Sa présence

L’OBJET DE LA FOI

« Détournant les regards sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi. »

(Hébreux 12.3)

Trois jeunes chrétiens qualifiés ont été chargés d’animer de bout en bout la réunion hebdomadaire de l’église, consacrée à l’évangélisation. Avant d’entrer dans la salle, ils se sont préparés à genoux pour réclamer et obtenir l’action de l’Esprit saint. Leur ardente requête s’est terminée par un acte de foi très précis qui doit assurer l’exaucement :

— Seigneur, ce soir nous te demandons avec instance le salut de deux personnes… Et puisque tu as dit : « Tout ce que vous demanderez avec foi dans la prière, vous le recevrez » (Matthieu 21.22), nous nous emparons de cette promesse et croyons que tu nous as déjà répondu. Sois béni de nous avoir exaucés. Amen ! »

Qu’y a-t-il à redire à cela ?

Ainsi armés, les trois jeunes entrent dans la salle « gonflés à bloc ». La réunion est rondement menée : chants, musique, témoignages, message incisif et percutant ne peuvent, pensent-ils, laisser insensible un seul des auditeurs. Et de fait, l’ambiance est favorable, aussi le jeune prédicateur termine-t-il son exposé par un vigoureux appel à suivre le Christ. Un appel un peu trop insistant aux dires de certains. Tandis qu’il parle, l’orateur scrute la salle cherchant à voir des mains se lever car, selon la promesse, il attend qu’en réponse à la foi se manifestent les deux personnes gagnées à l’Évangile. Hélas ! Nul ne daigne faire le geste attendu. De guerre lasse, déçu, le bouillant évangéliste doit se résigner à clôturer la soirée et à renvoyer l’auditoire.

A la sortie, les trois amis se retrouvent pour échanger leurs impressions. ou plutôt leur découragement : pourquoi donc l’auditoire apparemment ouvert est-il resté insensible au moment de l’appel ? Dieu aurait-il menti ? Les promesses du Seigneur seraient-elles sans lendemain ? Ou bien y avait-il un obstacle à l’exaucement de leurs prières ? Vraiment, ils ne comprennent pas.

Leurs yeux s’ouvriront quelques jours plus tard lorsqu’ils apprendront que l’Évangile prêché a produit de beaux fruits. Ils sont à la fois humiliés d’avoir ainsi douté et réjouis d’expérimenter la fidélité de Dieu. Oui, il tient ses promesses. Après tout, un acte de foi, même exprimé avec force par trois personnes convaincues, peut camoufler une bonne dose d’incrédulité.

Ce fait mérite réflexion.

1) L’acte de foi le plus sincère ne nous autorise pas à exiger de Dieu qu’il s’exécute sur-le-champ ou dans les heures qui suivent. Qui sommes-nous pour lui dicter sa ligne de conduite ? Qui aura l’audace de lui ordonner quoi que ce soit, sous prétexte que l’on « s’est emparé par la foi » d’une promesse de l’Écriture ? Le Seigneur tient trop à sa souveraineté pour qu’on l’oublie. Et si dans sa sagesse il tarde à se manifester c’est certainement pour que nous en prenions conscience ; sans doute aussi pour que nous découvrions notre « peu de foi » en constatant les doutes qui l’accompagnent. Et puis le contenu de nos demandes est parfois si éloigné de la pensée de Dieu !

2) Les doutes qui se mêlent à nos actes de foi devraient nous guérir à jamais de porter les regards sur notre foi, de compter sur elle en lui accordant si peu que ce soit une valeur méritoire. Ne sommes-nous pas tentés, comme ces jeunes évangélistes, d’avoir foi… en notre foi plutôt qu’en Jésus, l’unique objet de la foi ? La nuance est d’importance. Si l’Écriture nous recommande de fixer les regards sur Jésus « l’auteur et le consommateur de la foi » (Hébreux 12.2) c’est que, par nature, nous sommes portés à les fixer sur nous-mêmes, sur nos œuvres (ici nos actes de foi). Or la foi ne s’appuie jamais sur les œuvres de l’homme, fût-il le meilleur et le plus zélé (« la foi SANS les œuvres », insiste l’apôtre — Romains 3.28). D’où l’appel à « détourner les yeux » de nous-mêmes pour les diriger sur le Christ, la seule personne qui a le pouvoir de répondre à nos besoins.

Beaucoup de gens paraissent dissocier la foi de son objet, comme si elle n’avait pas d’objet. Dans l’esprit de certains, on hérite de la foi comme on entre en possession d’une maison ou d’un tableau. On me dit parfois :

— Oh monsieur, que j’aimerais avoir la foi que vous avez !

Ou encore :

— Vous, vous avez de la chance de croire. Moi, je n’ai pas cette grâce…

Pour de telles personnes, la foi est comparable à des cadeaux distribués à quelques privilégiés. Un peu au hasard ! Ou seulement à ceux qui en sont dignes. Alors on attend… on espère recevoir un jour ce don du ciel… On s’efforce de le mériter. Or, la Bible ne dit jamais – au grand jamais – qu’il faut attendre de croire (1). Au contraire, elle use de l’impératif : croyez… en précisant EN QUI nous devons croire.

(1) Il est vrai que la foi est un don de Dieu. Certes, il accorde « la grâce de croire » (Philippiens 2.29) mais à ceux qui ont « la volonté de croire ». D’où l’impératif : croyez : « Je crois, viens au secours de mon incrédulité » (Marc 9.24).

Je lisais récemment dans un grand hebdomadaire le témoignage d’un chef d’État, témoignage que j’aurais voulu plus précis. « Ma foi, déclarait-il, continue de jouer un rôle central dans ma manière de gouverner. C’est la foi qui me rend capable de remplir cette tâche, qui me pousse à travailler davantage, qui me fait regarder en avant et m’appelle à poursuivre des buts et des objectifs plus élevés… » Ah ! Que j’aurais voulu dire à ce haut personnage : « Pas du tout. C’est le Christ en qui vous croyez (du moins je le suppose) et non votre foi qui vous rend capable de remplir votre grande tâche. D’ailleurs, j’aurais aimé que ce croyant éminent, pour lever l’équivoque, précisât QUI était l’objet de sa foi. Était-ce Bouddha, Mahomet, un certain Dieu… ou Jésus-Christ le Seigneur ?

Si la foi est agréable à Dieu (Hébreux 11.6), donc nécessaire, elle est loin d’être suffisante. Après tout, que vaut… notre foi ? A-t-elle au moins la dimension d’un « grain de sénevé » ? Lorsqu’un enfant demande à son père de lui acheter une bicyclette – chose acceptée – il ne se pose pas de questions de ce genre : « Ma demande a-t-elle été bien formulée ? Ai-je montré assez de confiance en la parole de mon père ? Ai-je parlé assez fort, avec suffisamment d’insistance ? » Certainement pas ! Le fils se confiera en son père qu’il sait homme de parole. Il a promis, donc il s’exécutera le moment venu. Imitons ce garçon. Comptons uniquement sur le Seigneur et nous resterons confiants, même si la réponse à nos requêtes tarde à venir. Qui jauge sa foi finira par être troublé, gagné par le doute et le découragement. Souvenons-nous ici de l’apôtre Pierre marchant sur les eaux du lac. Aussi longtemps qu’il fixe les yeux (de la foi) sur Jésus, il avance sans crainte au-dessus des flots. Il enfonce, pris de panique, dès qu’il cesse de le regarder et de se confier en lui.

Enfin, et comme le disent certains chrétiens ardents, doit-on « s’emparer par la foi » des promesses de Dieu ? Le terme « s’emparer » n’est-il pas déplacé dans la bouche de quiconque invoque le Seigneur des seigneurs ? Le chapitre suivant abordera cette question.

Pour conclure, retenons que l’essentiel n’est pas notre foi mais le Christ, l’objet de notre foi, ce que confirme l’expression déjà citée : « …ayant les regards sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi » (2). De cette parole importante nous pouvons tirer une définition de la foi toute simple : c’est un regard de confiance arrêté sur la personne du Seigneur. Croire, c’est Lui accorder une totale confiance, sans idée de mérite ; c’est se défier de soi-même et « s’efforcer d’entrer dans le repos de nos œuvres » (Hébreux 4.11).

(2) Cette expression est traduite différemment selon les versions : « Les yeux fixés sur Jésus qui est l’auteur de la foi et qui l’amène à la perfection » (Segond révisé) — «…sur Jésus qui est l’initiateur de la foi et qui la mène à son accomplissement » (Tob) — « Gardons les yeux fixés sur Jésus ; dans cette course de la foi, il est notre chef de file et nous mènera au but » (transcription A. Kuen).

Questions :

  1. Avez-vous l’habitude de « jauger » votre foi ? Vos yeux sont-ils vraiment fixés sur Jésus le consommateur de la foi ?
  2. Avez-vous réellement compris que c’est en Jésus, l’objet de votre foi, et non en votre foi, que vous devez placer votre confiance ?
  3. Conformément à l’Écriture, efforcez-vous et empressez-vous d’entrer dans le repos de vos œuvres propres (Hébreux 4.16).

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