CES lettres furent portées par la mère de l'Empereur, par cette Princesse si heureuse en enfants, qui avait produit cette grande lumière, et qui l'entretenait par l'infusion continuelle de l'esprit et des sentiments de la véritable Religion, et dont la vertu recevait des éloges de la bouche de toutes les personnes de piété. Son extrême vieillesse ne lui fit point appréhender l'incommodité du voyage, et elle l'entreprit un peu avant sa mort, qui arriva en la quatre-vingtième année de son âge. Lorsqu'elle fut au lieu où le Sauveur souffrit autrefois la mort, qui a été une source de vie pour le monde, elle commanda qu'on démolît le Temple exécrable qu'on y avait bâti, et qu'on en portât les démolitions autre part. Le tombeau qui était demeuré si longtemps caché ayant été découvert, on aperçut proche, trois Croix. On ne doutait point qu'une des trois ne fût celle du Sauveur, et que les deux autres ne fussent celles des Larrons qui avaient été crucifiés avec lui. Mais la difficulté était de les discerner, et de reconnaître celle où le corps du Seigneur avait été attaché, et qui avait été teinte de son sang. Mais Macaire, cet Évêque rempli de sagesse, trouva le moyen de lever cette difficulté. Car après s'être mis en prière, il fit toucher les trois Croix à une Dame de qualité qui était malade depuis longtemps, et reconnut la puissance de celle du Sauveur. En effet cette Croix ne l'eut pas sitôt touchée qu'elle chassa la maladie, et lui rendit la santé.
La mère de l'Empereur ayant appris de la sorte ce qu'elle avait souhaité avec tant de passion de savoir, elle fit mettre une partie des clous au casque de Constantin pour le garantir des traits de ses ennemis ; et une autre partie au mors de son cheval tant pour le conduire, et pour le défendre, que pour accomplir cette Prophétie, qui avait été faite longtemps auparavant par Zacharie : Ce qui est dans le mors du cheval sera Saint au Seigneur tout-puissant. Elle fit porter une partie de la vraie Croix au Palais, et laissa l'autre dans une chasse d'argent entre les mains de l'Évêque, qu'elle pria de la garder avec soin. Ayant ensuite fait chercher un grand nombre d'Ouvriers, et amasser quantité de matériaux, elle éleva deux Églises, dont il est d'autant plus inutile de décrire ici la grandeur, et la beauté, que toutes les personnes de piété qui s'y rendent en foule, ne sauraient les voir sans les admirer.
Je rapporterai encore une autre action fort louable de cette incomparable Princesse. Elle assembla une troupe de filles qui avaient consacré à Dieu leur virginité, et les ayant fait asseoir, elle leur donna à laver, leur versa à boire, et les servit à table ; elle retourna ensuite vers l'Empereur son fils, et mourut bientôt après d'une mort douce et tranquille. Elle lui donna, avant que de mourir, de sages conseils, et lui souhaita toutes sortes de grâces. Elle reçut après sa mort les honneurs qui étaient dus à sa piété.