouter » (ceci peu avant la passion — Luc 21.37-38). A la veille de grands événements ou d’importantes décisions, le Christ s’imposait des retraites prolongées, par exemple avant que débute son ministère public et au moment de son baptême (Matthieu 4.1-2 ; Luc 3.21), pour le choix de ses disciples (Luc 6.12), avant de les entretenir de ses souffrances (Luc 9.18-22), pour se préparer au sacrifice suprême (Luc 23.46).
Hélas ! Nos rencontres avec le Ressuscité sont généralement écourtées. Nous venons à lui souvent pressés et c’est au galop que nous énumérons nos besoins ou intercédons au hasard des noms qui nous viennent à la pensée. Cette hâte – parfois justifiée à cause de circonstances imprévues que Dieu n’ignore pas ! – attriste celui qui voudrait avoir le temps de se communiquer à nous. Or – qu’on me pardonne de me répéter – le Seigneur voudrait tellement nous introduire dans son sanctuaire et nous faire partager les joies de sa présence. Notre hâte et nos bavardages l’en empêchent. N’est-ce pas lui qui devrait, si je puis dire, mener l’entretien, et le moment venu, nous dire : « Maintenant tu peux retourner à tes activités ; je resterai dans tes pensées et te garderai tout au long des heures qui suivent. » Sans doute le monde évangélique est-il riche de saine doctrine mais tellement pauvre de vraie piété, Que Dieu nous communique la soif et la faim de sa présence. Non pour la joie qu’elle peut nous apporter mais pour la joie qu’elle procure à notre Dieu. L’appétit, dit-on, vient en mangeant. Ne peut-on pas en dire autant du désir de rester en la compagnie du Seigneur ? Il grandira en moi si je m’attarde auprès de lui.
Il est vrai que nous éprouvons infiniment plus de satisfaction à agir qu’à prier. L’action nous plaît davantage, et lorsque nous nous dépensons dans l’église ou donnons du temps à une œuvre de bienfaisance, nous avons le sentiment combien réconfortant d’être utiles, de vivre pleinement l’Évangile, d’aimer vraiment le Seigneur ; il n’en est pas ainsi lorsque nous prions car Satan « rôde autour de nous », cherchant à nous persuader que nous perdons notre temps et avons mieux à faire qu’à rester à genoux. Pourtant, il n’y a pas de bon travail qui ne soit précédé d’une rencontre prolongée avec le Seigneur. Et plus la tâche s’annonce ardue ou de grande importance et plus nous devrions nous attarder devant lui pour nous préparer à l’accomplir. Economisons le temps de la prière et nous manquerons de temps pour notre tâche, même la plus ordinaire.
Il est vrai que nous ne sommes pas naturellement poussés à rechercher la face du Seigneur. Satan le sait qui pèse de tout son poids pour nous priver de ce temps précieux de communion et de ressourcement. Son action se discerne sans peine justement lorsque nous nous apprêtons à invoquer notre Dieu. Une fatigue inexplicable, une soudaine tendance à la somnolence, une visite inopportune, un coup de téléphone interminable et sans intérêt, le conjoint débordé, qui s’impatiente et réclame de l’aide, viennent couper notre élan et jeter une ombre sur nos relations avec le Maître. Certes il faut dénoncer l’adversaire et refuser ses accusations mais en nous persuadant une fois de plus que le moment le plus propice est sans contredit le matin, bien avant que tout s’agite autour de nous. Celui qui a été tenté en tous points comme nous (Hébreux 2.18) et a connu des contretemps plus sérieux que les nôtres veut nous rendre capables de trouver de longs moments tranquilles au cours de nos semaines, pourvu que nous le lui demandions et soyons déterminés à le rencontrer sans hâte ni fébrilité (le jour du repos est un jour favorable à ne pas gaspiller).
Guidé par l’Esprit saint et peu avant d’entrer dans le ministère, Jésus fit quarante jours de retraite dans les solitudes de Juda. Harcelé, tenté par le diable, tenaillé par la faim, il aurait pu quitter ces lieux arides avec bonne conscience en se disant qu’il y avait mieux à faire qu’à souffrir sans motif en plein désert. Or, Jésus tint bon devant l’adversaire, Comme pour nous rappeler qu’il y a toujours un combat et une victoire à remporter sur soi-même si l’on veut que Dieu soit le premier dans notre temps et dans notre cœur. Cette victoire sera facilitée si nous nous souvenons des paroles du Seigneur (Matthieu 6.6). Lui, qui connaît la paresse de ses disciples, juge utile de les stimuler en leur assurant qu’ils ne prient pas en vain puisque le Père les voit et les récompensera le moment venu. La prière, avons-nous dit, sera « payée » de retour : « Ton Père te le rendra… » Nous sommes donc perdants si nous négligeons de venir à lui. O. Smith, qui avouait sa joie de prier, déclarait : Quand j’ai prié « les problèmes sont résolus avant que je les affronte ».
On dit volontiers qu’il faut se mêler à la foule pour en gagner quelques-uns à l’Évangile. C’est vrai, en partie du moins. On ne peut vivre cloîtré si l’on tient à rayonner de Christ et à le faire connaître. N’êtes-vous pas frappé, en parcourant les Évangiles, de constater que Jésus cherchait davantage son Père que la foule ? Or, c’était la foule qui le recherchait jusque dans ses retraites (Marc 1.35-37). C’est dans mes temps de vraie communion avec Dieu (trop intermittents, hélas !) que j’ai eu de réels contacts avec le prochain.
Une personne insista pour que je parle à son fils de dix-sept ans qui montrait des velléités d’indépendance. La maman était inquiète, le sachant faible et influençable. Chrétienne ardente, elle voulait tellement que son enfant suive le Seigneur. Alors que je méditais dans mon bureau, je pensais à ce garçon et m’apprêtais à le rejoindre sur son chantier lorsque me vint à la pensée l’expérience d’un jeune pasteur qui avait perdu toute sa matinée à courir en vain après un jeune homme qu’il voulait évangéliser et qui demeurait introuvable. Dieu se servit d’un texte biblique comme pour me dire : « Reste auprès de moi. J’ai encore des choses à t’enseigner. » Je continuai donc ma méditation lorsqu’on frappa à la porte. C’était justement ce jeune qui venait me demander un renseignement (pas en vue de son âme). Une conversation amicale s’engagea et je pus lui parler le plus naturellement du monde de son Sauveur. Plus tard, je fus heureux d’apprendre qu’il avait changé de route et s’était résolument décidé à Le suivre.
Ici, arrêtez-vous un instant pour vous approcher de Dieu.
1) Au début, ne vous préoccupez pas de ce que vous allez lui dire mais attendez-vous à lui, en gardant le silence s’il le faut. Tout sujet qui se présente devant son roi attend humblement qu’il lui adresse la parole (Ecclésiaste 5.1).
2) Soyez pénétré de la pensée que le temps que vous allez consacrer à Dieu lui est agréable, est sujet de joie pour lui. C’est un don – un humble don certes – que vous lui faites, de sorte que vous ne venez pas à lui les mains vides. Réjouissez-vous de lui faire ainsi plaisir.
3) Ne recherchez pas Sa face pour la joie qu’elle procure bien qu’elle soit toujours source de joie. C’est vrai, il n’y a pas de compagnie plus agréable que celle du Seigneur. Cependant, approchez-vous pour lui seul. Acceptez qu’il éclaire et purifie les motifs qui vous poussent à l’invoquer.
4) Restez paisible et plein de respect devant lui. N’oubliez jamais qu’il est le Dieu souverain. Sans exiger « cavalièrement » qu’il réponde à vos demandes, attendez sereinement et avec une pleine assurance qu’il vous accorde ce qu’il a promis, ce qu’il juge le meilleur de vous donner. Et le meilleur pour vous, c’est « la communion de son Fils » (1 Corinthiens 1.9). Marie l’avait compris et avait choisi la bonne part en restant aux pieds du Maître.
5) Tenez bon, persévérez dans la foi, comme vous y convie l’Écriture : « En sorte que vous ne vous relâchiez pas et que vous imitiez ceux qui, par la foi et la persévérance, héritent des promesses » (Hébreux 6.12). Ayez les regards sur Jésus. et une paix inondera votre âme lorsque Dieu le voudra.
Questions :