Ce supplément n’est ajouté que pour répondre à des questions isolées qui ont été cent fois posées. Il nous a paru utile d’y répondre d’autant qu’elles restent dans le cadre du sujet traité. Toutefois, le vrai don des langues ayant cessé depuis longtemps, ces questions sont, pour la plupart, sans objet, mais nous aurions mauvaise grâce à refuser d’y répondre. Nous y consentons pour ne rien laisser en suspens. Nous le faisons à la lumière de 1 Corinthiens 13.8 qui a annoncé la disparition de ce don. Il est souhaitable qu’avant d’aller plus loin, le lecteur en relise l’explication au chapitre 8.
Cela a été dit et redit. C’est ce qu’affirme avec force G. Lindsay dans son livre “21 raisons pour lesquelles les chrétiens devraient parler en langres.” À la base de cette thèse il y a l’éclairage pentecôtiste du baptême du Saint-Esprit. Nous renvoyons le lecteur au chapitre 9 qui nous montre que la doctrine biblique sur le sujet est tout autre chose que ce qu’on voudrait faire croire qu’elle est. Le texte le plus souvent cité à l’appui de cette idée est celui de Paul : “Je voudrais que vous parliez tous en langues” (1 Corinthiens 14.5). Si ce désir de l’apôtre est à prendre comme un impératif doctrinal, comment faut-il comprendre les paroles du même apôtre qui, dans la même épître, dit aussi : “Je voudrais que tous les hommes soient comme moi”, c’est-à-dire célibataires ! (1 Corinthiens 7.7). En grec, les deux expressions “je voudrais” sont identiques. Faut-il donner à ces deux désirs force de loi ? On remarque (permettez-nous d’être un tantinet malicieux) que tous ceux qui voient le feu au vert quand ils lisent 1 Corinthiens 14.5, le voient au rouge en 1 Corinthiens 7.7 ! Seraient-ils subitement devenus daltoniens ? Car, s’il faut voir dans le premier une norme de la vie chrétienne, il faut aussi, pour rester honnête, reconnaître la même norme au second. Tous ceux qui privilégient le parler en langues devraient donc s’imposer le célibat. Par quelle gymnastique cérébrale arrive-t-on à dire qu’il faut faire comme Paul quant aux langues, mais pas quant au mariage ? Cette remarque empreinte d’humour a fait mouche, à chaque fois. Un jeune homme, mordu du don des langues, à qui je disais ces choses, a pris les mors aux dents et m’est carrément “rentré dedans”. Il était furibond. Pour se justifier, il a avancé une idée qu’il avait lue quelque part, selon laquelle Paul était, non pas célibataire mais veuf. Il ne m’apprenait rien. Cette pensée se base sur le fait que pour être membre du sanhédrin, il fallait obligatoirement avoir été marié. Et comme Saul de Tarse avait été membre de ce sanhédrin c’est qu’il n’était plus célibataire mais vraisemblablement veuf. Je lui ai fait remarquer que, si tel était le cas, Paul aurait donc voulu dire qu’il souhaitait que tous les hommes fussent veufs ! Le ridicule de la situation l’a laissé sans réponse. Il a tourné les talons et s’en est allé.
Il y a toute une implication doctrinale derrière les paroles de Paul. Comme tous les Corinthiens n’étaient pas appelés à être célibataires, tous non plus n’étaient pas appelés à parler en langues. Paul accepte ces deux idées. D’une part que tous n’avaient pas le don du célibat (1 Corinthiens 7.7), et d’autre part que tous n’avaient pas le don des langues quand il dit : “Tous sont-ils apôtres ? Tous sont-ils prophètes ? Tous sont-ils docteurs ?… Tous parlent-ils en langues ?” Poser la question c’est donner la réponse. S’il en était autrement, il n’y aurait qu’une façon de comprendre les cinq éléments de la parole du Seigneur en Marc 16.17-18 : “Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom :
Tous devraient obligatoirement faire la preuve de leur foi, non seulement en parlant de nouvelles langues mais en chassant chacun des démons, en buvant tous un breuvage mortel ou en mangeant sans danger une amanite phalloïde, en guérissant tous des malades et en plongeant chacun sa main dans un nœud de vipères à l’exemple de l’apôtre Paul qui fut mordu par l’une d’elles sans qu’il en résulte ni n’en ressente du mal. D’ailleurs, aucun de ceux qui font la démonstration de leur acquis spirituel par les langues ne se risque à le faire par les serpents.
Un jour, un pasteur extrémiste dans cette voie, essayait de me convaincre que parler en langues était une expérience que tout chrétien devait nécessairement faire. J’ai ouvert ma Bible et je lui ai demandé de lire avec moi les versets cités plus haut (1 Corinthiens 12.29-30) :
Arrivé à ce point, il a refusé d’aller plus loin. Il venait de se rendre compte où le texte allait le conduire, à dire : “Tous parlent-ils en langues ?” La réponse ne pouvait être que NON ! Et il le savait. Trois fois j’ai essayé de reprendre le texte avec lui. Trois fois il a refusé d’aller jusqu’au bout. Il s’en est allé réellement fâché contre moi.
Ainsi, même au temps de Paul où le vrai don existait et devait être employé comme signe de l’internationalisation du salut aux Juifs qui n’y croyaient pas, tous n’avaient pas ce don car “l’Esprit distribue ses dons à chacun en particulier comme il veut” (1 Corinthiens 12.11). De même que tous n’étaient pas apôtres, ou prophètes, ou célibataires, tous non plus ne parlaient pas en langues.
Il ne s’agit pas ici de volubilité. Ces bavards de Corinthiens étaient plus loquaces que Paul dont la parole ou l’élocution était, selon eux, méprisable (2 Corinthiens 10.10). Paul n’entre pas ici en compétition avec la faconde corinthienne. La raison pour laquelle il leur dit qu’il parle plus qu’eux tous est simple. Paul était l’apôtre des nations, envoyé par Dieu vers les peuples aux langues étrangères, c’est-à-dire autres que l’hébreu. Cet appel était contesté par ses adversaires Juifs qui l’empêchaient de parler aux païens (1 Thessaloniciens 2.16). Et non seulement les Juifs inconvertis, mais les convertis d’Israël avaient beaucoup de peine à saisir la grande nouveauté ou vérité spécifique de l’ère de l’Église inaugurée à la Pentecôte : Dieu répandait désormais son Esprit sur toute chair, ce qui revient à dire sur toutes les langues du monde et les peuples qui les parlent. Le livre des Actes montre que partout où il allait, Paul entrait en contact et en conflit avec les Juifs à ce sujet. En parlant miraculeusement ces langues par l’Esprit, Paul, outre son enseignement, leur donnait le signe prévu à cet effet. Il leur démontrait ainsi que les langues étrangères pouvaient, tout aussi bien que la leur, louer le Yahvé d’Israël et que le mur de séparation était abattu une fois pour toutes. Pour bien le prouver, cet ex-pharisien libéré et éclairé, de ses lèvres de Juif, publiait miraculeusement au vu et au su des Juifs, les merveilles du Dieu des Juifs dans les langues des païens ! Merveille pour les uns (Juifs et païens acquis à cette vérité nouvelle) ; feu de jugement pour les autres (Juifs incroyants et opposés). Plus que n’importe qui, et peut-être seul de sa génération, Paul pouvait dire sans forfanterie : “J’ai travaillé plus qu’eux tous” (1 Corinthiens 15.10). De par sa vocation particulière, ses nombreux voyages, son labeur incessant et ses nouveaux contacts, Paul, à bon escient, parlait aussi en langues plus que les autres.
Il faut savoir que le charisme dont Paul parle ici, c’était le vrai et non la contrefaçon qu’on nous propose aujourd’hui. Malgré son authenticité, il était entaché de telles malfaçons que l’apôtre inspiré dut écrire presque trois chapitres pour remettre les Corinthiens sur les rails. Ils l’utilisaient à tort et à travers comme Samson sa force herculéenne qui lui venait aussi de Dieu. Champion de la classe biberon, premier prix d’infantilisme tels les Corinthiens (1 Corinthiens 14.20), il en usait et en abusait à des fins personnelles et charnelles. Dieu ne l’a pas empêché de se servir de la force qu’il lui avait donnée, mais il ne l’avait pas reçue pour s’en servir comme il le faisait. De même, Paul a apporté un sérieux rectificatif aux erreurs corinthiennes, mais tant que le don était encore de saison, il ne pouvait empêcher qu’on l’exerçât avec à-propos. Mais quand il devenait inapproprié, comme par exemple en l’absence d’interprète, Paul empêchait de parler en langues, donnant alors l’ordre de se taire (1 Corinthiens 14.28). Il en était du don des langues comme du don de rédaction des livres du Nouveau Testament. Paul aurait pu dire qu’il écrivait plus d’épîtres que les autres, et même plus que tous les autres ensemble. Comme pour les langues, il signale l’existence d’écrits douteux (2 Thessaloniciens 2.2), mais il n’empêchera ni Jean, ni Pierre, ni Luc, ni personne d’autre d’écrire les vrais. Toutefois, continuer à en écrire aujourd’hui, ou continuer à contrefaire le don des langues alors que ces deux dons ont cessé, cela se définit par une expression : faux et usage de faux.
Les MYSTÈRES dont il est question ici n’ont rien de commun avec le sens qu’on leur prête de nos jours : insaisissables, incompréhensibles, inconnus, secrets, etc… Dans le Nouveau Testament le mot se rencontre vingt-sept fois. Sans exception il s’agit, comme l’enseigne Scofield “d’une vérité cachée auparavant, que Dieu révèle en partie dans le temps présent”. Son analyse très intéressante se trouve à la Page 1075, en note du texte de Matthieu 13.11 de sa Bible à références où il cite les dix mystères :
Ceux qui parlaient en langues adoraient Dieu sur la base de la plupart (ou de l’ensemble) de ces mystères. Ce sont exactement les mêmes mystères que les rachetés proclament lorsqu’ils louent le Seigneur. Nous le bénissons, ô combien, pour son royaume à venir que nous saluons par la foi sans pouvoir en sonder l’étendue ! Que de louanges exprimées pour la grâce qui nous a été faite à nous qui étions éloignés, qui n’avions aucun droit de cité en Israël, mais qui sommes devenus héritiers de la promesse par leur chute ! (Romains 11). Que d’adoration pour le mystère de Christ lui-même ; pour celui de son incarnation, mystère d’un Dieu quittant sa gloire et y retournant après s’être manifesté en chair, choses dans lesquelles les anges eux-mêmes désirent plonger leurs regards ! Que d’actions de grâce pour le jour où le mystère de l’iniquité qui corrompt cette terre sera terminé ! Quelle bénédiction aussi pour le jour où morts et vivants seront changés dans un corps rendu conforme à celui de sa gloire et que les rachetés saluent en disant : “Amen, viens Seigneur Jésus”. Mais par-dessus tout, ce qui, en langues étrangères, était au centre de la louange, c’était le mystère qui s’y rapportait le plus et qui avait une importance capitale à cette époque, c’est-à-dire : “Ce mystère c’est que les païens sont co-héritiers, forment un même corps et participent à la même promesse en Jésus-Christ par l’évangile" (Éphésiens 3.6). Paul, après avoir expliqué le mystère de l’endurcissement d’Israël et du salut des païens dit : “Dieu a enfermé tous les hommes (Juifs et non-Juifs) dans la désobéissance pour faire miséricorde à tous” (Romains 11.31). Comme ébloui par cette vérité, Paul conclut dans un élan d’adoration : “O profondeur de la richesse, de la sagesse et de la science de Dieu ! Que ses jugements sont insondables et ses voies incompréhensibles” (Romains 11.33). Ce mystère est tel que les vingt-quatre anciens d’Apocalypse 5.8-10 “se courbent en adoration et chantent un cantique nouveau à la gloire de l’Agneau immolé qui a racheté par son sang des hommes de toute tribu, DE TOUTE LANGUE, de tout peuple et de toute nation”. C’est pour ces mystères que Pierre et les autres glorifièrent Dieu en langues étrangères au jour de la Pentecôte qui était le jour inaugural d’une dispensation qui s’étendait désormais à tous peuples et langues de la terre. À tous ceux qui n’avaient pas compris, ils ont donné séance tenante une explication claire, disant qu’à partir de ce moment-là Dieu déversait son Esprit sur toute les langues de la terre (toute chair). Ils apportèrent une preuve indiscutable de cette doctrine en parlant sur le champ quinze d’entre elles.
Cette insistance à dire avec Paul que le parler en langues, comme la vision de Pierre, ne faisait signe qu’à “ce peuple”, peut indisposer des amis qui demanderont avec une certaine irritation : Pourquoi, rien qu’aux Juifs ? Outre le fait que le Saint-Esprit le dit en 1 Corinthiens 14.21 : “…à ce peuple”, et que le plus élémentaire bon sens empêche de le comprendre autrement, il faut y ajouter deux autres considérations. La première, déjà mentionnée au chapitre 3, rappelle que les 12 fois où l’expression CE PEUPLE se rencontre dans le Nouveau Testament, elle ne désigne qu’israël. La seconde, c’est qu’en Romains 9.4, il est dit que c’est aux Juifs qu’appartiennent l’adoption, la gloire, les alliances, la loi, le culte, les promesses, les patriarches. C’est pour eux d’abord que le Sauveur était venu. Les apôtres étaient Juifs ; au début, l’Église était entièrement juive ; tout, y compris la proclamation du salut, était entre des mains juives. Or, les mieux disposés d’entre eux, Pierre le premier, se seraient bien gardés de partager la Bonne Nouvelle avec des étrangers (Actes 10.28) qu’ils classaient, eux et leurs langues, comme étant barbares. Parler par l’Esprit dans ces langues détestées, plus la vision de Pierre, ont été les deux signes par lesquels Dieu voulait convaincre ce peuple du caractère universel de l’évangile. Par ces moyens Dieu triomphait de leur réticence à l’annoncer aux autres peuples. La compréhension de cette vérité ne pouvait aller que dans le sens Juifs-païens et jamais dans le sens païens-Juifs ou païens-païens. Voici un exemple du plus parfait contre-sens qu’on puisse trouver. Un certain magazine très branché sur “l’expérience” a rapporté qu’un pasteur français ne sachant pas un mot d’hébreu, s’est mis à le parler par l’Esprit et que cela fut compris par un de ses collègues. Et voilà tout un parterre de gens sérieux qui applaudit à cette “orthodoxie” biblique. En supposant que l’incident raconté soit vrai (ayant été témoins de tant de faux rapports dans ce domaine, nous nous permettons de douter de la véracité du fait) nous sommes en présence d’une contrefaçon toute cousue de gros fil blanc :
Faire parler un français en hébreu, c’est renverser l’ordre divin comme, par exemple, donner la vision de Pierre au païen Corneille. Or Corneille, recevant le salut de la bouche de Pierre, n’avait nullement besoin d’apprendre que Pierre y avait droit autant que lui ! C’eût été un contre-sens doublé d’un non-sens monumental. Peut-on imaginer qu’un Anglais ait besoin d’un miracle linguistique en langue d’oc pour se convaincre que les Français ont droit à la nationalité française ? Quel ridicule ! C’est un peu ce que l’article mis en cause ci-dessus relate : que ce parler en langues en hébreu révélait à deux croyants français que les Hébreux avaient droit à leur propre Dieu !
Les versets 21 à 25 de 1 Corinthiens 14 restent pour beaucoup d’exégètes un véritable casse-tête.
Verset 21 : “C’est par des hommes d’une autre langue et par des lèvres d’étrangers que je parlerai à ce peuple”.
Verset 22 : “Par conséquent, les langues sont un signe, non pour les croyants mais pour les incroyants ; la prophétie ; au contraire, est un signe, non pour les non-croyants, mais pour les croyants”.
Verset 23 : “Si donc, dans une assemblée de l’Église entière, tous parlent en langues, et qu’il entre des simples auditeurs ou des non-croyants, ne diront-ils pas que vous êtes fous ?”.
Verset 24 : “Mais si tous prophétisent, et qu’il entre un non-croyant on un simple auditeur, il est convaincu par tous…”
Au verset 22, l’Esprit dit que les langues sont un signe pour les non-croyants. Mais au verset suivant, il semble dire le contraire : les non-croyants y crient “au fou !” en entendant parler en langues. On butte là dans un inextricable paradoxe que personne, de quelque bord qu’il soit, ne m’a jamais expliqué. Car si les non-croyants des versets 22, 23 et 24 sont indifféremment des Juifs et des païens, l’apparente contradiction est insurmontable, c’est la bouteille à encre. Mais la difficulté disparaît d’elle-même si l’on tient compte que l’Esprit avait en vue deux sortes d’incroyants. Les non-croyants du verset 22 sont identifiés par le verset 21 : “Je parlerai à ce peuple”. Ce sont les Juifs et le signe est pour eux. Mais les non-croyants du verset 23 sont identifiés par l’expression de “simples auditeurs” où “simples” selon J.N. Darby. En grec, c’est “idiotès” (consonance bien connue !). C’est bien ainsi que les Juifs voyaient les païens : ignorants, barbares, simples, non-instruits des choses de la loi (Romains 2.20). C’était à Corinthe, les gens du commun peuple et non de “ce peuple”. Cette exégèse honore le texte et son contexte, supprime la contradiction et confirme que le signe des langues, manifestement hors de portée des gens de Corinthe, n’était pas pour eux. Il était pour “ce peuple” juif afin de l’amener à croire enfin que les païens étaient greffés, insérés, baptisés avec eux dans le Corps de Christ qu’est l’Église.
On ne peut terminer ce paragraphe sans attirer l’attention sur les deux versets qui suivent où, une fois de plus, le don de prophétie est mis en contraste avec celui des langues : “Mais si tous prophétisent et qu’il entre un non-croyant (ou un “idiotès”), il est convaincu par tous, il est jugé par tous, les secrets de son cœur sont dévoilés de telle sorte que, tombant sur sa face, il adorera Dieu et publiera que Dieu est réellement au milieu de vous” (versets 24, 25). Quoique destinée en priorité aux croyants, la prophétie avait l’immense avantage d’être comprise même par les “idiotès” parce qu’elle était articulée dans leur propre langue. Il en résultait des consciences remuées et des conversions profondes, au point que des simples gens du peuple tombaient sur leur face, publiant que Dieu était là.
Si Paul privilégiait la prophétie aux langues (versets 4, 19), c’est parce que là-même où il y avait une interprétation, ce don n’avait qu’un contenu restreint puisqu’il ne servait de signe qu’à l’incroyant juif. Tandis que la prophétie couvrait presque tout le champ de l’expérience chrétienne résumée par ces trois mots : elle édifie, exhorte, console (verset 3). C’est aussi la raison pour laquelle, dans l’Assemblée, Paul préférera ne dire que cinq paroles intelligentes plutôt que dix mille en langues. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Si quelqu’un dit qu’il préfère cinq chats à dix mille chiens, c’est qu’il ne veut pas de chien. Cette boutade n’est peut-être pas de haut vol, mais elle a le mérite de bien dire ce qu’elle veut dire. Au niveau des chiffres en tout cas, Paul n’a pas dédaigné cette comparaison.
Certains ont sauté à la conclusion : Puisque celui qui parlait en langues parlait à Dieu, servons-nous en pour en faire autant. Mais cela, comme aussi de s’édifier soi-même, n’était que deux composants du parler en langue, et pas son BUT. Permettez-moi, une fois encore, de clarifier ce qu’était le but ultime de ce don par voie de comparaison.
Dans certains pays européens, les autobus sont officiellement classés comme “Véhicules pour le transport de personnes”. Cela, c’est le premier et seul but de l’utilisation de ce moyen de transport. Mais quelqu’un dira :
Ces quatre points sont faisables et pourraient s’inscrire dans les possibilités d’utilisation d’un autobus. Et pourtant, le chauffeur qui s’aviserait de s’en servir dans ces buts, serait mis à la porte sur-le-champ.
Ainsi en va-t-il du Parler en langues. Il est juste de penser que :
Mais ces trois points en eux-mêmes, manquaient la cible, autant que de conduire un autobus hors de son seul et ultime but : “Transporter des personnes”. Et quel était le but de parler à Dieu dans les langues des nations ? La réponse est dans le récit de la Pentecôte et en 1 Corinthiens 14 que nous résumons ainsi : “Dieu le Saint-Esprit, dans la bouche des Juifs opposés au salut de toute chair (les païens), y souffle miraculeusement les langues des barbares comme autant de prière ou de louange à Lui-même, pour servir de signe à ces mêmes Juifs incrédules que l’accès à leur Yahvé était désormais ouvert à ces barbares dont les langues étaient maintenant articulées par leurs propres lèvres de Juifs”.
Faisant fi de la cessation du don des langues, ce texte est souvent cité pour essayer de justifier la prière personnelle en langue. Il est à noter que :
Rien ne permet de croire qu’il s’agit là de la prière en langues. Pout l’y trouver il faut l’inventer. Si tel était le cas, Jésus n’aurait jamais prié par l’Esprit puisqu’il n’a jamais prié en langues. La Bible est pleine de prières faites par l’Esprit ; aucune n’a été articulée en langues ; ni la célèbre sacerdotale de Jean 17, ni la prière agonisante de Gethsémané. D’Étienne, le premier martyr chrétien, il est dit qu’il était plein du Saint-Esprit, plein de grâce et de puissance, qu’il faisait des prodiges et des miracles et que nul ne pouvait résister à la sagesse et à l’Esprit par lequel il parlait (Actes 6.3, 8, 10). Cependant, bien qu’il parlait par l’Esprit, il ne leur a tenu son impressionnant discours ni dans la langue de l’ange auquel il ressemblait en cet instant, ni dans aucune autre langue que celle de tous les jours.
Qui a tout-à-coup poussé cet ami à se lever au milieu de la nuit et à prier à genoux pour un frère chrétien qui, à cette minute était en danger de mort, l’avion qui l’emportait raclant la cime des arbres au point d’en emporter quelques branches. Peut-on trouver prière plus inspirée de l’Esprit que celle-là ? Elle ne fut cependant pas exprimée en langue. Pourquoi, voici quelque temps, ai-je été contraint, à un moment précis de la journée, de prier pour un frère en Christ vivant à mille kilomètres de chez moi et dont je n’avais aucune nouvelle précise ? Une conviction à laquelle je ne pus résister me fit plier les genoux et crier au ciel pour lui. Ce n’est que quelques mois plus tard que j’ai appris qu’il traversait à ce moment-là la crise la plus douloureuse de son ministère. Seul l’Esprit de Dieu pouvait m’avoir inspiré cet impérieux besoin de prier. Le Saint-Esprit qui l’a formé dans mon esprit et sur mes lèvres ne l’a pas fait en langues. Comment l’aurait-Il pu, lui qui l’a donnée comme signe aux non-croyants (et il n’y avait pas d’incroyants dans la chambre où je me trouvais), qui a prévu la cessation de ce don et qui l’a retiré depuis de nombreux siècles selon ce qu’en atteste 1 Corinthiens 13.8 ? (Voir : chapitre 8).
La dernière prière de la Bible (Apocalypse 22.17-20) est celle-ci : “L’Esprit et l’épouse disent : Viens ! Amen ! Viens Seigneur Jésus !”. Si au monde il y une prière qui est “dans l’Esprit” c’est bien celle-là. Mais pas plus que les autres elle n’a été faite en langue.
Pas plus que de contester la doctrine mariale de l’Église romaine. Tout chrétien évangélique admet sans réserve ce que la Bible dit de Marie : le choix divin qui s’est porté sur elle, sa foi, son obéissance, le risque d’opprobre courageusement accepté, la naissance virginale du Sauveur, ses maternités, la remontrance de son Fils (Jean 2.4), son incompréhension du ministère de Jésus (Marc 3.21, 31-35), la sollicitude du Seigneur envers sa mère (Jean 19.26-27) et les quelques soixante-cinq années de silence la concernant, entre sa dernière apparition en Actes 1 et la fin de l’Apocalypse. Admettre que son rôle est terminé et que son action s’est éteinte dans l’Église militante, n’arrache aucune page à la Révélation écrite et ne jette un quelconque discrédit sur les estimables qualités de celle qui fut la mère du Sauveur, ni sur la part importante qui fut la sienne dans le plan de Dieu pour cette occasion. Mais de là à en faire l’Immaculée Conception, la Mère de Dieu et de l’Église, la Reine des anges et du ciel, la Co-rédemptrice, la Médiatrice de toutes les grâces et, par voie de conséquence, lui reconnaître une action dans l’Église actuelle, il y a une monstruosité doctrinale à laquelle nous nous opposons farouchement.
Quelqu’un demandera pourquoi nous soulevons ici cette question ? Parce qu’elle permet de faire un rapprochement avec le sujet débattu. À cet ami qui m’a dit un jour : “Le don des langues, c’est biblique, non !”, je lui ai simplement répondu par une question semblable : “Et Marie, c’est biblique, non ?”. Pas plus que l’historicité de la vierge Marie, personne ne songe à contester la réalité biblique et historique du don des langues, ni l’action ni la place qu’il a eu dans l’Église. Il était au nombre des dons miraculeux comme ceux de prophétie et de connaissance qui ont présidé à la rédaction des Écrits inspirés du Nouveau Testament et dont personne ne nie qu’ils ont cessé. Nous croyons avec Paul qu’il n’était pas un signe pour les croyants. Nous croyons, toujours avec Paul, qu’il était au contraire un signe pour les incroyants de “ce peuple”. Avec Paul encore nous croyons qu’il était donné pour l’édification des autres et non pour l’édification personnelle, etc. Nous croyons tout cela. Mais, faire subir au parler en langues le sort que l’Église catholique a fait subir à Marie, non merci. Le faire s’adresser aux hommes, en faire pour les croyants le signe évident du baptême de l’Esprit, l’exercer en privé alors qu’il était un signe destiné aux incroyants, y voir un remède contre l’insomnie, le saluer comme une cure de jouvence et surtout propager l’idée qu’il existe encore aujourd’hui sous sa forme primitive alors qu’il n’en est qu’une évidente contrefaçon que les faits vérifiés démontrent et que le refus de mise à l’épreuve confirme, il y a là un pas que toute conscience éclairée et honnête refusera de franchir.
Ce ne serait pas non plus ôter des vérités à la Bible que d’affirmer avec Paul que le chrétien n’est plus sous la Loi (Romains 6.14-15), et que des livres entiers d’une Bible pourtant inspirée au iota près, ne sont plus normatifs de la vie chrétienne. Admettre les dispensations, reconnaître que certains hauts faits sont à jamais figés dans l’histoire et n’auront jamais de renouvellement (Nativité, Crucifixion, Ascension) si ce n’est dans le souvenir et le cœur des croyants, se plier à l’enseignement divin sur la cessation de certains dons, celui des langues y compris, ce n’est faire injure ni à la Bible ni au Saint-Esprit. Par contre, ce qui leur est une offense, c’est de prendre des vérités historiques comme Marie, les langues ou le sacrifice de la croix transformé en messe, et de les actualiser en essayant de les reproduire à la manière des faussaires, ceux-ci ayant cet avantage moral qu’ils se donnent au moins beaucoup de peine pour imiter le véritable, tandis que dans le domaine du sacré, l’imitation est tellement gros-grain que seuls des aveugles peuvent s’y méprendre. On connaît la saillie attribuée aux Jésuites et reprise par les Nazis : “Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose ; ne dites pas de petits mensonges, dites-en des grands, répétez-les, on finira par les croire”. C’est ce que Rome a fait avec Marie, et avec quelle réussite ! Idem avec le parler en langues et le baptême du Saint-Esprit. On assiste à un matraquage verbal qui, comme la mariolâtrie, trouve ses sources dans la Bible. Les croyants immatures sont abreuvés d’expressions à consonance biblique qui les conditionnent à leur insu, et les rendent incapables d’exercer sainement leur jugement. Plus on les trompe et plus ils y croient au point que des affirmations ahurissantes comme le remède à l’insomnie de Ramseyer, le défatiguant de Thomas Roberts, les interprétations chronométriquement déphasées et le signe aux croyants, ne les font même plus sourciller. Plus l’erreur est de taille et vérifiable, plus on s’y adonne jusqu’au paroxysme. Certains se feraient couper en petits morceaux pour le parler en langues comme d’autres donneraient leur vie pour Marie. Quand on en est là, on a quitté le terrain de l’objectivité scripturaire ; les garde-fous sont enfoncés. À l’exemple des Jésuites, on n’est plus que les défenseurs attitrés d’une doctrine particulière. Comme certains nous accusent de ne pas croire à la Sainte Vierge, d’autres nous accusent de ne pas croire au don des langues sans prendre la peine de vérifier le bien-fondé de nos objections.
Quand à paru mon premier livre sur le sujet “Je parle en langues plus que vous tous”, suivi de celui de Ralph Shallis “Le don de parler diverses langues” et de “D’où viennent ces langues” de G.H. Lang, un ami m’a dit, en parlant des charismatiques : “Il leur sera difficile de trouver la parade”. C’était sans compter sur les ressources de l’esprit humain à se sortir de situations difficiles en “tordant Le sens des Écritures pour leur propre ruine” (2 Pierre 3.16).
Pour donner le change face à l’insurmontable difficulté doctrinale, au moins six scénarios ont été expérimentés.
Plusieurs m’ont posé la question : “Avez-vous parlé en langue ?” Cela mérite mieux que de répondre par oui ou par non.
Mon itinéraire spirituel a, très tôt après ma conversion, subi l’influence pentecôtiste. J’ai fréquenté leurs Assemblées, côtoyé de très près leurs pasteurs et collaboré avec eux à de nombreuses campagnes d’évangélisation. Beaucoup qui ont été sauvés par mon ministère, font maintenant partie de leurs Églises. Certains exercent un ministère pastoral dans la frange modérée du mouvement. De même qu’on peut être baptiste de conviction sans être membre d’une Église baptiste, j’ai partagé des convictions pentecôtistes sans pour autant faire officiellement partie de leur mouvement, ce qui est loin d’être un cas isolé. Ma prédication en a été influencée au point que certains ont très mal pris ce qu’ils croyaient être une nouvelle (et mauvaise) orientation. Ils me l’on fait savoir par des remarques où les menaces étaient à peine voilées. Mon adhésion à ces idées, sans être totale, a été suffisante pour être qualifié de pentecôtiste. J’en parle non avec les a prioris de ceux qui viennent de l’extérieur du mouvement, mais plutôt avec les expériences enregistrées à l’intérieur. Je sais donc de quoi je parle.
À la lumière de ce que je viens de dire, j’estime que la question est imparfaitement posée. Elle doit être formulée comme suit : “Avez-vous parlé en langues par le Saint-Esprit selon le modèle biblique ?” À cela je répondrai NON ! Non, ni moi ni personne n’avons dans notre temps exercé l’authentique don de l’Esprit pour toutes les raisons décrites dans ce livre. Mais si on me demande si j’ai baragouiné comme les autres un incompréhensible galimatias étiqueté “Appellation Contrôlée” alors, sans hésitation je réponds OUI ! Et je peux, devant qui le veut, en faire une démonstration sur l’heure. Un “interprète” y trouverait matière à un bon message évangélique, ce qui démontrerait que si ce que je dis “en langue” est faux, ce qui est “interprété” l’est tout autant.
Un jeune ami, récemment sorti de ce milieu, confessait humblement (avec le langage actuel de la jeunesse que nous nous permettons de reproduire) que la pratique du parler en langues c’était “du bidon”.
“Comment pouviez-vous vous plier à cette contrefaçon ?”
“Parce que c’était l’ambiance du groupe ; tous on devait essayer pour ne pas avoir l’air de rester en arrière ; nous étions jeunes et ignorants et la Bible ne nous était enseignée que par bribes et jamais de façon suivie. Les textes qui contredisaient nos pratiques étaient évités. Ces choses faisaient partie de notre jargon sans qu’on sache ce que ça voulait dire. C’était présenté comme le remède à tout ce qui n’allait pas chez nous. Il fallait croire, croire. Se poser des questions, c’était presque l’impardonnable péché contre le Saint-Esprit. Nous devions nous boucher les oreilles et nous méfier de ceux qu’on nous décrivait comme des minus qui ne croyaient pas au Saint-Esprit. Mais on m’a ouvert les yeux à ce que dit la Bible. J’ai compris que le Saint-Esprit et l’esprit qui animait notre groupe, ça faisait deux !”
Bien qu’étant la Vérité incarnée, Jésus était ressenti comme un trouble-fête. Barrabas était moins dérangeant. On sait comment cela a fini ; comme la “pierre vivante et d’angle rejetée par les hommes” (1 Pierre 2.4). Il serait utopique de croire que tous laisseront leur erreur préférée. Elle est pour eux comme le fameux suaire de Turin dont nous tirerons trois analogies.
1 Corinthiens 12.13 | Le but du baptême de l’Esprit. | |
1 Corinthiens 14.2 | La parole en langues dirigée vers Dieu seul. | |
1 Corinthiens 14.21 | Le signe pour Israël. | |
1 Corinthiens 14.21 | Le signe aux incroyants. |
Puisse les autres Églises évangéliques les recevoir comme le Seigneur lui-même les recevrait.
Si on me demandait de citer trois vérités bibliques parmi les plus simples et les plus faciles à résumer, je crois bien que mon choix se porterait sur :
Un mot encore à l’adresse des frères charismatiques (ou pentecôtistes) de tendance modérée qui, en conscience, s’interrogent sur le bien-fondé de la doctrine des langues et s’inquiètent des excès qu’elle produit. Jésus a un jour dit : “Si quelqu’un veut faire ma volonté, il saura si ma doctrine est de Dieu” (Jean 7.17). La connaissance de la vérité est liée à de bonnes dispositions intérieures qu’Il appelle ailleurs “un cœur honnête et bon” (Luc 8.15). Ces bonnes dispositions consistent, quel qu’en soit le prix, le plus cher étant l’abaissement de notre orgueil naturel, à donner raison à Dieu et à reconnaître que l’on s’est trompé. C’est ce qu’a fait l’auteur. Il n’a rien perdu au change bien au contraire car la vérité n’aliène pas, elle affranchit (Jean 8.32).
Le dernier mot sera pour nos frères évangéliques qui subissent la pression charismatique tous azimuts, qui ne peuvent plus se retrouver dans des rencontres communes sans se voir gratifiés à tout propos de parler en langues et de baptême du Saint-Esprit. Les deux derniers points du résumé relus, étudiés et mémorisés avec application leur donneront comme à Étienne, une connaissance scripturaire et une sagesse spirituelle à laquelle on ne pourra résister. Ceux qui ont de la peine à formuler leurs convictions dans ce domaine, pourront alors faire leurs les deux célèbres vers de Boileau :
“Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément”.