La pièce suivante qui faisait autrefois partie du dépôt du Louvre, et que nous avons trouvée dans la collection des documents qui ont servi à l’œuvre de Rulhière, prouve à quel point le commerce intérieur souffrit de la rigueur avec laquelle on exigeait les passeports, non seulement des négociants étrangers, quand ils sortaient du royaume, mais surtout des religionnaires soupçonnés de vouloir émigrer.
« La nécessité où se trouvent réduits les négociants étrangers qui viennent dans le royaume de prendre des passeports pour en sortir, est sans doute un très grand inconvénient, et il est impossible de rétablir le commerce et d’éviter une extrême misère et la ruine de cet État, s’il demeure longtemps comme il est, et dans une espèce d’interdiction. On essaye tant qu’on peut dans les pays étrangers de se passer de la France, et la nécessité où l’on se verra réduit de s’en passer en effet fera sans doute tout ce que l’industrie et la mauvaise volonté des ennemis n’ont pu faire jusqu’ici. Il est important pour le service du Roi d’y pourvoir incessamment, car il ne sera pas toujours temps ni possible d’y remédier. Et quant à ce fait particulier des passeports, il est certain que, dans la conjoncture présente, on se trouve entre deux extrémités également dangereuses, la ruine du commerce d’un côté, et de l’autre le danger de l’évasion d’un très grand nombre de sujets du roi. »
(Dépôt du Louvre, 1686.)